Comment Neil Jacobs transforme l'hôtellerie de luxe en 2025 ?
Découvrez Wild Origins, le projet de Neil Jacobs qui redéfinit le luxe responsable dans l'hôtellerie et l'impact sur le tourisme.

Dans l’hôtellerie de luxe, certains dirigeants ne se contentent plus d’empiler des étoiles. Neil Jacobs, artisan de la métamorphose de Six Senses, prend aujourd’hui le pari d’un luxe plus humain, sobre et ancré. Avec Wild Origins, il pose les bases d’un modèle créatif et de conseil qui entend influencer la chaîne de valeur du tourisme, de l’investissement à l’expérience client, en passant par la gouvernance.
Du laboratoire six senses à wild origins, une grammaire du luxe réinventée
Figure respectée de l’hospitalité internationale, Neil Jacobs a consacré plus d’une décennie à adapter le luxe aux enjeux contemporains chez Six Senses. Sous sa direction, la marque est passée d’une empreinte intimiste en Asie à un réseau élargi, avec des ouvertures en Europe, au Moyen-Orient et dans les Amériques, et un portefeuille étoffé de projets urbains et de résidences.
Le cœur de sa méthode tient en trois mots que l’on n’associe pas spontanément à l’ultra haut de gamme: durabilité, authenticité, ancrage local. Il résume ainsi sa boussole stratégique: « Les tendances sont éphémères. Ce qui compte, ce sont les fondamentaux: comment on se déplace, comment on se repose, comment on se connecte aux autres et à soi-même. Tout est dans l’intention et la conscience. »
Wild Origins, lancé à l’été 2025 et dévoilé dans la presse spécialisée internationale, prolonge cette recherche d’un luxe de sens. La structure se présente comme un collectif hybride, à la fois studio créatif et cabinet de conseil, destiné à des marques d’hospitalité bâties sur la finalité, pas uniquement sur les métriques de rendement trimestriel. Objectif: fédérer des talents, fluidifier les décisions, accélérer les programmes responsables et sécuriser les standards d’expérience.
À l’appui de cette ambition, les témoignages sont explicites. Craig Cogut, PDG de Pegasus Capital Advisors et ancien propriétaire de Six Senses avant la cession à IHG en 2019, vante le « regard à 10 ou 20 ans » de Jacobs et sa capacité à constituer des équipes où goût, style et sensibilité ne sont pas de simples attributs, mais des ressources productives. Un ancien collègue, désormais à la tête d’Equinox Hotels, insiste sur le lien entre intégrité, générosité et réussite durable.
Chiffres-clés à retenir pour la France
Le tourisme reste un pilier de l’économie française. Selon les données publiques disponibles, la France a accueilli en 2023 près de 100 millions de visiteurs internationaux, pour plus de 60 milliards d’euros de recettes de voyages, confirmant le rôle structurant du secteur dans la balance des paiements et l’emploi (Direction générale des entreprises, ministère de l’Économie).
Dans ce contexte, le pari de Wild Origins tombe au moment où les clientèles haut de gamme valorisent des séjours sobres en apparence, mais sophistiqués dans l’expérience: immersion culturelle, design local, bien-être fondé sur la science et impact environnemental mesuré. La compétition ne se joue plus seulement sur la surface des suites ou la signature du chef, mais sur l’alignement entre promesse, opérations et externalités.
La demande évolue, l’offre s’adapte: ce que disent les indicateurs de marché
Du côté de la demande, le mouvement est clair. Les voyageurs prêtent une attention accrue à la qualité du repos, à la régénération physique et mentale, et à l’effet des séjours sur l’environnement. Cette « conscience d’usage » pousse le marché vers des modèles qui replacent l’expérience transformationnelle au centre, de la mobilité à l’hébergement.
Pour les professionnels basés en France, cela se traduit par trois chantiers essentiels.
- Différenciation par l’authenticité. Les établissements qui valorisent le terroir, les savoir-faire artisanaux et une gastronomie de saison évitent l’écueil du « copier-coller » et renforcent la préférence de marque.
- Réduction des impacts mesurables. L’énergie, l’eau, les déchets, le carbone et la biodiversité deviennent des lignes de pilotage opérationnel, pas uniquement des chapitres de rapport RSE.
- Bien-être fondé sur la preuve. Les programmes holistiques gagnent en crédibilité quand ils s’appuient sur des protocoles clairs, des partenariats scientifiques et des résultats observables par les clients.
La demande corporate s’aligne progressivement. Dans les conventions et déplacements d’affaires, les acheteurs intégrant des critères ESG dans les appels d’offres revalorisent les chaînes qui documentent leur performance extra-financière.
Les labels crédibles, la traçabilité des achats et la sobriété énergétique constituent des arguments tangibles lors de la négociation. La préférence va aux opérateurs capables de relier les engagements aux preuves.
Les acteurs qui souhaitent crédibiliser leur trajectoire s’appuient sur des référentiels reconnus. À titre d’exemples: l’Ecolabel européen pour des exigences environnementales sur le cycle de vie des services d’hébergement, ISO 14001 pour la gestion environnementale, ISO 50001 pour l’énergie, la norme NF Environnement pour certains produits d’entretien, ou encore les méthodologies SBTi pour fixer des objectifs climatiques robustes. Ces outils n’ont de sens que s’ils s’intègrent dans la conduite opérationnelle et la gouvernance.
Côté investisseurs, le circuit s’ajuste. L’alignement avec la taxonomie européenne et la qualité des données extra-financières conditionnent de plus en plus les coûts du capital. Les projets de repositionnement hôtelier capables de réduire les consommations d’énergie et d’eau, de favoriser l’économie circulaire et d’illustrer un impact social local obtiennent un meilleur accès aux financements spécialisés.
Wild origins, un véhicule pour accélérer l’hospitalité à impact
Structurée comme un collectif de conseil et de création, Wild Origins accompagne des marques dont l’ADN est la finalité. La plateforme intervient à la fois sur la stratégie, le design d’expérience, le développement et la mise en œuvre opérationnelle. Elle se positionne sur les segments luxe et bien-être, tout en gardant une approche sobre et locale.
La société a été annoncée à juillet 2025, avec un premier réseau de partenaires et d’investisseurs. Jacobs collabore notamment avec Cain, fonds d’investissement basé à Londres et New York, sur des opportunités ciblant l’hospitalité et les lieux de santé intégrative. L’objectif est d’identifier des projets où le design, la qualité des opérations, l’impact et le rendement se renforcent mutuellement.
L’écosystème s’étend en Asie du Sud-Est et au Moyen-Orient. Jacobs conseille Potato Head, acteur reconnu à Bali pour ses programmes de circularité et de culture locale, et participe à des initiatives de formation en Arabie saoudite, dans le contexte d’une montée en gamme rapide de l’offre touristique. À Qiddiya, près de Riyad, un projet d’école de tourisme doit former massivement en ligne et en présentiel les cadres de demain.
Six senses douro valley: une localisation sincère
Au Portugal, Six Senses a revisité son standard historique. Le site de la vallée du Douro a troqué symboles exogènes et signature « resort asiatique » pour des matériaux, motifs et artisanats enracinés dans la région.
Le message de Jacobs, devenu signature: « Un hôtel au Portugal ne doit pas ressembler à Bali. Il doit refléter son terroir. » Le cas illustre un principe de cohérence culturelle que Wild Origins place au cœur du design.
Potato head: narration et circularité comme moteur d’attractivité
À Bali, Potato Head a développé une identité où l’architecture, la musique, l’art et le réemploi de matériaux composent une expérience singulière. Wild Origins accompagne cette grammaire en la reliant à une stratégie de croissance maîtrisée. L’ambition est d’amplifier la valeur d’usage et l’attachement à la marque en restant frugal en capital, via une narration forte et des preuves concrètes de circularité.
Qiddiya: structurer l’offre et les compétences
Le développement touristique en Arabie saoudite s’accompagne d’un investissement massif dans le capital humain. L’instance consultative à laquelle contribue Neil Jacobs travaille à la mise en place d’une école de tourisme conçue pour accueillir des cohortes importantes, avec une pédagogie hybride et des passerelles avec les standards internationaux de l’hospitalité. L’objectif: une montée en compétences rapide et mesurable des jeunes professionnels du secteur.
Dans l’hôtellerie, la tendance est de surinvestir dans les mètres carrés et sous-investir dans l’intention et l’itération. Un studio créatif interne ou en partenariat rebat les cartes: conception centrée sur l’usage, design localisable, modularité des espaces, contenus éditoriaux qui prolongent l’expérience, et formation active des équipes.
Résultat: CAPEX mieux ciblé, OPEX plus efficients et revenu additionnel grâce aux activités culturelles ou bien-être. La marge progresse par l’affectation intelligente du capital, pas par l’escalade décorative.
Ce que cela change pour les acteurs français: normes, finance et opérations
La trajectoire portée par Wild Origins résonne avec les cadres réglementaires et financiers qui s’imposent aux groupes et investisseurs en France. L’hôtellerie et la restauration sont pleinement embarquées dans les politiques publiques de décarbonation, d’économie circulaire et d’information au consommateur.
- Rapportage de durabilité. La directive européenne CSRD, transposée en droit français, élargit le périmètre des entreprises soumises à la publication d’informations extra-financières et à l’audit des données ESG. Les groupes hôteliers significatifs doivent structurer la collecte et l’assurance des données selon les référentiels ESRS.
- Décret tertiaire. Les bâtiments à usage tertiaire, dont les hôtels, sont soumis à des objectifs de réduction des consommations d’énergie par paliers à 2030, 2040 et 2050. Les plans d’action énergétiques ont un impact direct sur la valorisation des actifs et les loyers.
- Loi Climat et Résilience. L’information du consommateur, la lutte contre le gaspillage et la gestion du cycle de vie des produits s’intensifient. Les chartes « plastique à usage unique », l’affichage environnemental expérimental, ou la réutilisation et le vrac deviennent des chantiers opérationnels concrets.
À ces exigences s’ajoutent les enjeux de financement. Les établissements performants sur les critères ESG peuvent accéder à des produits dédiés, prêts verts, mécanismes de garantie et subventions pour la rénovation énergétique ou l’optimisation des systèmes techniques. L’accès au capital est corrélé à la crédibilité des trajectoires de décarbonation et à la qualité du reporting.
Financer la transition des hôtels en France
Plusieurs leviers se combinent: prêts verts et garanties, appels à projets de l’ADEME pour la rénovation et l’économie circulaire, certificats d’économies d’énergie pour l’efficacité des équipements, et dispositifs fiscaux comme le crédit d’impôt recherche pour des dépenses de R et D liées à l’ingénierie énergétique, au numérique de sobriété ou à la mesure d’impact. La structuration documentaire est décisive pour sécuriser ces aides.
Les entreprises concernées par la CSRD doivent produire un rapport de durabilité au même rang que les états financiers, avec audit. Pour l’hôtellerie, les points sensibles incluent la matérialité double, le climat et la biodiversité, la chaîne d’approvisionnement en F et B, la consommation d’énergie et d’eau, les déchets, le bien-être au travail, la sécurité des clients, et la gouvernance des données. Les données doivent être traçables, vérifiables et comparables entre sites.
Sur le terrain, la bascule vers un modèle à impact n’est pas qu’une affaire d’outils. Elle requiert une culture d’entreprise qui donne de l’autonomie aux équipes, une organisation apprenante et un pilotage en temps réel. C’est là que la vision portée par Jacobs, centrée sur les personnes, rejoint les exigences européennes: lorsque les pratiques responsables deviennent protocole, l’expérience client gagne en cohérence et la performance durable cesse d’être un supplément d’âme.
Le capital humain comme avantage stratégique dans un secteur saturé de technologie
Le récit de Jacobs oppose deux formes de modernité. D’un côté, une industrie qui digitalise à marche forcée la distribution, la tarification, la relation client. De l’autre, une hospitalité qui réaffirme la primauté des compétences humaines: sens de l’accueil, esthétique, discernement, capacité à tisser un récit. « Dans un monde dominé par la technologie, les talents humains font la différence », résume Craig Cogut.
La question n’est pas d’opposer l’un à l’autre. L’enjeu est d’inscrire la technologie au service de l’attention. Des outils de gestion énergétique qui rendent visibles les économies. Des CRM qui contextualisent la relation sans la standardiser. Des tableaux de bord qui guident la décision, sans déposséder les équipes de leur autorité. L’ultime indicateur n’est pas le taux de clic, mais l’intensité de l’expérience sur place.
Au chapitre managérial, Jacobs assume une vision qui lie douceur et exigence. Il évoque un travail avec un coach issu du sport de haut niveau pour structurer la concentration, apprivoiser les émotions et libérer les performances.
Sa formule, mi-philosophique mi-pragmatique, fait écho aux cycles du secteur: « La vie est comme un ascenseur. Acceptez les bas, les hauts viendront. » C’est aussi une façon de rappeler que l’hôtellerie est un métier d’endurance.
Quelques actions à impact rapide: mettre en place des parcours de formation certifiants sur l’efficacité énergétique et la gestion de l’eau, ouvrir des programmes d’intrapreneuriat pour tester des concepts en conditions réelles, créer des partenariats avec des écoles pour des projets appliqués, instaurer un budget d’essai-erreur sur de petits périmètres, et documenter les réussites pour diffuser les apprentissages. L’attractivité employeur se construit par ces preuves, plus que par les slogans.
Itinéraire d’exécution pour les opérateurs et investisseurs en france
Pour transformer un portefeuille d’actifs ou un groupe hôtelier sans tomber dans l’incantation, une feuille de route opérationnelle s’impose. L’approche de Wild Origins fournit un canevas utile, que les acteurs français peuvent adapter à leur terrain.
- Cartographier les impacts par site, avec un inventaire des consommations d’énergie et d’eau, des flux déchets, des sources d’achats, des espaces sous-utilisés. Mettre en place des mesures simples et fiabilisées.
- Hiérarchiser les gisements de performance: enveloppe thermique, CVC, éclairage, eau chaude, cuisine, blanchisserie, piscine et spa. Prioriser selon le retour sur investissement et les obligations réglementaires.
- Prototyper des offres: ateliers artisanaux locaux, menus à empreinte réduite, séquences de bien-être validées par des praticiens, expériences culturelles avec les communautés voisines.
- Aligner les incitations: bonus-malus indexés sur les économies d’énergie, rémunération variable liée à la satisfaction, achat responsable mesuré et partagé.
- Financer avec des instruments adaptés: prêts verts et garanties, investissements partagés avec des partenaires, et contrats de performance énergétique quand c’est pertinent.
- Communiquer sans greenwashing: raconter l’intention, montrer la preuve, expliquer les arbitrages et les limites quand elles existent.
Cette traduction en gestes concrets permet de passer du discours d’engagement aux actes mesurables. Sur des marchés matures comme Paris, Lyon, Bordeaux, Nice ou Biarritz, elle constitue surtout un levier pour se différencier dans des environnements d’offre dense et de clientèle exigeante.
Bon à savoir: design et maintenance, le tandem gagnant
Un concept ne vit que s’il se maintient. L’intégration anticipée des équipes maintenance et housekeeping dès la conception réduit les coûts cachés et prolonge la qualité perçue. Matériaux durables et réparables, modules remplaçables, contrats fournisseurs conditionnés à la durée de vie, documentation claire. Le luxe durable commence souvent là où l’œil du client ne regarde pas.
Rôle des investisseurs: gouvernance, risque et création de valeur
Le message adressé aux capitaux est limpide. La valeur d’un actif hôtelier se joue autant dans la stabilité des flux et la maîtrise des coûts que dans la désirabilité construite par une identité forte et un récit sincère. Les cycles de marché favorisent les propriétaires qui se préparent à des normes plus serrées, à une énergie plus chère et à une clientèle plus informée.
Dans cette perspective, l’association entre un fonds d’investissement aguerri et un studio créatif comme Wild Origins constitue une proposition singulière. Elle rapproche le pilotage financier et la conception de l’expérience, deux univers trop souvent étanches. L’équilibre s’obtient quand les décisions d’allocation de capital servent des expériences qui justifient un prix et une fidélité élevés, tout en réduisant l’intensité matérielle des opérations.
Cette gouvernance suppose aussi une éthique de la preuve. Wild Origins en fait un principe: on ne demande pas aux équipes de « faire mieux » sans préciser comment, ni de « raconter » sans mesurer. L’hospitalité engagée gagne en sérieux lorsque la créativité rencontre la comptabilité, l’artisanat rencontre l’ingénierie et le design rencontre l’amortissement.
Ce qu’en retirent les destinations françaises: attractivité et régénération
Pour les territoires, l’approche de Jacobs peut être un accélérateur. Un hôtel qui travaille avec les artisans, qui valorise les paysages, qui respecte les capacités d’accueil et qui invente des formats de séjour à faible empreinte participe à la régénération locale. Ce n’est plus un simple hébergeur, c’est un acteur économique, culturel et environnemental.
Les destinations françaises disposent d’atouts rares à l’échelle mondiale: densité patrimoniale, terroirs variés, savoir-faire, infrastructures. L’enjeu n’est pas d’ajouter de la complexité, mais de redonner du sens et de la durée. Le luxe de demain pourrait bien être la simplicité sophistiquée, servie par des professionnels capables d’anticiper, d’écouter et d’émerveiller sans gaspiller.
Un nouveau chapitre pour l’hôtellerie haut de gamme
Wild Origins ne promet pas de miracles, mais une méthode. Celle qui a permis à Neil Jacobs de redéfinir les codes chez Six Senses en combinant respect du lieu, cohérence créative et rigueur d’exploitation. Les partis pris sont clairs: moins de cosmétique, plus d’intention; moins de standardisation, plus de local; moins de promesse, plus de preuve.
Pour l’écosystème français, c’est une opportunité de consolider un leadership sur le luxe d’hospitalité. La demande est là, les cadres réglementaires s’installent, les outils existent. Reste à faire converger capital, compétences et culture de service. La leçon de Jacobs tient en peu de mots: quand le sens guide les décisions, la performance suit.
En définitive, l’initiative Wild Origins s’inscrit dans une trajectoire où l’hôtellerie française peut exceller: un luxe sobre, enraciné et mesurable, capable d’allier désirabilité, rigueur opérationnelle et impact positif sur les territoires.