Les amateurs de gros électroménager reconditionné ont de quoi se réjouir : la jeune pousse nantaise Underdog vient d’annoncer une levée de fonds d’un montant de 7 millions d’euros, soutenue notamment par BNP Paribas et Serena. Selon l’annonce de l’entreprise, cette injection de capital permettra d’accélérer son développement industriel et d’ancrer durablement le marché du reconditionné dans le quotidien des consommateurs français.

Quand l’électroménager se réinvente pour un usage plus durable

L’électroménager est souvent associé à une consommation linéaire : on achète un appareil neuf, on l’utilise, puis on le jette quand il est défaillant. Pourtant, le contexte économique et environnemental actuel invite à repenser cette logique. Ainsi, des acteurs comme Underdog s’emploient à prolonger la durée de vie de nos équipements grâce au reconditionnement.

Le concept de reconditionné dans l’électroménager est encore méconnu de certains consommateurs, alors qu’il est déjà répandu dans d’autres secteurs (smartphones, ordinateurs, etc.). L’ambition d’Underdog : valoriser des appareils usagés pour leur redonner une seconde jeunesse, et proposer ainsi une alternative concrète au neuf. Avec son premier atelier de 1 000 m² à Nantes, la start-up s’est vite imposée comme un acteur à suivre. Elle s’attaque désormais à l’étape suivante de son plan de croissance : industrialiser le reconditionnement et encourager les Français à adopter cet usage responsable.

Cette nouvelle levée de 7 millions d’euros traduit une véritable confiance des investisseurs dans le potentiel de ce secteur. Non seulement l’initiative répond à des enjeux environnementaux pressants, mais elle offre également un modèle économique viable, avec l’apparition d’une chaîne de valeur dédiée à la « deuxième vie » du gros électroménager. Pour les consommateurs, c’est la possibilité de réaliser des économies tout en réduisant leur impact carbone. Pour l’écosystème industriel, c’est l’occasion de créer de nouveaux emplois et de revitaliser des savoir-faire locaux.

Le reconditionnement consiste à remettre en état de fonctionnement un produit (smartphone, lave-linge, etc.) en remplaçant les pièces défectueuses et en vérifiant qu’il respecte des critères de qualité élevés. À la différence de l’occasion classique, les équipements reconditionnés sont censés répondre à des normes contrôlées, assurant un meilleur niveau de performance et de fiabilité.

Mais pourquoi parier autant d’argent sur cette filière ? Les entreprises misent notamment sur l’évolution des comportements d’achat en France : la population est plus sensible que jamais à la réduction des déchets et au budget familial. Les ménages voient dans le reconditionné une solution pour accéder à de grands appareils (lave-linge, sèche-linge, réfrigérateur, etc.) à un prix avantageux, tout en faisant un geste pour la planète. De plus, la hausse du coût de l’énergie encourage une consommation plus rationnelle.

L’histoire d’Underdog : un trio féminin et une vision audacieuse

Pour mieux comprendre la dynamique d’Underdog, il faut revenir à sa genèse. Fondée en 2022 par Claire Bretton, Laura Chavigny et Léa de Fierkowsky, la start-up a posé rapidement ses valises à Nantes. Le choix de cette ville n’est pas anodin : la métropole nantaise est reconnue pour son écosystème entrepreneurial dynamique et son attractivité pour les projets innovants, en particulier ceux à impact environnemental.

En moins de deux ans, Underdog s’est forgé une solide réputation. Son atelier de 1 000 m² fonctionne déjà à un rythme industriel, permettant de traiter un volume croissant de lave-linges, lave-vaisselles ou encore sèche-linges. L’ambition de l’entreprise est claire : faire du reconditionné la norme, et non plus une exception ou un marché de niche.

Au-delà de la performance technique, la jeune pousse met l’accent sur la qualité du service et l’accompagnement du consommateur. L’objectif : lever les doutes quant à la fiabilité du reconditionné. Grâce à un processus de vérification rigoureux, Underdog entend prouver que durabilité et satisfaction client peuvent aller de pair. La confiance instaurée dès les premières ventes a d’ailleurs favorisé l’arrivée d’investisseurs majeurs, séduits par la dimension circulaire du projet et la capacité de l’équipe fondatrice à faire bouger les lignes.

Bon à savoir : la différence entre seconde main et reconditionné

Seconde main implique que le produit est revendu tel quel, avec son état d’usure. Reconditionné signifie qu’un spécialiste a vérifié, testé et, si nécessaire, remplacé certaines pièces. Le consommateur bénéficie donc d’un appareil en meilleur état, assorti souvent d’une garantie supplémentaire.

Un tour de table stratégique pour un déploiement industriel massif

Le potentiel d’Underdog ne s’est pas démenti depuis son amorçage à 3,8 millions d’euros. Aujourd’hui, la start-up boucle une série A de 7 millions d’euros, un cap crucial dans la vie d’une jeune entreprise. Parmi les investisseurs, on retrouve des acteurs qui avaient déjà misé sur le projet (Daphni, Sistafund, Tivoli, Founders Future) et de nouveaux noms prestigieux (BNP Paribas, Serena). Cette combinaison de partenaires traduit une volonté d’unir différents types de compétences et de réseaux, afin de soutenir la croissance exponentielle de la société.

Dans le détail, la manne financière servira à intensifier la production et à optimiser la chaîne logistique, du diagnostic des appareils usagés jusqu’à leur remise en service. Underdog prévoit, d’ici fin 2025, de doubler la capacité de son atelier nantais, pour atteindre 1 500 appareils reconditionnés par mois. À plus long terme, trois nouveaux sites industriels devraient voir le jour en France avant 2027, permettant de viser 6 000 appareils reconditionnés par mois — soit plus de 70 000 appareils par an.

Un autre enjeu majeur de cette expansion réside dans la création d’emplois. L’entreprise table sur la formation de 200 techniciens spécialisés, renforçant ainsi l’écosystème industriel français. Cette main-d’œuvre hautement qualifiée contribuera à professionnaliser davantage la filière, en imposant des critères de qualité, de traçabilité et de durabilité stricts. Au-delà de l’essor économique, Underdog souhaite jouer un rôle dans l’émergence d’un nouveau modèle industriel basé sur la valorisation des produits existants.

La création de sites de reconditionnement engendre une demande de compétences variées : diagnostics techniques, réparation d’appareils, gestion logistique et qualité. Cette nouvelle industrie dynamique est susceptible de redonner vie à des bassins d’emploi en quête de projets durables et innovants, d’autant plus que la demande pour le reconditionné est en forte progression.

Un marché français en pleine mutation

Selon un sondage OpinionWay réalisé en septembre 2024 pour le réseau Envie, 66 % des Français auraient déjà acheté un produit d’occasion ou reconditionné afin de réduire leurs dépenses. Cette tendance est également poussée par l’instabilité du pouvoir d’achat et par une volonté grandissante de consommer autrement. Les grandes enseignes sont de plus en plus enclines à proposer des rayons dédiés au reconditionné, tout comme les plateformes en ligne s’en emparent pour toucher un public soucieux de son budget et de l’environnement.

Dans le gros électroménager, les marges de progression sont énormes. Les chiffres du cabinet Xerfi en 2022 estimaient à 5 % la pénétration du reconditionné dans ce secteur. Un pourcentage qui paraît faible, mais qui s’avère déjà prometteur dans un domaine historiquement dominé par les appareils neufs. On estime, par ailleurs, que 10 millions d’appareils électroménagers sont jetés chaque année dans l’Hexagone, pour un taux de reconditionnement inférieur à 3 %. Les spécialistes du secteur tablent sur une forte croissance dans les années à venir, la revalorisation des déchets électroménagers s’inscrivant parfaitement dans les politiques publiques de réduction des déchets et de lutte contre l’obsolescence programmée.

Bon à savoir : le cadre législatif français

La loi AGEC (Anti-Gaspillage pour une Économie Circulaire), adoptée en 2020, vise à encourager la réutilisation et la réparation. Parmi les mesures phares, on trouve l’instauration d’un indice de réparabilité pour certains produits, la fin progressive de la mise à disposition de certains plastiques à usage unique, ou encore le renforcement des filières Responsabilité Élargie des Producteurs (REP).

De plus, la montée en puissance du « réflexe écologique » parmi les consommateurs offre un terrain favorable à l’essor de start-up comme Underdog. À travers la sensibilisation au recyclage et la prise de conscience de l’impact environnemental, le public se montre réceptif à ces alternatives. L’entreprise nantaise capitalise donc sur un double moteur : la compétitivité prix et l’impératif écologique.

Une ambition verte : réduire le gaspillage et les émissions de CO₂

Le chantier ne se limite pas à offrir une seconde vie aux appareils : Underdog veut transformer radicalement la manière de produire et de consommer de l’électroménager. Pour l’entreprise, le reconditionné n’est pas seulement une activité économique rentable : c’est un levier puissant pour limiter l’extraction de ressources et la génération de déchets.

Chaque année, la France génère des millions de tonnes de déchets électroménagers. Or, la fabrication d’un appareil neuf implique l’utilisation de matières premières (métaux, plastiques, composants électroniques) et engendre un bilan carbone élevé. Grâce au reconditionnement, on prolonge le cycle de vie du produit en évitant la production d’un nouvel équipement, ce qui se traduit par une économie de ressources et une baisse significative des émissions de gaz à effet de serre.

D’ici 2029, Underdog anticipe la préservation de 620 000 tonnes de ressources naturelles et l’éviction de 97 000 tonnes de CO₂. Cet objectif, bien sûr, dépend de la capacité de la société à développer son maillage industriel et à convaincre un nombre croissant de ménages de passer au reconditionné. Mais les tendances actuelles du marché laissent augurer d’un potentiel de croissance conséquent, soutenu par une prise de conscience collective et par des politiques nationales incitant à la réduction du gaspillage.

Le reconditionnement épargne l’utilisation de matières premières, dont l’extraction et la transformation sont fortement émissives en carbone. De plus, il diminue la pollution liée à l’enfouissement ou à l’incinération des appareils en fin de vie, en revalorisant les composants encore exploitables.

Cette dimension verte est d’ailleurs au cœur du discours des fondatrices d’Underdog. Dans leurs prises de parole, elles insistent sur la nécessité d’allier rentabilité et responsabilité, soulignant que l’industrie peut et doit opérer sa mue. Alors que certains acteurs traditionnels restent frileux à l’idée de revoir leurs chaînes de production, Underdog se positionne comme un catalyseur de changement, démontrant la faisabilité d’une économie circulaire à grande échelle.

Comprendre le fonctionnement de l’atelier nantais

L’atelier de 1 000 m² à Nantes, véritable noyau opérationnel d’Underdog, illustre parfaitement la logique de l’entreprise. Chaque appareil réceptionné suit un parcours en plusieurs étapes :

  • Diagnostiquer : identification des pannes ou dysfonctionnements éventuels.
  • Réparer : remplacement des pièces usées et tests de performance.
  • Nettoyer : remise à neuf des surfaces extérieures et intérieures.
  • Contrôler : vérification finale de la conformité et de la sécurité.

À l’issue de ce processus, un appareil jugé « en fin de vie » peut retrouver une fiabilité et une qualité d’usage proches du neuf, pour un coût global inférieur. De plus, Underdog propose généralement une garantie, gage de sérieux pour des consommateurs parfois hésitants à acheter un produit reconditionné. La personnalisation du service est également un atout : l’équipe sait répondre aux interrogations techniques et guider dans le choix du bon équipement selon la taille de la famille, la fréquence d’utilisation, etc.

Le savoir-faire technique se double d’une solide organisation logistique. L’entreprise doit, en effet, gérer des flux d’appareils en provenance de divers canaux : particuliers, points de collecte, retours de grandes surfaces, etc. Cette maîtrise de la supply chain est cruciale pour optimiser les coûts et les délais de remise en état. Au fur et à mesure de sa montée en puissance, Underdog investit donc dans des outils de suivi informatique et de traçabilité, afin de localiser chaque appareil et d’automatiser certaines étapes (par exemple, la commande de pièces détachées). L’atelier s’inscrit ainsi dans une vision résolument industrielle et scalable.

Un soutien financier au service de l’innovation et de la pédagogie

La levée de 7 millions d’euros ne se limitera pas à la seule expansion géographique. Underdog entend également consacrer une part de l’investissement à la recherche et au développement, pour améliorer ses process et maintenir un haut niveau d’expertise. Tester de nouveaux protocoles de réparation, développer des diagnostics à distance, innover sur la détection de pannes électroniques : autant de pistes qui, à terme, permettront de faire baisser les coûts et d’offrir une prestation plus rapide.

Parallèlement, la start-up veut sensibiliser le grand public à la valeur du reconditionné. L’enjeu est de taille : briser certaines réticences face à des appareils jugés moins fiables que le neuf. Underdog pourrait par exemple investir dans des campagnes d’information, mener des opérations de communication sur les réseaux sociaux, ou encore forger des partenariats avec des distributeurs engagés. La pédagogie occupe une place de plus en plus grande dans la stratégie de croissance, car une clientèle bien informée est plus susceptible d’adopter durablement le réflexe reconditionné.

D’autres chantiers pourraient voir le jour, comme la diversification des gammes de produits (fours, réfrigérateurs, plaques de cuisson…) ou le développement d’une offre de maintenance périodique. La volonté affichée est de créer un éco-système complet, où la notion de « cycle de vie » prime sur celle de simple transaction. Grâce à un service après-vente adapté et à un suivi personnalisé, l’entreprise espère fidéliser une clientèle consciente des enjeux environnementaux, mais aussi exigeante en termes de fiabilité.

Les perspectives du marché du reconditionné en France

Le marché du reconditionné s’inscrit dans une dynamique plus large d’économie circulaire, promue par les pouvoirs publics et encouragée par les consommateurs. La France, à travers diverses initiatives législatives et incitatives, a pris acte de l’urgence environnementale. Les start-up qui s’engagent dans ce secteur bénéficient d’ailleurs d’un soutien grandissant : dispositifs d’aide financière, mise en place de label « Répar’acteurs », soutien des collectivités, etc.

Néanmoins, certaines interrogations subsistent. Les consommateurs craignent parfois l’absence de garanties comparables à celles d’un produit neuf. Par ailleurs, la concurrence pourrait s’intensifier si de grands groupes décident de lancer leur propre ligne de reconditionnement. C’est pourquoi les entreprises spécialisées doivent veiller à professionnaliser leurs processus, en adoptant des normes techniques et des standards de qualité reconnus.

Chez Underdog, on anticipe déjà ces défis. En misant sur l’innovation technologique et la formation continue des équipes, la start-up veut se distinguer sur la fiabilité des appareils qu’elle commercialise. Le but est de hisser le reconditionné au même rang que le neuf en termes de durée de vie, tout en conservant l’atout prix. Cette démarche demande un investissement soutenu, d’où la nécessité de mobiliser des fonds pour financer les différentes phases de la montée en puissance.

Zoom sur la concurrence et l’écosystème industriel

Le secteur du reconditionnement d’appareils électroménagers est encore relativement émergent, ce qui ouvre un champ d’opportunités pour les nouveaux entrants. Certains recycleurs ou réparateurs traditionnels pourraient voir l’essor de cette filière comme une concurrence, tandis que d’autres y verront une chance de collaboration. Les groupes historiques d’électroménager, quant à eux, suivent avec attention ces évolutions. Ils pourraient soit développer leurs propres solutions, soit conclure des partenariats avec des acteurs déjà installés pour capter cette part de marché en expansion.

C’est dans ce contexte que Underdog doit consolider sa proposition de valeur. Se positionner sur la formation de techniciens spécialisés, maîtriser toutes les étapes de la supply chain et proposer un service irréprochable constituent des piliers stratégiques. À moyen terme, la start-up devra également se confronter à la question de l’échelle : comment reproduire le modèle nantais dans d’autres régions sans perdre en qualité ? Comment standardiser le process tout en conservant une flexibilité vis-à-vis des spécificités locales ? Des obstacles de taille, mais qui sont aussi synonymes de croissance.

Cette expansion va de pair avec une réflexion sur la montée en compétences. À l’heure actuelle, le manque de techniciens formés à la réparation de gros électroménager est un frein, mais aussi une belle opportunité de créer de nouveaux métiers. En collaborant avec des centres de formation et des organismes publics, Underdog pourrait générer un réservoir de talents et participer à la structuration d’une filière. Les 200 postes annoncés dans la foulée de cette levée de fonds viennent conforter l’idée qu’il y a un vrai pari sur le capital humain.

A la conquête de nouveaux standards de consommation responsable

L’essor de start-up comme Underdog démontre qu’il est possible de marier rentabilité et impact positif, et d’en faire un argument de développement. À une époque où la conscience écologique se renforce, la perspective de reconditionner au lieu de produire du neuf prend tout son sens. Alors qu’ils étaient peu visibles il y a quelques années, les acteurs du reconditionné bénéficient désormais d’une médiatisation accrue et d’une demande croissante. Les consommateurs prennent goût à l’idée de donner une seconde vie à leurs produits, tout en allégeant leur facture.

Certes, la route est encore longue pour que le reconditionné s’impose comme une évidence dans le gros électroménager. Mais les engagements financiers consentis par des investisseurs institutionnels et privés traduisent une tendance de fond. L’industrie française, en pleine mutation, a besoin d’innovations concrètes pour réduire son empreinte et créer de la valeur autrement. Les plans d’expansion d’Underdog, de même que la collaboration avec divers partenaires, suggèrent que la jeune pousse a toutes les cartes en main pour gagner son pari.

Le discours porté par les fondatrices, associant pragmatisme économique et sensibilité écologique, résonne auprès d’un public large. Au-delà d’Underdog, c’est tout un écosystème de PME, de start-up et d’associations qui se trouve dynamisé par cette approche circulaire. Les pouvoirs publics y voient un levier pour atteindre leurs objectifs de réduction des déchets, tandis que les collectivités locales y trouvent une opportunité de revitalisation économique. Le succès du modèle nantais devrait donc servir de référence et favoriser l’émergence d’acteurs semblables sur le territoire français.

Le parcours d’Underdog illustre avec force la montée du reconditionné dans l’électroménager, preuve que performance industrielle et engagement écologique peuvent façonner un nouveau visage de la consommation en France.