Tout chef d’entreprise a dans son arsenal de compétences la faculté d’anticiper avec plus ou moins de réussite les événements. Et s’il y a bien un moment qui ne se dérobera pas dans la vie de patron, c’est celui de la passation de pouvoir. Dans le cas d’une entreprise familiale, le pacte Dutreil fait figure d'incontournable : ce dispositif est le moyen le plus rentable pour transmettre sa société à ses associés. Exonération des droits de mutation, transmission des titres de son activité... Comment fonctionne ce dispositif ?

Pacte Dutreil : définition

Depuis 2003, le pacte Dutreil facilite la transmission d’une entreprise en allégeant les droits de donation. Cela passe par une exonération des droits de mutation à hauteur de 75 % des titres de la société comme le prévoit l’article 787 B du Code général des impôts.

Les droits de mutation sont des taxes imposées par les collectivités locales et perçues par le notaire lorsqu’un bien immobilier change de propriétaire. Leur montant étant calculé sur la base de la valeur de l’entreprise transmise, ils représentent en temps normal la plus grosse part des frais de notaire. L’exonération des trois quarts du montant de ces droits permise par le dispositif Dutreil allège donc considérablement l’addition. 

Mais pour pouvoir prétendre à cette exonération d’une grande partie des frais qui accompagnent la conservation des titres de son entreprise dans sa famille, il faut remplir quelques critères.

Conditions d’exonération du pacte Dutreil

Les sociétés, tout comme les entreprises individuelles, peuvent prétendre au dispositif Dutreil.

Le pacte Dutreil pour les sociétés

Le régime Dutreil est réservé aux sociétés françaises ou étrangères : 

  • Qui exercent une activité commerciale, industrielle, artisanale, libérale, agricole (les holding actives sont aussi éligibles à condition qu'elles soient bien opérationnelles et qu’elles contrôlent l’ensemble de leurs filiales) ;
  • Dont la transmission se fait par donation ou transmission ;
  • Dont les associés ont signé un engagement collectif et un autre individuel.

Le pacte Dutreil pour les entreprises individuelles

Depuis 2019 et la loi Pacte, le régime Dutreil est ouvert aux EURL et SASU qui remplissent les conditions suivantes : 

  • Exercer une activité commerciale, industrielle, artisanale, libérale, agricole ; 
  • Avoir été détenue pendant au moins deux ans par le donateur ;
  • Qu’il y ait eut un engagement individuel de chacun de ses héritiers au regard de sa transmission ;
  • Qu’un des héritiers poursuive l’exploitation de l’entreprise pendant au moins 3 ans à compter de la transmission ;
  • Que tous les biens nécessaires à l’exercice de l’activité professionnelle aient été transmis.

Les sociétés et les entreprises individuelles cochant toutes les cases peuvent alors profiter de l’exonération de la majorité des impôts liés à la transmission des titres. 

Chronologie des événements permettant la mise en place du dispositif Dutreil

La mise en place du pacte Dutreil est un processus s'étalant sur plusieurs années. Elle se divise ainsi en 4 étapes : 

  • 1ʳᵉ étape : l’engagement collectif de conservation de titre ; 
  • 2ᵉ étape : la transmission des titres de l’entreprise ; 
  • 3ᵉ étape : l’engagement individuel de conservation de titre ; 
  • 4ᵉ étape : exercice de la fonction de direction par un des héritiers des parts de donation. 
  Sociétés cotées

Sociétés non cotées

Sociétés individuelles non cotées

Droit financier

10 %

17 % 17 %

Droit de vote

20 % 34 % 34 %

L’engagement collectif

La signature de l’engagement collectif de conservation des titres constitue la première étape de la mise en place du pacte Dutreil. Il engage les signataires à conserver les titres pendant une durée minimale de 2 ans à conserver un pourcentage minimum des droits financiers et des droits de vote. Ces seuils diffèrent en fonction de si l’entreprise est cotée en bourse ou non.

Transmission des titres

Une fois l’engagement collectif conclu, la transmission des parts de la société peut avoir lieu. Vient alors le temps de l'engagement individuel.

L’engagement individuel

L’engagement individuel débute 2 ans après la date de signature de l'engagement collectif. À compter de cette date, la ou les personnes reprenant la société s’engagent à conserver ses titres nouvellement acquis pendant une durée minimale de 4 ans.

Exercice de la fonction de direction

L’un des associés ayant signé l’engagement collectif doit occuper une fonction de direction ou exercer son activité professionnelle principale dans la société pendant au moins 3 années qui suivent la transmission des titres.

Pacte Dutreil et donation

À lui seul, le pacte Dutreil permet aux sociétés de faire de réelles économies d’impôts en cas de donation ou de succession. De plus, il est cumulable à d’autres dispositifs d’exonération. En effet, un chef d’entreprise peut bénéficier d’allégements fiscaux supplémentaires, comme :  

  • Un abattement sur les donations parent-enfant de 100 000 € par enfant ; 
  • Une réduction de 50 % des droits de donation si la transmission des titres de la société se fait alors que le donateur a moins de 70 ans.
 

Pacte Dutreil

Quoi ?

Dispositif facilitant la transmission des titres d’une entreprise exerçant une activité éligible à des associés.

Pourquoi ?

Abattement fiscal réduisant drastiquement les frais dus.

Pour qui ?

Détenteur de titres d’une société cotée ou non et des personnes à la tête d’une entreprise individuelle depuis 2019 (loi Pacte). Le pourcentage de parts qu’il possède doit être supérieur à un seuil minimal exigé.

Cas particulier de l’engagement collectif réputé acquis

La mort ne frappe pas avant d’entrer, si bien que le décès prématuré d’un dirigeant peut l'avoir empêché d’assurer la pérennité de sa société. Dans cette situation, l’engagement collectif réputé acquis permet aux héritiers de bénéficier de l’exonération de 75 % des droits de mutation à condition de respecter deux critères : 

  • D'un côté, le défunt ou son conjoint doit avoir détenu pendant au moins 2 ans un pourcentage de titres supérieur au seuil exigé en droits financiers et en droits de votes.
  • De l'autre, le défunt doit avoir exercé une fonction de direction dans la société depuis plus de 2 ans. 

Dans le cas où le donateur des titres de la société n’occupait pas une fonction de dirigeant, son activité professionnelle dans cette société doit :

  • Avoir été son activité principale, d'une part ;
  • Avoir été exercée pendant au moins 2 ans, d'autre part.

Cas particulier de l’engagement collectif de conservation post mortem

Lorsque ni l’engagement collectif de conservation ni un engagement réputé acquis n’ont pu être constitués, le dernier recours possible est de mettre place un engagement collectif post mortem. Pour cela, il doit être conclu dans les 6 mois suivants le décès du donateur.