VizioSense : l’avenir de la mobilité axé sur l’éthique et la vie privée
VizioSense, deeptech lilloise, lève 2,7 M€ pour déployer sa solution de comptage optique en edge computing, garantissant vie privée et conformité RGPD.
Focaliser l’avenir de la mobilité sur l’éthique et la confidentialité : tel est le pari revendiqué par la deeptech VizioSense. Selon l’annonce officielle publiée sur la page LinkedIn de VizioSense, cette société lilloise fondée en 2022 vient de boucler une levée de fonds de 2,7 millions d’euros (8 juillet 2025), afin de déployer à grande échelle sa solution de comptage optique sans vidéosurveillance. Tour d’horizon des points clés et des enjeux économiques derrière cette opération prometteuse pour le marché européen.
VizioSense : avancer sans reculer sur la vie privée
Forcer l’innovation sans empiéter sur les libertés individuelles : voilà, en substance, la devise de VizioSense. Dans un contexte où de nombreuses villes d’Europe adoptent des dispositifs de vidéoprotection pour réguler le trafic, la start-up française s’est donné la mission audacieuse de collecter des données de mobilité sans filmer ni stocker d’images. Elle s’appuie pour cela sur une intelligence artificielle embarquée, aussi appelée edge computing, qui effectue tous les calculs en local. Résultat : l’outil n’a aucune raison d’envoyer des vidéos à un serveur, supprimant ainsi tout risque de reconnaissance faciale ou de fichage involontaire.
Cette architecture technologique, en accord avec le RGPD en vigueur en France et les lignes directrices de la CNIL, va bien plus loin que la simple notion de consentement. Elle ouvre la voie à un modèle de smart city où le recueil d’informations ne s’accompagne pas d’un sentiment d’invasion de la vie privée. Illustration de cette démarche : la jeune pousse dit pouvoir quantifier précisément le nombre de voitures, vélos, piétons ou encore camions qui transitent sur une zone, sans jamais se transformer en caméra de surveillance.
Quand le financement s’accorde avec l’ambition
Avec 2,7 millions d’euros nouvellement injectés, VizioSense bénéficie d’un soutien financier conséquent, mené par Alacrité, un fonds d’investissement précoce qui mise sur des technologies à forte valeur ajoutée. On retrouve à leur côté Wesley Clover International, fonds du milliardaire Sir Terry Matthews, ainsi que BeAngels, important réseau de business angels actif en Belgique et au Luxembourg. S’y ajoutent des personnalités telles que Yung Kim (ancien président de Korea Telecom), Raouti Chehih (fondateur d’EuraTechnologies) ou encore Laurent Bouillot (créateur de Siradel, racheté par Engie).
Alors que certaines levées de fonds donnent priorité à la croissance rapide, ce tour de table valorise également l’expertise dans la gestion de projets industriels. En effet, Alacrité a pour spécificité d’accompagner de manière très opérationnelle les start-up, depuis leurs premières itérations techniques jusqu’à la commercialisation à grande échelle. Les dirigeants de VizioSense espèrent ainsi franchir les dernières étapes pour passer d’une preuve de concept parfaitement rodée à l’industrialisation, tout en restant concentrés sur la priorité affichée : une IA éthique conçue et perfectionnée à Lille.
Décryptage : les dessous du succès européen
Les solutions de VizioSense sont déjà présentes dans 15 pays, notamment la France, l’Allemagne, la Grèce, le Luxembourg et même l’Arabie saoudite (avec un pilote en cours à la Mecque). Cette extension géographique rapide illustre son potentiel dans différents secteurs : centres-villes désireux d’améliorer la fluidité du trafic, grands sites logistiques cherchant à rationaliser l’occupation de leurs quais, ou encore aéroports éventant la nécessité d’analyse de flux de passagers (l’aéroport de Nice faisant partie des références citées). De plus, la start-up multiplie les partenariats avec des intégrateurs — citons Axione, Bouygues Energies & Services, Vinci (Citeos), Sogetrel, NGE ou Fayat. Autant d’alliances stratégiques pour accéder aux grands chantiers urbains et aux infrastructures critiques.
En outre, la formule technologique de VizioSense épouse parfaitement l’essor d’une ville “intelligente” tout en préservant un haut niveau de souveraineté. Dans l’écosystème français, cette approche résonne fortement avec un mouvement pro-actif de la French Tech qui valorise l’innovation responsable. Dans le sillage du RGPD et face aux débats européens sur les futurs règlements liés à l’IA, la proposition de VizioSense s’impose comme un “cas d’école” en matière de respect de la vie privée. Cet atout pourrait bien constituer un argument décisif pour convaincre municipalités et entreprises d’opter pour cette solution, au détriment d’outils plus intrusifs mis au banc de la société civile et de certains régulateurs.
Le principe du edge computing consiste à traiter les données le plus près possible de la source. Dans le cas de VizioSense, le boîtier intégré gère en interne le comptage grâce à un algorithme d’analyse d’images, sans remonter la moindre séquence vidéo vers un serveur cloud. Cela réduit la latence, la consommation de bande passante et élimine tout échange d’images brutes.
L’histoire de VizioSense : de l’idée à la mise en œuvre
Créée en 2022 à Lille, VizioSense est née d’un constat simple : la transformation numérique des espaces urbains s’accélère, mais la question de la protection des libertés individuelles n’est pas toujours une priorité pour les acteurs du secteur. Les cofondateurs, dont Maxime Schacht (CEO), ont voulu proposer un véritable capteur optique “nouvelle génération”. Ce dernier se distingue des solutions traditionnelles sur plusieurs points :
- Dimension éthique : aucune image n’est stockée, pas de reconnaissance faciale.
- Fabrication française : production réalisée dans les Hauts-de-France.
- Robustesse : la technologie fonctionne aussi bien en intérieur qu’en extérieur.
- Facilité d’intégration : mise en place rapide dans des environnements variés (ports, aéroports, zones logistiques, etc.).
En misant sur un socle technologique solide et en préemptant d’emblée des principes de responsabilité numérique, la jeune pousse a su séduire des clients et partenaires, preuve que l’éthique ne freine pas la performance. Après une première phase commerciale en 2024, marquée par l’implémentation de solutions-pilotes dans plusieurs pays d’Europe, VizioSense accélère désormais grâce à cette injection de capital de 2,7 millions d’euros.
Applications concrètes : trois propositions phares
Le portefeuille de produits de VizioSense se décline en trois modèles :
- VizioPark : pour la gestion intelligente du stationnement (nombre de places disponibles, détection de véhicules stationnant trop longtemps, etc.).
- VizioCount : pour l’analyse fine de la mobilité (comptage piétons, vélos, voitures, etc.).
- VizioCrowd : pour la supervision en temps réel des zones à forte affluence (grands événements, terminaux de transport, etc.).
Ces trois fonctionnalités répondent à des besoins manifestes dans les centres urbains, où l’on cherche à perfectionner la fluidité du trafic, la sécurité et le bien-être collectif. Plus largement, elles intéressent également l’industrie et la logistique. Par exemple, en Allemagne, le groupe Coca-Cola aurait entrepris un déploiement-test pour optimiser la rotation des camions et limiter les délais d’attente. En s’adaptant à des environnements multiples, la technologie de VizioSense confirme son caractère transverse et modulaire.
Bon à savoir sur l’investissement early-stage
Alacrité illustre parfaitement la notion de “startups factory” où s’opère un accompagnement allant au-delà du simple financement. Il s’agit non seulement d’apporter un soutien financier, mais aussi de fournir des compétences en stratégie, en développement produit, ou encore de faciliter l’accès à des réseaux d’experts. Cet accompagnement longue durée fait souvent la différence dans les premières années critiques d’une jeune entreprise.
Éclairage juridique : le RGPD et la CNIL
Sur le plan légal, toute entreprise manipulant des données personnelles se confronte nécessairement au RGPD. Bien que VizioSense neutralise toute vidéo en ne stockant que des statistiques agrégées (flux, comptages, taux de fréquentation), l’entreprise s’est attachée à vérifier que sa solution correspondait aux directives de la CNIL. Cet aspect est primordial, surtout à l’heure où le débat public questionne la légitimité de la vidéoprotection algorithmique.
Au-delà du cadre légal européen, VizioSense anticipe déjà de futures évolutions de la réglementation française en matière d’IA, comme en témoignent les propositions législatives sur l’Acte sur l’Intelligence Artificielle (IA Act) qui pourraient renforcer l’obligation de transparence. En choisissant un modèle edge computing, la jeune pousse se retrouve en première ligne pour prouver que la performance algorithmique peut exister sans surveillance généralisée.
L’IA Act, toujours en discussion au niveau européen, vise à réguler les applications de l’IA selon leur niveau de risque (faible, moyen, élevé). Il imposerait notamment des obligations de transparence et de fiabilité. Les systèmes jugés trop intrusifs pourraient être restreints, voire interdits. Bien que le texte ne soit pas encore finalisé, les solutions “edge” de comptage anonymisé, comme celles de VizioSense, sont perçues comme des alternatives moins invasives.
Défis économiques associés à la mobilité urbaine sans vidéosurveillance
Démocratiser les solutions de gestion du trafic sans recours à des caméras classiques implique un certain nombre de défis financiers et techniques. Premièrement, le matériel doit être suffisamment abordable pour être posé en grand volume, tout en restant fiable dans la durée. Deuxièmement, il est crucial d’écosystémiser l’approche en s’intégrant aisément aux logiciels municipaux existants, souvent hétérogènes. Enfin, les industriels et collectivités attendent un retour sur investissement (ROI) tangible : réduction des embouteillages, meilleure gestion du stationnement, ou encore analyse précise des flux de passagers. Les pouvoirs publics sont particulièrement sensibles à ces gains concrets, qu’il s’agisse de soutenir des politiques de transition écologique ou de renforcer leur attractivité.
En France, diverses métropoles s’emploient déjà à exploiter VizioSense : Arras, Beauvais, Reims, Avignon et Nice. L’exemple de Nice est particulièrement symbolique : l’aéroport local a adopté ces capteurs pour affiner la répartition des voyageurs dans les différentes zones, fluidifiant potentiellement le parcours dans les terminaux. De telles retombées économiques (baisse des plaintes, satisfaction des passagers, gains logistiques) justifient aisément l’investissement initial dans des capteurs optiques dépourvus de caméra, répondant ainsi aux exigences de la CNIL.
Zoom financier : la place de VizioSense dans la Deeptech française
La France mise fortement sur l’essor des deeptech, c’est-à-dire des entreprises reposant sur des technologies de pointe, souvent issues de laboratoires de recherche. À l’horizon 2030, divers dispositifs publics (Bpifrance, Crédit Impôt Recherche) visent à accompagner ce secteur. Grâce à la levée de 2,7 millions d’euros, VizioSense consolide ainsi sa position de pépite régionale, renforçant la réputation de la métropole lilloise comme terre d’accueil pour les innovations industrielles.
Focus sur l’importance du local et des partenariats
Si la production française d’un composant électronique reste onéreuse, VizioSense assume ce choix pour maîtriser la chaîne de valeur de bout en bout. Cette souveraineté industrielle se révèle d’autant plus stratégique qu’en période de pénuries (ex. crise des semi-conducteurs), disposer d’une filière nationale de production et d’assemblage peut faire la différence. De plus, en assurant la maintenance et l’installation via un réseau de partenaires (Bouygues Energies & Services, Vinci, Sogetrel, etc.), la start-up renforce sa réactivité face aux demandes de nouveaux clients.
Dans un marché où la concurrence internationale est rude, notamment avec des solutions chinoises ou américaines, l’engagement éthique dans la fabrication locale n’est pas seulement un argument commercial. Il contribue aussi à la fiabilité perçue par les clients institutionnels. Dans un contexte où les collectivités recherchent des solutions conformes aux normes européennes, le fait d’être localement implanté apporte un réel avantage concurrentiel.
La logistique en pointe : le cas Coca-Cola en Allemagne
Le partenariat avec Coca-Cola en Allemagne fournit un excellent exemple de la dimension opérationnelle. Le géant des boissons exploite des entrepôts de grande superficie où les flux de camions sont permanents. Or, chaque minute de ralentissement peut avoir un coût élevé que ce soit en énergie, en personnel ou en occupation d’espace. En équipant ces sites de capteurs VizioSense, Coca-Cola vise plus de fluidité : si un bouchon se forme à l’entrée, les responsables peuvent réorienter les véhicules pour minimiser les blocages. Les possibilités de croisement de données d’occupation réelle et d’horaires de livraison optimisent par ailleurs la planification.
Ce cas d’usage témoigne d’une tendance générale : on ne parle plus seulement de régulation de la circulation en ville, mais d’une analyse très fine du trafic de marchandises dans des zones industrielles. Le fait d’exploiter des capteurs sans caméra est un atout stratégique : l’entreprise n’a pas besoin de se soucier de la diffusion de données sensibles (par exemple le type de marchandises transportées ou les plaques d’immatriculation). Cette approche garantit une neutralité des informations captées, ce qui peut rassurer des partenaires n’ayant normalement pas accès à ces données.
Le concept de “mesurer sans observer”
Dans l’écosystème de la smart city, la frontière entre collecte de données légitime et intrusion dans la vie privée peut vite devenir floue. VizioSense résume sa ligne directrice en une formule : “mesurer sans observer”. Autrement dit, évaluer la fréquentation d’un espace sans capturer la physionomie des passants. Cette approche se démarque dans un paysage où la tentation de déployer des caméras omniprésentes grandit, motivée par des impératifs de sécurité, de marketing ou d’optimisation commerciale.
Pour les municipalités soucieuses de leur image, il s’agit d’une réponse concrète : améliorer l’efficacité de la gestion urbaine en faisant l’économie d’une vidéosurveillance permanente. En effet, la possibilité de détecter des flux de circulation ou des attroupements resta, jusqu’à présent, largement associée à la captation vidéo. Ici, la détection est réalisée par des capteurs optiques compact qui, une fois paramétrés, distinguent un piéton d’un cycliste ou d’une voiture, de façon purement algorithmique, en temps réel.
Dans un monde où la méfiance grandit envers la surveillance de masse, proposer des solutions exemptes de captation d’images représente un avantage concurrentiel décisif. Les citoyens, souvent réticents face à l’installation de caméras, pourraient mieux accepter un boîtier analysant un flux de silhouettes de manière 100 % locale, sans stockage. Par ricochet, les élus peuvent ainsi préserver leur popularité auprès des administrés, en affichant une approche citoyenne de la “smart city”.
Stratégies de croissance jusqu’en 2026
La start-up lilloise prévoit de recruter des profils commerciaux et techniques partout en Europe, pour multiplier les contacts avec les collectivités et les logisticiens. Elle cible plus particulièrement l’Europe de l’Est, l’Europe de l’Ouest et le Moyen-Orient, zones où la densité urbaine accroît la nécessité d’outils de gestion performants. L’objectif avoué : se rapprocher de la rentabilité d’ici 2026. Ce cap impose de concilier l’essor à l’international et la maîtrise des coûts de déploiement.
Pour conforter leur stratégie, les dirigeants de VizioSense insistent sur le fait que leur produit est “prêt à l’emploi” et ne requiert pas de maintenance lourde. Cette promesse constitue un véritable argument auprès des partenaires immobiliers et des gestionnaires d’infrastructures, souvent échaudés par des dispositifs frappés d’obsolescence rapide. En clair, la société veut s’établir comme le leader européen d’un nouveau segment baptisé “mobilité urbaine sans vidéosurveillance”, en persuadant les clients que performance et respect de la vie privée se marient parfaitement.
Cadrage technique : comment VizioSense répond aux impératifs industriels ?
Outre l’aspect juridique, l’approche technique doit pouvoir se plier aux contraintes des sites industriels. Par exemple, un port ou un aéroport nécessite un matériel à la fois résistant aux intempéries et calibré pour supporter de forts taux de passage. Dans cette optique, les capteurs VizioSense se distinguent par :
- Une structure externe conçue pour résister aux variations climatiques (chaleur, pluie, froid).
- Un traitement IA embarqué protégé de la poussière et des interférences électromagnétiques courantes, notamment dans les sites industriels lourds.
- Des protocoles de communication sécurisés et compatibles avec les systèmes d’information existants.
À cela s’ajoute la notion d’autonomie énergétique pour certains dispositifs : il est possible d’alimenter les capteurs relativement sobrement, garantissant un coût d’exploitation restreint. Sur le terrain, ce genre de détail fait souvent la différence, car brancher un dispositif supplémentaire dans des infrastructures déjà saturées n’est pas toujours aisé. C’est dans ce contexte que les ingénieurs de VizioSense ont cherché à minimiser la consommation afin de répondre aux exigences écologiques des clients possédant des chartes internes de responsabilité environnementale.
La parole à Alacrité : la prime à l’opérationnel
Si l’on interroge Alacrité sur les raisons de son investissement, la réponse tourne souvent autour de cet axe : le passage de la preuve de concept au produit final exige un accompagnement rapproché et non de simples financements. Pour de nombreuses deeptech, le défi réside dans la dernière ligne droite, lorsqu’il s’agit de fabriquer en série et de convaincre des premiers clients clés. Dans son portfolio, Alacrité ambitionne d’emmener VizioSense au-delà des frontières françaises, pour atteindre une assise solide en Europe.
De plus, la “vocation d’industrialisation” d’une AI edge computing s’inscrit dans les projets défendus par Alacrité, qui valorise le potentiel d’autonomisation des territoires. Il n’est pas anodin qu’un fonds international comme Wesley Clover se joigne à l’aventure : la demande en outils de comptage anonymisé est en effet mondiale, et l’exemple saoudien l’illustre déjà. Dans certaines mégalopoles, la gestion des foules impacte directement la sécurité, la fluidité et donc la rentabilité des infrastructures.
Une transition qui séduit collectivités et entreprises
La concertation avec les villes demeure cruciale. VizioSense se positionne comme une alternative innovante aux dispositifs de surveillance classiques, souvent jugés trop invasifs. Et la stratégie semble porter ses fruits : plusieurs grandes agglomérations en France et en Europe ont déjà signé des partenariats, validant l’a priori que protéger la vie privée n’empêche pas l’efficacité.
Pour les acteurs privés, la promesse de capteurs modulables et compatibles avec les standards IT existants représente un argument de poids. Au-delà des enjeux de protection des données, beaucoup de grands groupes cherchent des solutions légères, faciles à installer, et offrant la possibilité d’un monitoring précis des flux. Les retombées directes : limiter les goulots d’étranglement, mieux répartir le personnel et, in fine, optimiser les coûts de fonctionnement.
Point clé à surveiller : l’évolution de la demande en mobilité urbaine
Selon plusieurs études du secteur, le trafic urbain devrait croître de plus de 40 % d’ici 2030 dans les grandes métropoles européennes. De fait, les décideurs sont pressés de trouver des solutions viables pour limiter les congestions, réduire la pollution et améliorer le quotidien des habitants. Les projets de “smart city” s’enchaînent, mais la question du respect de la vie privée demeure un point sensible pour beaucoup de municipalités. D’où l’intérêt de systèmes respectueux des réglementations.
L’impact de la levée de fonds sur la concurrence
Dans le secteur de la surveillance intelligente, plusieurs entreprises cherchent à mettre en avant des solutions plus ou moins similaires. Néanmoins, rares sont celles qui éliminent entièrement la captation d’images. Les approches concurrentes misent souvent sur l’anonymisation a posteriori, ce qui n’exclut pas le risque qu’un flux vidéo circule, fût-ce de manière temporaire.
Avec sa levée de 2,7 millions d’euros et les partenariats internationaux évoqués, VizioSense pourrait bénéficier d’un effet d’entraînement. Plus la jeune pousse consolidera ses références, plus elle se rapprochera d’un standard de facto pour la “mobilité urbaine respectueuse de la vie privée”. À l’inverse, les solutions concurrentes restées sur un modèle de Big Data centralisé devront justifier la nécessité de collecter de la vidéo, parfois au prix d’un surcoût réglementaire ou d’une défiance du public.
L’anticipation : viser la rentabilité dès 2026
Le modèle d’affaires de VizioSense repose sur la vente de capteurs et de services associés (maintenance, mise à jour logicielle, intégration). La société compte développer un service d’abonnement pour le traitement de données et la création de rapports analytiques personnalisés. Un tel service, parfois qualifié de “Data as a Service”, pourrait générer des revenus récurrents, contribuant ainsi à stabiliser la jeune pousse avant l’échéance de 2026.
Par ailleurs, l’expansion internationale ne se réduit pas à l’Europe. Certains marchés du Golfe, dotés de moyens financiers conséquents et de problématiques de gestion de foules (pèlerinages, événements sportifs, etc.), voient dans VizioSense une opportunité de maîtriser les rassemblements massifs sans instaurer de mécanismes de surveillance généralisée. Cet alignement d’intérêts entre rentabilité économique, innovation technique et respect des libertés pourrait cristalliser le positionnement de VizioSense comme un nouvel étendard d’une intelligence artificielle “vertueuse”.
Au-delà de la ville : logistique, industrie et smart building
Par extension, les capteurs de VizioSense peuvent être installés dans des usines ou des sites industriels pour surveiller la circulation interne de machines et de personnel. Dans des espaces clos, le positionnement de boîtiers intelligents permet d’optimiser la localisation des employés, d’éviter les zones de sur-occupation ou de repérer rapidement d’éventuels accidents. En France, l’Industrie 4.0 évolue beaucoup grâce à des systèmes connectés qui mesurent la productivité en temps réel. Ici encore, l’absence de tournage vidéo rassure notamment les collectifs syndicaux, parfois inquiets de la mise sous surveillance continue des salariés.
Dans le secteur du smart building, des promoteurs immobiliers high-tech pourraient intégrer ces capteurs pour réguler, par exemple, l’afflux de personnes dans les halls d’entrée ou les ascenseurs. Dès lors, VizioSense se positionne sur plusieurs créneaux simultanés, ouvrant la voie à une diversification de son portefeuille d’activités. Cela plaît aux investisseurs, qui perçoivent là un gage de sécurisation du chiffre d’affaires sur le moyen terme.
Un virage stratégique et humain
Dans sa communication, la direction de VizioSense insiste sur l’importance de l’équipe. Avec environ 10 salariés aujourd’hui, l’entreprise entend renforcer ses effectifs pour pénétrer de nouveaux marchés. Les compétences recherchées portent autant sur la science des données (afin d’affiner l’algorithme d’IA embarquée) que sur la connaissance du terrain (commercial, gestion de projets d’infrastructures, etc.). L’enjeu est souvent de bâtir un réseau local solide, car chaque pays possède ses propres règles urbanistiques, ses spécificités réglementaires et sa culture en matière de protection de la vie privée.
“Nous voulons devenir pour la mobilité ce que le smartphone fut pour les télécoms : un outil polyvalent, simple, économique et respectueux des personnes.” C’est ainsi que Maxime Schacht, CEO, décrit l’ambition de VizioSense. Une déclaration qui souligne la volonté d’embrasser un marché vaste, tout en gardant le paradigme de l’IA éthique comme boussole indéfectible.
Un horizon sans précédent : la transformation de la mobilité urbaine
Le pari est ambitieux : réconcilier l’exigence d’efficacité dans la gestion des flux avec l’impératif de respect des droits fondamentaux. Les collectivités, soucieuses d’améliorer leurs infrastructures sans brider la vie privée de leurs administrés, semblent adhérer à la vision de VizioSense. L’intérêt manifesté par de grands groupes industriels, tels que Coca-Cola ou Engie, laisse également entrevoir de futurs déploiements massifs dans des milieux professionnels divers.
Forte de son modèle d’edge computing, la start-up lilloise voit désormais plus loin. Épaulée par des investisseurs reconnus et un réseau de partenaires solides, VizioSense vise la rentabilité dès 2026. Si cet objectif se concrétise, il y a fort à parier que la mobilité urbaine à la française fera école sur un continent en quête de progrès technologiques transparents et responsables.
Dans un paysage où la donnée est à la fois précieuse et potentiellement intrusive, VizioSense démontre qu’on peut innover, compter et optimiser sans pour autant observer, enregistrer ni surveiller : un paradigme dont la portée pourrait redessiner les contours de la ville de demain.