Dans un univers de la gestion de patrimoine en pleine mutation, la jeune pousse française RockFi vient d’annoncer une opération d’envergure : une levée de fonds de 18 millions d’euros en Série A. Une percée majeure pour cette fintech fondée en 2023, déjà saluée par les milieux d’affaires et de la finance en France, qui voient en elle un nouvel acteur prêt à bouleverser le secteur.

Un nouveau coup d’éclat : faits marquants et premières réactions

RockFi, spécialisée dans la gestion d’actifs et de patrimoine, démontre une ambition notable : après un premier tour de table de 3 millions d’euros conclu il y a moins d’un an, la société récidive avec un tour de Série A avoisinant 18 millions d’euros, sous la houlette de Partech, accompagnée par Varsity et plusieurs business angels. Les observateurs s’accordent à dire que cette opération accrédite la forte croissance du marché de la gestion patrimoniale digitale en France.

Pour nombre d’acteurs du secteur, cette opération reflète surtout la pertinence d’un modèle hybride. RockFi table en effet sur un double levier : une plateforme technologique de pointe, couplée à un réseau de banquiers privés indépendants. Cette combinaison séduit autant les cadres dirigeants et entrepreneurs que les artistes et sportifs de haut niveau qui souhaitent optimiser leur patrimoine en toute transparence. Les premières réactions sur les marchés financiers sont favorables, pointant la solidité du management et l’expérience d’une équipe dirigeante qui réunit d’anciens responsables de la banque privée.

Au-delà du montant significatif, c’est l’écosystème de la French Tech qui se réjouit. Plusieurs médias spécialisés mettent en lumière la rapidité de l’opération et la confiance renouvelée des actionnaires existants. Il est rare qu’une startup tricolore axée sur la gestion de patrimoine voie sa valorisation grimper aussi vite en moins d’un an. En conséquence, certains concurrents classiques du domaine, notamment les banques privées traditionnelles, pourraient être amenés à revoir leurs stratégies pour conserver leurs clients haut de gamme.

Indicateur clé à retenir

Avec désormais 500 clients à son actif et une croissance mensuelle de +25 %, RockFi affiche un rythme inhabituellement rapide pour une fintech orientée gestion privée. Les experts estiment que ces nouveaux fonds pourraient accélérer encore davantage cette dynamique.

Les premiers pas de RockFi : de l’idée à la montée en puissance

RockFi naît en 2023 de la volonté de trois cofondateurs : Pierre Marin, Marie Bedu et Maxime Durand. Ils s’associent à deux ex-directeurs de banque privée, convaincus que la gestion de patrimoine souffre d’une image élitiste et d’un manque de digitalisation. Dès le départ, l’ambition est claire : rendre l’expertise patrimoniale accessible, plus transparente et plus adaptée à une clientèle exigeante, parfois en déplacement constant ou peu familière des circuits bancaires traditionnels.

Afin de se démarquer, l’entreprise mise sur une architecture d’investissement ouverte, forte de 3 000 supports financiers. Dès ses premiers mois, RockFi contractualise avec des noms prestigieux tels que Morgan Stanley, BlackRock ou encore Goldman Sachs. Cette stratégie attire rapidement l’attention de fonds d’investissement comme Varsity, qui mène son tour d’amorçage en 2024.

Deux facteurs majeurs expliquent la trajectoire ascendante de RockFi. D’une part, une volonté affirmée de digitaliser des process historiquement lourds : reporting en temps réel, allocation personnalisée disponible sur une application dédiée, suivi régulier assuré par un banquier privé. D’autre part, un seuil d’entrée volontairement placé à 250 000 €. Cette sélection d’investisseurs favorise une relation de proximité, tout en préservant un certain standing, aligné avec la promesse haut de gamme de la fintech.

Au tout début de leur aventure, les cofondateurs ont testé leur concept auprès de 20 familles fortunées, en leur offrant un suivi gratuit pendant 3 mois. Les retours clients, très positifs, ont accéléré la mise en œuvre du projet et permis d'ajuster certains services avant même le lancement officiel.

Décryptage légal et obligations réglementaires dans l’univers patrimonial

En France, la gestion de patrimoine est soumise à des cadres réglementaires stricts, relevant notamment de l’Autorité des marchés financiers (AMF) et de l’Autorité de contrôle prudentiel et de résolution (ACPR). Toute fintech souhaitant proposer des conseils en investissement ou distribuer des produits financiers doit se plier aux règles de MiFID II, qui portent sur la transparence, la protection des investisseurs et la prévention des conflits d’intérêts. Pour RockFi, le respect de ces dispositions représente un atout : cela rassure les investisseurs sur la solidité et la conformité de leur modèle.

D’autre part, le secteur de la banque privée implique la maîtrise d’aspects fiscaux (impôt sur le revenu, IFI pour l’immobilier) et successoraux complexes. Les équipes internes de RockFi, selon les informations communiquées, s’appuient sur des conseillers juridiques spécialisés pour proposer une optimisation qui soit à la fois performante et conforme aux obligations fiscales. De plus, la fintech se positionne sur le segment de l’assurance-vie, un placement plébiscité en France pour sa souplesse et ses avantages successoraux.

Au-delà de la conformité, ces règles peuvent aussi freiner certaines opérations. Pour RockFi, il a fallu articuler l’innovation technologique avec les exigences procédurales (contrôle d’identité renforcé, connaissance client, lutte contre le blanchiment). Ce sont des contraintes coûteuses, tant sur le plan financier que du temps de développement, mais elles constituent un passage obligé pour installer la confiance auprès d’une clientèle fortunée.

En France, la souscription d’une assurance-vie via une plateforme numérique est régie par la DDA (Directive sur la Distribution d’Assurances). Celle-ci impose notamment des obligations d’information et de conseil renforcées. Les distributeurs doivent s’assurer du profil de risque et des objectifs d’investissement de leurs clients, ce qui nécessite la mise en place d’outils de diagnostic patrimonial sophistiqués.

Analyse financière : modèles, chiffres et perspectives

Le business model de RockFi repose sur un abonnement annuel dont le coût varie en fonction du volume d’actifs gérés. Cette tarification, qualifiée de « forfait exclusif », inclut un accompagnement personnalisé, un accès à des produits d’investissement diversifiés et un suivi digital en temps réel. Pour l’investisseur, ce modèle de « service global » est perçu comme transparent : pas de commission cachée, un budget identifié à l’avance et des partenariats ciblés avec des géants de la finance.

Sur le plan des résultats, RockFi revendique une croissance mensuelle de +25 % en termes d’activité et déjà 500 clients signés. Cette progression s’explique en partie par le bouche-à-oreille d’une clientèle satisfaite, mais également par la spécialisation de l’équipe, qui connaît les rouages de la banque privée. Les 50 collaborateurs actuels, dont 25 banquiers privés, couvrent déjà 6 bureaux en France (Paris, Lille, Bordeaux, Lyon, Annecy et Toulon). Les dirigeants tablent sur 60 recrutements supplémentaires de banquiers privés dans les mois à venir, afin d’étoffer la présence régionale.

Le nouveau financement de 18 millions d’euros doit permettre de soutenir un plan d’expansion audacieux : RockFi prévoit de conquérir une nouvelle ville par mois, priorisant des agglomérations dynamiques comme Nice, Cannes, Toulouse, Rennes ou encore Strasbourg. L’objectif visé ? Atteindre la barre symbolique du milliard d’euros sous gestion d’ici la fin 2026. Cette ambition, si elle se concrétise, hisserait la jeune société au rang d’acteur incontournable face aux banques privées historiques.

Plusieurs autres acteurs digitaux se positionnent sur le segment de l’investissement automatisé ou de la gestion d’épargne, comme Yomoni, Nalo ou WeSave. Toutefois, RockFi tente de se différencier avec une double approche alliant technologie et un suivi humain de type « family office », proposant des solutions complexes (private equity, ingénierie patrimoniale) souvent absentes chez les robo-advisors traditionnels.

Un autre atout financier réside dans la diversification : outre les actifs classiques (actions, obligations, ETF), RockFi s’est ouvert à des placements plus spécialisés : parts de fonds de capital-investissement, assurance-vie luxembourgeoise et produits structurés. Cette pluralité d’options, combinée à une gestion centralisée via une interface digitale, séduit une catégorie d’investisseurs en quête d’outils modernes, tout en désirant conserver la relation de confiance avec un interlocuteur dédié.

En matière de valorisation, aucune estimation officielle n’a été communiquée à ce jour, mais les marchés spéculent déjà sur une valorisation supérieure à plusieurs dizaines de millions d’euros. L’arrivée de Partech au capital, accompagnée de figures comme Philippe Collombel (cofondateur et General Partner de Partech) et Didier Valet (cofondateur du fonds Varsity) dans la gouvernance, renforce cette crédibilité financière.

Résonance sur l’écosystème français et ambitions européennes

Cette levée de fonds met en exergue l’appétit des investisseurs pour la digitalisation de la banque privée. La France, avec ses 6 millions de foyers disposant d’un patrimoine dépassant 250 000 €, constitue un terreau propice pour l’émergence de solutions innovantes. Le succès de RockFi ne profite pas seulement à la société elle-même : en recrutant massivement, elle stimule l’emploi dans un secteur parfois jugé peu accessible aux profils non traditionnels.

Au niveau de l’innovation, l’entreprise se démarque par sa volonté de bâtir une véritable « plateforme patrimoniale » intégrée. Ce qui implique la mise en place d’un back-office et d’un middle-office hautement automatisés, capables de traiter rapidement les opérations de souscription, d’arbitrage et de reporting. L’enjeu dépasse la simple mise à disposition d’un tableau de bord en ligne : il s’agit de proposer une expérience complète, depuis la construction d’un portefeuille jusqu’à l’accompagnement en matière de fiscalité.

Les perspectives européennes sont tout aussi enthousiasmantes. Bien que RockFi se concentre pour l’instant sur la France, ses dirigeants n’excluent pas un déploiement à l’échelle continentale. Le marché de la gestion privée en Europe est en pleine reconfiguration : la population fortunée et aisée augmente, tandis que la confiance dans les banques universelles traditionnelles s’effrite. Pour de nombreux spécialistes, une expansion à l’étranger est une suite logique, dès lors que la solidité réglementaire et la capacité à recruter des banquiers locaux sont réunies.

Bon à savoir

RockFi dispose d’une équipe technique de 12 ingénieurs entièrement dédiée à l’amélioration continue de sa plateforme. Elle ambitionne de doubler cet effectif dans l’année pour soutenir la croissance et répondre aux exigences de clients internationaux, souvent confrontés à des structures d’actifs dispersés dans plusieurs pays.

Le chemin qui se dessine

En misant à la fois sur la relation de proximité avec un banquier privé et sur la force d’une interface technologique aboutie, RockFi suscite un véritable engouement. Le recrutement de nouveaux talents, l’ouverture régulière de bureaux régionaux et la volonté de renforcer la gamme de produits financiers traduisent une stratégie de croissance ambitieuse. Dans un contexte où la digitalisation s’accélère et où les exigences des investisseurs s’intensifient, la fintech fait figure de précurseur.

Si RockFi parvient à maintenir ce rythme, la gestion privée pourrait s’offrir une nouvelle jeunesse, emmenant dans son sillage un écosystème financier français déjà en pleine mutation.