Parima : une nouvelle entité pour révolutionner l'alimentation cultivée
Découvrez comment Gourmey et Vital Meat créent Parima pour transformer l'industrie des aliments cultivés en Europe.

À Évry-Courcouronnes, Gourmey prend la main sur Vital Meat et fait émerger Parima, une bannière commune pour accélérer l’industrialisation des aliments cultivés en Europe. L’opération, annoncée le 15 octobre 2025, redessine le paysage français des protéines alternatives et installe une ambition claire : combiner science cellulaire et capacité industrielle pour viser un leadership mondial.
Parima naît de l’acquisition de Vital Meat par Gourmey
La jeune pousse francilienne Gourmey, connue pour son foie gras cultivé, a confirmé l’acquisition de Vital Meat, jusqu’ici au sein du groupe Grimaud, et la création d’une structure unique : Parima. Le nouveau périmètre associe les lignes cellulaires de poulet développées par Vital Meat aux procédés de culture de Gourmey, afin de consolider la propriété intellectuelle, d’optimiser la montée en échelle et de mutualiser les démarches réglementaires.
Selon les informations publiées le 15 octobre 2025, la transaction scelle une consolidation en France dans un secteur où la taille critique devient un différenciateur. Parima affiche sa feuille de route : accélérer l’innovation, renforcer la souveraineté technologique européenne et soutenir une transition vers une production animale de nouvelle génération à plus faible empreinte carbone.
Dans un message officiel, Parima résume son positionnement : « En réunissant deux équipes pionnières, nous renforçons la capacité de l’Europe à mener la transition mondiale vers une production animale efficace et durable grâce à l’innovation, en complétant les méthodes existantes et en construisant des chaînes de valeur plus résilientes ». Cette orientation confirme la volonté de scaler à l’industrie, en partant de briques technologiques déjà éprouvées en laboratoire.
Aliments cultivés : de quoi parle-t-on concrètement
Les aliments cultivés reposent sur la culture de cellules animales en bioréacteurs. Résultat attendu : des protéines qui reproduisent la texture, le goût et la valeur nutritionnelle des produits d’élevage, sans abattage et avec des intrants optimisés. Le concept vise à réduire les externalités environnementales tout en assurant une qualité constante et une traçabilité renforcée.
Synergies industrielles et portefeuille technologique
Avec la fusion, Parima intègre des infrastructures de culture cellulaire, des lignes cellulaires propriétaires, des brevets et des dossiers liés aux demandes réglementaires portés par Gourmey et Vital Meat. L’ensemble doit accélérer la réduction des coûts de production et faciliter une bascule vers des volumes précommerciaux, puis commerciaux, dans un contexte européen exigeant en matière de sécurité alimentaire.
La complémentarité est double : technologique et marché. Gourmey apporte son savoir-faire sur des produits premium comme le foie gras cultivé. Vital Meat, positionnée sur des ingrédients protéinés pour l’agroalimentaire, renforce l’ouverture vers des applications B2B.
Gourmey : profil et financement
Fondée en 2019, Gourmey a levé 48 millions d’euros en 2022 pour industrialiser son procédé de foie gras cultivé. Son ancrage en Île-de-France réunit chercheurs et ingénieurs en biotechnologie cellulaire. L’entreprise a structuré son effort de R&D sur des protocoles de culture, des milieux et des supports qui alignent qualité sensorielle et contraintes d’échelle.
Vital Meat et groupe Grimaud : atouts industriels
Vital Meat s’appuie sur l’écosystème du groupe Grimaud, basé à Roussay, spécialiste de la génétique animale multi-espèces. Le groupe a enregistré 130 millions d’euros de chiffre d’affaires en 2023, et Vital Meat a constitué un portefeuille de lignes cellulaires de poulet et un positionnement d’ingrédient B2B. Cette base renforce Parima sur le plan des ressources biologiques, du scaling et de la qualité.
Trois maillons déterminent la performance économique : la génération de lignes cellulaires robustes et stables, le coût des milieux de culture et la conception de bioréacteurs adaptés à l’adhérence ou à l’agrégation cellulaire. La fusion rapproche ces briques clé pour viser des coûts unitaires soutenables en B2B et en B2C.
Gouvernance réglementaire et propriété intellectuelle
Parima indique intégrer les demandes réglementaires préparées par Gourmey et Vital Meat, avec des interactions attendues auprès d’autorités comme l’EFSA. En Europe, aucun feu vert n’a été rapporté à ce stade pour les viandes cultivées, là où Singapour et les États-Unis ont commencé à autoriser certaines commercialisations dès 2023. Cette asymétrie ouvre une fenêtre de préparation pour constituer des dossiers techniques robustes.
L’enjeu de la propriété intellectuelle demeure central. L’alignement des brevets et savoir-faire autour des lignées cellulaires, milieux, matrices comestibles et procédés de différenciation renforce la barrière à l’entrée et sécurise le transfert depuis le laboratoire vers l’usine pilote, puis vers la production industrielle.
Dossiers EFSA : chemin de commercialisation
Les demandes visent à démontrer la sécurité sanitaire, la composition et la stabilité des produits finis, ainsi que la maîtrise des procédés. Parima pourra tirer profit de la consolidation des données et de l’harmonisation documentaire pour raccourcir les délais de réponse. L’objectif annoncé reste une accélération de la mise sur le marché en Europe, sous réserve d’évaluation positive des autorités.
Propriété intellectuelle : brevets et complémentarités
La combinaison des portefeuilles de Gourmey et Vital Meat favorise l’extension des protections sur la chaîne complète, du cradle-to-scale des lignées jusqu’aux protocoles de maturation. Pour un acteur émergent, c’est un levier de négociation avec des partenaires industriels et un atout dans la réduction du coût du capital.
Les éléments classiquement attendus portent sur la sécurité microbiologique et chimique, la caractérisation des ingrédients et auxiliaires technologiques, la constance de procédé, la traçabilité des lignées et la qualité nutritionnelle. La granularité des données et la reproductibilité sont déterminantes pour convaincre les autorités.
Contexte européen : France 2030 et Green Deal, leviers publics
La trajectoire de Parima s’inscrit dans un environnement public mobilisé. Le programme France 2030, lancé en 2021, finance des projets d’innovation vers une alimentation durable.
Le 7 mai 2025, le ministère de l’Agriculture a confirmé la réouverture de l’appel à projets Résilience et Capacités Agroalimentaires 2030, avec des enveloppes orientées prototypes et industrialisation. En parallèle, des initiatives sur les compétences et métiers d’avenir cumulent des financements totaux supérieurs à 50 millions d’euros pour des projets identifiés en 2025 (gouvernement français, octobre 2025).
À l’échelle de l’UE, le Green Deal favorise les alternatives aux élevages intensifs et la réduction des émissions associées. En visant une production animale de nouvelle génération, Parima se situe sur un axe cohérent avec ces politiques, notamment en renforçant la résilience des chaînes de valeur.
CIR et dispositifs France 2030 : effets possibles pour Parima
Le crédit d’impôt recherche constitue un pilier fiscal pour les start-up deeptech : jusqu’à 30 % des dépenses éligibles de R&D peuvent être remboursées. Combiné à l’accès aux dispositifs France 2030, ce socle peut amortir l’effort capitalistique lié à l’industrialisation des bioprocédés et soutenir la montée en échelle.
Green Deal et chaînes de valeur plus résilientes
L’industrialisation des aliments cultivés répond aux objectifs de résilience face aux chocs sanitaires et climatiques. En France, elle peut déclencher des effets d’entraînement sur la fabrication d’équipements, la logistique du froid, l’ingénierie de procédés et la gestion de la qualité, avec un ancrage territorial en Île-de-France et dans le Maine-et-Loire.
Les bioréacteurs et milieux de culture sont les principaux postes de coût et d’impact. Les progrès de formulation, le recyclage des composants et l’usage d’ingrédients alimentaires de substitution aux facteurs biologiques coûteux sont des leviers pour réduire la dépendance aux intrants critiques.
Impact économique en France : emplois, ancrage territorial et compétitivité
L’acquisition renforce l’ancrage industriel en Essonne et dans le Maine-et-Loire, avec des besoins en talents qualifiés en bioproduction, assurance qualité et ingénierie. Cette combinaison des bassins d’emploi favorise l’émergence d’une filière nationale structurée, connectée aux grands laboratoires académiques et aux fournisseurs d’équipements.
Au plan macro, l’agroalimentaire représente environ 4 % du PIB en France. Les innovations de type aliments cultivés peuvent contribuer à rehausser la productivité, à sécuriser l’offre et à soutenir la balance commerciale grâce à des exportations de technologies et de produits à haute valeur ajoutée.
Ancrage en Essonne et en Maine-et-Loire : effets d’entraînement
Les deux zones combinent R&D, pilotes industriels et savoir-faire logistique. Les fournisseurs locaux peuvent bénéficier de commandes récurrentes en instrumentation, contrôle qualité, réactifs et services d’ingénierie. Cette proximité réduit les délais de mise au point et accélère la qualification des procédés.
Chaîne d’approvisionnement et sobriété carbone
Le secteur des aliments cultivés est régulièrement mis en avant pour son potentiel de réduction d’impact. Des analyses citées indiquent une possible baisse allant jusqu’à 90 % des émissions de gaz à effet de serre par rapport aux filières conventionnelles, selon la technologie retenue.
En parallèle, l’élevage traditionnel mobiliserait environ 70 % des terres agricoles mondiales et contribuerait à 14,5 % des émissions de CO2. Dans ce contexte, Parima se place sur un segment où la sobriété foncière et la décarbonation peuvent devenir des avantages comparatifs.
Au-delà de l’environnement, la question sociétale est centrale : les aliments cultivés offrent une alternative sans abattage, en phase avec une part croissante de consommateurs ouverts à des protéines alternatives lorsqu’elles sont durables et transparentes sur leur fabrication. Le positionnement premium de type foie gras cultivé sert de tremplin pédagogique avant l’élargissement vers d’autres catégories.
Trois facteurs de compétitivité pour Parima
- Coût des milieux et optimisation des intrants, déterminants pour atteindre des prix cibles.
- Réglementation maîtrisée, avec des dossiers complets et une traçabilité exemplaire.
- Échelle industrielle et capex mesurés, en privilégiant des pilotes modulaires et la standardisation d’équipements.
Feuille de route commerciale : du premium vers les ingrédients B2B
La fusion calibre deux canaux. D’un côté, des produits premium comme le foie gras cultivé, à forte valeur, susceptibles d’absorber des coûts unitaires encore élevés. De l’autre, des ingrédients protéinés B2B pour formulations hybrides ou 100 % cultivées, qui ciblent l’industrie agroalimentaire et la restauration.
Cette double entrée permet de tester les marchés en profondeur, d’optimiser les formulations et d’ajuster les volumes, tout en construisant le dossier d’acceptabilité consommateur. À l’appui, l’estimation d’un marché mondial des viandes cultivées autour de 25 milliards de dollars à l’horizon 2030 souligne le potentiel adressable, même si la courbe d’adoption reste conditionnée à la réglementation et aux coûts de production (FoodNavigator, 15 octobre 2025).
Positionnement prix et segmentation
Les premiers lancements privilégient les segments où la valeur perçue est élevée et la différenciation forte. Le déploiement d’ingrédients B2B permettra ensuite de diluer les coûts dans des recettes complexes, de standardiser l’approvisionnement et de lisser la montée en régime industrielle.
Partenariats industriels et restauration
Des accords en co-développement avec des transformateurs ou des acteurs de la restauration pourront fiabiliser la demande et accélérer la validation des applications culinaires à grande échelle. La fusion simplifie le message à l’écosystème : un interlocuteur unique, un portefeuille élargi et une capacité d’exécution renforcée.
Financement et fiscalité : sécuriser la courbe d’apprentissage
Les technologies de fermentation et de culture cellulaire exigent des capex et opex importants avant l’atteinte d’un coût marginal compétitif. Le CIR et les instruments de France 2030 peuvent abaisser le coût du capital pour les phases d’ingénierie et de qualification industrielle. Par ailleurs, les dispositifs de soutien aux compétences accélèrent la structuration d’une main-d’œuvre spécialisée, clé pour stabiliser la qualité en production.
À mesure que Parima franchira des jalons techniques, le financement pourra s’orienter vers des combinaisons associant subventions, prêts innovation et capital privé, tout en recherchant des contrats d’achats fermes avec des partenaires. La fusion joue ici un rôle de dé-risqueur en mutualisant la PI, les installations et les équipes.
Bénéfices d’échelle et réplicabilité
La standardisation des lots de milieux, la qualification de fournisseurs multi-sources et la modularité des bioréacteurs soutiennent la réplicabilité des sites. À terme, la duplication de lignes industrielles pourrait réduire les coûts unitaires et faciliter l’export, renforçant la position de la France comme hub européen des protéines alternatives.
Après l’opération, quels jalons à court terme pour Parima
La priorité est désormais opérationnelle : intégrer les équipes, harmoniser les protocoles qualité, cartographier la PI et aligner les dossiers réglementaires. Sur le plan commercial, la stratégie semble privilégier une entrée par le premium pour bâtir la marque, puis l’expansion en B2B pour les volumes. Le tout avec un narratif axé sur la durabilité, la performance sanitaire et la résilience des chaînes d’approvisionnement.
Cette consolidation française, officialisée à l’automne 2025, pourrait catalyser d’autres rapprochements en Europe. Parima ouvre une voie : industrialiser sans renoncer à l’exigence scientifique, tout en s’arrimant aux politiques publiques d’innovation et de souveraineté alimentaire.
La course est lancée, et Parima joue désormais à taille critique.