Pourquoi Motte-Cordonnier émerge-t-elle sur la scène brassicole ?
Découvrez comment Motte-Cordonnier à Armentières remporte des médailles et dynamise le marché de la bière en France.

À Armentières, une maison de bière historique remet la pression sur la scène française. Motte-Cordonnier, relancée il y a quelques années, aligne désormais des distinctions internationales et un plan d’investissement ambitieux. De quoi éclairer, au-delà de l’effet d’image, les retombées économiques, réglementaires et commerciales d’un renouveau brassicole orchestré depuis les Hauts-de-France.
World beer awards 2025 : signal fort et place de choix pour les brasseries du nord
La saison 2025 des compétitions consacre la vitalité brassicole française, avec un net avantage aux brasseries du Nord. Motte-Cordonnier en livre une démonstration concrète : la maison d’Armentières décroche trois médailles d’argent aux World Beer Awards 2025 pour ses références René Blonde, Émile Triple et Henry IPA.
Ces distinctions s’ajoutent à une médaille d’or au Concours Général Agricole 2025 pour la René Blonde, l’un des jugements les plus suivis par les acheteurs français. L’effet cumulatif est notable : notoriété, référencement accéléré sur certains réseaux, et légitimité accrue face aux distributeurs.
Au-delà du cas d’entreprise, le palmarès confirme un leadership régional. Les Hauts-de-France totalisent 41 médailles lors de l’édition 2025, un volume qui valide la profondeur du vivier local et renforce l’argument commercial des acteurs du territoire (Région Hauts-de-France, 2025).
Exemple avec ninkasi
En miroir de ce mouvement, une autre maison française s’est distinguée en 2025 : Ninkasi voit sa Blanche sacrée au palmarès mondial, rappelant que le savoir-faire ne se cantonne pas à une seule région mais tire l’ensemble de la filière vers le haut. Cette visibilité profite à tous les brasseurs hexagonaux en négociation de référencement, en e-commerce et auprès des cavistes.
Comprendre deux jurys clés pour le marché
Les World Beer Awards et le Concours Général Agricole ne servent pas les mêmes objectifs :
- World Beer Awards : visibilité internationale, benchmarks stylistiques, levier PR et export.
- Concours Général Agricole : reconnaissance nationale, gage de régularité, vecteur d’achats en grande distribution et circuits courts.
Combinés, ces labels couvrent deux horizons commerciaux complémentaires : retail français et marchés extérieurs.
Les jurys évaluent par styles définis : profil aromatique, équilibre houblon-malt, précision de fermentation, texture et finale. Les dégustations se déroulent à l’aveugle, par séries, avec des calibrations régulières.
Un écart de température de service, une prise d’oxygène à l’embouteillage ou un défaut de stabilité aromatique peuvent coûter des points. Pour un brasseur, standardiser les lots et fiabiliser le cold-chain en amont de l’envoi s’avèrent décisifs.
Motte-cordonnier : héritage ancien, relance contemporaine et cap industriel
Le nom Motte-Cordonnier est intimement lié à Armentières. Ses racines remontent à l’Ancien Régime, et la marque s’est structurée industriellement au fil du XIXe siècle. Après une longue éclipse, la brasserie a repris sa production en 2019, portée par une équipe qui conjugue fidélité au terroir et procédés modernes.
Le projet s’est d’abord cadré autour d’un noyau agile : 11 salariés aujourd’hui, avec une organisation compacte qui favorise la réactivité commerciale, la constance de production et la mise au point de recettes calibrées pour des concours exigeants.
La montée en puissance s’est faite à rythme contrôlé. Le cœur de gamme joue trois partitions bien identifiées : une blonde légère aux notes fruitées, une triple plus riche en malts avec pointe épicée, et une IPA à amertume affirmée. Ces styles lisibles facilitent la pédagogie en dégustation, du bar à la cave spécialisée.
Motte-cordonnier : stratégie et résultats
- Positionnement : bières accessibles, lisibles, orientées sur la justesse d’exécution plutôt que l’exubérance aromatique.
- Approvisionnement : intégration d’ingrédients régionaux, notamment le malt, afin d’ancrer l’identité locale et de sécuriser une partie de la chaîne.
- Marque : mise en avant d’un patrimoine d’Armentières, avec des codes graphiques sobres et un récit historique modernisé.
- Résultat tangible : médailles 2025, dynamisation des ventes locales et meilleur taux d’ouverture chez les distributeurs hors région.
Armentières, un écosystème propice
L’histoire industrielle de la ville et sa proximité avec Lille créent un bassin de consommation dense, soutenu par le tourisme évènementiel. Le voisinage de la Belgique facilite les échanges de savoir-faire et l’accès à des passionnés avertis. Ce contexte soutient l’émergence de microbrasseries et le succès d’évènements dédiés à la bière.
Blonde René : équilibre sur la buvabilité, alcool autour de 5 pour cent, finale nette qui la rend compatible avec un service en pression en restauration.
Triple Émile : fermentation soutenue qui apporte rondeur et épices, environ 8 pour cent. Elle se prête aux accords avec fromages affinés.
Henry IPA : houblonnage plus intense, 6 pour cent environ, agrumes et résine modérée. Adaptée aux caves qui cherchent un profil moderne mais non extrême.
Capacités, volumes et maillage commercial : une mécanique qui s’étoffe
La brasserie affiche actuellement une production annuelle supérieure à 2 500 hectolitres. À l’échelle du marché, cela classe Motte-Cordonnier parmi les PME brassicoles à fort potentiel, davantage que dans l’ultra-micro, mais encore loin des volumes des marques nationales.
La distribution repose sur un socle régional puissant. Les bières sont diffusées dans les Hauts-de-France, avec des débouchés croissants en Normandie et à Paris. La maison travaille aussi avec des partenaires en Belgique et en Suisse, ce qui l’expose à des exigences logistiques plus fines, notamment sur la stabilité des arômes, l’étiquetage multilingue et la conformité des mentions légales.
Cette diffusion progressive s’appuie sur trois leviers classiques : circuit CHR, caves et épiceries fines, e-commerce spécialisé. Le triptyque permet d’absorber des pics saisonniers et de diversifier l’exposition aux aléas du retail.
Repères marché 2024 utiles aux brasseurs
- La bière artisanale poursuit sa progression en valeur en France, portée par l’intérêt pour les circuits courts et les styles lisibles.
- Le segment des bières premium et de spécialités soutient la marge, mais exige une régularité de qualité en bouteilles et fûts.
- Les consommateurs plébiscitent l’ancrage régional et la transparence sur l’origine des ingrédients, ce qui renforce l’avantage des brasseries locales.
Pour un acteur comme Motte-Cordonnier, l’enjeu consiste à gagner en capillarité commerciale sans dégrader l’identitaire de la marque.
La rentabilité unitaire dépend de l’arbitrage entre pression et bouteille. La vente à la pression, lorsque les volumes suivent, est souvent plus contributive. Les cavistes, eux, gagnent en prescription, mais imposent une discipline stricte sur la constance des séries. Les compétitions 2025 constituent à ce titre un passeport commercial pour se différencier dans ces réseaux encombrés.
Entre sortie de cuve et dégustation, la chaîne du froid influe sur la stabilité aromatique des houblons et des esters. Optimiser transport et stockage réduit l’oxydation et les écarts de qualité entre lots, un facteur crucial pour maintenir une note organoleptique constante et éviter les déclassements en concours ou en dégustation pro.
Règles de vente et licences : un cadre qui s’assouplit pour la vente directe
Le cadre réglementaire français s’est récemment assoupli pour les brasseries artisanales. Depuis l’été 2025, une mesure nationale facilite la vente au verre de la production propre, sur place ou à emporter, sans les anciennes licences qui freinaient certains projets de taproom. L’évolution est un atout pour les circuits courts et la rentabilité des sites de production (L’Alsace, 24 août 2025).
Concrètement, l’allègement des contraintes favorise trois trajectoires : ouverture de comptoirs de dégustation, allongement des horaires d’accueil du public et montée en gamme de l’expérience client sur site. Les brasseries bénéficient d’une meilleure maîtrise du prix de vente et de la présentation. Cela réduit l’intermédiation et appuie la pédagogie autour des styles.
Pour autant, l’assouplissement n’exonère pas des obligations sanitaires, de la conformité des mentions et de la prévention de l’alcoolisation excessive. Les contrôles peuvent porter sur l’étiquetage, l’hygiène, la sécurité du public et le respect des restrictions liées à la publicité de l’alcool. Une taproom performante est d’abord une taproom conforme.
Points de conformité à sécuriser en taproom
- Mentions obligatoires des étiquettes et affichage lisible des informations consommateurs.
- Hygiène et traçabilité : procédures écrites, plan de nettoyage, contrôle des dates et des lots.
- Gestion responsable : formation du personnel au service de l’alcool, politique de prévention.
- Sécurité des locaux : capacité d’accueil, issues, signalétique, conformité ERP le cas échéant.
Une gouvernance de la conformité évite l’effet ciseau entre montée en puissance de la fréquentation et risques opérationnels.
Un comptoir de dégustation associé à un site de production obéit à des règles spécifiques, indépendantes des activités de restauration. Les évolutions récentes allègent les licences pour la vente au verre de la production propre, mais ne dispensent pas du respect des autres obligations légales. En cas de diversification vers la restauration, un cadre distinct peut s’appliquer selon les prestations (service à table, boissons non produites, etc.).
Un plan d’expansion d’ici fin 2026 : doublement visé et ouverture au public
Motte-Cordonnier prépare un nouveau site de production assorti d’un espace de visite et d’un brewpub. Objectif affiché : doublage des volumes sur un horizon court pour atteindre potentiellement 5 000 hectolitres annuels. Le projet porte à la fois sur l’équipement, l’accueil du public et l’expérience sur place.
La démarche a plusieurs vertus économiques. Investir dans une capacité accrue permet d’amortir plus rapidement la cuverie, de négocier certains intrants et d’absorber les pics saisonniers sans tension excessive sur les plannings. L’espace de visite, lui, participe à la marge via la vente directe, crée des possibilités d’événements privés et renforce la fidélité des clients locaux.
L’enjeu RH suivra. Un doublement de volumes exige une montée en compétence sur la production, la qualité et la logistique. À taille égale, le back-office (planification, maintenance, conformité) est souvent le premier goulot. Le pilotage fin des stocks, l’anticipation des immobilisations et le fractionnement des lots pour le fût et la bouteille deviennent des disciplines clés.
Brewpub : stratégie et résultats
- Expérience client : contact direct, storytelling, mises en avant de brassins éphémères.
- Mix produit : pression prioritaire, marges supérieures, complément par vente à emporter.
- Synergies : flux réguliers sur site, relais de communication organique via les visiteurs.
- Impact économique local : créations d’emplois et retombées sur l’attractivité d’Armentières.
Dans un contexte national où la consommation hors domicile reprend ses marques, les taprooms et brewpubs offrent une surface de marge décisive pour sécuriser l’Ebitda. Bien calibrés, ils amortissent les hausses de coûts des intrants et les surcoûts énergétiques par une création de valeur directe sur site.
Quels effets économiques d’une montée en volume
- Effet d’échelle : achats d’intrants négociés, coûts fixes mieux répartis.
- Capacité de sécurisation des flux : réduction des ruptures et meilleures promesses de service aux distributeurs.
- Renforcement de la position prix : possibilité de stabiliser les tarifs malgré la pression sur les coûts.
Le contrepoint : un besoin accru en cash et un pilotage serré du BFR, notamment sur le fût, plus lent à tourner que la bouteille dans certains réseaux.
Calendrier 2025 et couverture commerciale : braderie, salons et festival
Pour amplifier sa visibilité, Motte-Cordonnier multiplie les rendez-vous où l’audience est qualifiée. La Braderie de Lille, évènement populaire et dense, reste une vitrine de choix. Elle maximise le contact avec des consommateurs curieux, potentiels prescripteurs via les réseaux sociaux, et ouvre une fenêtre sur les professionnels de passage.
Le salon Horesta cible la restauration et l’hôtellerie. C’est l’occasion de travailler messages et contraintes métier : vitesse de service, constance de tirage, taux de casse, rotation des références. Les chefs de secteur y mesurent la capacité de la brasserie à livrer des fûts en temps utile et à fournir des supports de mise en avant.
Le festival Bière à Lille fait le lien entre culture brassicole et marché, dans une région où l’amateurisme éclairé tire la qualité vers le haut. Pour un brasseur, c’est une scène test. Les retours de dégustation s’intègrent au développement produits. Les concours accentuent ensuite la crédibilité face aux acheteurs, bouclant une boucle vertueuse.
Sur ce triptyque, la stratégie commerciale peut se résumer ainsi : attirer, convaincre, structurer. Attirer par le grand public et les concours. Convaincre sur salon professionnel. Structurer par la signature de contrats récurrents et la mise en place d’un calendrier d’animations en point de vente.
L’effet d’un salon ou d’un festival se mesure rarement dans l’immédiat. Les indicateurs à suivre : nombre de contacts utiles, taux de transformation à 30 et 90 jours, part de nouveaux comptes vs réassorts, panier moyen par compte et coût d’acquisition. Un suivi CRM rigoureux, avec un scoring simple (qualité du prospect, intérêt pour la pression, capacité de volume), permet d’objectiver le ROI.
Une dynamique nordiste qui crée de la valeur au-delà du verre
Les prix 2025 de Motte-Cordonnier ne forment pas un aboutissement. Ils servent de rampe pour consolider une trajectoire : montée en capacité, accueil du public, couverture commerciale élargie. La réforme des ventes au verre accélère l’équation économique des sites de production et crédibilise les projets de taprooms régionales, à condition de sécuriser la conformité et l’expérience.
La force du territoire, rappelée par le volume de médailles régionales cette année, est un avantage concurrentiel à exploiter méthodiquement. En se positionnant sur des styles lisibles, en renforçant l’ancrage local et en s’ouvrant aux marchés frontaliers, Motte-Cordonnier illustre une voie d’équilibre entre héritage et compétitivité. Les prochains mois diront comment ce cap se traduit, en volumes, en emplois et en notoriété.
À Armentières, la relance de Motte-Cordonnier catalyse tendances de marché, allègement réglementaire et stratégie de marque, dessinant une croissance mesurée où qualité primée et ancrage local nourrissent à la fois l’économie régionale et l’ambition nationale.