Gojob s'associe à Persol pour transformer l'intérim
Gojob lève 120 millions d'euros avec Persol pour booster son développement international et intégrer l'IA dans le recrutement.
+120 millions d'euros et changement d'échelle pour Gojob : la plateforme française d'intérim dopée à l'IA s'adosse à Persol, poids lourd japonais du travail temporaire. « Ensemble, on va tout casser ! », promet Pascal Lorne, fondateur et PDG, qui entend multiplier la capacité commerciale de l'entreprise, sans renoncer à son ADN technologique français.
Alliance stratégique Gojob-Persol : 120 millions d'euros et prise de contrôle
Gojob officialise une alliance capitalistique structurante avec Persol. Le groupe japonais investit 120 millions d'euros et devient l'actionnaire majoritaire de la scale-up française spécialisée dans l'intérim et le recrutement assisté par l'IA (sources presse, 1er octobre 2025).
L'opération s'accompagne du rachat des participations des fonds historiques Breega, Kois, Alter Equity, Amundi Private Equity Funds et Banque des Territoires. Ces actionnaires sortants avaient alimenté des tours précédents de 11 millions d'euros en 2020 puis 23 millions d'euros en 2022.
La transaction rebat les cartes du contrôle sans renverser l’organisation opérationnelle : Pascal Lorne demeure le deuxième actionnaire et revendique l'indépendance stratégique de Gojob, avec maintien de la marque, des équipes et de la direction. Le socle technologique et la R&D restent ancrés en France.
Gouvernance et périmètre de l'opération
Le passage de Persol en position majoritaire constitue un changement de contrôle capitalistique. Les éléments précis de gouvernance ne sont pas publics, mais l'orientation annoncée est claire : consolidation de la technologie de matching propriétaire, accélération commerciale et renforcement du pôle IA basé en Provence. Cette configuration combine la puissance d’un industriel international avec l'agilité d'un éditeur de technologie RH.
Investisseurs historiques : une sortie ordonnée
La rotation du capital acte la réussite d’un cycle de financement classique pour une scale-up française : entrée de fonds d'impact et de VC, soutien de véhicules institutionnels, puis relai industriel. Pour Gojob, la bascule permet de viser la taille critique sur un marché RH mondial fragmenté et très concurrentiel.
Ce que l'investissement de 120 M€ change vraiment
Trois leviers clés se dessinent :
- Distribution : accès à la force commerciale et aux comptes de Persol en Asie-Pacifique.
- Technologie : intégration de l'IA de Gojob dans l'offre multi-pays de Persol.
- Consolidation : capacité renforcée à mener des acquisitions ciblées en Europe et aux États-Unis.
Expansion sur trois continents : intégration en Asie-Pacifique
Présente en Europe et aux États-Unis, Gojob franchit un cap en ouvrant un troisième front de croissance en Asie grâce au réseau Persol. Le groupe japonais opère dans 13 pays de la région Asie-Pacifique. L'accord prévoit l'embarquement de la technologie IA de Gojob dans les services de recrutement de Persol, avec un déploiement sous la marque Gojob maintenue en Europe et en Amérique du Nord.
Le marché des services d'intérim et de recrutement est évalué à plus de 300 milliards d'euros pour les zones atlantiques seules, une profondeur de marché qui rend décisif l’accès à des relais internationaux et à une distribution multi-pays (presse économique). Pour Gojob, la conséquence directe est l'accélération de l’acquisition de clients grands comptes et middle market.
Persol en Asie-Pacifique : 13 pays adressés
Le maillage régional de Persol offre un tremplin immédiat. L’intégration de la brique IA de Gojob vise à améliorer les taux de conversion des candidatures et la vitesse de staffing dans des environnements réglementaires hétérogènes. La promesse : des délais de couverture des missions compressés et une meilleure pertinence des propositions.
Accès marché : Gojob conserve sa marque
La marque demeure un actif différenciant. Gojob opère en propre en Europe et en Amérique du Nord, ce qui lui permet de conserver son positionnement d’éditeur de technologie RH piloté par la donnée, tout en bénéficiant des volumes, du sourcing et des implantations de Persol en Asie.
Dans l’intérim, l’avantage compétitif se joue sur trois facteurs : densité de viviers candidats, temps de réponse, et conformité locale. Un partenaire déjà implanté permet d’accéder à des bassins d’emploi, des équipes commerciales et des systèmes de conformité en place. L’IA de Gojob trouve un terrain d’expression élargi, là où la volumétrie de candidatures renforce l’apprentissage des modèles.
Technologie et R&D : l'IA Aglae au cœur du matching
Fondée en 2015, Gojob a conçu une IA opérationnelle, Aglae, focalisée sur l’appariement rapide et équitable entre candidats et missions. La plateforme revendique un délai moyen de 14 minutes pour identifier des profils pertinents, avec un outreach à grande échelle par SMS, WhatsApp et email. Les volumes traités sont significatifs : plus de 10 000 missions gérées chaque mois, appuyées par une base de 7 millions de CV.
Les secteurs adressés couvrent l'hôtellerie-restauration, la logistique, la grande distribution et l'industrie automobile. Plus de 1 000 entreprises — dont La Poste, Stellantis, Carrefour, Casino, CMA CGM et Safran — figurent parmi les clients, et des entités publiques comme France Travail exploitent la base de candidats.
Sur le plan de l’infrastructure, Gojob s’appuie sur des briques de pointe, dont des modèles de Mistral AI. La priorité affichée : améliorer la précision des matchings, limiter les biais cognitifs et industrialiser des processus de recrutement conformes aux standards européens.
Aix-en-Provence : laboratoire IA et équipes R&D
Le centre de gravité technologique est à Aix-en-Provence, avec un laboratoire IA qui emploie 65 personnes sur un effectif total d’environ 250 salariés répartis entre la France et les États-Unis. L’investissement de Persol doit permettre à ce pôle de monter en puissance, notamment via un doublement des capacités de R&D envisagé par l'entreprise.
France Travail et entreprises clientes : volumes adressables
L’accès aux viviers publics et privés, via France Travail et des clients grands comptes, maximise le rendement des algorithmes : plus le flux de données est riche, plus l’IA affine l’appariement. Dans l’intérim, où la pénurie de compétences est récurrente, l’accélération du time-to-fill constitue un avantage compétitif direct pour les donneurs d’ordre.
Métriques clés à retenir sur Gojob
- Fondation : 2015.
- Effectifs : ~250 salariés, dont 65 en R&D à Aix-en-Provence.
- Base candidats : 7 millions de CV.
- Productivité : 14 minutes en moyenne pour matcher une mission.
- Volumes : 10 000 missions par mois.
- Clients : plus de 1 000 entreprises; usage par France Travail.
- Impact : plus de 50 000 jeunes accompagnés vers l'emploi.
La réduction des biais s’appuie sur trois piliers : anonymisation partielle des critères sensibles, pondération des variables à la performance et audits réguliers des modèles. Concrètement, Aglae agrège l’historique de placements, l’adéquation compétences-poste et les retours clients pour calibrer la pertinence des matchings. L’objectif : neutraliser les variables non corrélées à la performance.
Objectifs financiers 2030 : cap sur 1 milliard d'euros
Gojob affiche un objectif de 1 milliard d'euros de revenus en 2030, à partir d’un niveau actuel d’environ 220 millions d'euros. Le discours est offensif : accélération organique, « croissance par acquisition en Europe et aux États-Unis » et maillage international grâce à l’alliance avec Persol. L’ambition, formulée par Pascal Lorne, est de positionner Gojob parmi les trois premiers groupes RH mondiaux à horizon 2030.
L'entreprise met en avant une trajectoire combinant déploiement technologique, scaling commercial et M&A ciblé. La crédibilité de ce cap dépendra de la vitesse d’intégration avec Persol, de la tenue de la marge brute dans un environnement concurrentiel et de la capacité à industrialiser les processus de compliance multi-pays.
Croissance externe : cibles européennes et américaines
La consolidation du marché RH reste fragmentée. Des acquisitions en Europe sont envisagées, avec un intérêt naturel pour des géographies profondes comme l’Allemagne ou le Royaume-Uni. L’appui de Persol sécurise la capacité financière et opérationnelle à intégrer des structures, tout en plaçant l’IA de Gojob comme socle commun des plateformes.
Capacité opérationnelle : de 220 millions à 1 milliard
- Productivité IA : amélioration continue des taux de conversion candidats-missions.
- International : exploitation du réseau Persol en Asie-Pacifique.
- Grands comptes : montée en gamme du portefeuille clients et contrats cadres.
- Consolidation : acquisitions pour accélérer l’onboarding de volumes et de verticales.
Un quadruplement de revenus tient rarement à un seul levier. Dans le cas de Gojob : 1) le pipeline commercial s’élargit via Persol, 2) la productivité de l’IA abaisse le coût de placement, 3) les acquisitions apportent des volumes incrémentaux, 4) la fidélisation des clients à contrats récurrents stabilise la base. L’enjeu est de maintenir la marge sur coûts variables, clé des activités d’intérim.
Cadre légal et aides publiques : l'IA encadrée et financée
Le référentiel réglementaire se durcit. Le règlement européen sur l'IA, entré en vigueur en 2024 avec une application progressive, fixe des exigences renforcées pour les systèmes qualifiés à haut risque. Les outils de recrutement, selon leur usage et leur impact, peuvent être concernés. Gojob met en avant une approche responsable du développement de ses modèles.
Le contexte français soutient la trajectoire d’innovation. D’après la Direction générale des Entreprises, la France recense environ 590 startups IA, dont 16 licornes, renforcées par des aides publiques de 1,5 milliard d'euros en 2022 (DGE). Ces dispositifs structurent un écosystème favorable à l’émergence d’acteurs technologiques exportables.
Sur le plan fiscal, des mécanismes comme le crédit d’impôt recherche (CIR) constituent un stimulant notable pour la R&D. Ils sont susceptibles de renforcer l’attractivité de la France comme base technologique pour Gojob, dont les équipes R&D sont installées à Aix-en-Provence.
La RGPD et l'IA de recrutement : exigences à anticiper
L’usage de l’IA en RH croise les exigences de la La RGPD : transparence sur la logique des traitements, minimisation des données, sécurité, droits des personnes. L’enjeu pour les opérateurs d’IA RH consiste à concilier performance des algorithmes et conformité, notamment sur la lutte contre la discrimination et l’explicabilité des décisions assistées par l’IA.
Repères réglementaires 2024-2025 pour l'IA de recrutement
- Règlement IA de l’UE : exigences renforcées pour les systèmes à risque, obligations de transparence et de gestion des risques.
- La RGPD : base légale, information des candidats, sécurité des données, droits d’accès et de rectification.
- Éthique : politiques anti-biais et évaluation de l’impact algorithmique sur l’égalité de traitement.
Les aides publiques et le CIR réduisent le coût marginal de l’expérimentation et des itérations modèle-produit. Pour une plateforme RH, cela se traduit par la possibilité de tester des algorithmes sur des sous-segments métier et d’industrialiser plus vite les fonctionnalités qui améliorent le taux de placement et la qualité de matching.
Impact social revendiqué : inclusion et accès à l'emploi
La dimension sociale constitue un pilier de la proposition de valeur. Gojob indique avoir permis à plus de 50 000 jeunes, souvent issus de quartiers populaires, d’accéder à l’emploi via sa technologie d’appariement. L’ambition déclarée par Pascal Lorne dépasse la recherche du statut de licorne, pour s’inscrire dans une logique d’impact social tangible.
Cette orientation rencontre la trajectoire de Yoshiko Shinohara, fondatrice de Persol, reconnue pour son engagement en faveur de l’emploi des femmes au Japon. La coopération franco-japonaise porte donc une double promesse : industrialiser une technologie européenne de recrutement équitable et diffuser des pratiques inclusives en Asie.
Indicateurs d'impact : volumes et publics
- Insertion : accompagnement de 50 000 jeunes vers l’emploi.
- Couverture : base de 7 millions de CV, multi-secteurs.
- Publics : candidats issus de secteurs en tension, avec montée en compétences à la clé.
Dimension franco-japonaise : vision RH partagée
La convergence des valeurs entre Gojob et Persol — égalité des chances, mobilité sociale, réduction des biais — peut nourrir des programmes pilotes en Asie. Elle positionne le tandem comme laboratoire de pratiques RH alliant IA, conformité et inclusion.
Intérim : relation tripartite liant le salarié à une entreprise de travail temporaire (ETT) et à une entreprise utilisatrice.
Matching : processus d’appariement entre un profil et une mission, basé sur des critères de compétences, disponibilité et contraintes.
Biais algorithmique : distorsion involontaire dans un modèle IA induisant un traitement défavorable de certains groupes.
Time-to-fill : délai de couverture d’un poste entre l’émission du besoin et la prise de fonction.
Feuille de route 2025-2030 : accélération contrôlée et attentes du marché
Annoncée le 1er octobre 2025, l’opération Gojob-Persol ouvre un cycle d'exécution très attendu : déploiement en Asie, montée en charge des équipes d’IA à Aix-en-Provence, et consolidation commerciale auprès des grands comptes. Le relai industriel de Persol doit se traduire par des contrats cadres élargis et une capacité accrue à mener des acquisitions ciblées.
Reste à orchestrer un équilibre entre croissance et conformité. Les exigences européennes sur l’IA s’intensifient et les donneurs d’ordre multiplient les audits de responsabilité numérique. Si la promesse d’atteindre 1 milliard d'euros de revenus d’ici 2030 est tenue, Gojob aura installé une technologie RH française à l’échelle mondiale tout en gardant son socle de R&D en France.
Cap désormais sur l’exécution : industrialiser la technologie, intégrer les marchés et documenter l’impact social, au rythme d’une croissance qui se veut maîtrisée.