Léon Grosse se renforce sur le marché du BTP français
Découvrez comment Léon Grosse prévoit d'atteindre 1,3 milliard d'euros d'ici 2030, en misant sur la spécialisation et la rénovation énergétique.

À Chambéry, Léon Grosse intensifie sa mue. Entreprise familiale fondée en 1881, l’ETI du BTP boucle 2024 avec un chiffre d’affaires de 907 millions d’euros et projette la barre du 1,3 milliard d’euros à l’horizon 2030. Diversification, industrialisation des expertises et ancrage RSE structurent désormais la stratégie d’un groupe qui se repositionne sur des marchés porteurs.
Léon Grosse : trajectoire 2024 et cap à 2030
Le groupe confirme son retour en puissance sur le marché français de la construction. En 2024, le chiffre d’affaires atteint 907 millions d’euros, dans le prolongement d’une dynamique engagée après des exercices moins favorables.
À titre de repère, le volume d’activité s’élevait à 826 millions d’euros en 2020, témoignant d’une reprise tangible. L’entreprise fixe un jalon stratégique clair : franchir le seuil du 1,3 milliard d’euros d’ici 2030 grâce à une montée en puissance ordonnée, portée par des métiers mieux segmentés et un renforcement de ses expertises techniques.
La lecture sectorielle est nette : le BTP français traverse des cycles d’investissement heurtés. Dans ce contexte, Léon Grosse privilégie une progression dite qualitative. Autrement dit, une croissance pilotée par la structure des offres, la spécialisation sur des segments techniques et la sélectivité commerciale lorsqu’il s’agit d’arbitrer des projets sensibles aux prix des matières ou à la complexité réglementaire.
La marche vers 2030 ne repose donc pas sur le volume seul mais sur une réallocation de capital humain et technique vers des pôles plus résilients. Cette approche réduit l’exposition aux chantiers à marge compressée, tout en sécurisant des savoir-faire différenciants, notamment sur la rénovation énergétique et les façades.
Repères financiers à retenir
Points clés communiqués par l’entreprise et la presse économique :
- 907 millions d’euros de chiffre d’affaires en 2024.
- 826 millions d’euros en 2020, soit un point de comparaison utile pour mesurer la reprise.
- Objectif déclaré : 1,3 milliard d’euros à l’horizon 2030 (La Tribune).
Organisation en cinq pôles : un modèle orienté marchés
La gouvernance opérationnelle a été refondée autour de cinq pôles qui concentrent les moteurs de création de valeur : construction, rénovation énergétique, façades, patrimoine et immobilier. Cette architecture rend l’allocation des ressources plus agile et permet d’adresser des marchés aux cycles et aux risques distincts.
La rénovation énergétique est érigée en priorité. Les exigences françaises et européennes en matière de performance des bâtiments font émerger une demande plus technique, où l’entreprise place l’ingénierie au cœur des offres. En parallèle, le pôle façades capitalise sur l’intégration de compétences spécifiques, consolidées depuis la prise de participation majoritaire dans Kyotec en 2020, afin d’adresser des projets d’enveloppe architecturale à forte complexité.
Rénovation énergétique : accélération réglementaire et exigences de performance
En pratique, l’entreprise met en avant des solutions intégrées qui combinent amélioration thermique, gestion des systèmes techniques et réduction mesurable des consommations. Cette approche épaissit la proposition de valeur au-delà du simple chantier, et la rapproche de la performance d’usage, point de passage obligé pour répondre aux cahiers des charges publics et privés.
Façades et enveloppe du bâtiment : montée en gamme technique
Les métiers de l’enveloppe exigent une maîtrise conjointe de la thermique, de l’acoustique, de l’étanchéité à l’air et de l’esthétique. L’intégration des compétences de Kyotec a renforcé cette chaîne de valeur. Résultat attendu : un positionnement plus affirmé sur les appels d’offres nécessitant innovation en façade, matériaux différenciants et savoir-faire d’ingénierie en amont.
Le terme désigne les systèmes d’enveloppe qui conjuguent performance énergétique et expression architecturale. Ils mobilisent des compétences en conception et en mise en œuvre pour assurer confort thermique, durabilité, étanchéité et intégration esthétique. Les solutions s’étendent des murs rideaux aux façades ventilées, avec des combinaisons de verre, métal, béton ou matériaux biosourcés selon les exigences du projet.
International : 20 % d’activité hors de France visés
Déjà implanté au Royaume-Uni, le groupe veut porter à 20 % la part de son activité réalisée à l’international d’ici 2030. L’objectif est double : diversifier les risques et capter la montée en charge des projets orientés construction durable en Europe. L’entreprise privilégie des partenariats locaux, levier essentiel pour naviguer dans des environnements réglementaires disparates et répondre aux standards attendus par les maîtres d’ouvrage.
Cette démarche n’a rien d’une fuite en avant. Elle s’inscrit dans un modèle d’expansion mesurée, aligné sur les compétences internes existantes et sur des marchés comparables à la France en termes d’exigences techniques et de maturité ESG. L’enjeu consiste à choisir des positions où l’effet de spécialisation prime le volume, tout en conservant un socle robuste d’activités en France.
Europe continentale : opportunités ciblées
Sans multiplier les pays, l’entreprise sonde des opportunités européennes cohérentes avec ses pôles. La logique est d’abord micro-économique : sécuriser un pipeline de projets alignés avec les savoir-faire de rénovation énergétique et d’enveloppe, en complément de la construction et de la réhabilitation à haute valeur ajoutée. La synergie locale via des partenaires permet d’accélérer sans diluer les marges ni alourdir la structure de coûts fixes.
Les contrats export exposent aux différences de normes, de responsabilités assurantielles et de régimes de garanties. Les clauses sur délais, pénalités et conditions de paiement doivent être adaptées aux pratiques locales. Les partenariats avec des acteurs établis aident à maîtriser les risques d’exécution et d’approvisionnement, un point particulièrement sensible pour les lots techniques de façade et de rénovation énergétique.
RSE au niveau Exemplaire : leviers opérationnels et sociaux
La démarche RSE est un axe cardinal. Certifiée « Engagé RSE » au niveau Exemplaire par l’Afnor, l’entreprise revendique une intégration de la RSE à la stratégie, considérée en interne comme un instrument d’orientation des décisions. Cette ligne directrice se traduit par des engagements concrets, en particulier dans les offres commerciales et la politique sociale.
Sur le plan environnemental, 70 % des offres commerciales incluent une alternative à plus faible impact, qu’il s’agisse de matériaux, de procédés ou d’optimisation de la performance d’usage. Sur le plan social, 32 % des compagnons proviennent de dispositifs d’insertion, favorisant l’accès à l’emploi et la montée en compétences de publics éloignés du marché du travail.
Chiffres RSE internes mis en avant
Trois marqueurs structurants, à impact direct sur la création de valeur :
- Certification « Engagé RSE » de l’Afnor, niveau Exemplaire.
- 70 % des offres comportent une option environnementale alternative.
- 32 % des compagnons issus de l’insertion professionnelle.
Bonnes pratiques RH et marque employeur
La politique RH évolue pour répondre à la pénurie de profils dans le BTP. En 2024, Léon Grosse est classée 2e au palmarès Best Workplaces dans la catégorie des entreprises de 1000 à 2500 salariés, distinction mise en avant par la presse économique. Cet indicateur de climat social renforce la capacité à attirer et fidéliser des compétences sur des métiers techniques où la tension demeure élevée, notamment en conduite de travaux, étude de prix et métiers d’exécution spécialisés.
La mise à niveau des conditions de travail, le développement de la formation et l’intégration de profils diversifiés constituent des vecteurs clés pour sécuriser la qualité d’exécution. Cette démarche est cohérente avec les priorités publiques favorisant l’inclusion et l’emploi, dans une logique d’impact économique et social documentée par l’entreprise et les observateurs du marché (Le Figaro).
Les parcours d’insertion alimentent des métiers en tension et stabilisent les équipes à moyen terme. Pour l’entreprise, l’effet recherché est double : sécuriser le planning en réduisant la dépendance aux sous-traitances opportunistes et capitaliser sur des savoir-faire progressivement internalisés, notamment en réhabilitation et en lots techniques.
Gouvernance des risques : inflation, normes et contrôle IEF
Le BTP reste exposé à l’inflation des matériaux et à la variabilité des délais d’approvisionnement. La montée en technicité des projets s’accompagne également d’un renforcement des contraintes réglementaires, de la conception au commissioning. Pour une ETI, la clé est d’inscrire ces contraintes dans les offres dès l’appel d’offres, afin de maîtriser les aléas de marge.
Autre point de vigilance pour la gouvernance : les opérations susceptibles d’entrer dans le périmètre des investissements étrangers en France et leur contrôle. Le rapport annuel 2024 de la Direction générale du Trésor rappelle la réalité de ce cadre, outil de souveraineté économique visant des secteurs stratégiques.
Dans la construction, les implications peuvent émerger lors d’opérations capitalistiques ou de partenariats sur des actifs sensibles. Sans être au cœur du modèle de Léon Grosse, cette contrainte illustre l’impératif de conformité pour les acteurs industriels opérant en France.
Pour équilibrer risque et compétitivité, l’entreprise met en avant une ingénierie qui anticipe l’évolution normative et réglementaire, et privilégie des écosystèmes d’approvisionnement compatibles avec ses engagements RSE. Ces arbitrages sont devenus une composante essentielle de la performance économique dans le BTP, au même titre que la productivité chantier ou l’optimisation des délais.
Contrôle IEF : rappel utile pour les entreprises
L’IEF, ou contrôle des investissements étrangers en France, vise à encadrer certaines prises de participation dans des secteurs sensibles. Il impose des notifications et, le cas échéant, des autorisations préalables. Pour les entreprises industrielles, la vigilance porte sur :
- La qualification du secteur et des actifs concernés.
- Les seuils de détention et la nature des droits transférés.
- Les délais à intégrer dans les calendriers de transaction.
La volatilité acier, aluminium, verre et isolants impacte le coût des structures, des façades et des améliorations thermiques. Les maîtrises d’ouvrage exigent des garanties de performance, tandis que les entreprises recherchent des clauses de révision appropriées. L’anticipation via achats cadres, variantes techniques et phasage d’exécution devient un différenciateur clé.
L’histoire de Léon Grosse : d’une entreprise savoyarde à une ETI nationale
Fondée en 1881, la maison savoyarde est restée familiale tout en se hissant au rang d’acteur national. Le groupe a construit sa réputation sur des chantiers emblématiques, puis a structuré son développement autour d’une organisation plus industrielle. L’objectif de devenir l’une des ETI leaders de la construction en France a été formulé dès 2020, avec à l’appui la consolidation d’expertises techniques et une discipline commerciale accrue.
La diversification a joué un rôle central. En 2020, la prise de participation majoritaire dans Kyotec a accéléré l’entrée sur des projets de façade à forte valeur ajoutée. Parallèlement, l’investissement dans la rénovation énergétique a ouvert de nouveaux relais de croissance, au croisement des besoins des collectivités, des bailleurs et des gestionnaires d’actifs.
Savoyard par ses racines, européen par ses chantiers
L’entreprise maintient une base française solide, tout en déployant des projets au Royaume-Uni et en explorant des positions ciblées sur le continent. Ce modèle combine proximité des donneurs d’ordre nationaux et accès à des marchés européens où la demande en construction durable s’intensifie. L’ambition reste mesurée : accroître la part internationale à 20 % d’ici 2030, sans diluer l’ADN technique.
Cette trajectoire illustre un mouvement plus large du BTP français : la capacité à exporter des savoir-faire d’ingénierie appliqués, notamment sur les enveloppes et la réhabilitation performancielle, tout en conservant un ancrage local fort pour l’exécution.
Cap industriel et impact économique : ce que change la nouvelle grille de lecture
La segmentation en cinq pôles et la montée en puissance de la RSE redessinent l’économie du groupe. Quelques changements se distinguent :
- Sélectivité commerciale plus marquée pour sécuriser la marge sur des projets techniques et réglementaires.
- Industrialisation des expertises façades et rénovation, permettant de capitaliser sur des méthodes reproductibles et un retour d’expérience accéléré.
- Chaîne d’approvisionnement pilotée autour d’options bas carbone et de variantes techniques documentées, utiles en phase d’offre.
- Marque employeur appuyée par des indicateurs de qualité de vie au travail et l’insertion, favorable à la disponibilité des compétences.
Ce cadrage conforte la logique d’une croissance disciplinée. L’entreprise s’expose moins aux aléas des cycles prix-volume, et plus aux marchés où la valeur provient de la performance d’usage, de la conformité et de la capacité à livrer des chantiers complexes dans les délais. La transformation n’est pas qu’un discours : elle s’incarne dans les pôles, dans la part des offres intégrant des alternatives environnementales et dans les pratiques RH.
Feuille de route 2030 : croissance disciplinée et innovation utile
Pour la décennie en cours, Léon Grosse affiche une ligne claire : faire converger compétitivité économique, excellence technique et engagements RSE. L’objectif de 1,3 milliard d’euros ne vaut que s’il s’accompagne d’une qualité de marge et d’une maîtrise des risques à la hauteur. L’accent mis sur la rénovation énergétique, les façades et l’international ciblé livre un cadre cohérent pour y parvenir.
L’entreprise aborde ainsi la suite du cycle sur des bases resserrées : métiers spécialisés, sourcing aligné avec la RSE et gouvernance attentive aux sujets de conformité et d’investissement. La trajectoire dépendra des arbitrages publics et privés, mais la structure est en place pour convertir la spécialisation en résultat mesurable à l’échelle de l’ETI.
Rendez-vous est pris pour mesurer, projet après projet, la capacité du groupe à transformer ses atouts techniques en avantage compétitif durable.