Pernod Ricard fait face à un début d'exercice difficile
Découvrez les résultats de Pernod Ricard pour 2025 et les enjeux stratégiques à venir, notamment aux États-Unis et en Chine.

-14,3 % sur le trimestre et un chiffre d'affaires à 2,384 milliards d'euros : depuis Paris, Pernod Ricard envoie un signal de vigilance aux marchés. Le groupe acte une dynamique plus faible en début d'exercice 2025/2026, tout en réaffirmant un scénario de reprise progressive. L'annonce du 16 octobre 2025 a, paradoxalement, été accueillie par une légère accalmie en Bourse, signe d'attentes déjà intégrées.
Chiffres clés du 1er trimestre 2025/2026
Le premier trimestre de l'exercice décalé 2025/2026 s'achève avec un chiffre d'affaires de 2,384 milliards d'euros, en retrait de 14,3 % par rapport à la même période un an plus tôt. En données organiques, la baisse atteint 7,6 %, reflet d'une demande en retrait sur certains marchés majeurs, amplifiée par un effet de change négatif de 143 millions d'euros (publication du 16 octobre 2025, chiffres relayés par la presse économique française).
À la mi-journée, le 16 octobre, l'action Pernod Ricard s'inscrivait en légère hausse. Cette réaction neutre à modérément positive traduit une lecture pragmatique des investisseurs : les tendances révélées s'inscrivent dans la fourchette des indications préalables, sans aggravation au-delà du scénario déjà communiqué par la direction.
Ces indicateurs confirment une séquence de normalisation, avec une base de comparaison exigeante et des variables exogènes défavorables. La ligne directrice reste la même : préserver la valeur des marques, gérer la rotation des stocks chez les distributeurs, et conserver une discipline stricte sur les coûts en attendant un point d'inflexion commercial attendu plus tard dans l'exercice.
La croissance organique isole la performance opérationnelle de l'effet périmètre et des devises. Ici, l'écart entre -14,3 % publié et -7,6 % organique reflète principalement des effets de change très pénalisants.
La base de comparaison du T1 2024/2025 joue également, après des périodes de constitution de stocks sur plusieurs marchés. Moralité : le recul est réel mais ne doit pas être lu comme un effondrement de la demande sous-jacente.
États-Unis et Chine : les foyers de tension
États-Unis : normalisation des stocks après les surtaxes
Premier débouché de Pernod Ricard, les États-Unis concentrent l'essentiel des ajustements de stocks. Les turbulences liées aux droits de douane instaurés sous l'administration Trump ont déclenché, par le passé, des achats préventifs et des arbitrages logistiques, gonflant les niveaux d'inventaires. La correction actuelle pèse sur les volumes livrés, même si la consommation finale demeure jugée solide par le groupe.
Pour la direction, l'enjeu n'est pas tant de forcer du sell-in que de piloter la disponibilité des références à la bonne cadence. En clair, le trimestre reflète une synchronisation plus fine entre stock et sell-out, à l'opposé d'un mouvement spéculatif de remplissage de linéaires.
Chine : -27 % et un dossier cognac en rémission
En Chine, la contraction est plus marquée, avec des ventes en baisse de 27 %. La demande atone et le dossier des taxes sur le cognac ont pesé sur les performances.
Un accord conclu à l'été 2025 offre toutefois un motif d'apaisement, susceptible d'atténuer, à terme, l'amplitude des perturbations. Le message envoyé est prudent : la reprise sera graduelle et dépendra de la stabilisation des conditions de marché et de l'effectivité des mesures convenues.
À ce stade, Pernod Ricard conserve une stratégie de protection de ses marques phares tout en adaptant les mix d'offres. L'équation du trimestre reste donc double : arbitrer les prix et promouvoir sélectivement, sans dégrader la valeur long terme des portefeuilles premium.
Commerce extérieur des vins et spiritueux : repères 2024
Les vins et spiritueux restent un contributeur majeur à la balance commerciale française, avec un solde positif de 14 milliards d'euros en 2024 pour 16,5 milliards d'euros d'exportations (source Douane française, étude sectorielle 2025).
L'annonce d'un accord à l'été 2025 autour des taxes frappant le cognac ouvre la voie à une baisse de l'incertitude réglementaire. L'effet attendu n'est ni immédiat ni automatique, mais la visibilité commerciale pourrait s'améliorer au fil des prochains mois, sous réserve de la mise en œuvre opérationnelle par les parties prenantes.
Programme d'économies et organisation : cap sur la rentabilité
Face à la dégradation des volumes, Pernod Ricard enclenche un plan d'économies d'un milliard d'euros sur cinq ans. L'objectif est net : restaurer des marges compétitives et financer la stratégie de marques tout en absorbant un environnement plus volatil. La trajectoire repose sur une combinaison d'actions sur les frais généraux, les processus et la priorisation des investissements marketing.
Ce plan s'accompagne d'une restructuration qui intègre des mesures d'effectifs. Au siège parisien, la réduction annoncée représente 17 % des postes, une inflexion notable de l'organisation, rapportée par la presse nationale. Ces arbitrages s'inscrivent dans une dynamique sectorielle plus large, plusieurs acteurs procédant à des révisions de coûts et d'empreinte organisationnelle pour composer avec la baisse de cadence observée depuis 2023-2024.
Impact social au siège parisien : éléments à connaître
La réduction de 17 % des effectifs concerne le siège à Paris. En France, ce type de projet implique classiquement un processus d'information-consultation des représentants du personnel et le respect du droit social applicable. Les périmètres détaillés et calendriers d'exécution n'ont pas été communiqués dans la publication d'octobre.
Qui est Pernod Ricard : positionnement et exposition marchés
Pernod Ricard est l'un des leaders mondiaux des vins et spiritueux, présent sur tous les continents avec un portefeuille de marques internationales et locales. Son profil d'exposition, historiquement robuste sur l'Amérique du Nord et l'Asie, lui confère un levier puissant en phase d'expansion, mais impose aussi un pilotage fin en phase de ralentissement, lorsque les cycles de stocks des distributeurs se retournent et que les politiques commerciales se resserrent.
La stratégie maison repose sur trois piliers : montée en gamme sélective, investissements marketing concentrés sur les franchises les plus rentables, et discipline sur les coûts. Le plan d'économies et les ajustements en cours prolongent cette ligne directrice.
Guidance 2025/2026 : année de transition assumée
La direction qualifie 2025/2026 d'année de transition. Le message est explicite : amélioration progressive des tendances organiques et espoir d'un rebond au deuxième semestre. La base de comparaison deviendra plus favorable d'ici la fin d'exercice, tandis que les ajustements de stocks devraient se normaliser sur les marchés clés.
Les investisseurs évalueront cette trajectoire au regard de trois marqueurs : la décrue effective des inventaires chez les distributeurs américains, la stabilisation de la demande en Chine après l'accord de l'été sur le cognac, et la capacité du groupe à dérouler, sans dégrader la top line, son plan d'économies. L'arbitrage prix-mix, sous contraintes de change, reste un test d'exécution majeur.
Un rebond au S2 peut traduire trois phénomènes distincts : 1) stabilisation technique des stocks, 2) effet base de comparaison plus facile, 3) reprise réelle du sell-out. Pour isoler le signal, surveiller la croissance organique, les commentaires sur les points de vente et l'évolution du mix produit.
Macro France et échanges internationaux : une toile de fond contrastée
Le commerce extérieur français montre des signes d'amélioration. Le déficit commercial s'établit à -5,8 milliards d'euros en août 2025, avec une tendance 12 mois en amélioration. Dans ce paysage, les vins et spiritueux conservent leur rôle de stabilisateur, au regard de leur contribution positive et récurrente aux échanges.
Pour Pernod Ricard, cette toile de fond reste ambivalente. D'un côté, la performance export de la filière confirme la résilience des savoir-faire français. De l'autre, l'entreprise subit des cycles régionaux hétérogènes qui pèsent ponctuellement sur les volumes expédiés. Le pilotage des prix et des devises, dans le sillage d'un euro volatil face au dollar et aux devises asiatiques, demeure un sujet central de création de valeur opérationnelle.
Poids sectoriel confirmé pour la filière vins et spiritueux
La filière a dégagé en 2024 un solde commercial positif de 14 milliards d'euros et 16,5 milliards d'euros d'exportations, niveaux attestant de sa dimension stratégique pour l'économie française, notamment en période de ralentissement des autres postes d'exportation (source Douane).
Les prochains jalons sur le dossier Pernod Ricard
La visibilité s'améliore pas à pas, mais le point d'inflexion reste à documenter. Les prochains trimestres devront valider la normalisation des stocks aux États-Unis, l'effectivité des engagements sur le cognac et la montée en puissance du plan d'efficience. D'ici là, la priorité reste la préservation de la valeur des marques et la discipline financière.
Pour les investisseurs, le suivi de la croissance organique, du free cash-flow et des commentaires qualitatifs sur la Chine constituera la grille de lecture privilégiée. L'exercice 2025/2026 s'annonce comme un test d'exécution, plus que comme une année de conquête.
Trois points à surveiller d'ici la fin d'exercice
- États-Unis : vitesse de dégonflement des stocks distributeurs et reprise des réassorts.
- Chine : transmission concrète de l'accord de l'été sur le cognac dans les commandes.
- Coûts : cadence d'exécution du plan d'économies et protection du mix.
Les marchés attendent désormais des preuves tangibles de reprise, plus que des promesses, pour réévaluer le dossier à la hausse.