2,37 milliards d’euros au 1er semestre 2025 : le groupe Roquette envoie un signal clair au marché en combinant croissance, amélioration de la marge et rééquilibrage vers la santé. Porté par l’intégration d’IFF Pharma Solutions en mai, l’industriel familial nordiste confirme sa capacité à lisser les cycles en nutrition, sans renoncer à l’innovation qui fait sa signature depuis 1933.

Roquette, un centenaire des ingrédients végétaux en ordre de marche

Fondé à Lestrem en 1933, Roquette s’est imposé comme un acteur mondial des ingrédients d’origine végétale et des excipients pharmaceutiques. En 2024, le groupe a enregistré un chiffre d’affaires de 4,5 milliards d’euros et emploie plus de 8 000 collaborateurs. Son modèle repose sur la transformation du maïs, du blé et des pois, adressant l’alimentation, la nutrition et la santé.

Cette histoire industrielle, construite sur des procédés d’extraction et de fermentation exigeants, a su s’adapter aux cycles de prix des matières premières et aux nouvelles attentes consommateur. Plus récemment, la montée en puissance des formulations santé a renforcé la proposition de valeur, y compris dans des segments pharmaceutiques où la qualité et la conformité réglementaire constituent un avantage compétitif.

Chiffres clés structurants du groupe Roquette

• 1933 : création à Lestrem, Pas-de-Calais.
• 4,5 milliards d’euros de chiffre d’affaires en 2024.
• Plus de 8 000 salariés dans le monde.
• Portefeuille équilibré entre nutrition, alimentation, solutions santé et excipients.

Semestre solide : croissance de l’activité et marge EBITDA renforcée

Au 1er semestre 2025, Roquette a publié des comptes au-dessus des attentes : le chiffre d’affaires atteint 2,37 milliards d’euros, en progression de 4 % par rapport à la même période en 2024. À données comparables, la performance affiche toutefois une baisse de 3 %, ce qui traduit une friction persistante dans certaines lignes de la nutrition humaine et animale.

La rentabilité opérationnelle s’apprécie plus nettement : EBITDA de 294 millions d’euros, en hausse de 18 %. À périmètre constant, l’indicateur recule légèrement de 1 %, confirmant que la dynamique provient en partie de changements de périmètre. La marge EBITDA s’établit à 12,4 %, un niveau salué par des analyses financières, qui y voient un signe de discipline sur les coûts et d’optimisation des flux industriels.

Selon le communiqué diffusé le 25 septembre 2025, le groupe met en avant une exécution rigoureuse et une gestion fine du mix produit, avec une contribution manifeste du segment santé. Ces données confirment la résilience de l’industriel, malgré la normalisation de volumes dans des catégories de nutrition plus exposées à la demande discrétionnaire et aux arbitrages de prix.

La mention « à périmètre constant » neutralise l’effet des acquisitions et cessions pour isoler la seule performance organique. Dans le cas de Roquette, la légère baisse organique du chiffre d’affaires et de l’EBITDA souligne un marché nutrition moins porteur, tandis que la progression publiée intègre la contribution récente d’IFF Pharma Solutions. Cet écart publication vs organique aide à apprécier l’impact réel de l’intégration.

Lecture financière : effet mix, coûts et productivité

Trois leviers expliquent la performance :

  • Effet mix favorable vers des applications santé à plus forte valeur ajoutée.
  • Coûts maîtrisés dans un environnement d’inflation plus diffuse qu’en 2022-2023, mais encore sensible sur l’énergie et certains intrants.
  • Productivité industrielle améliorée, avec une optimisation des sites et la digitalisation croissante des opérations.

Les analystes évoquent un semestre de qualité où la progression de la marge compense la modération volumique, soutenant la crédibilité du plan à moyen terme. Ces éléments sont corroborés par les informations publiées par le groupe le 25 septembre 2025 via GlobeNewswire (GlobeNewswire, 25 septembre 2025).

L’EBITDA mesure la performance opérationnelle avant amortissements. Dans la chimie de spécialités, il sert de proxy de génération de cash avant capex et reflète la qualité du mix produit, la discipline de prix et l’efficacité industrielle. Une marge à deux chiffres, comme celle annoncée par Roquette, signale un positionnement différenciant sur des niches à barrière d’entrée.

Acquisition d’IFF Pharma Solutions : accélérateur de la branche santé

Finalisée en mai 2025, l’acquisition d’IFF Pharma Solutions a apporté deux mois de contribution au semestre. Le montant de l’opération n’est pas communiqué publiquement. Il est évoqué comme estimé à plusieurs centaines de millions d’euros, sans précision officielle sur la valorisation.

Ancienne division d’International Flavors & Fragrances, IFF Pharma Solutions renforce l’expertise de Roquette sur les excipients pharmaceutiques. L’intégration cible des synergies en production et en R&D, avec une montée en gamme qui soutient la marge opérationnelle. Le management du groupe présente cette opération comme un rééquilibrage de portefeuille, atténuant la cyclicité de la nutrition grâce à l’ancrage santé.

IFF Pharma Solutions : périmètre et synergies

Les premiers effets se traduisent par :

  • Des gammes étendues dans les excipients, utiles à la fabrication et à la formulation des médicaments.
  • Un meilleur maillage client dans la santé, avec une profondeur de portefeuille accrue.
  • Des synergies rapides issues de l’alignement des procédés, du sourcing et des plateformes de R&D.

Sans détailler la cartographie des actifs repris, Roquette souligne que l’intégration se déroule conformément aux attentes et que la rentabilité consolidée bénéficie déjà d’un effet périmètre positif.

Effets attendus d’une intégration réussie

  1. Accélération du mix santé : meilleure visibilité de la demande et marges plus élevées.
  2. Optimisation industrielle : mutualisation des procédés et standardisation qualité.
  3. Rationalisation R&D : feuille de route produits plus lisible, time-to-market réduit.
  4. Renforcement commercial : cross-selling au sein d’un portefeuille élargi.

Nutrition vs santé : un portefeuille rééquilibré pour atténuer la cyclicité

Le semestre reflète un double mouvement. La nutrition, soumise à une demande plus atone sur certaines applications, contribue moins à la croissance. À l’inverse, la santé et les excipients portent la performance. Cette configuration conforte la stratégie de Roquette : renforcer les segments à valeur soutenue et décrocher des relais de croissance moins sensibles à la conjoncture.

Nutrition : demande modérée, ajustements en cours

Dans la nutrition humaine et animale, le groupe signale des volumes moins dynamiques. Plusieurs facteurs sont en jeu : normalisation post-pic sur certaines catégories, arbitrages de prix des clients, recalibrage des stocks. La réponse de Roquette s’articule autour d’un pilotage fin des capacités, de l’optimisation du portefeuille produits et d’une vigilance continue sur les coûts variables.

Santé : excipients en traction et pricing discipliné

Le pôle santé bénéficie d’une demande résiliente en excipients et ingrédients pour médicaments. La combinaison d’un pricing discipliné, d’un niveau d’exigence réglementaire élevé et de relations clients de long terme maintient des marges attractives. L’apport d’IFF Pharma Solutions améliore la profondeur d’offre et sécurise la trajectoire de marge groupe.

Les marchés de la nutrition sont plus exposés aux arbitrages de volumes et aux variations de matières premières. La santé, via les excipients et ingrédients pharmaceutiques, se caractérise par des contrats plus longs, des spécifications strictes et une sensibilité prix différente. En renforçant cette jambe, Roquette réduit la volatilité globale de ses résultats.

Capex, excellence opérationnelle et appui des politiques publiques

Roquette poursuit un modèle fondé sur l’innovation et l’efficience. Le groupe affirme intensifier la digitalisation de ses usines et l’excellence opérationnelle, leviers décisifs pour contenir les coûts, fiabiliser les procédés et augmenter la productivité des lignes. Ces choix s’inscrivent dans les grandes orientations industrielles françaises, où la montée en gamme et la relocalisation de chaînes critiques s’intensifient.

Sur le volet R&D, l’entreprise maintient un niveau d’investissement élevé, évalué à plus de 100 millions d’euros annuels dans les données sectorielles citées, afin d’accélérer le lancement de nouvelles solutions en nutrition végétale et excipients. Les priorités portent sur des ingrédients éco-conçus, des formulations plus performantes et des procédés à empreinte réduite.

France 2030 : cadres utiles à l’innovation industrielle

Si Roquette n’est pas mentionné comme lauréat récent d’un dispositif spécifique, ses orientations s’alignent avec les instruments de soutien à l’innovation rappelés par la Direction générale des Entreprises. Les dispositifs de type Première Usine ou les aides structurelles à l’innovation illustrent le cadre public dans lequel un acteur comme Roquette évolue, notamment pour accélérer les transitions technologiques et environnementales.

Fiscalité 2025 : points d’attention pour les industriels

La loi de finances pour 2025 comporte des ajustements qui intéressent l’industrie et l’innovation. Pour un groupe comme Roquette, l’enjeu consiste à articuler incitations à l’innovation et discipline d’investissement, sans dépendre de mesures exceptionnelles. Les impacts précis ne sont pas détaillés par l’entreprise, qui se concentre sur l’exécution opérationnelle.

Discipline financière : endettement sous contrôle

Consécutivement à l’acquisition d’IFF Pharma Solutions, Roquette affiche l’objectif de réduire progressivement son levier. Le ratio d’endettement net sur EBITDA est présenté comme maîtrisé, sans publication d’un niveau chiffré. Le message est clair : préserver la flexibilité financière pour financer la R&D et les capex productifs tout en soutenant l’intégration.

Gouvernance et exécution : les pivots qui rassurent les investisseurs

Le semestre s’est conclu par une communication disciplinée qui insiste sur l’exécution. Cette posture séduit les investisseurs et analystes qui privilégient la lisibilité des trajectoires sur des marchés devenus plus sélectifs. Les commentaires publiés sur la période relèvent une surperformance par rapport aux attentes et un rehaussement de la crédibilité autour de la marge.

La gouvernance a mis l’accent sur deux principes : pas d’emballement sur les volumes dans la nutrition tant que la demande reste modérée et accélération sur la santé afin de capter la croissance incrémentale offerte par l’intégration d’IFF Pharma Solutions. Ces principes, désormais ancrés, orientent les arbitrages commerciaux, industriels et d’allocation de capital.

Quatre priorités d’exécution

  • Consolider la marge via le mix produit et les synergies industrielles.
  • Accélérer l’innovation en R&D avec des lancements ciblés sur la santé et la nutrition végétale.
  • Optimiser l’outil de production grâce à la digitalisation et à la standardisation des procédés.
  • Maintenir une structure financière robuste pour accompagner l’intégration sans diluer la flexibilité.

Dans un cycle où les volumes en nutrition restent hésitants, la valorisation des industriels récompense la capacité à stabiliser ou améliorer la marge. Une marge EBITDA à 12,4 % indique que Roquette arbitre efficacement entre prix, volumes et mix. À court terme, cette discipline prime souvent sur la course aux volumes.

Feuille de route 2025 : arbitrages entre nutrition et santé

Pour la seconde partie de 2025, le groupe confirme sa focalisation sur l’exécution. La santé doit continuer de porter la dynamique, avec une intégration d’IFF Pharma Solutions qui se déploie progressivement dans les opérations et la R&D. Les activités de nutrition, sous contrainte de demande, feront l’objet d’un pilotage sélectif des capacités et des mix.

Les investissements en R&D resteront significatifs, soutenant les feuilles de route produits. En filigrane, l’objectif financier demeure la décrue du levier, sans sacrifier l’innovation ni les capex indispensables à la compétitivité. La combinaison de ces axes doit permettre de protéger la rentabilité tout en préparant le prochain cycle de croissance.

Indicateurs à surveiller d’ici la fin d’exercice

  • Vitesse de réalisation des synergies liées à IFF Pharma Solutions, tant en usine qu’en portefeuille produits.
  • Évolution des volumes en nutrition, notamment sur les catégories les plus sensibles à la demande finale.
  • Discipline sur les prix et tenue des coûts variables, en particulier l’énergie.
  • Capacité d’innovation mesurée par les lancements à valeur ajoutée et l’adoption par les clients.

Fin 2025 : trajectoire à confirmer

Les chiffres publiés au 1er semestre valident une stratégie désormais lisible : consolider la marge, rééquilibrer vers la santé, intégrer rapidement l’acquisition et préserver la flexibilité financière. Pour les investisseurs et partenaires industriels, la suite se jouera sur la constance d’exécution et la tenue des synergies promises.

Roquette, fidèle à son ADN d’industriel de long terme, semble calibrer ses décisions pour absorber les aléas conjoncturels sans dévier de ses priorités. Si la demande en nutrition se normalise, la combinaison avec une branche santé renforcée pourrait offrir un cycle de croissance plus régulier.

Rendez-vous en fin d’année pour mesurer la solidité de ce cap et la portée concrète des synergies enclenchées.