Ÿnsect obtient le feu vert américain pour la protéine de vers de farine
Ÿnsect obtient l’approbation de l’AAFCO pour ses protéines à base de vers de farine, ouvrant la voie à un nouveau marché US pour le pet food écoresponsable.

Le fabricant français de protéines alternatives Ÿnsect vient de marquer un grand tournant dans l’alimentation animale, en se voyant accorder par l’AAFCO l’autorisation de commercialiser ses protéines issues de vers de farine aux États-Unis. Ce feu vert ouvre de nouvelles perspectives pour la marque Sprÿng de l’entreprise, qui vise à proposer des ingrédients écoresponsables et adaptés à la nutrition des chiens.
Un nouveau chapitre pour l’alimentation canine
Il ne s’agit pas d’une simple annonce : la validation de l’AAFCO place désormais les insectes, et en particulier le Tenebrio molitor, au même rang que les sources protéiques plus classiques dans l’alimentation pour chiens. Ÿnsect peut ainsi déployer son offre outre-Atlantique sans entraves réglementaires, ouvrant la voie à de potentielles révolutions dans nos gamelles pour animaux de compagnie.
Les professionnels du secteur s’accordent pour dire que cette première autorisation est un signe fort d’évolution du marché. Les insectes, déjà connus dans certaines régions comme source alimentaire pour les humains, se voient ici conférer une légitimité supplémentaire pour la production d’aliments canins. Les chercheurs et acteurs économiques y voient à la fois une opportunité de croissance commerciale et un moyen de réduire l’impact environnemental lié à la production de protéines d’origine animale.
L’AAFCO (Association of American Feed Control Officials) évalue la sécurité et la qualité des ingrédients proposés sur le marché américain du pet food. Dans le cas des protéines de vers de farine, le dossier scientifique comportait des analyses poussées : démonstration d’une forte digestibilité, étude toxicologique et présentation de tests réalisés sur des chiens pendant plusieurs mois.
Ce rapprochement entre le monde de la science et celui de la réglementation illustre la métamorphose du secteur agroalimentaire : intégrer des solutions plus vertes, tout en garantissant sécurité et performance nutritionnelle. Le vertige suscité par l’idée de nourrir nos animaux de compagnie avec des insectes laisse peu à peu place à une acceptation éclairée par des études fiables.
Pourquoi miser sur les protéines d’insectes pour nourrir les chiens ?
Plutôt méconnues du grand public, les protéines entomologiques se distinguent par leur forte teneur en acides aminés essentiels. Dans le cas précis des vers de farine, des analyses indiquent une bonne concentration en nutriments indispensables à la santé des canidés. Les études menées par Ÿnsect, notamment en collaboration avec Summit Ridge Farms, ont également mis en évidence une sécurité sanitaire notable sur de longues périodes.
Au-delà de la composition protéique, l’aliment issu de Tenebrio molitor présente un profil complet : acides gras insaturés, minéraux variés et vitamines. Par conséquent, son incorporation dans la formulation des croquettes peut se faire sans crainte de carences nutritionnelles, d’autant plus qu’il se substitue aux protéines animales classiques (bœuf, porc, volaille, poisson…). Les éleveurs, tout comme les maîtres soucieux d’offrir une bonne alimentation à leur chien, y voient donc un atout pour la santé de l’animal.
Tenebrio molitor : Nom scientifique du ver de farine, un insecte coléoptère utilisé pour l’alimentation humaine et animale.
Protéine alternative : Terme générique désignant toute source de protéines qui n’est pas issue de l’élevage conventionnel (bovin, porcin, etc.). Cela inclut les insectes, les algues, ou encore certaines cultures végétales innovantes.
Pet food : Secteur alimentaire dédié aux animaux de compagnie (chiens, chats, etc.). Il englobe de multiples sous-catégories de produits (croquettes, pâtées, friandises...).
Cependant, l’intérêt pour les protéines d’insectes ne s’explique pas uniquement par la performance nutritionnelle. L’élevage de vers de farine requiert moins d’eau et d’espace que la production de viande bovine, par exemple, ce qui fait de cette méthode un atout clé pour diminuer la pression sur les ressources naturelles. Dans le contexte actuel, où la responsabilité environnementale prend une place centrale, le recours à des solutions plus économes en énergie suscite de plus en plus d’intérêt.
Un marché américain colossal : 42 milliards de dollars pour le pet food
Les États-Unis occupent une place prédominante dans l’industrie mondiale du pet food. En 2022, ce secteur représentait plus de 42 milliards de dollars sur le marché américain, selon des sources institutionnelles. Derrière ces chiffres se cache une population d’environ 65 millions de chiens, selon l’AVMA, et autant de maîtres prêts à investir dans des formules alimentaires qualitatives, voire premium.
Cette croissance régulière — estimée à 5 % par certains rapports (dont TechNavio) — ouvre de réelles opportunités pour les ingrédients innovants. Les propriétaires de chiens n’hésitent plus à se tourner vers des nourritures haut de gamme, surtout lorsqu’elles promettent un meilleur respect de l’environnement. Ainsi, la décision de l’AAFCO prend toute sa dimension : en autorisant Ÿnsect à commercialiser ses protéines dégraissées de vers de farine, le champ concurrentiel s’élargit et pourrait encourager d’autres entreprises à suivre ce mouvement.
Fidélité et dépenses canines
42 milliards de dollars : c’est la valeur du marché américain du pet food en 2022, portée par une population canine toujours plus gâtée. Les spécialistes y voient la preuve que le bien-être animal est désormais une priorité économique et sociale, ouvrant la voie à des offres diététiques novatrices.
Pour les entreprises françaises comme Ÿnsect, s’implanter sur le marché américain revient à franchir un palier stratégique important. D’une part, elles bénéficient de la notoriété d’une économie où la dépense moyenne par chien dépasse bien souvent celle observée en Europe. D’autre part, elles profitent d’un fort élan en faveur de la durabilité et de la traçabilité, qui ne cesse de s’accroître dans la culture américaine.
Par ailleurs, il ne faut pas minimiser l’importance de la sensibilisation des consommateurs américains. Les nouveaux acheteurs sont à la recherche d’histoires et de valeurs : la traçabilité, la transparence, ainsi que l’engagement environnemental. Offrir un aliment original, moins gourmand en ressources, s’avère être un avantage compétitif de taille pour les jeunes pousses ou les entreprises venues d’ailleurs.
Selon TechNavio, la croissance du marché du pet food américain est portée par :
- La hausse des dépenses des consommateurs pour la santé animale.
- La diversification des produits alimentaires proposés (bio, végan, insectes...).
- L’intérêt accru pour les aliments premium et sur-mesure.
Le secteur est anticipé à +5 % par an, ce qui encourage l’arrivée de nouveaux ingrédients novateurs.
Sécurité et nutrition : le rôle de Summit Ridge Farms
Un des éléments phares ayant contribué à l’autorisation américaine concerne l’étude menée par Summit Ridge Farms. Cette référence reconnue dans l’évaluation des produits destinés aux animaux de compagnie a analysé les effets d’une alimentation riche en Tenebrio molitor sur une période prolongée de six mois.
Selon les résultats publiés, les chiens n’ont montré aucun signe d’intolérance et ont conservé des performances physiologiques et digestives de qualité. Mieux encore, la farine de vers de farine dégraissée, baptisée Protein70, s’est révélée parfaitement assimilable, avec un taux de digestibilité avoisinant voire dépassant les 80 %. Cela place la protéine d’insecte dans la même catégorie que les meilleurs produits d’origine animale utilisés habituellement (bœuf, porc, saumon…).
Les experts nutritionnistes soulignent l’importance de la présence d’acides gras insaturés, de vitamines et de minéraux pour optimiser la santé des chiens, notamment en termes d’immunité et de vitalité. Avec ce haut niveau de sécurité alimentaire, l’essai mené par Summit Ridge Farms a joué un rôle majeur dans la décision de l’AAFCO, qui se veut particulièrement vigilante lorsqu’il s’agit d’autoriser un ingrédient nouveau sur le marché américain.
Bon à savoir
Summit Ridge Farms réalise depuis plusieurs années des essais cliniques et nutritionnels dédiés au pet food. Ses infrastructures spécialisées et ses équipes multidisciplinaires permettent d’étudier les réactions, le métabolisme et le comportement alimentaire de nombreux animaux de compagnie sur des durées variables.
Cette dynamique de recherche et de développement a été soutenue par le professeur Kelly Swanson, de l’Université de l’Illinois Urbana-Champaign, qui a également confirmé la proximité de la qualité protéique entre la farine d’insectes de Tenebrio molitor et les sources conventionnelles de haute qualité. Cette convergence de validations scientifiques a propulsé la candidature de Ÿnsect vers le succès, en renforçant la crédibilité de l’entreprise face aux autorités et aux clients potentiels.
Un focus sur la ferme verticale d’Amiens
Alors que la ferme verticale d’Amiens de Ÿnsect est entrée en phase de production, une première livraison a déjà eu lieu en décembre 2023, démontrant la capacité de la start-up à soutenir une montée en puissance rapide de sa production. Construite dans l’optique de fonctionner selon des critères exigeants d’économie circulaire, cette ferme mise sur la valorisation des co-produits agricoles issus de régions céréalières.
Concrètement, les vers de farine sont nourris à partir de matières premières disponibles localement, diminuant ainsi l’empreinte liée au transport et à la consommation d’eau. Les installations robotisées et les technologies de pointe permettent un contrôle précis des paramètres de croissance, tout en minimisant les pertes. Cette approche illustre la volonté de Ÿnsect de fournir des ingrédients Premium tout en se positionnant en leader d’un modèle agricole moins intensif sur le plan environnemental.
Le choix d’Amiens n’est pas le fruit du hasard : la région Hauts-de-France constitue un véritable bassin agricole, avec une logistique éprouvée et un écosystème favorable à l’innovation. Les pouvoirs publics, au travers de soutiens et de subventions, encouragent depuis plusieurs années l’implantation de projets à haute valeur ajoutée dans ce secteur.
D’après les annonces officielles de la société, cette ferme verticale a vocation à accroître progressivement sa capacité de production pour répondre, non seulement au marché européen, mais aussi à la demande croissante aux États-Unis suite à la récente autorisation de l’AAFCO. L’objectif est de maintenir une qualité constante tout en augmentant le volume pour atteindre un équilibre économique viable.
La quête de la durabilité : comment réduire l’empreinte carbone du pet food ?
Avec le phénomène de réchauffement climatique et de pression sur les ressources naturelles, les industries sont poussées à adopter des solutions moins polluantes. Dans le domaine de l’alimentation animale, produire des croquettes richement protéinées a longtemps impliqué un recours massif aux protéines d’élevage intensif. Ce modèle est désormais remis en question pour son impact sur l’eau, la biodiversité et les émissions de gaz à effet de serre.
Les vers de farine nécessitent beaucoup moins de surface et d’eau que l’élevage de mammifères. Dans certaines évaluations, 1 kg de farine d’insectes émet moins de la moitié du CO2 équivalent par rapport à la même quantité de farine de soja ou d’agneau, et jusqu’à 20 fois moins que la farine de bœuf. Cette différence de performance environnementale ouvre la porte à de nouvelles stratégies pour diminuer les émissions dans la chaîne de production du pet food.
De plus, l’élevage d’insectes valorise des co-produits agricoles qui n’entrent pas en compétition directe avec l’alimentation humaine. En d’autres termes, il limite la déforestation et la conversion de terres arables. Pour les défenseurs d’une économie circulaire, c’est un levier fort pour optimiser l’utilisation des ressources existantes.
Vers de farine : des alliés pour la biodiversité ?
Contrairement à l’élevage de bétail, le développement d’insectes comme le Tenebrio molitor ne requiert pas la déforestation de nouveaux espaces agricoles. En travaillant avec des flux de matières premières déjà disponibles, la pression sur les écosystèmes naturels diminue, ce qui pourrait contribuer à préserver la faune et la flore locales.
Si la transition écologique est en marche, elle rencontre cependant des freins : la perception du consommateur, le coût initial des infrastructures et la nécessité d’une adaptation réglementaire. L’autorisation obtenue par Ÿnsect constitue donc un jalon marquant, apte à faciliter l’adoption de ce nouveau type d’ingrédient à plus large échelle et à standardiser les procédés de fabrication.
Réactions du secteur : opportunités et défis
Du point de vue des entreprises du pet food, l’arrivée d’une nouvelle source de protéines validée par l’AAFCO est synonyme de concurrence, mais aussi d’opportunités inédites. Les distributeurs, en recherche permanente d’innovation, peuvent se positionner sur la vague verte en proposant des gammes d’aliments intégrant des insectes. Cette démarche peut leur apporter un avantage concurrentiel, notamment auprès de propriétaires de chiens sensibles aux enjeux climatiques.
Néanmoins, le chemin n’est pas sans embûches. Les ingrédients à base d’insectes restent souvent plus onéreux que les approvisionnements en protéines classiques, du moins tant que la production n’a pas atteint une échelle suffisamment large. Les fabricants doivent donc jongler entre la nécessité de proposer un tarif acceptable et celle de préserver leurs marges. Les institutions, pour leur part, pourraient encourager cette transition via des subventions ou des mesures fiscales favorables, permettant un déploiement plus rapide.
Les experts du secteur voient aussi dans cette autorisation une impulsion pour la R&D. Davantage de recherches pourraient émerger sur l’optimisation génétique des insectes, l’amélioration des procédés de transformation ou la mise au point d’aliments encore plus spécifiques (répondant à certains profils de chiens : sportifs, seniors, etc.). D’ici quelques années, il n’est pas exclu que le pet food à base d’insectes se décline en une multitude de variantes spécialisées, du format croquettes aux compléments alimentaires pointus.
L’AAFCO n’est pas un organisme fédéral mais une association d’agences qui collabore avec la FDA et d’autres instances. Ses lignes directrices, largement reconnues par les États américains, établissent les normes pour les ingrédients utilisés dans la nourriture animale, la définition des nutriments nécessaires et les exigences d’étiquetage. L’approbation de nouveaux ingrédients suit un processus long, impliquant la fourniture d’un dossier scientifique complet.
Qui est Ÿnsect ? Histoire et vision
Fondée en 2011, la société parisienne Ÿnsect est le fruit d’une collaboration entre des scientifiques et des personnes investies dans la cause écologique. L’objectif initial : transformer les insectes en ingrédients de haute qualité pour l’alimentation animale et végétale, voire humaine. Dès ses débuts, l’entreprise a misé sur une technologie propriétaire et déposé plus de 400 brevets dans le monde, couvrant différents volets de l’élevage et de la transformation.
Ÿnsect se distingue aussi par sa certification B Corp, qui témoigne d’un engagement sociétal et environnemental. Avec l’aide de financements divers (fonds d’investissement, banques, institutions publiques), la jeune pousse a réussi à lever plus de 625 millions de dollars. Cette réussite lui a permis de construire plusieurs sites de production et de se positionner sur la scène mondiale comme l’un des principaux acteurs de la protéine entomologique.
La marque Sprÿng (spécialisée dans le pet food) offre un éventail de produits axés sur le Tenebrio molitor transformé. On y retrouve de la farine dégraissée (Protein70), mais aussi des déclinaisons pensées pour répondre aux besoins spécifiques des animaux de compagnie. Si le marché européen est déjà acquis à l’entreprise, l’ouverture vers le continent américain élargit considérablement son horizon, lui permettant de répondre à la demande d’une clientèle variée, de plus en plus réceptive à l’idée de protéines alternatives.
Des perspectives en plein essor
En définitive, l’autorisation délivrée par l’AAFCO marque un changement d’échelle déterminant pour l’alimentation canine. Elle prouve qu’une approche alternative, centrée sur l’élevage d’insectes et la durabilité, peut être reconnue par des instances rigoureuses et normatives. Ÿnsect, pionnier français, illustre comment la technologie, la recherche scientifique et l’activisme écologique peuvent se combiner pour proposer des solutions novatrices.
L’impact potentiel sur la planète et la filière alimentaire est non négligeable : des économies d’eau et d’énergie, un moindre recours aux terres agricoles, et une limitation de la dépendance aux élevages intensifs traditionnels. Aux États-Unis, la demande pour des croquettes de meilleure qualité, voire pour des régimes alimentaires ciblés, ne cesse de croître. L’intégration d’insectes s’inscrit donc parfaitement dans cette trajectoire, qui vise à concilier bien-être animal et respect de l’environnement.
À mesure que la ferme d’Amiens monte en régime, d’autres projets de la sorte pourraient voir le jour en France ou ailleurs dans le monde. L’essor du marché de l’alimentation animale laisse présager des alliances stratégiques, des innovations supplémentaires et une consolidation de la place des insectes dans l’assiette de nos compagnons à quatre pattes. Il reste à observer l’acceptation finale des consommateurs et la réaction concrète des grandes marques de pet food.
Dans une période où la soutenabilité devient une priorité mondiale, l’initiative de Ÿnsect et l’aval des autorités américaines réaffirment l’importance de penser autrement notre rapport à la protéine et de préparer, dès maintenant, l’avenir alimentaire de nos animaux de compagnie.