TotalEnergies érige un champ solaire monumental à Séville
Près de Séville, la multinationale française marque un tournant avec un champ solaire de 263 MW, soutenant l’objectif espagnol de 80 % d’énergies vertes d’ici 2

La multinationale française TotalEnergies vient de célébrer, le 22 mai 2025, l’ouverture de sa plus imposante installation solaire européenne près de Séville. Cet événement symbolise un virage décisif pour la production d’électricité verte en Europe et réaffirme la détermination de l’Espagne à renforcer la part des énergies renouvelables dans son mix.
Un nouveau jalon pour l’essor photovoltaïque en Europe
Implanté à quelques kilomètres de Séville, ce complexe solaire regroupe une série de cinq centrales, totalisant une puissance installée de 263 MW. Chaque année, leur production attendue s’élève à 515 GWh d’électricité verte, alimentant en énergie plus de 150 000 foyers. Outre cette injection de courant bas carbone dans le réseau espagnol, ces installations devraient permettre d’éviter l’émission d’environ 245 000 tonnes de CO2 sur une base annuelle. C’est un atout précieux pour l’accélération de la transition énergétique espagnole.
D’un point de vue financier, cet investissement s’inscrit dans une stratégie de plus en plus adoptée par les géants de l’énergie : diversifier leur portefeuille en intégrant des actifs renouvelables massifs. La croissance fulgurante des power purchase agreements (PPAs) offre en effet un modèle économique stable et avantageux, permettant à la fois de sécuriser les revenus sur plusieurs années et d’alléger les risques de volatilité sur les marchés de gros.
Cette centrale ibérique se distingue non seulement par sa taille record pour TotalEnergies en Europe, mais également par l’utilisation de technologies solaires très performantes. Des panneaux bifaciaux à suivi solaire (“trackers”) ont été déployés, augmentant le rendement énergétique par rapport aux systèmes fixes. Dans un pays baigné de soleil comme l’Espagne, cette optimisation est un avantage considérable pour maximiser la production.
Les trackers solaires orientent automatiquement les panneaux photovoltaïques pour suivre la course du soleil. Cette technologie optimise l’exposition, accroît la production électrique et peut augmenter la rentabilité globale d’un projet. Dans le cas de panneaux bifaciaux, l’arrière du module peut également capter la lumière réfléchie par le sol, améliorant davantage l’efficacité.
Le choix de Séville n’a rien d’anodin. L’Andalousie bénéficie d’un gisement solaire très élevé, figurant parmi les régions les plus ensoleillées d’Europe. Grâce au soutien de la Junta de Andalucía, ce chantier monumental a vu la participation de 14 entreprises, dont la moitié originaires de Séville, créant ainsi plus de 800 emplois directs et indirects.
Le volet stratégique andalou
Déclaré d’intérêt stratégique par les autorités régionales, ce projet témoigne de la volonté de l’Andalousie de consolider sa position de leader européen en matière de solaire. De fait, l’Espagne a officiellement pour ambition de porter la part d’énergies renouvelables à 80 % dans son mix électrique d’ici 2030. Dans ce contexte, l’installation de plus de 400 000 panneaux bifaciaux dans la province sévillane bénéficie non seulement aux acteurs industriels, mais aussi aux communautés locales.
D’ailleurs, l’attrait pour le solaire en Espagne va bien au-delà du seul climat favorable. Les dispositifs légaux de soutien, les subventions potentielles et la simplification des démarches administratives figurent au rang des facteurs clés pour encourager l’implantation rapide de nouveaux sites de production. L’Espagne a en effet adopté des mesures incitatives pour accélérer les procédures et favoriser les investissements étrangers dans les énergies renouvelables.
L’appui régional matérialisé par la Junta de Andalucía apporte un coup de pouce supplémentaire, tant sur le plan réglementaire que sur celui du financement. Ce soutien a permis de structurer le projet et d’impliquer un large tissu industriel andalou, offrant ainsi une impulsion socio-économique substantielle.
Bon à savoir : statut “d’intérêt stratégique”
Lorsqu’un projet est déclaré d’intérêt stratégique, il bénéficie d’une procédure accélérée, d’un accès prioritaire aux ressources administratives et d’un accompagnement renforcé de l’État ou de la région concernée. Cette reconnaissance facilite aussi l’obtention des permis et peut réduire les délais de construction.
Sur le plan purement opérationnel, ce label stratégique atteste de la pertinence économique et sociale de l’infrastructure solaire. Il témoigne également de la volonté politique locale de basculer vers une production d’énergie à faible empreinte carbone. Le tout s’inscrit dans l’objectif global espagnol d’atteindre la neutralité carbone d’ici la moitié du siècle.
Analyse économique et financière : un marché favorable aux PPAs
La majorité de l’électricité issue de ce champ solaire est vendue sous forme de contrats d’achat d’électricité à long terme, plus connus sous l’acronyme anglais “PPA” (Power Purchase Agreement). Le PPA permet de garantir un volume de ventes prédéfini à un tarif stable, offrant ainsi une sécurité de revenus à l’exploitant et une visibilité budgétaire précieuse aux acheteurs.
D’un point de vue financier, cette approche séduit de plus en plus d’investisseurs, car elle protège contre les fluctuations du prix de l’énergie sur le marché de gros. Les entreprises consommatrices d’électricité peuvent, quant à elles, afficher une empreinte carbone réduite, un argument désormais crucial pour la réputation et l’attractivité vis-à-vis de leurs clients et partenaires.
En Espagne, la signature de PPAs dans le secteur des énergies renouvelables s’est démultipliée ces dernières années, reflétant l’appétit grandissant des acteurs industriels et tertiaires pour de l’électricité bas carbone. Par ailleurs, l’essor de ces contrats à long terme répond aussi à un cadre juridique permettant plus de flexibilité. Le résultat s’avère gagnant pour chaque partie, les producteurs bénéficiant d’une rentrée d’argent stable sur plusieurs années, tandis que les acheteurs s’assurent un prix compétitif et prévisible.
Le marché de gros de l’électricité, appelé aussi marché spot, est la place où les producteurs et distributeurs échangent des volumes d’électricité sur des bases journalières ou à très court terme. Les tarifs y sont soumis aux variations de l’offre et de la demande, influencées par les conditions météorologiques et l’état du réseau.
L’attrait pour les PPAs en Espagne s’inscrit donc dans une logique de stabilité et de réduction des risques financiers. Cela coïncide avec les objectifs environnementaux européens, le Vieux Continent incitant activement chaque État membre à encourager les grandes entreprises à s’engager sur la voie de la décarbonation.
Un impact social et régional considérable
Le déploiement d’un complexe solaire de cette envergure génère une dynamique locale immédiate. Les travaux de construction ont impliqué 14 entreprises, dont plus de la moitié basées en Andalousie, induisant 800 emplois directs et indirects. L’afflux de main-d’œuvre, le recours à des fournisseurs locaux et la maintenance de l’installation à long terme contribuent à la vitalité économique de la région.
En outre, Séville et ses environs bénéficient indirectement des revenus complémentaires liés à l’ingénierie, la logistique, la restauration ou encore l’hébergement temporaire des équipes. Cette effervescence favorise la diversification du tissu économique local, souvent dépendant d’autres secteurs traditionnels. À plus long terme, la réputation de l’Andalousie en tant que pôle majeur de l’énergie solaire peut attirer de nouveaux projets, dans une spirale vertueuse d’innovations et d’investissements.
Au-delà du strict registre financier, ce type de grand projet vert favorise aussi une prise de conscience environnementale plus forte au sein des populations locales. Par l’effet de vitrine et la médiatisation, la société civile peut s’intéresser davantage à l’énergie solaire, initiant des opportunités de formations ou de reconversions professionnelles vers les métiers des renouvelables.
Chiffres clés à retenir
• 263 MW de puissance installée
• 515 GWh de production annuelle
• Plus de 150 000 foyers alimentés
• 245 000 tonnes de CO2 évitées chaque année
• 14 entreprises mobilisées et 800 emplois créés
La réussite de ce chantier témoigne également de la capacité d’une région, historiquement tournée vers l’agriculture et le tourisme, à saisir les opportunités de la transition énergétique. L’Espagne, et plus particulièrement l’Andalousie, devient un foyer d’innovations vertes où l’on expérimente de nouvelles approches pour concilier croissance économique et préservation de l’environnement.
L’histoire de TotalEnergies : de la major pétrolière à la multi-énergies
Si TotalEnergies est née au début du XXe siècle comme une compagnie pétrolière (alors dénommée Total), l’entreprise a progressivement élargi son portefeuille au fil des décennies. Elle s’est intéressée au gaz naturel, avant de s’orienter résolument vers le secteur électrique et les énergies bas carbone au cours des dernières années. Le changement de nom en 2021 marque la volonté de signifier cette transformation profonde, tout en soulignant sa détermination à peser dans la transition énergétique.
Cette mutation s’inscrit dans un contexte global où les compagnies historiques de l’« or noir » affrontent des défis croissants : volatilité des cours, pression environnementale et nécessité de décarboner. TotalEnergies ambitionne ainsi de se positionner comme un acteur majeur de la production d’électricité verte à l’échelle internationale. Le groupe investit également dans des infrastructures gaz-flexibles (CCGT) et explore les perspectives du biogaz et de l’hydrogène bas carbone.
Les projets solaires en Europe, comme celui près de Séville, s’ajoutent à un portefeuille plus large qui inclut aussi l’éolien terrestre et offshore. Cette diversification s’aligne sur les objectifs du Pacte vert pour l’Europe et sur la stratégie française de neutralité carbone d’ici 2050. Toutefois, le chemin est encore long, et la concurrence est vive dans le secteur des énergies renouvelables, puisque de nombreux groupes internationaux multiplient les acquisitions et projets.
Selon l’Agence internationale de l’énergie, les énergies renouvelables devraient représenter près de 90 % de l’augmentation de la production d’électricité mondiale d’ici 2025. L’Europe se fixe des objectifs ambitieux, misant sur le déploiement massif du solaire et de l’éolien pour réduire drastiquement les émissions de gaz à effet de serre.
Le virage pris par TotalEnergies est emblématique d’une époque. Il illustre la volonté des majors pétro-gazières de s’adapter à une demande d’énergie plus verte, tout en capitalisant sur leur puissance financière et leur savoir-faire en matière d’exploitation de projets industriels d’envergure.
Les ambitions de TotalEnergies dans l’électricité bas carbone
Au 31 mars 2025, TotalEnergies disposait de 28 GW de capacité brute de production d’électricité renouvelable à travers le monde. L’entreprise s’est fixé un objectif d’atteindre 35 GW à la fin de l’année 2025, avec une vision à plus long terme visant une production nette d’électricité de plus de 100 TWh d’ici 2030. Pour y parvenir, elle développe un modèle d’affaires complet :
- Production renouvelable : solaire, éolien terrestre et offshore.
- Actifs flexibles : centrales à cycle combiné gaz (CCGT) et solutions de stockage.
- Commercialisation : fourniture d’électricité bas carbone à des clients particuliers, professionnels et industriels, notamment via des PPAs.
En Espagne, le groupe s’impose déjà comme 4e fournisseur d’électricité et de gaz, fort de plus de 2 millions de clients et 1 700 collaborateurs. Cette implantation ne fait que croître, TotalEnergies misant sur la complémentarité entre énergies renouvelables intermittentes et unités de production flexible. L’objectif est de proposer une énergie bas carbone accessible 24h/24, pour rivaliser avec les grands énergéticiens historiques.
Le saviez-vous ?
Le CCGT, ou centrale à cycle combiné gaz, améliore considérablement l’efficacité de la production électrique. Ce type de centrale utilise simultanément une turbine à gaz et une turbine à vapeur, permettant de valoriser la chaleur résiduelle et d’atteindre un rendement supérieur à celui d’une simple turbine à gaz.
En parallèle, la société continue d’explorer le potentiel de l’hydrogène bas carbone et du biogaz, qui pourraient venir compléter le bouquet énergétique futur. L’élargissement rapide des capacités de stockage, via des batteries et d’autres technologies, figure également au cœur de la stratégie de l’entreprise pour pallier l’intermittence des sources renouvelables.
Regards d’analystes sur les enjeux juridiques et réglementaires
L’engouement pour le solaire ne saurait occulter les défis réglementaires auxquels font face les producteurs d’énergie en Europe. Les procédures de raccordement au réseau, l’obtention des permis, la gestion de l’impact sur l’environnement ou encore la coexistence avec l’agriculture et la biodiversité restent des problématiques de premier ordre. Certains projets photovoltaïques se heurtent à la contestation locale, portant sur l’occupation des terres ou la protection des habitats naturels.
Dans le cas de la nouvelle infrastructure près de Séville, la déclaration d’intérêt stratégique a permis de fluidifier les processus, mais cela implique aussi un contrôle attentif des autorités sur le respect des normes environnementales et sur la bonne intégration paysagère des sites. Par ailleurs, l’Espagne a mis en place des mesures spécifiques pour sécuriser les investissements étrangers, offrant un cadre plus stable que dans d’autres juridictions européennes.
D’un point de vue juridique, le développement d’un champ solaire de 263 MW soulève nécessairement des questions sur les contrats d’approvisionnement, les assurances requises, les obligations en termes de recyclage des panneaux en fin de vie et la maintenance à long terme. Les analyses de cabinets spécialisés en droit de l’énergie insistent sur l’importance de maîtriser toutes ces dimensions, sous peine d’exposer le projet à des risques de contentieux ou de surcoûts imprévus.
Sur le plan européen, les directives successives encouragent l’harmonisation des standards de construction et de connexion au réseau pour faciliter les échanges transfrontaliers. Cependant, chaque État membre conserve une marge de manœuvre pour adapter les règles selon son contexte. L’Espagne mise clairement sur la simplification, ce qui explique en partie son succès rapide dans la mise en place de grandes fermes solaires.
Pourquoi l’Espagne attire tant d’investisseurs ?
Au-delà de son rayonnement solaire exceptionnel, l’Espagne propose un cadre réglementaire favorable aux initiatives vertes, une main-d’œuvre qualifiée et des infrastructures de transport d’électricité modernisées. Les régions comme l’Andalousie soutiennent activement la croissance du photovoltaïque, ce qui renforce l’attractivité pour les capitaux étrangers.
Pour les observateurs du marché, l’initiative de TotalEnergies à Séville symbolise la montée en puissance de l’Espagne comme porte d’entrée stratégique vers le marché européen de l’énergie solaire. Elle illustre également la vitalité d’un secteur où l’innovation technologique (panneaux bifaciaux, trackers) se conjugue à l’innovation financière (PPAs, partenariats public-privé) dans un environnement juridique de plus en plus adapté.
Perspectives à long terme pour la transition énergétique européenne
En inaugurant cette installation de 263 MW, TotalEnergies souligne la portée de sa mission : fournir une électricité bas carbone à grande échelle, tout en soutenant l’économie locale. L’Espagne, de son côté, consolide sa réputation de chef de file du solaire. À mesure que les projets se multiplient, la question cruciale devient celle de la stabilité du réseau et de la capacité à gérer l’intermittence. D’où l’intérêt d’investir dans des centrales à cycle combiné gaz et des solutions de stockage.
L’Europe, dans son ensemble, vise la neutralité climatique d’ici 2050, et de nombreux plans nationaux ciblent déjà des paliers intermédiaires, notamment celui des 80 % d’énergies renouvelables pour la production d’électricité en Espagne d’ici 2030. Les nouveaux records de puissance installée ou de production solaire sont régulièrement battus, signe de l’accélération du mouvement. Les institutions financières, quant à elles, allouent des capitaux croissants aux énergies vertes, renforçant la viabilité de ces projets sur le long terme.
Les retombées de cette dynamique ne se limitent pas à la production d’électricité. Elles s’étendent aux industries connexes, tels que la construction de panneaux, la recherche sur les systèmes de stockage ou le développement de logiciels de pilotage pour optimiser l’injection d’électricité sur le réseau. La chaîne de valeur se consolide autour de ces projets d’envergure, favorisant la création d’emplois qualifiés et la compétitivité européenne dans les technologies vertes.
En définitive, l’inauguration du plus grand champ solaire de TotalEnergies en Europe symbolise l’évolution rapide de l’industrie énergétique, entre ambitions environnementales, innovations technologiques et impulsions économiques de grande ampleur.