À Aytré, Systel élargit son périmètre d’action. Le 6 octobre, GBL Holding, actionnaire de Systel, a pris une participation majoritaire dans Jaguards, éditeur basé à Valbonne et reconnu pour ses solutions de gestion opérationnelle. Objectif annoncé : muscler l’offre technologique en sécurité civile et accélérer la diffusion d’outils numériques dédiés aux interventions d’urgence.

Prise de contrôle de Jaguards par GBL Holding : cap stratégique pour la sécurité civile

Le mouvement capitalistique est clair : GBL Holding consolide son pôle logiciels de sécurité civile en entrant au capital de Jaguards à hauteur majoritaire. L’opération, finalisée le 6 octobre, ne s’accompagne pas d’une fusion juridique immédiate. Les deux sociétés conserveront leur identité et leur base client, tout en organisant une montée en puissance commune sur le produit et le marché.

Les paramètres financiers ne sont pas communiqués. En revanche, le périmètre vise une coopération technique et commerciale resserrée. Systel apporte sa couverture nationale auprès des Services Départementaux d’Incendie et de Secours, tandis que Jaguards injecte ses briques logicielles dédiées aux environnements industriels, urbains et aux sites à forte affluence.

Dans l’écosystème français de la protection des populations, la consolidation par adjonction d’expertises est un chemin pragmatique. Elle réduit les délais de mise sur le marché pour des fonctionnalités critiques, tout en aidant les acheteurs publics et privés à gérer l’interopérabilité entre leurs systèmes.

Ce que recouvre une prise de participation majoritaire

Sans fusion, une participation majoritaire peut déjà produire des effets décisifs :

  • Alignement de la gouvernance et du pilotage stratégique.
  • Priorisation commune des feuilles de route produit, avec arbitrages mutualisés.
  • Distribution croisée via des forces commerciales coordonnées.
  • Effets d’échelle sur les achats techniques et la conformité.

Chaque effet dépend cependant des accords formalisés entre les parties et de leur cadence d’exécution.

Qui est Systel : ancrage à Aytré et savoir-faire opérationnel

Éditeur pionnier de la gestion d’alertes pour les secours, Systel s’est construit sur un socle industriel à Aytré, en Charente-Maritime. L’entreprise compte 120 salariés, réalise un chiffre d’affaires de 15,9 millions d’euros et revendique plus de 35 ans d’expertise dans les logiciels de coordination d’intervention. Ses solutions équipent près de la moitié des SDIS en France, une couverture soulignée par la profession (CNAJMJ, 22 janvier 2024).

Le positionnement est résolument opérationnel : alerter, qualifier, engager, coordonner, historiser. Systel s’adresse aux acteurs de la sécurité civile, au-delà des pompiers, avec un même impératif de fiabilité en situation critique. Cette spécialisation explique la profondeur fonctionnelle de ses produits, ainsi que l’empreinte de ses références en France.

Sur le plan économique, Systel a sécurisé sa trajectoire récente. Des publications de presse régionales évoquent une situation stabilisée à l’automne 2024 et l’ambition d’étendre son empreinte vers l’Outre-Mer, le Royaume-Uni et l’Afrique. L’entreprise a obtenu la validation d’un plan de continuation par le tribunal de La Rochelle, lui permettant de poursuivre sa dynamique commerciale et sa R&D.

Un logiciel de gestion d’alertes performe à trois niveaux :

  • Détection et consolidation des signaux d’alerte, provenant de multiples capteurs et sources humaines.
  • Décision et engagement des moyens, avec cartographie, scénarios d’intervention et règles de priorisation.
  • Retour d’expérience et capitalisation, pour affiner les schémas d’action et les entraînements futurs.

Les systèmes analogues décrits dans les chaînes d’alerte alimentaire rappellent l’importance des protocoles, de la traçabilité et de la réactivité coordonnée, même si les secteurs diffèrent.

Jaguards à Sophia Antipolis : technologies et clients clés

Créée en 2016 et installée à Valbonne, au cœur de Sophia Antipolis, Jaguards développe des solutions de gestion opérationnelle dédiées à la protection des personnes et des biens. L’entreprise, aussi référencée sous le nom SemanticsExperts, allie une orientation produit centrée sur la réactivité en urgence et un ancrage dans un écosystème de R&D dense. Elle a enregistré un résultat net de 257 000 euros en 2024, témoignant d’une montée en puissance maîtrisée.

Son portefeuille couvre des industriels du transport et de l’énergie, des collectivités urbaines comme Nice, ainsi que des infrastructures d’accueil du public, à l’image du Puy du Fou. Les cas d’usage partagent un tronc commun : collecte multi-sources, corrélation d’événements, commande et contrôle, et diffusion rapide d’informations exploitables.

Nice : pilotage opérationnel en environnement urbain

Dans un contexte métropolitain, les besoins portent sur l’orchestration multi-acteurs, l’intégration aux systèmes urbains, la cartographie temps réel et la communication sécurisée. Jaguards s’insère sur ce terrain avec des suites qui fluidifient l’acheminement de l’information vers les équipes de terrain, tout en respectant les cadres techniques et juridiques imposés aux collectivités.

Le Puy du Fou : coordination de sites à forte affluence

Dans les sites touristiques, la priorité est d’accélérer la décision et la diffusion d’instructions claires lors d’un incident, pour protéger les visiteurs et les personnels. Les fonctionnalités dédiées à la remontée d’alertes, au balisage des zones et au pilotage des évacuations sont au centre des attentes.

Sophia Antipolis offre un vivier d’ingénieurs, des partenariats académiques et un environnement propice aux tests grandeur nature de briques logicielles. Pour un éditeur orienté opérations critiques, cette proximité avec des compétences en cybersécurité, l’IA et les communications durcies est un accélérateur de maturité produit.

Synergies produit et marché : intégration fonctionnelle sans fusion juridique

La combinaison Systel et Jaguards crée une chaîne de valeur élargie en sécurité civile et en gestion opérationnelle. Les acheteurs publics et privés recherchent des solutions capables de couvrir l’alerte, la coordination et la traçabilité sur des périmètres hétérogènes. L’alliance apporte plusieurs bénéfices concrets pour ces décideurs.

  • Couverture fonctionnelle étendue des scénarios d’urgence, du déclenchement à l’analyse post-incident.
  • Interopérabilité accélérée entre plateformes de commandement et briques spécialisées.
  • Mutualisation de la R&D pour délivrer des nouveautés plus rapidement, dont l’IA applicative pour la détection de signaux faibles et la priorisation des ressources.
  • Capacités multi-sectorielles : secours, villes, énergie, transport, tourisme, sites classés.

Cette trajectoire répond aussi à la montée en complexité des menaces, numériques et physiques. En 2024, 348 000 infractions liées au numérique ont été enregistrées par les services de sécurité en France, ce qui renforce la demande de solutions fiables, auditables et intégrables dans des architectures robustes (Ministère de l’Intérieur, 11 juillet 2025).

Chiffres à retenir

  • 120 salariés chez Systel.
  • 15,9 M€ de chiffre d’affaires pour Systel.
  • 257 000 € de résultat net 2024 pour Jaguards.
  • Près de la moitié des SDIS équipés par Systel en France.
  • 6 octobre : prise de participation majoritaire de GBL Holding dans Jaguards.

Les modalités financières de l’opération capitalistique ne sont pas publiques à ce stade.

Sécurité des infrastructures critiques : exigences techniques et cadre public

La sécurité civile s’inscrit désormais dans une équation où le numérique, la disponibilité temps réel et la cybersécurité se conjuguent. Le rapport d’activité 2024 de l’ANSSI insiste sur la montée en puissance de l’écosystème cyber français et l’enjeu de protéger les infrastructures critiques, y compris par la sécurisation des couches logicielles et des interconnexions.

Dans ce contexte, les logiciels d’alerte et de gestion opérationnelle doivent répondre à des exigences élevées : résilience, intégrité des données, souveraineté de l’hébergement, auditabilité. Les chaînes d’alerte formalisées dans d’autres secteurs, comme l’alimentaire, éclairent sur les bonnes pratiques de détection, de qualification et de réactivité, même si les enjeux métiers diffèrent.

  • Traçabilité des événements et des décisions prises en salle de commandement.
  • Interconnexion maîtrisée avec SIG, capteurs, systèmes radio et plateformes cloud.
  • Gestion des accès et cloisonnement des environnements selon les principes de moindre privilège.
  • Tests réguliers et exercices d’entraînement pour éprouver les procédures.

Pour des acheteurs publics comme les collectivités territoriales ou des opérateurs sensibles, la combinaison d’une solution éprouvée sur les SDIS et de briques adaptées à l’industrie constitue un argument. Elle réduit les intégrations spécifiques et standardise des démarches déjà adoptées par les secours dans d’autres départements.

Sur les projets de sécurité civile et de gestion opérationnelle, l’interopérabilité est un facteur décisif :

  • Interfaces SIG avec des référentiels d’adressage et de topographie.
  • Connecteurs pour radios professionnelles, téléphonie d’alerte, messageries sécurisées.
  • Flux en temps réel pour la localisation des moyens et l’état des infrastructures.
  • Journalisation complète pour reconstituer l’intervention et améliorer la doctrine.

Cette couche d’intégration conditionne la productivité des équipes et la qualité des décisions en salle de commandement.

Gouvernance et intégration opérationnelle : ce que l’on sait

GBL Holding détient Systel et prend la majorité de Jaguards. Aucune fusion n’est annoncée. Le cadrage public de l’opération met l’accent sur la synergie commerciale et l’industrialisation conjointe de fonctionnalités clés de gestion d’alertes et d’opérations. Les étapes d’intégration seront graduelles, afin de préserver la continuité de service chez les clients existants.

Le choix d’une intégration fonctionnelle sans fusion immédiate présente des avantages : maintien des rythmes de livraison propres à chaque entité, capitalisation sur les expertises métiers, et gouvernance resserrée pour aligner les arbitrages produit avec les exigences des utilisateurs finaux.

Feuille de route produits : priorités probables

  • Harmonisation UX des consoles et rationalisation des workflows opérationnels.
  • Interopérabilité avancée entre la chaîne d’alerte Systel et les modules de commandement Jaguards.
  • IA d’aide à la décision pour accélérer l’identification de la gravité et la répartition des moyens.
  • Renforcement cyber des configurations par défaut et durcissement des protocoles d’accès.

Marchés visés : industries, métropoles et Outre-mer

Sur la base des informations publiques, la dynamique commerciale se projette vers des collectivités métropolitaines, des industriels de l’énergie et du transport, ainsi que des territoires d’Outre-Mer. Systel a déjà exprimé un intérêt pour le Royaume-Uni et l’Afrique via la presse régionale, des zones où des briques technologiques de Jaguards peuvent créer des accélérations de marché.

Sur ces marchés, les décideurs recherchent :

  • Références déployées dans des environnements comparables.
  • Garantie de disponibilité et continuité de service dans des fenêtres critiques.
  • Conformité au cadre de sécurité des SI publics et aux référentiels sectoriels.
  • Transparence sur l’hébergement, la localisation des données et la réversibilité.

La combinaison Systel et Jaguards peut réduire les risques perçus côté acheteur en capitalisant sur des retours d’expérience complémentaires.

Points de repère sectoriels : de l’alerte alimentaire aux infrastructures critiques

La qualité d’un système d’alerte se juge au temps et à la justification des décisions. Les mécanismes décrits dans les chaînes d’alerte alimentaire mettent en évidence la structuration des informations, la traçabilité et la réactivité graduée. Transposés à la sécurité civile, ces principes confortent l’intérêt de solutions modulaires capables d’intégrer des capteurs variés et de restituer une vision décisionnelle cohérente.

Sur le terrain cyber, l’écosystème français progresse, et le rapport 2024 de l’ANSSI souligne la priorité donnée à la sécurité des systèmes critiques. Pour des éditeurs comme Systel et Jaguards, cela implique de lier sans couture l’alerte opérationnelle et les exigences de cybersécurité, afin d’éviter que la couche de coordination devienne un point d’entrée vulnérable ou un maillon faible de disponibilité.

Dans les appels d’offres, cette réalité se traduit par une attention accrue à la résilience logicielle et aux preuves d’intégration. Les donneurs d’ordres recherchent des fournisseurs capables de montrer des interfaces robustes, des scénarios d’incident simulés et une réponse conformée à la doctrine locale des secours.

Témoins chiffrés du marché sécurité en France

Deux indicateurs éclairent la pression sur les systèmes d’alerte et de commandement :

  1. Près de la moitié des SDIS équipés par Systel en France, signe de pénétration profonde dans l’écosystème secours (CNAJMJ, 22 janvier 2024).
  2. 348 000 infractions liées au numérique en 2024, chiffre qui illustre la porosité des risques physiques et cyber pour les organisations publiques et privées.

Point d’inflexion pour l’écosystème sécurité civile français

Avec l’entrée majoritaire de GBL Holding au capital de Jaguards, Systel élargit son rayon d’action et renforce ses assets logiciels. Le signal envoyé au marché est double : consolider des positions métiers éprouvées et accélérer sur des briques technologiques nécessaires aux opérations d’urgence, dans un environnement d’exigences croissantes en cybersécurité.

La feuille de route détaillée n’est pas publique, mais la direction de marche est lisible. En combinant profondeur fonctionnelle côté SDIS, expériences multi-sectorielles et innovations attendues sur l’IA d’aide à la décision, le duo Systel et Jaguards dispose d’un levier crédible pour gagner des parts de marché en France et au-delà.

Resteront déterminants les choix d’intégration produits et la capacité à démontrer, par le terrain, des gains mesurables sur le temps d’intervention et la fiabilité des décisions.