30 septembre 2025 : date butoir à Bruxelles pour une consultation publique capable de changer la vie des fondateurs. Avec EU-INC, l’écosystème européen pousse un 28e régime pensé pour réduire la paperasse, accélérer les levées et fluidifier l’expansion. L’enjeu dépasse l’économie numérique : il touche à la souveraineté, à la sécurité et à la compétitivité européenne à l’ère de l’IA.

EU-INC : un 28e régime pour passer à l’échelle en Europe

Lancée en octobre 2024, l’initiative EU-INC vise à instaurer une forme juridique paneuropéenne reconnue dans tous les États membres. Le principe est simple et stratégique : une incorporation unique, une reconnaissance automatique et des règles harmonisées pour opérer partout dans l’UE sans multiplier les entités ni les coûts d’implémentation pays par pays.

Les promoteurs détaillent des piliers concrets : formalités 100 % en ligne, cadre fiscal cohérent et mécanismes qui sécurisent investisseurs, salariés et partenaires publics. Une start-up fondée à Paris pourrait ainsi lever à Berlin, recruter à Lisbonne et ouvrir un bureau à Varsovie sous un seul statut. Les analyses communiquées autour du projet estiment des économies administratives jusqu’à 50 %, avec à la clé un déploiement plus rapide et une meilleure lisibilité pour les investisseurs.

Incorporation simplifiée et reconnaissance dans toute l’UE

EU-INC s’attaque à une douleur opérationnelle bien connue : la duplication des procédures à chaque passage de frontière. L’ambition est d’établir un socle commun qui supprime la nécessité de créer une nouvelle entité dans chaque pays pour signer des contrats, embaucher ou lever des fonds. Ce serait un rééquilibrage majeur face aux modèles étrangers qui ont depuis longtemps normalisé la standardisation.

Financement, fiscalité et gouvernance mieux alignés

Le projet promeut un langage commun pour les investisseurs et les fondateurs. Les règles de gouvernance, de cession, de levée et de contrôle seraient clarifiées au niveau européen. À la clé, une réduction du risque de friction juridique et une trajectoire plus prévisible de croissance, point critique pour les tours de table et les opérations transfrontalières.

Ce que promet le 28e régime EU-INC

Trois leviers au cœur du dispositif :

  • Une seule incorporation valable dans toute l’UE, avec des formalités en ligne.
  • Des règles harmonisées pour les opérations courantes, les levées et l’emploi.
  • Une reconnaissance automatique dans chaque État membre afin de supprimer les redondances.

Fragmentation du marché unique : coûts cachés et freins juridiques

Le cœur du problème tient moins à l’accès aux talents ou au capital qu’à la fragmentation. Vingt-sept régimes de droit des sociétés, des dizaines de formes sociales, des coûts et délais qui varient fortement : la somme des micro-frictions pèse lourdement sur la vélocité des start-up.

Les créations de filiales transfrontalières exigent des semaines, parfois des mois, et des frais juridiques élevés. Ce temps perdu érode la compétitivité à l’étape cruciale du scale-up.

Le décalage se voit dès l’amorçage. Les conseils prodigués aux fondateurs européens qui visent une hypercroissance convergent souvent vers une incorporation aux États-Unis pour standardiser la relation investisseurs-entreprise. Une étude citée indique qu’une part significative des start-up européennes à forte croissance choisit d’ouvrir une entité américaine pour fluidifier leur expansion internationale.

Delaware : simplicité et standardisation

Aux États-Unis, l’attrait du Delaware tient à un package clair : une forme juridique unique et largement adoptée, des contrats standardisés (dont le SAFE popularisé par Y Combinator) et un corpus jurisprudentiel lisible. À cela s’ajoute un objectif d’exécution rapide : l’incorporation peut être finalisée en une journée dans l’État, alors qu’elle prend généralement plusieurs semaines en Europe selon des données internationales.

Europe : 27 droits des sociétés à harmoniser

En Europe, chaque franchissement de frontière réactive une couche de complexité. Les normes divergent, les conventions d’actionnaires se réécrivent, et l’hétérogénéité des pratiques ralentit l’exécution.

L’optimisation fiscale et juridique tourne à la gestion de projet permanente. Le coût d’opportunité est considérable : la lenteur dans la signature de contrats, l’ouverture de comptes ou le recrutement nuit à la traction commerciale et au rythme d’innovation.

L’effet cliquet est connu : des documents contractuels identiques d’une opération à l’autre, une jurisprudence abondante, une fiscalité prévisible et des délais très courts. Résultat : les investisseurs se fient à des modèles éprouvés, ce qui accélère due diligence et closing. L’écosystème y gagne en vitesse et en confiance.

La critique n’est pas nouvelle dans l’écosystème européen. Des figures de premier plan rappellent que les talents et l’ambition ne manquent pas, mais que l’absence d’un marché effectivement unifié freine le passage à l’échelle. L’appel récurrent : bâtir un cadre qui ne soit ni symbolique ni conçu sans les fondateurs, mais co-produit avec eux.

Chiffres clés : investissements, emplois et retard de valorisation

Au-delà des constats, quelques ordres de grandeur aident à objectiver les enjeux. La Commission européenne a estimé que les start-up européennes ont créé plus de 1,5 million d’emplois directs entre 2018 et 2023. Le potentiel de remobilisation industrielle est réel : technologies de défense, solutions climatiques, robotique médicale et outils d’IA tracent des trajectoires d’impact sur les économies nationales.

En 2024, les investissements en capital-risque ont atteint 100 milliards d’euros en Europe, contre environ 200 milliards aux États-Unis (Dealroom, 2024). L’écart ne résume pas tout, mais il illustre un déficit d’attractivité et une friction de marché. Par ailleurs, l’Europe compte environ 50 000 start-up actives en 2024 et la part de celles qui franchissent le cap du milliard de valorisation reste inférieure à celle observée aux États-Unis.

Emploi, innovation et souveraineté technologique

Les start-up ne sont pas seulement des gisements d’emplois qualifiés. Elles développent des briques technologiques indispensables à la souveraineté : sécurité et défense, transition énergétique et climatique, santé et robotique, sans oublier l’IA qui rebat les cartes des chaînes de valeur. Le risque pour l’UE en l’absence de consolidation du marché unique : voir ces technologies naître en Europe puis partir s’industrialiser ailleurs.

Repères chiffrés à garder en tête

  • 1,5 million d’emplois directs créés par les start-up européennes entre 2018 et 2023.
  • 100 milliards d’euros de capital-risque investis en Europe en 2024 contre 200 milliards aux États-Unis.
  • Environ 50 000 start-up actives en 2024, mais un taux de passage au statut de licorne inférieur à celui observé outre-Atlantique.

Ces écarts alimentent l’argument en faveur d’un dispositif juridique unifié capable d’accélérer le scale-up.

Feuille de route politique et mobilisation des acteurs

EU-INC s’est constitué très rapidement en plateforme d’alignement. Depuis octobre 2024, l’initiative a rallié une large communauté de fondateurs, d’investisseurs et de conseillers juridiques.

La pétition associée a dépassé 16 000 signatures, un niveau présenté comme sans précédent pour l’écosystème européen. La dynamique ne s’est pas limitée aux déclarations : une proposition juridique détaillée a été publiée en open source en janvier 2025, puis présentée le mois suivant à Bruxelles à des commissaires européens.

La semaine précédant le 26 septembre 2025, la Commission a ouvert une consultation publique dédiée au 28e régime. Elle se clôt le 30 septembre 2025. L’objectif est de recueillir des contributions opérationnelles pour calibrer un texte utile aux utilisateurs finaux : les start-up et leurs investisseurs.

Signataires et cabinets impliqués

Des personnalités de premier plan ont manifesté leur appui, parmi lesquelles des fondateurs et dirigeants d’entreprises technologiques. Des cabinets juridiques internationaux se sont mobilisés pour documenter et structurer les propositions, aux côtés d’associations européennes engagées sur ces sujets. Cette coalition multi-acteurs est assez rare pour être soulignée et témoigne d’un alignement sur l’urgence de simplifier.

Calendrier à Bruxelles et articulation avec la stratégie UE

La proposition EU-INC s’inscrit dans une trajectoire politique plus large. Elle fait écho à une stratégie dédiée aux start-up et scale-up rendue publique au printemps 2025.

Les messages convergent : redonner de la vitesse, faciliter l’accès aux marchés et améliorer la lisibilité des règles pour réduire les coûts de transaction. Cette articulation renforce la légitimité d’un 28e régime et sa complémentarité avec les autres chantiers européens en cours (PYMNTS.com, 28 mai 2025).

Comment contribuer à la consultation publique

  1. Identifier les irritants concrets : délais d’ouverture d’activité, clauses standard introuvables, divergences fiscales.
  2. Proposer des pistes précises : harmonisation de documents, reconnaissance mutuelle, délais cibles.
  3. Soumettre une contribution courte et factuelle avant le 30 septembre 2025.

Objectif : obtenir un EU-INC utile dès sa mise en œuvre, pas un énième dispositif théorique.

Les défis européens, des tensions géopolitiques à l’IA : pourquoi les start-up sont décisives

Crises géopolitiques, transition climatique, vieillissement démographique, pression sur la dette publique, fragilités démocratiques et accélération de l’IA : les défis sont multiples et s’additionnent. Ce cumul d’instabilités ne relève pas uniquement du domaine politique. Il appelle des réponses technologiques et industrielles, que les jeunes entreprises développent déjà dans la défense, l’énergie, la santé et les logiciels.

Les start-up sont un instrument de souveraineté. Elles reconfigurent les chaînes d’approvisionnement, introduisent des solutions de résilience et créent des emplois qualifiés.

L’Europe dispose de talents et de capitaux, mais l’architecture juridique morcelée dilue la vitesse d’exécution. C’est précisément ce que vise à corriger EU-INC : substituer un cadre unique à la mosaïque actuelle, sans effacer les droits nationaux, mais en créant une voie rapide européenne.

Qui est Maxime Paradis : entrepreneur et catalyseur de souveraineté tech

Entrepreneur et investisseur, cofondateur du European Tech Sovereignty Summit et de United Founders, Maxime Paradis porte une analyse axée sur l’alignement entre objectifs industriels et cadre juridique. Son message est clair : sans outil d’intégration à l’échelle du continent, les innovations européennes restent à la merci d’un déploiement plus rapide ailleurs.

Défense, climat, santé, robotique, IA : les technologies stratégiques émergent souvent dans des start-up. Leur capacité à prototyper vite, à itérer et à produire des ruptures en fait un socle de souveraineté. Sans cadre pro-scale-up, ces actifs risquent d’être structurés et valorisés hors d’Europe, au détriment de l’emploi et de la compétitivité.

Impacts attendus pour les entreprises françaises

Pour les fondateurs basés en France, un 28e régime opérationnel serait synonyme de moindre complexité dans les opérations transfrontalières. Embaucher dans un autre État membre, ouvrir un bureau, signer un gros contrat public ou privé à l’étranger, faire venir des investisseurs basés dans une autre capitale européenne : autant d’opérations qui gagneraient en rapidité et en prévisibilité.

Sur le volet financement, des règles harmonisées peuvent réduire les divergences documentaires et les arbitrages coûteux qui jalonnent aujourd’hui les tours transfrontaliers. La standardisation permettrait aussi de fluidifier les deals secondaires ou les opérations de croissance externe à l’échelle de l’UE.

Recrutement et expansion rapide

Un statut unique faciliterait la mobilité intra-européenne des talents et la contractualisation homogène. Les directions financières et juridiques réduiraient les redondances de procédures, limitant la multiplication des coûts fixes dans chaque pays. À l’échelle d’une série A ou B, ces écarts d’exécution peuvent décider d’un trimestre de retard… ou d’avance.

Accès au capital et gouvernance

La lisibilité du cadre renforce la confiance des investisseurs. En diminuant l’incertitude juridique, la négociation se concentre sur l’essentiel : le projet, le produit, les KPI. La convergence des pratiques de gouvernance dans l’UE hisserait la région au niveau des standards internationaux, sans renoncer à ses exigences en matière de conformité et de protection.

  • Bien cadrer la coexistence entre le 28e régime et les droits nationaux.
  • Clarifier la reconnaissance des actes, décisions et sûretés à l’échelle de l’UE.
  • Anticiper les conséquences fiscales et sociales des recrutements transfrontaliers.

Le succès d’EU-INC dépendra de sa capacité à réduire les zones grises, pas à en créer de nouvelles.

Participation décisive avant la clôture du 30 septembre 2025

La consultation publique ouverte par la Commission quelques jours avant le 26 septembre 2025 est une fenêtre courte pour agir. Une participation faible ouvrirait la porte à un texte dilué, difficilement opérationnel.

Une contribution massive, structurée et documentée peut, à l’inverse, ancrer des mécanismes simples et efficaces dès la première version. L’objectif est à portée de main : bâtir un dispositif à la fois ambitieux et praticable dès le démarrage.

Le message est repris par des investisseurs de premier plan, convaincus que l’Europe dispose déjà de l’appétit entrepreneurial et de l’ambition pour créer des entreprises mondiales. Reste à se doter du bon outil de marché unique. La balle est désormais dans le camp de l’écosystème, fondateurs, fonds, conseils et organisations professionnelles confondus. À eux de faire valoir leurs cas d’usage, exemples concrets et exigences de clarté.

Dernière ligne droite : cinq minutes pour contribuer, des années d’impact pour l’économie européenne.