Face à la domination des géants du numérique, à la diffusion de contenus haineux et à la désinformation en ligne, l'Union européenne a franchi un pas décisif en adoptant deux règlements majeurs : le DSA et DMA. Le Digital Markets Act (DMA) est en vigueur depuis le 2 mai 2023 et le Digital Services Act (DSA) depuis le 25 août 2023. Ces règlements européens proposent des nouvelles règles très strictes que les plateformes doivent respecter. L'objectif des DSA et DMA ? Instaurer un environnement numérique plus équitable, transparent et sécurisé pour tous les utilisateurs en Europe. 

DSA, DMA : quels sont les enjeux ? 

Actuellement, l'Union européenne compte plus de 10 000 plateformes numériques. Cependant, ce vaste paysage est déséquilibré. En effet, seule une petite portion, principalement les géants comme les GAFAM (Google, Apple, Facebook, Amazon et Microsoft), concentre la majeure partie des bénéfices. Ce déséquilibre pose trois grands défis :

  • La concurrence loyale ;
  • Le manque d'innovation ;
  • Et des choix limités pour les consommateurs.

Dans ce contexte, l'Union européenne a lancé deux dispositifs. Le DMA cible les grandes plateformes, cherchant à limiter leur pouvoir monopolistique. Il encourage ainsi une concurrence plus saine et vise à rétablir l’équité.

Le DSA, quant à lui, vise à rendre Internet plus sûr. Il oblige les plateformes à être plus transparentes et responsables de leurs contenus. Pour le dire simplement, le DSA a pour objectif de renforcer les sanctions contre les comportements abusifs en ligne en attribuant une responsabilité directe aux GAFAM. Par conséquent, en cas de discours haineux, par exemple, les réseaux sociaux ne pourront plus se retrancher derrière l'argument selon lequel ils ne sont « que des intermédiaires ». Ces géants du web vont donc devoir revoir le fonctionnement de leurs plateformes.

Règlement DMA : un garde-fou contre la domination des géants numériques

Le Digital Markets Act (DMA) se confronte directement aux géants comme les GAFAM ainsi qu’au géant chinois ByteDance. Ces mastodontes du numérique, de part leur envergure et leur influence, sont souvent critiqués. Les accusations ? Monopole, abus de position dominante, et entrave à la concurrence.

L'objectif du DMA est clair : rééquilibrer le marché. Il instaure des règles précises pour briser le monopole des « contrôleurs d'accès ». Ces règles visent à empêcher que ces grandes entités profitent de façon déloyale de leur puissance. En brisant ces monopoles, le DMA veut dynamiser le marché. Il aspire à stimuler l'innovation et à diversifier les choix pour les consommateurs. De plus, il ouvre la porte à de nouvelles entreprises, leur permettant de se développer et d’entrer en concurrence sur un pied d'égalité.

 

Bon à savoir

Le DMA vise explicitement les grandes entreprises technologiques telles que :

  • Alphabet (Google, Android, Maps) ;
  • Amazon ; 
  • Apple ; 
  • Bytedance (TikTok) ; 
  • Meta (Facebook, Instagram, WhatsApp) ;
  • et Microsoft.

Règlement DSA : vers un internet plus sûr

Le Digital Services Act (DSA) représente une tentative ambitieuse de nettoyer l'espace numérique. Il s'attaque aux contenus illicites (haine, pédopornographie, terrorisme…) et produits illégaux (produits dangereux, contrefaçons…) diffusés en ligne. Ce règlement impose aux plateformes numériques des obligations accrues pour assurer la sécurité de leurs utilisateurs. Le principe du DSA est clair : « ce qui est illégal hors ligne doit également l'être en ligne ». 

Les fournisseurs de services numériques sont donc en première ligne. Ils doivent surveiller et réguler les contenus publiés sur leurs plateformes. En procédant ainsi, l'UE espère transformer Internet. L'objectif est de le rendre plus sûr et plus fiable pour tous les citoyens européens. Cela implique des mesures proactives de la part des plateformes pour identifier et supprimer les contenus illégaux rapidement.

 

Bon à savoir

Le DSA s'applique à une liste de 22 acteurs, comprenant des plateformes en ligne telles que Alibaba, AliExpress, Amazon Store, Apple AppStore, ainsi que des moteurs de recherche comme Bing et Google Search. 

En outre, trois sites pornographiques, à savoir XVideos, Pornhub et Stripchat, sont concernés par ce règlement.

DSA DMA : ces dispositifs sont-ils en vigueur aujourd'hui ?

La réponse est oui. 

Le DMA a été officiellement publié au Journal Officiel de l'Union européenne le 12 octobre 2022. Il est entré officiellement en vigueur le 2 mai 2023. Cette période d'incubation a permis aux plateformes concernées et aux autorités réglementaires de se préparer à l'application des nouvelles règles. Une date importante à retenir est le 6 mars 2024. À cette date, les plateformes dominantes doivent avoir adapté leurs pratiques aux nouvelles exigences pour éviter les sanctions.

De son côté, le DSA a suivi un calendrier différent. Après sa publication officielle le 27 octobre 2022, il est entré en vigueur en deux temps. D'abord, ce sont les très grandes plateformes et moteurs de recherche qui l’ont appliqué à partir du 25 août 2023. Il a ensuite été étendu aux autres plateformes à partir du 17 février 2024. De plus, dans chaque État membre de l’UE, des d'autorités spécifiques ont été désignées pour surveiller la bonne application de cette législation. En France, par exemple, il s’agit de l’Autorité de régulation de la communication audiovisuelle et numérique (Arcom).

DMA DSA : ce qui va se passer en 2024

L'année 2024 marquera un tournant dans le monde numérique avec l'entrée en vigueur de ces régulations européennes. Zoom sur leurs implications concrètes. 

DMA et DSA : les nouveaux dispositifs qui régulent Internet en Europe

Le DMA redéfinit les règles du numérique en 2024

Suite à la mise en œuvre du DMA, voici un aperçu des changements concrets pour les utilisateurs :

  • Les grandes plateformes ne peuvent plus favoriser leurs propres produits ou services, ni utiliser injustement les données d'autres entreprises ;
  • Les utilisateurs peuvent plus facilement choisir et enlever les applications ou logiciels qu'ils ne veulent pas sur leurs appareils ;
  • Les publicités ne peuvent être personnalisées en utilisant les données personnelles des utilisateurs sans leur accord clair ;
  • Les grandes plateformes doivent informer les autorités quand elles achètent d'autres entreprises, pour éviter trop de concentration de pouvoir ;
  • Les consommateurs pourront intégrer librement leurs solutions de paiement dans leurs smartphones, contournant ainsi les monopoles tels qu'Apple Pay ;
  • La communication entre les différentes plateformes de messagerie sera possible, facilitant les échanges entre utilisateurs de services distincts. Par exemple, l'envoi d'un message depuis WhatsApp vers un utilisateur utilisant iMessage devrait se réaliser sans problème. Cela illustre ce que l'on nomme l'interopérabilité entre les différentes plateformes de messagerie.

Avec ces changements, le DMA veut s'assurer que le marché numérique reste compétitif, équitable et ouvert à tous.

Le DSA change le quotidien des utilisateurs en 2024

Concernant le DSA, voici les transformations concrètes pour les utilisateurs en 2024 :

  • Une publicité plus responsable. La cible publicitaire ne pourra plus être orientée vers les enfants ou basée sur des données sensibles comme la religion, les préférences sexuelles, etc ;
  • Un examen rigoureux des algorithmes. Les autorités pourront vérifier les algorithmes des plateformes pour assurer une distribution équitable du contenu ;
  • Les conditions générales d'utilisation seront plus claires pour tous les utilisateurs ;
  • Les plateformes seront tenues d'avoir des équipes de modération capables d'appliquer les lois locales et de gérer les contenus inappropriés ;
  • Les utilisateurs bénéficieront d'un outil simplifié pour signaler les contenus problématiques avec une réponse rapide exigée des plateformes ;
  • En situation d'urgence, les acteurs du numérique devront agir conformément aux demandes européennes.

DSA, DMA : des sanctions en cas de non-respect des règles

Mais que se passe-t-il si les entreprises ne suivent pas les règles du DSA et DMA ?

D'abord, si une entreprise ne respecte pas les règles du DMA, la Commission européenne peut lui demander de corriger son comportement. Si l'entreprise continue de ne pas suivre les règles, elle peut se voir infliger de lourdes amendes, allant jusqu'à 10 % de son chiffre d'affaires mondial. Si elle récidive, l'amende peut même atteindre 20 %. De plus, si une entreprise récidive, la Commission peut par exemple lui interdire d'acquérir d'autres entreprises pendant un certain temps. Les autorités des différents pays de l'UE peuvent aussi enquêter et envoyer leurs résultats à la Commission. Le but est de garder un œil attentif sur les entreprises et de s'assurer qu'elles se comportent correctement.

Pour le DSA, c'est un peu différent. Chaque pays de l'UE décide des amendes, qui peuvent atteindre jusqu'à 6 % du revenu annuel de l'entreprise. Si une entreprise ne coopère pas ou donne de fausses informations, elle peut être sanctionnée. De plus, si une plateforme continue à ne pas respecter les règles, elle peut même se voir interdire d'opérer sur le marché européen. En d'autres termes, l'UE a le pouvoir de suspendre l'accès à des plateformes telles que Facebook, Twitter, Instagram dans toute l'Europe si ces dernières ne se conforment pas aux règlements.

L'Union européenne prend donc ces règles très au sérieux. Si les entreprises ne les respectent pas, elles doivent s'attendre à de sévères conséquences. C'est une manière pour l'UE de s'assurer que le monde numérique est équitable et sûr pour tous.