Levée de 25 M€ : Melvan muscle son parc solaire et sa mission
Melvan attire Bpifrance, Crédit Agricole et OCCTE pour financer 2 GW solaires, créer des emplois et renforcer sa gouvernance à mission.

Grâce à une levée de fonds de 25 millions € menée auprès de Bpifrance, IDIA Capital Investissement, divers fonds du groupe Crédit Agricole et OCCTE, Melvan franchit un cap stratégique dans le financement de projets solaires multi‑technologies.
Un pacte financier au service de la transition énergétique
En pleine accélération des renouvelables en France, Melvan ouvre pour la première fois son capital à des partenaires minoritaires mais très impliqués : Bpifrance, via le fonds France Investissement Énergie Environnement 2 (FIEE 2), IDIA Capital Investissement avec le support de Crédit Agricole Transitions & Énergies, ainsi qu’OCCTE, gestionnaire du FPCI Occigen labellisé Greenfin. Ce tour de table, bouclé en moins de six mois, apporte à la société des moyens financiers et un réseau territorial étendu qui devraient accélérer la mise en service de 750 MW de projets en phase avancée.
Bpifrance injecte une logique d’investissement à impact, assortie d’indicateurs extra‑financiers contraignants. IDIA et les caisses régionales agrègent quant à elles leurs capacités d’ingénierie locale, tandis qu’OCCTE offre un relais puissant vers les collectivités d’Occitanie et les financements européens InvestEU. Le pool n’exige pas de prise de contrôle : Melvan reste maître de sa gouvernance, garantie phare pour fidéliser les équipes et les élus locaux.
Bon à savoir
La valeur des investissements fléchés « énergie » par Bpifrance a doublé entre 2020 et 2024, passant de 650 M€ à plus de 1,3 Md€. Melvan s’inscrit dans cette dynamique de croissance verte.
Des chiffres qui éclairent l’essor du solaire français
La France comptabilisait 22,3 GW de puissance photovoltaïque raccordée fin 2024, soit +23 % sur un an selon le Service des données et études statistiques (SDES). Sur la même période, près de 4 GW supplémentaires ont été attribués dans le cadre des appels d’offres de la Commission de Régulation de l’Énergie (CRE). Melvan revendique 2 GW de projets en portefeuille : l’entreprise viserait donc environ 9 % du pipe national en développement, un ratio significatif pour un acteur créé il y a à peine cinq ans.
Derrière les moyennes nationales, la répartition territoriale reste contrastée : quatre régions (Nouvelle‑Aquitaine, Occitanie, Provence‑Alpes‑Côte d’Azur et Île‑de‑France) concentrent plus de la moitié des nouvelles demandes de raccordement. Le parti pris de Melvan – déployer des agences régionales à Orléans, Toulouse, Montpellier ou encore Clermont‑Ferrand – permet de capter ces gisements tout en coordonnant l’acceptabilité des projets grâce à la concertation locale.
Entrée en vigueur partielle en 2022, la taxonomie définit les activités considérées comme « durables ». La production d’électricité solaire est classée « éligible et alignée » sous réserve de seuils d’émission inférieurs à 100 gCO2eq/kWh. L’éligibilité permet aux fonds Article 9, comme FIEE 2 ou Occigen, d’investir tout en préservant leurs engagements ESG.
Modèle économique : agilité locale et maîtrise du cycle de vie
Melvan a choisi une intégration verticale partielle. L’entreprise conçoit les centrales, mène les études environnementales, sécurise le foncier et le financement bancaire, puis confie la construction à des consortiums EPC sélectionnés par appel d’offres. Une fois l’installation livrée, Melvan en assure l’exploitation et la maintenance pendant 20 ans, générant des flux de trésorerie récurrents et refinançables.
Le cash‑flow prévisible permet de structurer des dettes seniors « green loan » auprès d’établissements partenaires – dont certaines filiales du Crédit Agricole déjà au capital. Ce mix equity‑debt limite la dilution des fondateurs et consolide la rentabilité des projets ; en 2024, le taux interne de rendement moyen sur portefeuille atteignait 6,8 % après impôts, supérieur de 120 points de base au benchmark CRE 4.
Près de 30 % du volume produit par Melvan est déjà vendu via des « Power Purchase Agreements » privés à des industriels cherchant à verdir leur électricité. Ces contrats long terme (10‑15 ans) sécurisent un prix plancher et amortissent les à‑coups du marché spot.
Gouvernance et raison d’être : la force juridique de la société à mission
Depuis 2024, Melvan est société à mission au sens de la loi Pacte. Ses objectifs statutaires intègrent la promotion des énergies propres, la préservation de la biodiversité sur les sites et l’appui aux filières agricoles en transition. Concrètement, un comité de mission de cinq personnalités indépendantes publie chaque année un rapport assorti d’indicateurs – taux de réemploi des matériaux de chantier, surface de terrains promus à l’agro‑voltaïsme, etc. – vérifiés par un tiers indépendant.
Ce statut séduit les investisseurs Article 9 mais impose également une transparence renforcée. L’échec éventuellement constaté sur un objectif pourrait déclencher une revue stratégique et affecter la distribution de dividendes. Melvan anticipe la contrainte : 3 % du chiffre d’affaires 2025 est déjà fléché vers un fonds interne de compensation carbone, et chaque nouveau site intègre un plan de gestion écologique sur 30 ans.
L’histoire de Melvan : d’un trio d’experts à un réseau national
L’aventure Melvan débute en 2020 lorsqu’un trio d’ingénieurs – Laurent Albuisson, Pierre‑Yves Barbier et Sébastien Dubois – décide de mutualiser plus de 60 années cumulées d’expérience dans le solaire et l’éolien. Installée à Orléans, la start‑up pivote rapidement vers une présence multisites pour capter les appels d’offres régionaux. Entre 2021 et 2023, elle signe ses deux premières centrales au sol (13 MWc dans le Loiret, 15 MWc dans le Lot) et se dote d’un pôle R&D sur l’hybridation photovoltaïque‑stockage.
Avec une équipe portée à 50 collaborateurs début 2025, l’entreprise structure des directions régionales autonomes chargées du relationnel collectivités et agriculteurs. Le modèle séduit : en février 2024, Melvan fait son entrée dans le top 20 des développeurs solaires français selon l’Observatoire INES‑ADEME, avant même la présente levée de fonds.
Cadre réglementaire : appels d’offres CRE et simplifications à surveiller
Le marché solaire français repose majoritairement sur les appels d’offres de la CRE, organisés chaque trimestre. Les lauréats bénéficient d’un complément de rémunération garantissant une rentabilité plancher. La déréglementation partielle introduite par la loi d’accélération des ENR (9 mars 2023) a toutefois ouvert la voie à des projets hors appel d’offres, surtout pour l’agrivoltaïsme et l’autoconsommation collective.
Cette flexibilité crée des opportunités mais aussi un risque de saturation des files d’attente chez Enedis. Melvan anticipe ce goulot en signant des conventions de raccordement tripartites et en réservant des capacités dès l’étape de faisabilité. De plus, l’entreprise s’aligne sur la rubrique ICPE 297 « Installation de production d’électricité renouvelable », minimisant le délai d’instruction grâce à des dossiers standardisés.
Risques et opportunités : coûts, matières premières et acceptabilité
Sur le plan financier, la baisse de 40 % du prix des panneaux entre 2022 et 2024 a amélioré les marges mais expose Melvan à une volatilité inverse si la filière polysilicium se revalorise. Pour limiter ce risque, le développeur contractualise avec plusieurs fournisseurs européens et asiatiques, intégrant des clauses CAPEX plafond. Autre enjeu : la hausse des taux fin 2023 (OAT 10 ans > 3 %) a renchéri la dette ; l’infléchissement de 2024‑2025 constitue cependant une fenêtre favorable pour finaliser la construction des centrales en portefeuille.
L’acceptabilité locale reste un paramètre clé. Melvan mène systématiquement des enquêtes publiques renforcées, incluant ateliers de co‑conception et chartes paysagères. Le taux de recours contentieux contre ses permis s’établit à 4 %, inférieur de moitié à la moyenne nationale du solaire au sol. Cette performance, valorisée par les investisseurs, participe à la réduction du coût du capital propre.
Un fonds classé article 9 s’engage à investir exclusivement dans des activités ayant un objectif durable explicite. Les indicateurs de durabilité sont vérifiés et publiés annuellement.
Perspectives 2025‑2030 : du GWh au TWh
Avec 25 M€ de fonds propres supplémentaires, Melvan peut lever jusqu’à 125 M€ de dette bancaire grâce à un ratio d’endettement project‑finance de 80 %. Cette force de frappe autoriserait la mise en service d’environ 400 MW solaires d’ici fin 2027, soit l’équivalent de la consommation électrique de 100 000 foyers. À horizon 2030, l’objectif interne vise un parc en exploitation de 2 GW, transformant la société en producteur d’envergure nationale capable de générer près de 3 TWh par an.
La diversification technologique constitue un axe majeur : hybridation solaire‑hydrogène pour sites logistiques, batteries de 100 MWh pour lisser la courbe d’appel d’offre CRE, voire petites centrales photovoltaïques flottantes sur retenues agricoles. Un tel mix répond aux futurs appels d’offres « multi‑capacités » envisagés par la CRE et maximise la valeur du kWh.
Melvan mise sur un triptyque : capital patient, expertise locale, statut à mission ; sa réussite dira si ce modèle peut devenir la prochaine norme de l’énergie citoyenne.