Alors que l'Europe entière s'engage dans la transition énergétique, le groupe minier français Eramet développe des techniques de recyclage des métaux critiques utilisés dans les voitures électriques. L'objectif est de réutiliser des métaux tels que le nickel, le cobalt et le lithium pour fabriquer de nouvelles batteries. Cette démarche s'inscrit dans le cadre des efforts déployés pour respecter la nouvelle loi du Parlement européen interdisant la vente de voitures à essence et diesel à partir de 2035. 

Pourquoi devons-nous apprendre à recycler les batteries ? 

Bien que de nombreuses personnes considèrent les voitures électriques comme l'avenir du transport écologique, la production des batteries qui les alimentent est loin d'être une sans dommages pour notre planète.

L'extraction du lithium de la terre n'endommage pas seulement les terres et les sols, mais le processus est également très gourmand en eau. Entre cela, les pénuries d'eau au niveau mondial et les effets sur les personnes vivant à proximité des mines, la seule partie gagnante est celle des sociétés minières. 

Il existe d'importants gisements naturels de lithium à la frontière du Chili, de l'Argentine et de la Bolivie. Environ un quart de ces ressources est stocké dans les salines du Salar d'Atacama, dans le nord du Chili. 

La meilleure façon de produire du lithium dans cette région est d'utiliser des nacelles d'évaporation. Cette technique nécessite beaucoup d'eau, environ 21 millions de litres par jour. Environ 2,2 millions de litres d'eau sont nécessaires pour produire une tonne de lithium. 

Comment recycler les piles au lithium ? 

Depuis son laboratoire de Trappes, au nord de Paris, Eramet travaille sur un procédé de recyclage des piles. 

Le groupe exploite également la plus grande mine de manganèse du monde au Gabon et produit du nickel en Nouvelle-Calédonie et en Indonésie. Il prévoit d'extraire du lithium à partir de sources géothermiques en Alsace d'ici la fin de la décennie, et en Argentine l'année prochaine avec un partenaire chinois. 

Bien qu'elle continue à planifier de nouvelles usines d'extraction pour répondre à la demande, elle cherche des moyens de réduire la quantité de nouveaux métaux à produire. 

« Contrairement au carburant brûlé par les moteurs thermiques, ces métaux sont recyclables à 95 % », assure Frédéric Martin, directeur du projet de recyclage des batteries chez Eramet ideas. 

Dans un premier temps, les scientifiques broient les vieilles batteries pour en faire une poudre appelée "masse noire". Ce mélange sombre est composé de nickel, de cobalt, de manganèse et de lithium, tous les métaux nécessaires pour stocker et conduire l'électricité à l'intérieur d'une batterie. Le prochain défi consiste à les séparer. 

Sophie Lebouil, responsable du projet, compare la technique de séparation "liquide-liquide" à la préparation d'une vinaigrette. 

« Dans l'huile, il y a une molécule particulière, que nous appelons molécule extractante, qui va capturer uniquement le nickel. Nous allons ensuite séparer les deux solutions. Il restera une solution à base d'eau qui contiendra le lithium et d'autres éléments », explique-t-elle. 

À la fin du processus, le laboratoire produit des pots de matériaux de qualité batterie : des granulés verts de sulfate de nickel, des granulés rouges cuivrés de sulfate de cobalt et une poudre blanche de carbonate de lithium. Tous ces matériaux sont prêts à être vendus et transformés en piles. 

Photo d'une usine

Le recyclage des piles à grande échelle est-il possible en Europe ? 

Jusqu'à présent, aucune usine ne traitait la masse noire en Europe et il fallait l'exporter à l'étranger. 

 « Une fois les métaux ramenés en Europe, il serait idiot de les renvoyer pour fabriquer de nouvelles batteries à l'étranger », explique Julien Masson, directeur de la stratégie d'Eramet. 

En septembre, Eramet lancera sa première usine pilote à Trappes - à côté de ses laboratoires - pour tester les procédés qui sont actuellement développés pour cette "masse noire". Après avoir poursuivi ses recherches, Eramet prévoit d'ouvrir une usine de recyclage de batteries, en partenariat avec Suez, dans le nord de la France en 2027. 

L'objectif ultime d'Eramet est de traiter 50 000 tonnes de modules de batteries par an. Cela équivaut à environ 25 000 tonnes de "masse noire", qui fournira environ 10 % du marché européen des batteries pour véhicules électriques, selon les calculs d'Eramet.