Introduction de Verification of Payee : un changement crucial pour les virements
Découvrez l'impact de Verification of Payee sur les paiements en euro et les nouvelles obligations pour les entreprises français d'ici 2025.

183 millions d’euros par an. C’est l’estimation des pertes liées aux fraudes aux virements dans la zone euro, alors que s’ouvre la dernière ligne droite avant l’arrivée de Verification of Payee le 9 octobre 2025. Pour les directions financières françaises, l’heure est à l’industrialisation des contrôles sur les paiements SEPA et à la mise à niveau des référentiels tiers.
Verification of Payee : calendrier, portée et obligations en zone euro
À compter du 9 octobre 2025, les établissements de paiement opérant en SEPA devront vérifier la concordance entre le nom saisi par l’émetteur et l’intitulé rattaché à l’IBAN du bénéficiaire. Cette vérification s’applique aux virements instantanés et aux virements classiques.
Le dispositif s’inscrit dans une stratégie européenne de réduction des fraudes numériques et des erreurs de routage. Son inspiration est claire : l’exemple britannique de Confirmation of Payee, déployé depuis 2020, a montré l’intérêt de confronter le nom du bénéficiaire et l’IBAN avant validation. La France, particulièrement exposée aux fraudes au faux fournisseur, est directement concernée par l’échéance et les ajustements d’outillage côté entreprises.
Les informations disponibles indiquent que la vérification consiste à confronter, en temps réel, l’IBAN et le nom fournis par le payeur aux données détenues par la banque du bénéficiaire. Des sources bancaires présentées comme régulièrement mises à jour détaillent ce mécanisme de rapprochement, avec des alertes graduées selon le niveau de correspondance.
VoP en pratique : ce qui change pour un virement SEPA
Avant l’exécution, la banque procède à une comparaison nom-IBAN. En cas d’écart, l’émetteur reçoit une alerte et choisit de corriger, d’annuler ou de maintenir l’ordre. En cas de correspondance, le paiement continue son cours sans friction additionnelle.
Mécanique de VoP : du nom saisi à l’alerte de correspondance
La vérification produit trois types de réponses, standardisées pour guider la décision de l’émetteur :
- Correspondance exacte : le nom correspond à l’intitulé associé à l’IBAN, le virement se poursuit.
- Correspondance partielle : légère divergence, par exemple abréviation ou faute de frappe. Une notification informe l’utilisateur qui peut corriger ou confirmer.
- Absence de correspondance : alerte forte. Le risque d’erreur ou de fraude est signalé, l’émetteur doit revalider de manière éclairée.
La décision finale revient à l’entreprise. Ce point est central sur le plan juridique et opérationnel : confirmer un virement malgré une alerte transfère le risque sur le donneur d’ordre. L’intérêt de VoP est double, réduction de la fraude et limitation des erreurs humaines, ce qui améliore la qualité des paiements.
Crédit Mutuel : logique de rapprochement nom-IBAN
Des pages d’information bancaires en France expliquent que VoP compare l’IBAN fourni et le nom du bénéficiaire tel qu’enregistré. L’objectif est d’afficher une alerte graduée selon l’écart observé, afin d’éviter les erreurs de saisie ou les détournements par usurpation d’identité. Ce fonctionnement s’articule aussi bien avec les virements instantanés qu’avec les virements classiques.
Entreprises : qui décide en cas de non-correspondance
En cas d’alerte, un processus de validation interne doit s’enclencher. Les meilleures pratiques consistent à exiger un contre-appel, une vérification documentaire et, le cas échéant, une validation à quatre yeux lorsque l’IBAN est nouveau, sensible ou étranger. La responsabilité du choix final rend indispensable la traçabilité des décisions dans l’outil de paiement.
Les divergences de casse, d’accentuation ou d’abréviations peuvent être légitimes. Mais des écarts plus subtils, comme l’ajout d’un suffixe, une homonymie proche ou un nom commercial sans lien capitalistique avec l’entité titulaire du compte, doivent déclencher un contrôle renforcé. L’automatisation est utile, mais le regard humain reste décisif sur les cas limites.
Risques opérationnels en France : faux fournisseur, IBAN modifié et points de fuite
La fraude dite du faux fournisseur exploite des processus de paiement imparfaits et des boîtes mail compromises. L’attaquant usurpe un partenaire, communique un RIB modifié et instaure une urgence artificielle. Sans contrôle contradictoire, la trésorerie enchaîne et le paiement part vers un compte frauduleux. VoP vient placer un filet de sécurité, mais ne remplace pas l’hygiène procédurale.
Exemple avec une PME du transport
Une PME du secteur du transport a été privée de 70 000 euros après avoir suivi des instructions de changement de coordonnées bancaires reçues par email. L’identité du fournisseur était usurpée via spoofing, et l’ordre a été exécuté sans contre-appel. La médiatisation de ce cas illustre la vulnérabilité des flux lorsqu’aucun contrôle indépendant n’est appliqué avant la saisie de l’IBAN.
Signaux d’alerte avant saisie ou modification d’IBAN
- Email de modification reçu en urgence ou en dehors des circuits habituels.
- Adresse, signature ou domaine de messagerie qui diffèrent subtilement de l’original.
- Demande de virement transfrontalier inhabituelle pour un fournisseur local.
- Raisons sociales divergentes entre facture, contrat et coordonnées bancaires.
- Pression psychologique ou menace commerciale pour accélérer l’exécution.
Les virements intrazone SEPA vers des IBAN étrangers impliquent souvent des délais de retour et des interactions interbancaires plus lourdes. En cas d’incident, la rétrocession des fonds peut se heurter à des calendriers différents, à des degrés variables de coopération et à des contraintes juridiques selon la juridiction du compte destinataire.
Indicateurs chiffrés et préparation du secteur bancaire
Les pertes annuelles liées aux fraudes aux virements en zone euro sont évaluées à 183 millions d’euros (Le Monde, 1er octobre 2025). Des données publiées au niveau européen font état d’une progression d’environ 20 % des fraudes entre 2023 et 2024 sur les virements, soulignant l’urgence d’un dispositif préventif robuste (BCE).
En France, des alertes régulières de l’AMF rappellent les risques de détournement de paiements. Des éléments statistiques sectoriels présentent des pertes moyennes de 50 000 euros par incident pour les entreprises, avec une exposition accentuée des PME représentant 70 % des victimes. Les fédérations bancaires indiquent une forte mobilisation des établissements français à l’approche de l’échéance, avec une grande majorité en situation opérationnelle pour le 9 octobre 2025.
BCE et Commission européenne : objectifs affichés
La trajectoire visée est claire : freiner la croissance des fraudes, stabiliser, puis réduire le niveau de pertes par l’introduction d’un garde-fou systématique. En s’alignant sur les retours d’expérience britanniques, la Commission européenne anticipe une baisse significative des cas après déploiement à grande échelle.
Lecture critique des chiffres
Les montants agrégés masquent des réalités hétérogènes par secteur et taille d’entreprise. Les entreprises multisites, avec de nombreux tiers et une fréquence élevée de modifications d’IBAN, rencontrent un risque opérationnel plus fort. VoP agit en prévention, sans se substituer aux contrôles de contrepartie ni aux contre-appels.
Impact pour la gouvernance d’entreprise : DAF, trésorerie et conformité
VoP ne se résume pas à une fonctionnalité bancaire. C’est un chantier de gouvernance paiement. Côté DAF et trésorerie, l’enjeu est de recalibrer la chaîne Procure-to-Pay pour intégrer VoP au bon moment, avec un référentiel tiers propre et des règles d’escalade claires en cas d’alerte.
Sur le plan technique, les entreprises doivent s’assurer que leurs canaux de communication bancaire, API ou EBICS, remontent bien les statuts VoP dans les outils de trésorerie et ERP, afin de conserver la piste d’audit et de tracer les arbitrages. La documentation interne doit formaliser les rôles, les délais de traitement et le plan de continuité si la vérification n’est pas disponible.
La fonction conformité, de son côté, gagne un levier supplémentaire pour atténuer le risque opérationnel sur les paiements, à articuler avec les procédures de sécurisation des accès et de validation des changements sensibles. VoP devient un contrôle de premier niveau, à compléter par des validations humaines et des segmentations par seuils.
VoP vérifie la cohérence nom-IBAN du bénéficiaire au moment du virement. Les diligences de connaissance de tiers (KYC fournisseur) restent nécessaires pour valider l’existence, l’identité et le compte cible lors de l’onboarding et lors de toute modification. La combinaison des deux échelons diminue la surface d’attaque et renforce la conformité.
Plan d’action en 5 étapes avant le 9 octobre 2025
La bascule vers VoP est une opportunité de renforcer la résilience paiement. Un programme court, orienté résultats, peut être structuré autour de cinq chantiers.
- Revoir les procédures internes : formaliser les étapes en cas d’alerte de non-correspondance, définir les niveaux de validation selon le risque et instituer la validation à quatre yeux pour tout IBAN nouveau ou sensible. Prévoir un journal de décision pour l’audit.
- Assainir le référentiel tiers : aligner la raison sociale légale avec l’IBAN enregistré. Les divergences entre noms commerciaux et entités juridiques déclenchent des alertes qui gênent l’exécution et augmentent le risque d’erreur.
- Renforcer le contre-appel : toute modification de RIB doit être confirmée via un canal sûr, en appelant un contact connu à un numéro vérifié. Redoubler de vigilance sur les IBAN étrangers compte tenu de la complexité des recours.
- Former les équipes : partager les signaux d’alerte, la typologie des escroqueries et les bonnes pratiques de vérification. Des formations basées sur des cas réels créent les bons réflexes face à l’urgence artificielle.
- Avaliser l’outillage bancaire : s’assurer que la banque expose VoP via API ou EBICS et que les outils internes intègrent les retours d’alerte. Questionner les mécanismes anti-fraude disponibles, notamment les modules d’IA de détection d’anomalies.
Coût organisationnel vs. bénéfices attendus
La mise en qualité des données fournisseurs et l’ajout de contrôles peuvent ralentir certains flux au départ. L’expérience montre toutefois que la baisse des faux positifs après nettoyage des référentiels, couplée à la diminution des incidents, fluidifie la chaîne à moyen terme. La réduction des erreurs de routage et des contentieux compense le surcroît initial d’effort.
Accords à valider avec sa banque avant déploiement
- Formats exacts des retours VoP et codification des niveaux d’alerte.
- Disponibilité de VoP sur les différents canaux et fenêtres de maintenance.
- Modalités de journalisation pour la piste d’audit et la preuve de décision.
- Escalade en cas d’indisponibilité du service au moment de la signature.
- Politique de support et délais de résolution en production.
Régulation et politiques publiques : cap sur la réduction des fraudes
Au-delà de VoP, plusieurs initiatives nationales rappellent l’effort de l’État pour protéger les finances publiques et privées, notamment de nouvelles mesures annoncées en 2025 contre les fraudes aux aides. Ces annonces soulignent l’importance des outils de vérification pour limiter l’attrition financière liée aux escroqueries sophistiquées.
Parallèlement, l’Europe encourage la mobilisation de financements dédiés à la cybersécurité. Des dispositifs 2021-2027 sont mobilisables pour renforcer les capacités des entreprises, en particulier des PME et des startups qui subissent la majorité des attaques. L’objectif reste constant : diffuser les bonnes pratiques et financer l’élévation du niveau de défense sur l’ensemble du tissu entrepreneurial.
VoP n’est ni un contrôle KYC complet, ni une garantie de récupération des fonds en cas d’escroquerie. C’est un test de cohérence au moment du paiement. La vigilance humaine, les procédures de contre-appel et l’hygiène de messagerie restent indispensables pour contrer l’usurpation et les attaques par ingénierie sociale.
Après VoP, bâtir une résilience paiement à l’échelle de l’entreprise
La généralisation de VoP est une avancée nette, sans être une panacée. Les fraudeurs exploitent déjà des techniques impulsées par l’IA pour améliorer l’usurpation, la qualité des emails et des deepfakes vocaux. Les directions financières gagneront à coupler VoP avec des contrôles comportementaux, des politiques strictes de double validation et un référentiel tiers maintenu en temps réel.
L’État encourage les signalements et la montée en compétences, tandis que l’UE soutient les investissements de cybersécurité. La combinaison d’un cadre réglementaire renforcé et d’une discipline interne exigeante doit permettre d’amorcer une décrue tangible des pertes liées aux fraudes d’ici 2026. La confiance dans le virement passera par l’addition de garde-fous techniques et de réflexes humains bien réglés.