Les banques ne se limitent pas à jouer leur rôle d’intermédiaire au cours des opérations bancaires. Il leur est également demandé de veiller à ce que leurs clients ne pratiquent pas d’activités illégales. C’est ce qu’exige d’eux l’obligation de vigilance. L'obligation de vigilance des banques existe en effet pour les empêcher d'avoir pour client des personnes malintentionnées. En quoi consiste ce dispositif ? Existe-t-il plusieurs niveaux de vigilance ? 

Obligation de vigilance banque : définition

L’obligation de vigilance des banques est un devoir qui incombe à tous les professionnels du secteur bancaire. En effet, il est attendu d’un banquier qu’il fasse preuve de vigilance au regard des opérations bancaires réalisées par les clients de la banque. Les banques doivent également garder un œil sur les bénéficiaires effectifs des opérations émanant de leur client. Pour ce faire, les banques doivent mettre en place en interne des procédures d’identification du client sur la base d’informations vérifiées. Le décret n°2009-1087 du 2 septembre 2009 précise la nature de ces informations. L’objectif ici est de pallier les éventuelles défaillances du système bancaire pouvant léser le client. 

L’obligation de vigilance engage la responsabilité du banquier. En effet, celui-ci sera tenu responsable si le client est victime d’une activité frauduleuse. Ainsi, si ce dernier est spolié, la faute est rejetée sur le banquier et donc, la banque. Le cas échéant, comme le prévoit l’article L133-18 du Code monétaire et financier, l’établissement bancaire devra rembourser son client à hauteur du montant frauduleusement prélevé à ce dernier. La responsabilité du banquier est également engagée si une tierce personne se retrouve lésée.

Pour éviter cette situation, le banquier doit scrupuleusement examiner les opérations bancaires suspectes ou inhabituelles. En cas d’opération douteuse, il doit s’assurer de la conformité du virement en se rapprochant du client concerné. En outre, il doit : 

  • Détecter les anomalies matérielles pouvant affecter un ordre de paiement ;
  • Relever les anomalies intellectuelles.

Anomalies matérielles apparentes et intellectuelles

Les anomalies pouvant activer l’obligation de vigilance sont de deux types : les anomalies matérielles apparentes et les anomalies intellectuelles. Une anomalie matérielle apparente est une anomalie qu’un simple coup d’œil suffit à détecter. Elle ne peut en principe donc pas échapper à un banquier diligent. Par exemple, sont considérées comme des anomalies matérielles apparentes : 

  • Les chèques impayés pour surcharge ; 
  • Un grattage sur un chèque ;
  • La fausse signature d’un chèque.

Les anomalies intellectuelles sont plus complexes à détecter, car en repérer une demande une analyse des facteurs intellectuels de présentation du chèque. Typiquement, un montant exceptionnellement haut ou une destination exotique (hors UE ou vers des pays à risque) devrait attirer l’attention du banquier. 

Le devoir de vigilance n’est pas systématique

Mais l’obligation de vigilance n’est pas une responsabilité attribuée d’office aux banquiers. En effet, en vertu du devoir de non-ingérence, la responsabilité du banquier n’est engagée que si une de ces circonstances se présente : 

Autrement, ce n’est pas l’obligation de vigilance qui s’applique, mais le devoir de non-ingérence. Aussi appelé le devoir de non-immixtion, ce dernier interdit les banquiers d’intervenir dans les affaires de leurs clients. Ils ne peuvent donc pas vérifier si une opération bancaire souhaitée par un de leurs clients est régulière, non préjudiciable et non susceptible de nuire injustement à des tiers. Les banques se contentent de faire leur travail en remplissant leur rôle d’intermédiaire.

Obligation de vigilance banque : quand déclarer ses soupçons ?

Comme le prévoit le Code monétaire et financier, dès que le banquier soupçonne une opération d’être non conforme, il doit en avertir le TRACFIN. La déclaration de soupçon peut se faire « à priori » (avant que l’opération ait lieu). Dans ce cas, le TRACFIN peut annuler le virement en faisant opposition, opposition qui sera alors notifiée à l’auteur de l’opération. Pour celles déjà exécutées et s’étant révélées suspectes sur le tard, les banquiers peuvent faire une déclaration de soupçon dite « à posteriori ».

Quels sont les différents types de vigilance ?

Toutes les opérations suspectes ne présentent pas le même risque. Ainsi, il existe quatre types de vigilance pouvant être mises en œuvre. La procédure de vigilance mise en place sera celle correspondant au niveau de risque que représente l’opération. Il existe l'obligation de vigilance : 

  • Normale (ou standard) ; 
  • Réduite ;
  • Allégée ; 
  • Renforcée.

Vigilance normale

La vigilance normale est exercée au début de la relation d’affaires entre la banque et le client. Le banquier doit alors vérifier l’identité de l’auteur de l’opération ainsi que le destinataire et la nature de celle-ci. Pour ce faire, le banquier doit se renseigner sur : 

  • L’identité des deux parties ; 
  • La situation professionnelle, économique et financière de son client ; 
  • Le montant et la nature de l’opération envisagée ; 
  • La provenance et la destination des fonds ;
  • Et les éléments permettant d’estimer le revenu et le patrimoine d’une personne physique si le client en est une.

Dans le cas où le bénéficiaire est une société, le banquier doit également identifier les personnes physiques ayant un pouvoir de décision au sein de cette entreprise. La vérification se fait par la consultation des statuts de la société et de son extrait KBIS.

La vigilance standard ne concerne pas que les premières opérations réalisées par le client. Elle doit en effet être répétée à chaque opération. De plus, chacune de ces dernières doit être mise en perspective avec celles ayant été réalisées au cours des 5 années précédentes afin de pouvoir en apprécier la cohérence. 

Vigilance réduite

La décision de mettre en œuvre la vigilance réduite appartient au banquier. En effet, l’article 561-9 du Code monétaire et financier prévoit que le professionnel peut appliquer la vigilance réduite : 

  • S’il juge que le risque de blanchiment de capitaux et de financement du terrorisme (BC-FT) est faible ; 
  • Si le client figure sur la liste des personnes présentant un faible risque de BC-FT ; 
  • S’il n’existe pas de soupçon de BC-FT concernant le client.

Vigilance allégée

Ce deuxième niveau de vigilance amoindrie dispense les professionnels d’identification du client et de caractérisation de sa relation avec le bénéficiaire. Pour autant, elle ne s’applique que dans un nombre limité de situations. Dans le milieu bancaire, la vigilance allégée ne peut être mise en œuvre que dans des situations ne présentant qu’un faible risque de blanchiment, tels que les : 

  • Contrats emprunteurs ; 
  • Contrats d’assurance-retraite sans clause de rachat ;
  • Virements sur un plan épargne retraite d’entreprise ou sur un plan d’épargne populaire.

Vigilance renforcée

La mise en œuvre de la vigilance renforcée (ou enhanced due diligence) enclenche les vérifications les plus poussées que prévoit l’obligation de vigilance. Les banquiers doivent l’appliquer lorsque  : 

  • Le client n’est pas physiquement présent aux fins d’identification ; 
  • La personne est politiquement exposée ; 
  • Le produit ou l’opération favorise l’anonymat ; 
  • Le client réside à l’étranger et qu’il est exposé à des risques particuliers en raison des fonctions politiques, juridictionnelles ou administratives.

La vigilance renforcée engage le banquier qui la met en œuvre à conduire les vérifications normales, mais également à en faire une supplémentaire parmi les suivantes : 

  • Obtenir des pièces d’identité supplémentaires ;
  • Vérification, par un tiers indépendant, de la copie de la pièce d’identité remis ; 
  • Exiger que le premier versement soit effectué à partir ou à destination d’un compte au nom du client dans un établissement assujetti aux mesures de lutte conte le BC établi en Europe ;
  • Obtenir la confirmation de l’identité du client par un établissement assujetti aux dispositions de lutte anti-blanchiment.