Le droit de priorité permet au détenteur d’une marque (ou d’un brevet) de la protéger a posteriori, dans un autre pays. C’est une démarche qui autorise un second dépôt de marque ou de brevet à l’étranger, basé sur la date et les conditions du premier dépôt. Il s’agit donc d’un moyen d’étendre sa marque à l’international et de bénéficier d’un privilège vis-à-vis des tiers désireux d’utiliser cette même marque. Cela est possible sous réserve de respecter le délai de priorité qui s’étend de 6 à 12 mois.   

Qu’est-ce que le droit de priorité ?

La protection d’une marque ou d’un brevet a une portée limitée géographiquement. Cela signifie qu’un dépôt de marque ou de brevet à l’échelle nationale ne sera effectif que dans le pays où il a été effectué. La création du droit de priorité offre donc plus de flexibilité dans le temps quant aux dépôts qui seraient faits ultérieurement à l’international. Concrètement, le droit de priorité permet donc de rétroagir sur l’existence d’une marque ou d’un brevet dans un pays autre que celui du dépôt initial.

Cette disposition permet aux personnes qui bénéficient déjà d’un brevet, marque, dessin ou modèle protégé sur leur territoire, de jouir d’un principe de faveur pour étendre cette protection à l’étranger. En effet, dès lors qu’ils font une demande de brevet ou le dépôt d’une marque, le droit de priorité s’enclenche. Pour une durée déterminée, le détenteur profite ainsi d’une antériorité sur son invention ou son nom marque.

Ce sont les traités internationaux qui ont mis en place ce principe. Ainsi, si l’entreprise, l’inventeur ou le professionnel réalise un dépôt dans un pays signataire de la Convention de l’Union de Paris ou de l’Organisation mondiale du commerce (OMC), le droit de priorité est accordé et s’applique dans n’importe quel autre pays membre. En France, c’est l’INPI qui accorde ce délai de protection pour un prochain dépôt de marque ou de brevet à l’étranger.

Comment fonctionne le droit de priorité ? 

Le déclenchement du droit de priorité instaure un délai de priorité. Il est de 6 mois pour les marques, les dessins et modèles, tandis qu’il s’élève à 12 mois pour les brevets et les droits d’obtention végétale.

Par exemple, pour un dépôt de marque effectué en France le 1er janvier, le détenteur dispose de 6 mois pour faire valoir son droit de priorité dans un autre pays, comme aux États-Unis. Si le détenteur du droit effectue ce nouveau dépôt à l’étranger le 1er mai, celui-ci sera pris en compte rétrospectivement avec la date de la première demande effectuée en France.

On considérera alors que la marque existe aux États-Unis depuis le dépôt initial français, soit le 1er janvier. Si pendant le laps de temps s’étant écoulé entre le 1er janvier et le 1er mai, des tiers ont exigé des droits sur cette marque ou en ont fait l’exploitation dans ce pays, toutes leurs actions seront réputées nulles. L’invocation du droit de priorité prend le dessus.

De plus, puisque la date du premier dépôt est celle qui fait foi, les conditions de brevetabilité seront aussi prises en compte en fonction de celle-ci. 

À quoi sert le droit de priorité ? 

Défendre sa marque à l’étranger

Le droit de priorité permet de faire valoir sa marque ou son brevet dans les pays autres que celui dont ils sont issus. Par la même occasion, ce droit répond à un objectif défensif.

Il rend effectivement inopposables les dépôts réalisés par des tiers dans l’intervalle de temps couvert par la priorité. Invoquer la priorité revient donc à annuler toutes les actions entreprises auparavant au bénéfice de celui qui jouit du droit de priorité, et ce qu’il s’agisse : 

  • du dépôt de la marque ou d’un dérivé de la marque, 
  • de la publication ou de l’exploitation de l’invention, 
  • ou même de la mise en vente de dessins, par exemple. 

Prenons l’exemple d’une enseigne X qui demanderait un brevet en Espagne pour l’invention d’un nouveau couteau COUPE-TOUT. On note qu’à partir de ce moment, le délai de priorité de 6 mois s’enclenche. Quelques semaines plus tard, une enseigne Y protège et commercialise cette même invention en Belgique, en le baptisant COU-TOUT. Si au cours des 6 mois suivant le dépôt du brevet initial, l’enseigne X décide d’invoquer son droit de priorité en Belgique, le brevet de l’enseigne Y ne sera plus valable.

Mettre en place une stratégie d’internationalisation

Dans la pratique, cette mesure peut s’avérer très utile, car elle n’épargne pas seulement l’inquiétude de devoir faire des dépôts simultanés sur tous les territoires visés, sans se faire doubler. Profiter du droit de priorité peut aussi faire partie intégrante de la stratégie de développement de la marque.

Par exemple, une entreprise peut mettre à profit ce temps de protection additionnelle pour évaluer le véritable potentiel commercial du marché ciblé. Il permet d’évaluer les pays les plus pertinents avant de demander le dépôt effectif sur la base du droit de priorité. De cette manière, rien n’empêche de démarrer une implantation progressive dans un ou plusieurs pays, pour ensuite déterminer s’il est judicieux de réellement s’y installer.

Quelles sont les modalités d’application de la priorité ?

Pour être valable, le droit de priorité doit concerner une marque identique à la marque d’origine. Il doit donc s’agir du même titulaire mais aussi du même logo, nom, produit ou service. Si ce n’est pas le cas, le délai de priorité devient caduque.  

Par ailleurs, on note que les deux marques demeurent indépendantes. Même si le droit de priorité leur confère une date de dépôt commune, c’est le seul aspect qui les lie. Pour ce qui est du reste, les deux marques continuent de fonctionner individuellement dans leur pays d’application. Par exemple, si l’une d’entre elle perd sa protection, cela n’affecte aucunement l’autre. 

À noter :

Lorsque le droit de priorité est invoqué à l’étranger, on considère que la « nouvelle » marque existe depuis la date du dépôt initial fait dans le pays d’origine. Toutefois, en ce qui concerne la durée de protection de la marque, il n’y a pas de rétroaction. Pour la seconde marque, le délai de protection de 10 ans débute donc quelques mois plus tard. Il prend effet à la date de priorité et non à la date du premier dépôt.