BOOSTHEAT mobilise 125 K€ : un nouveau souffle pour son compresseur thermique breveté
L’industriel lyonnais finance audits et démonstrateurs via 125 K€ d’OCEANE, amorçant une stratégie pour mettre en marché son compresseur thermique breveté.

Le 27 juin 2025, BOOSTHEAT vient de mobiliser 125 000 € en obligations convertibles (OCEANE) auprès d’Impact Tech Turnaround Opportunities (ITTO), la première tranche d’un programme signé le 6 novembre 2024. En dépit du faible montant facial, l’opération compte dans la stratégie de l’énergéticien lyonnais, qui réajuste son cap depuis l’arrivée d’un nouveau directeur général.
Cap sur une levée de fonds ciblée
En tirant 25 OCEANE d’une valeur nominale unitaire de 5 000 €, BOOSTHEAT sécurise immédiatement la trésorerie nécessaire pour finaliser son plan d’action à court terme. L’accord prévoit des tirages successifs, chaque tranche étant souscrite puis arbitré sur le marché par ITTO, investisseur « turnaround » spécialisé dans les situations de redéploiement industriel.
Le choix d’instruments hybrides, mi‑obligation, mi‑action, offre à la société une solution de financement « au fil de l’eau » : les actions issues des conversions sont revendues progressivement, évitant une dilution frontale mais imposant une pression baissière persistante sur le cours.
Bon à savoir : qu’est‑ce qu’une OCEANE ?
OCEANE signifie « Obligation Convertible ou Échangeable en Actions Nouvelles ou Existantes ». Elle verse un coupon faible, mais son détenteur peut la transformer en actions à un prix préférentiel. Les sociétés en croissance l’utilisent pour lever des fonds sans fixer immédiatement la valeur d’émission des titres, au prix d’une dilution future pour les actionnaires historiques.
Des effets de dilution mesurables
Selon la conversion théorique fondée sur le dernier cours coté, la tranche tirée pourrait engendrer 94 123 228 actions nouvelles. Ainsi, l’investisseur qui détenait 1 % du capital avant l’émission verrait sa quote‑part ramenée à 0,91 % une fois l’intégralité de cette tranche convertie.
La dilution Δ% se calcule par :
Δ% = (Nouveaux titres / (Anciennes actions + Nouveaux titres)) × 100.
Exemple : si BOOSTHEAT comptait 10 M d’actions avant l’opération et en crée 94,1 M supplémentaires, la base devient 104,1 M. La part d’un actionnaire de 100 000 titres passe de 1 % à ≈ 0,096 %.
En cumulant les financements dilutifs déjà contractés depuis 2021 (ORA puis OCEANE), la société a levé 8,82 M € et créé 2,447 milliards d’actions. Il subsiste un potentiel de 967,48 millions de titres supplémentaires, ramenant la part d’un actionnaire « 1 % » d’origine à seulement 0,359 %.
Feuille de route sous l’impulsion d’un nouveau capitaine
Le conseil d’administration a confié, en janvier 2025, les rênes opérationnelles à un nouveau directeur général, ingénieur passé par les mondes du HVAC et des cleantech. Son mandat : concentrer les ressources sur la valorisation du compresseur thermique breveté de BOOSTHEAT et sourcer des partenaires OEM plutôt que d’industrialiser seul tout un appareil de chauffage hybride.
La levée de fonds de 125 K €, modeste à l’échelle d’un industriel, constitue donc un jalon : elle finance les audits techniques, la normalisation CE renforcée et la participation à plusieurs démonstrateurs pilotes attendus à l’automne 2025. L’équipe estime que chaque tranche équivalente garantit environ trois mois de visibilité sur les dépenses d’ingénierie et de propriété intellectuelle.
Le pari du management
Pivot technologique : plutôt qu’un produit fini (chaudière), BOOSTHEAT veut vendre un « cœur énergétique » intégrable dans des pompes à chaleur ou des process industriels.
Marché visé : acteurs du retrofit CVC, fabricants de séchoirs, data centers et industriels intensifs en chaleur basse température.
Critère clé : preuve de durabilité > 20 000 cycles.
Retour sur les financements antérieurs
En mai 2021, BOOSTHEAT recourt pour la première fois aux ORA (obligations remboursables en actions) pour 5 M €. Deux ans plus tard, l’entreprise adopte un schéma OCEANE/BSAR de 3,82 M € avec le même investisseur. Ces outils visent à éviter une suspension de paiement tout en maintenant la cotation sur Euronext Growth, source essentielle de liquidité pour les actionnaires et de visibilité auprès des partenaires industriels.
21 mai 2021 : émission d’ORA (5 M €).
02 décembre 2024 : création d’un programme OCEANE échelonné (3,82 M €).
27 juin 2025 : tirage de la tranche T6 (125 K €).
Total levé : 8,82 M € ; Actions créées : 2,447 Md.
Si cette mécanique permet d’éviter une levée de fonds conventionnelle (plus coûteuse dans le contexte actuel de taux élevés et de performance boursière volatile), elle place néanmoins l’entreprise sous la surveillance renforcée du régulateur et attire un profil d’investisseur très court‑terme, prêt à arbitrer rapidement ses conversions.
Mobilisation des investisseurs et impacts boursiers
Le mode opératoire d’ITTO consiste à revendre sur le marché les actions issues des conversions dès qu’elles sont livrées, créant un afflux technique d’offre susceptible de peser sur la valorisation. Le communiqué précise d’ailleurs que l’investisseur « n’a pas vocation à conserver les titres ».
À la date du tirage, le titre ALBOO s’échange autour de 0,0014 € selon Euronext — un cours « penny » qui exacerbe l’effet multiplicateur de chaque million d’actions injecté. Néanmoins, le flottant important peut également faciliter l’entrée d’investisseurs spéculatifs susceptibles de soutenir ponctuellement la demande.
Rappel de l’avertissement AMF
Les opérations de financement par OC/ORA successives exposent les investisseurs à :
• Risque de dilution élevée
• Volatilité accentuée du cours
• Incertitude sur la liquidité future
L’Autorité des marchés rappelle que ces instruments doivent être réservés aux sociétés n’ayant pas d’alternative de crédit classique et conseille la vigilance aux porteurs.
BOOSTHEAT en bref
Née en 2011 à Vénissieux, BOOSTHEAT développe un compresseur thermique à absorption gaz/électricité couplé à un échangeur haute performance. Sept familles de brevets protègent la cinématique interne ainsi que l’optimisation des cycles de compression. En 2019, l’entreprise avait lancé une chaudière hybride 20 kW finalement retirée faute de fiabilité industrielle. Son recentrage sur le « compresseur moteur » reflète une logique de licencing plus agile et potentiellement moins capitalistique.
Au‑delà du résidentiel, la technologie vise la chaleur basse température (60‑160 °C), segment représentant 50 % de la consommation énergétique industrielle française. Les partenaires ciblés incluent les fabricants de séchoirs papetiers ou de fours de cuisson alimentaire, très dépendants du gaz naturel.
Perspectives énergétiques et marché français
Le gouvernement prévoit un doublement du rythme de rénovation thermique d’ici 2030 et consacre 4 Md € par an au fonds chaleur de l’Ademe. Dans ce contexte, une solution qui réduit de 20‑30 % la consommation d’énergie primaire des équipements existants correspond aux besoins du marché. Toutefois, la concurrence s’organise : les pompes à chaleur air/eau haute température de nouvelle génération (≥75 °C) ou les micro‑turbines ORC offrent déjà des gains équivalents.
L’avantage comparatif de BOOSTHEAT réside dans son hybridation gaz/électricité, pertinente lorsque l’électricité est carbonée ou chère aux heures de pointe. Le modèle économique licencing + redevances permettrait d’atteindre la rentabilité sans lourde CAPEX industrielle, à condition de conclure, avant fin 2026, au moins un accord cadre avec un intégrateur européen.
Une trajectoire à consolider
La levée de 125 K € n’est qu’une étape. Pour convaincre les investisseurs de long terme, BOOSTHEAT devra :
- Valider la fiabilité du compresseur sur banc d’essai 10 000 h.
- Réduire sa consommation de cash mensuelle (cash burn) en dessous de 150 K € via des partenariats.
- Publier, au plus tard en mars 2026, un carnet de commandes ou de proof‑of‑concepts industriels.
- Clarifier la stratégie de couverture du risque de dilution pour les anciens actionnaires, peut‑être via un regroupement de titres (reverse stock‑split) une fois la phase dilutive achevée.
À travers ce financement ciblé, BOOSTHEAT joue une course d’endurance : transformer une innovation prometteuse en avantage compétitif, sans se laisser submerger par la mécanique dilutive qu’elle mobilise pour survivre.