Fusion-absorption : les clés d’une entente réussie et pérenne
Certains contextes peuvent conduire deux entreprises à se rapprocher pour créer une seule et unique entité. On parle alors de fusion-absorption.
La fusion-absorption est une opération qui vise à transmettre un patrimoine, que ce soit lors d’opérations de croissance externe ou de projection à l’international. En d’autres termes, il y a transfert de la totalité du passif et de l’actif de la société absorbée vers l’entité absorbante. L’instauration d’une fusion-absorption répond à de nombreuses formalités et requiert également des moyens financiers solides. Explications dans ce focus spécial !
Les différents types de fusion
Avant tout, il est primordial de définir correctement les détails de l’opération et les objectifs à atteindre avant d’opter pour le mode de fusion le plus adapté au résultat attendu.
Pour cause, il y a un premier mode permettant à une société A de fusionner avec une société B pour former une entité C. Cette méthode est la plus adéquate si les deux entreprises souhaitent une fusion égale entre elles, notamment au niveau du partage de nouveaux titres entre les associés.
A contrario, la fusion-absorption se distingue de ce premier type de fusion. En effet, l’objectif de cette opération est d’octroyer le droit à une structure d’absorber une autre pour atteindre une certaine taille. L’entreprise absorbante intègre donc en son sein l’autre entreprise. Elle récupère ainsi tous les actifs, passifs, salariés, contrats… de celle-ci. Le processus se termine alors par le fusionnement patrimonial des deux entités.
Quels sont les avantages d’un projet de fusion-absorption ?
Une fusion-absorption a de nombreux avantages. Elle concède effectivement la création de synergies fortes entre les sociétés leur permettant alors de :
- Mutualiser les dépenses ;
- Développer une R&D plus agile ;
- Concrétiser des projets plus rapidement ;
- Se positionner comme un acteur plus important sur son marché ;
- Partir à la conquête de l’international.
De surcroît, la valorisation boursière devient plus positive pour les actionnaires. C’est alors le motif principal d’un vote en faveur d’un projet de fusion-absorption.
Les étapes essentielles au projet de fusion-absorption
Avant tout, on considère deux étapes fondamentales à l’heure de fusionner deux entités : le pré-diagnostic et le diagnostic.
Pré-diagnostic : définir les éventuels obstacles
Le pré-diagnostic consiste notamment à évaluer la réalisation de son projet et identifier rapidement les points de blocage qui pourraient rendre difficile sa concrétisation. Il se base sur le résultat hypothétique de la fusion des deux sociétés. En ce sens, il est donc essentiel de se focaliser particulièrement sur ces différents facteurs :
- Étude des moyens. Elle doit porter sur les moyens, mais aussi sur les outils professionnels mis à la disposition de l’entreprise qui résultera du projet de fusion. Peuvent-ils lui permettre d’exercer son activité de manière sereine ? Des acquisitions sont-elles à prévoir ? Si oui, quel sera alors le budget ?
- Étude de l’activité. Celle-ci repose sur le potentiel du marché dans lequel s’inscrit l’entreprise, mais également sur son potentiel de développement et sa compétitivité.
- Étude financière. L’étude financière est primordiale. Elle doit donc être apte à répondre à plusieurs questions majeures liées à la rentabilité de l’entreprise. Elle doit également prendre en compte la capacité du repreneur à faire face aux coûts intrinsèques à son projet de fusion.
- Étude des ressources humaines. L’étude des ressources humaines de l’entreprise envisagée pour l’absorption est importante pour comprendre son fonctionnement ou dysfonctionnement, notamment quant au management et à la direction générale. L’équipe déjà fonctionnelle sera-t-elle gardée ? Faudra-t-il également effectuer des ajustements ? Les profils talentueux risquent-ils de quitter le navire après la fusion ?
- Étude juridique. Le transfert d’activité impacte directement les contrats d’une entreprise. En effet, des éléments inhérents à son exercice seront transférés. Il est donc indispensable de procéder à un diagnostic juridique.
- Étude QSE (Qualité Sécurité et Environnement). La non-conformité d’une entreprise peut véritablement compromettre sa réussite à court terme. Valider ce point et chiffrer la mise aux normes QSE si elle ne l’est pas est donc essentiel.
Diagnostic : évaluer le projet de fusion
Une fois que tous les éléments de diagnostic sont étudiés, un schéma plus clair et précis des forces et des faiblesses de l’entreprise avec laquelle on envisage de fusionner se dessine alors.
Dans cette optique, il faudra donc dresser son business plan en fonction de ses objectifs et de ses envies. À cette étape, il ne faut pas oublier d’intégrer tous les éléments qui renforcent le projet de fusion. Il faut également s’assurer que les points négatifs n’indiquent pas qu’il est judicieux d’abandonner le projet. En revanche, si les points négatifs ne peuvent être rectifiés, le projet est déconseillé.
Les aspects juridiques et financiers d’une fusion-absorption
L’opération de fusion-absorption répond à des critères particuliers en termes de juridiction et de finances. Qu’en est-il alors de ces deux dimensions ?
L’aspect juridique
L’opération de fusion-absorption comporte 3 effets juridiques :
- La transmission universelle du patrimoine de l’absorbée vers l’absorbante ;
- La dissolution de la société absorbée ;
- Une augmentation de capital par échange de titres dans l’absorbante.
La dimension financière
D’une part, la fusion-absorption est une opération plutôt délicate qui peut prendre plusieurs mois pour se réaliser. Elle contient 3 principaux axes :
- L’entreprise absorbante effectuera d’abord une évaluation de son actif net et de celui de l’entreprise qu’elle veut absorber ;
- Par la suite, il conviendra de calculer la valeur des titres des deux sociétés. Cette opération leur permettra alors d’élaborer une parité d’échange ;
- Enfin, lors d’une réunion de travail, il faudra définir l’échange des titres pour les actionnaires.
D’autre part, la société absorbante aura à :
- Augmenter son capital par rapport aux apports en nature effectués par la société absorbée ;
- Émettre des actions nouvelles. En général d’une valeur supérieure à la valeur nominale qui se traduit par une « prime d’apport » ou « prime de fusion » ;
- Renoncer à recevoir des titres en contrepartie de ceux qu’elle a déjà sur la société absorbée (fusion-renonciation) ;
- Remplacer les titres émis par des titres détenus auparavant par les autres actionnaires de la société absorbée.
Quelles normes encadrent une fusion-absorption ?
La concrétisation d’une fusion-absorption suit des directives bien précises. Quelles sont-elles ?
Une réglementation encadrée
La fusion-absorption est strictement réglementée. De ce fait, la procédure requiert la réalisation d’un audit et la nomination d’un commissaire à la fusion. Toutefois, comme le souligne l’article L. 236.11 du Code de commerce, la nomination d’un commissaire à la fusion n’est pas obligatoire si la fusion est simplifiée. Autre condition : il faudra aussi déposer un projet de traité de fusion au Registre du commerce et des sociétés.
Ensuite, il est indispensable de déterminer un délai d’opposition. C’est au terme de ce dernier que l’assemblée générale des actionnaires des deux entreprises se réunira pour consentir la fusion. Par ce biais, les dirigeants auront alors le pouvoir de signer le traité de fusion-absorption. En second lieu, l’entreprise absorbée se concertera en assemblée générale pour conclure l’opération. C’est ainsi qu’elle va disparaître.
Des formalités exigées par la loi
Depuis le 1er janvier 2019, des modifications concernant l’acte constatant une fusion exclusive de personnes morales ou organismes passibles de l’impôt sur les sociétés ont été mises en vigueur. L’enregistrement de cet acte est dorénavant gratuit en vertu de l’article 816 du Code général des impôts.
Quant aux formalités, il est important d’avertir le service des impôts des entreprises. De plus, il faut prévenir les tiers (les créanciers, par exemple) par le biais d’annonces légales de l’avis de fusion et de la désignation d’un commissaire à la fusion. Ces conditions et toute modification de l’entreprise absorbante (nom, siège social…) sont, par ailleurs, exigées par la loi.
Quels sont les délais en vigueur à respecter ?
Le tableau ci-dessous retrace de manière synthétique et à titre indicatif, la procédure à suivre en cas de fusion-absorption :
Délai (en jours) | Démarches |
J-90 (délai indicatif) | Dépôt par le gérant d’une requête auprès du président du tribunal de commerce pour solliciter la désignation d’un commissaire à la fusion. La désignation du commissaire à la fusion intervient ensuite 15 jours après le dépôt de la requête. |
J-75 | Transmission des éléments qui permettront au commissaire à la fusion de définir ce rapport. |
J-45 | Élaboration du projet de fusion. |
J-45 (délai légal) | Convocation, dans chaque société, des associés à des AGE appelées à statuer sur le principe de la fusion-absorption et habilitation de la gérance à signer le traité de fusion. |
J-30 | Tenue dans chaque société des AGE appelées à statuer sur le principe de la fusion-absorption et habilitation de la gérance à signer le traité de fusion. |
J-30 | Signature du traité de fusion par les gérants des sociétés. |
J-30 | Formalités : – dépôt du projet de fusion au greffe du tribunal de commerce du lieu du siège social de chaque société, – publication d’un avis de fusion dans un journal d’annonces légales, – dépôt du rapport du commissaire à la fusion au siège social de chaque société. |
J-15 au plus tard (délai légal) | Convocation des associés à l’AGE appelée à approuver la fusion-absorption. |
J-8 au plus tard (délai légal) | Dépôt du rapport du commissaire à la fusion au greffe du tribunal de commerce du siège social de la société, s’il y a augmentation de capital par apport en nature. |
Jour J | Tenue des AGE : – dans la société absorbée : décision de fusion et de dissolution sans liquidation. – dans la société absorbante : décision de fusion et modification corrélative des statuts. Établir les procès-verbaux (PV) d’AGE. |
J+5 | Si l’apport comprend des immeubles ou droits immobiliers : dépôt du projet de fusion au rang des minutes d’un notaire pour alors réaliser une formalité de publicité foncière. |
J+30 | Formalités : – enregistrement auprès des services fiscaux de 4 exemplaires timbrés ou certifiés conformes par le gérant du procès-verbal de l’assemblée générale extraordinaire de la société absorbante, – publication dans un JAL d’un avis de fusion et des modifications statutaires : augmentation de capital par apport en nature et autres, – publication dans un JAL d’un avis de dissolution sans liquidation. Dépôt au greffe du tribunal de commerce : – 2 exemplaires de la déclaration de conformité * – 2 exemplaires du projet de fusion, – mais aussi 2 exemplaires et copies certifiées conformes par le gérant de la société absorbée, – et 2 exemplaires et copies certifiées conformes par le gérant de la société absorbante, – 2 copies certifiées conformes par le gérant des statuts modifiés de la société absorbante. Inscriptions modificatives au RCS : Société absorbante : – K bis des sociétés participant à la fusion, – 1 exemplaire du JAL portant avis de fusion et modification des statuts. Société absorbée : – K bis – 1 exemplaire du JAL portant avis de dissolution sans liquidation. |
* Dans le cadre de la loi Pacte, l’obligation de déposer une déclaration de conformité ne s’impose qu’aux sociétés anonymes (SA).
En conclusion, un projet de fusion est technique et requiert une préparation bien définie. Une analyse en profondeur de la réalité de l’entreprise absorbante et de l’entreprise absorbée, des aspects financiers et juridiques ainsi que des formalités administratives en vigueur permettra de décider d’aller au bout du projet ou de l’abandonner.