À Marseille, Optipus PV passe à l’offensive. Fondée fin 2023, la spin-off du CNRS sécurise un premier tour de table pour industrialiser ses films photovoltaïques organiques destinés aux objets du quotidien. Avec Energyskin, la jeune pousse promet une alimentation autonome, flexible et recyclable pour l’électronique mobile.

Un financement d’amorçage de 1,5 m€ qui structure l’industrialisation

La start-up deeptech annonce une levée de 1,5 million d’euros en avril 2025, réunissant plusieurs réseaux de business angels et des acteurs publics. Le tour associe Investessor, Femmes Business Angels, des investisseurs individuels, ainsi que Bpifrance et la SATT Sud-Est (CFNEWS, avril 2025).

Selon les informations relayées, l’opération a mobilisé des réseaux affiliés à France Angels, dont Les Business Angels des Grandes Écoles. Cette configuration hybride capitalise sur des fonds privés et des dispositifs publics, typiques des montages deeptech en phase d’amorçage.

Le capital réuni vise un double objectif jugé déterminant par les fondateurs : industrialiser Energyskin et accélérer les premières intégrations B2B avec des fabricants d’électronique et de micromobilité. Le financement doit permettre de déverrouiller les sujets critiques pour une technologie matérielle : passage à l’échelle, qualité de production, montée en cadence et conformité.

Pourquoi la SATT et Bpifrance importent

SATT Sud-Est intervient sur le transfert de technologie et la valorisation de la propriété intellectuelle issue de la recherche publique. Bpifrance apporte du capital d’amorçage et un accompagnement stratégique. La combinaison des deux dispositifs facilite la sécurisation du socle technologique et l’accès aux premiers marchés, tout en structurant la gouvernance et la feuille de route industrielle.

Origines scientifiques et gouvernance opérationnelle

Spin-off du cnrs et équipe fondatrice

Optipus PV émerge fin 2023 d’une spin-off du CNRS. L’entreprise est cofondée par Jörg Ackermann, Olivier Margeat, David Duché et Benoît dont le nom complet n’a pas été communiqué. Cette association d’expertises académiques et industrielles dessine une gouvernance orientée vers la mise sur le marché rapide d’une innovation de laboratoire.

La trajectoire annoncée repose sur une discipline de scale-up : stabiliser les procédés de fabrication des cellules organiques, sécuriser les chaînes d’approvisionnement des polymères actifs et finaliser des itérations produit avec des clients pilotes.

Les cellules photovoltaïques organiques se distinguent par des films ultra-fins, flexibles et colorés, pensés pour des surfaces courbes ou textiles. Leur production nécessite moins de ressources que le silicium et les modules visent la recyclabilité. En contrepartie, l’efficacité énergétique intrinsèque est généralement inférieure aux technologies conventionnelles, d’où l’intérêt d’applications sur des objets peu énergivores mais exposés à la lumière ambiante.

Energyskin, un film photovoltaïque organique pensé pour l’usage

Le produit phare d’Optipus PV, Energyskin, se présente sous forme de films adhésifs capables de convertir la lumière ambiante en énergie. L’objectif : prolonger l’autonomie des objets électroniques et réduire le recours aux chargeurs et aux batteries classiques.

Les applications visées sont nombreuses : casques et écouteurs, sacs à dos, vélos ou enceintes. La technologie a été présentée au CES de Las Vegas en janvier 2025, avec un angle fort sur l’électronique outdoor et les objets connectés à faible puissance, reliés à une mini-batterie tampon.

Applications ciblées dans l’électronique mobile

  • Accessoires de mobilité douce, pour une alimentation continue sans retirer l’appareil.
  • Audio nomade et équipements sportifs, avec une autonomie augmentée en extérieur ou en intérieur lumineux.
  • Objets connectés basse consommation, pour limiter la fréquence de recharge et optimiser le cycle de vie des batteries.

Energyskin en un coup d’œil

  • Format : film adhésif ultra-fin, compatible surfaces souples.
  • Intégration : connexion à une mini-batterie pour usage continu.
  • Design : matériaux colorés, adaptables à l’esthétique produit.
  • Environnement : modules conçus pour la recyclabilité et une empreinte matière contenue.

Production pilote en 2026 et montée en cadence

La société prévoit une première ligne pilote en 2026, calibrée pour jusqu’à 20 000 pièces par an. Cette étape doit valider la répétabilité des performances, les rendements de production, la stabilité des encres conductrices et les taux de rebut.

Le déploiement industriel reste progressif : l’entreprise vise d’abord des intégrations B2B sur des volumes maîtrisés, indispensables pour ajuster les procédés et répondre aux exigences de qualité des équipementiers. Le passage du prototype au produit série conditionne l’accès à des contrats cadres avec les fabricants ciblés.

Objectifs 2026 et jalons opérationnels

  • Stabilisation des procédés d’impression des films organiques et contrôle qualité fin de ligne.
  • Qualification des matériaux et tests de durabilité en conditions réelles d’usage.
  • Itérations produit avec des partenaires pilotes en électronique outdoor et micromobilité.

La ligne pilote sert à valider l’industrialisation sur des volumes limités. Elle permet de mesurer l’efficacité globale du procédé, de réduire les défauts, d’éprouver l’assemblage avec la mini-batterie et de documenter la conformité. C’est aussi l’étape clé pour préparer les audits fournisseurs des clients B2B et la montée vers une ligne industrielle à plus forte capacité.

Soutiens publics, capital patient et incitations fiscales

La levée s’inscrit dans un écosystème où les politiques publiques misent sur la deeptech. Le programme French Tech 2030 accompagne l’industrialisation et la souveraineté technologique, tandis que le dispositif Première Usine soutient la création de premières capacités de production. En mai 2025, le Sommet Choose France a annoncé 40,8 milliards d’euros d’investissements et 53 projets, confortant l’attractivité pour les technologies vertes (DGE, 2025).

Optipus PV bénéficie d’un environnement favorable, même si la société n’est pas mentionnée comme lauréate d’un programme spécifique dans les informations disponibles. Les relais de financement et d’accompagnement restent essentiels pour une montée en puissance capitalistique.

Panorama des leviers pour investisseurs et start-up

  • IR-PME : réduction d’impôt sur le revenu pour les souscriptions au capital de PME innovantes, incitation clé pour les business angels.
  • Fonds d’amorçage Bpifrance : capital et accompagnement stratégique, utiles pour structurer les premières étapes d’industrialisation.
  • SATT : transfert de technologies et sécurisation de la propriété intellectuelle en amont de la commercialisation.

Selon l’INSEE, les investissements en R&D liés aux énergies renouvelables ont progressé de 15% entre 2023 et 2024, ce qui soutient l’émergence d’acteurs positionnés sur les OPV et les usages bas carbone.

Points juridiques et conformité à anticiper

  • Propriété intellectuelle : sécurisation des brevets sur les formulations et procédés d’impression.
  • Marquages et normes : exigences de sécurité et de performance pour l’électronique grand public et outdoor, selon les marchés ciblés.
  • Fin de vie : documentation de la recyclabilité et filières de traitement, en cohérence avec les objectifs européens.

Contraintes techniques, réglementaires et arbitrages industriels

Comme toute technologie organique, les cellules OPV doivent encore progresser en efficacité par rapport au silicium. L’enjeu est de trouver le bon product-market fit sur des appareils basse consommation où l’apport énergétique de la lumière ambiante est déterminant pour l’usage.

Sur le plan réglementaire, l’alignement avec les objectifs du Green Deal incite à maximiser la recyclabilité des matériaux, limiter l’empreinte matière et documenter les performances. Ces exigences imposent des parcours de certification plus denses avant une adoption large par les OEM.

Enfin, la scalabilité réclame des investissements additionnels au-delà de l’amorçage. Les coûts d’industrialisation, la fiabilité des approvisionnements et la maîtrise des rendements de production conditionneront la trajectoire économique à moyen terme.

Cadre européen et responsabilité produit

  • Conception pour l’éco-modulation et valorisation des pièces en fin de vie.
  • Intégration de matériaux organiques pour réduire l’intensité matière par rapport à certaines solutions traditionnelles.
  • Traçabilité et données de performance, afin de répondre aux attentes des fabricants et des utilisateurs finaux.
  • OPV : photovoltaïque organique, cellules solaires à base de matériaux organiques imprimables.
  • SATT : Société d’accélération du transfert de technologies, interface entre recherche publique et industrie.
  • IR-PME : régime fiscal incitatif pour l’investissement des particuliers dans le capital de PME.

Cap 2026 pour une mise sur le marché structurée

Avec un financement de 1,5 M€, une ligne pilote attendue en 2026 et des usages B2B clairement identifiés, Optipus PV s’attaque au passage critique du laboratoire à l’usine. La feuille de route privilégie des intégrations pragmatiques dans l’électronique outdoor, où l’apport énergétique de la lumière ambiante crée une valeur d’usage immédiate.

Le momentum de l’écosystème deeptech, nourri par les apports des business angels, les relais publics et l’attention portée aux technologies bas carbone, constitue un terrain propice. Reste à concrétiser les jalons industriels et réglementaires pour installer Energyskin dans le paysage des composants d’alimentation de nouvelle génération.

À suivre en 2026, lorsque les premiers volumes industriels valideront la promesse d’autonomie énergétique embarquée.