Les start-up françaises affichent une croissance dynamique en 2024
En 2024, les start-up en France connaissent une croissance de 13 %, surpassant les PME et ETI, grâce à l'innovation et l'export.

+13 % en 2024 : malgré un environnement de financement plus sélectif, les start-up françaises accrochent une nouvelle année de croissance et s’installent sur un rythme plus discipliné. L’écosystème reste au-dessus de la moyenne nationale, mais la cadence s’érode et révèle une transformation en profondeur de la performance, des secteurs moteurs et des pratiques d’exportation.
Trajectoire 2021-2024 : croissance toujours supérieure, rythme normalisé
Selon une étude publiée par la Banque de France le 19 septembre 2024, le chiffre d’affaires agrégé des start-up étudiées progresse de 13 % sur un an. L’échantillon couvre 2 165 start-up répondant à des critères objectifs de taille ou de financement. Le cumul de chiffre d’affaires atteint 25 milliards d’euros pour l’année 2024, confirmant une assise économique substantielle (Banque de France, 19 septembre 2024).
Le mouvement s’inscrit dans une décélération progressive : après +30 % en 2021, la hausse est revenue à +25 % en 2022, puis à +18,6 % en 2023. La nouvelle marche à +13 % marque une normalisation, sans remise en cause du différentiel favorable par rapport au tissu productif classique.
À titre de repère, les PME ne progressent que de +1,3 % en 2024 et les ETI affichent une quasi-stagnation à +0,6 %. L’écart de dynamique met en évidence l’effet d’innovation, de modèle d’affaires digital et de positionnement export.
La sélection retenue par la Banque de France éclaire le profil des entreprises suivies : elles présentent soit un chiffre d’affaires supérieur à 750 000 euros, soit une levée de fonds d’au moins 3 millions d’euros. Autrement dit, l’étude consolide des start-up en phase d’industrialisation commerciale ou d’amorçage avancé, ce qui explique la taille agrégée du chiffre d’affaires observé.
L’étude agrège des entreprises répondant à l’une des deux conditions suivantes : chiffre d’affaires annuel supérieur à 750 000 euros, ou levée de fonds d’au moins 3 millions d’euros. Ce périmètre met en avant des structures ayant franchi un premier palier d’exécution commerciale. Les dynamiques constatées reflètent donc les trajectoires de start-up déjà engagées dans la mise à l’échelle.
Écart avec les PME et les ETI en 2024
Les start-up surperforment nettement la moyenne nationale : +13 % de chiffre d’affaires contre +1,3 % pour les PME et +0,6 % pour les ETI. Ce différentiel se nourrit de l’innovation produit, d’une distribution digitalisée et d’une orientation export plus forte.
Secteurs en mouvement : la fintech caracole, le software reste porteur
La hiérarchie sectorielle confirme l’avance des modèles les plus scalables. La fintech mène la danse avec une croissance de chiffre d’affaires de +41 %.
Les activités software et data, les énergies et l’environnement ainsi que le e-commerce et les marketplaces pèsent ensemble près de 40 % du chiffre d’affaires total des start-up étudiées. L’ensemble dessine un mix d’activités où la technologie embarquée, la donnée et la décarbonation tirent la demande, pendant que les plateformes B2B et B2C structurent les revenus récurrents.
Fintech : dynamique et arbitrages
La hausse de +41 % du chiffre d’affaires reflète la montée en puissance d’offres de paiements, d’infrastructures financières et de solutions de conformité. Le ralentissement des levées incite toutefois à des arbitrages plus stricts sur l’acquisition et la rentabilité par client. La trajectoire 2024 laisse entrevoir des modèles plus sobres en capital et un recentrage sur des unités économiques positives.
Software et data : colonne vertébrale de la croissance
La part significative des revenus liés au software et à la data traduit la maturité de ces marchés : modularité SaaS, monétisation d’APIs, offres data-driven pour l’industrie, la santé ou la finance. L’effet récurrent des abonnements sécurise la visibilité, tout en offrant des leviers de pricing par fonctionnalités ou par usage.
Énergies, environnement, e-commerce et marketplaces : un trio décisif
Les solutions climat et énergie s’imposent comme relais de croissance, portées par l’efficacité énergétique, la gestion des flux et la valorisation des données environnementales. Les marketplaces et e-commerce, de leur côté, arbitrent entre coûts d’acquisition et rentabilité logistique, avec des gains d’échelle possibles sur l’offre, la data et l’expérience utilisateur.
IT : cap vers la rentabilité
Du côté des technologies de l’information, les start-up enregistrent une augmentation de 13 % de leur chiffre d’affaires entre 2023 et 2024. Cette évolution s’explique en partie par une bascule assumée vers l’optimisation opérationnelle et la rentabilité, pour compenser la moindre abondance des financements externes. Le recentrage se fait sur des portefeuilles clients à forte valeur, une rationalisation des coûts et la priorisation des fonctionnalités cœur, comme l’a souligné la presse spécialisée.
La progression reflète à la fois l’extension de la base clients, l’enrichissement des produits et une meilleure monétisation par usage. L’élément clé n’est pas seulement la croissance brute, mais la qualité de celle-ci : marge brute par produit, coût d’acquisition client et churn. Un +41 % soutenable est celui qui s’accompagne d’une amélioration des unités économiques.
À l’international, l’export tire la locomotive
Près de deux tiers des start-up réalisent une part significative de leurs ventes à l’export. Les secteurs tourisme, marketing digital et IoT/hardware figurent parmi les plus tournés vers l’international. L’effet est double : réduction de la dépendance au cycle domestique et lissage du risque par zone géographique.
Cette stratégie rejoint les priorités d’accompagnement public : la dynamique d’expansion est cohérente avec l’ambition de French Tech 2030, qui soutient des projets innovants avec une visée d’industrialisation et d’export. L’orientation européenne, puis mondiale, constitue un relais de croissance de premier plan pour des modèles technologiques différenciants.
France Digitale : cap sur l’Europe et au-delà
Les données communiquées par l’écosystème confirment l’importance des ventes hors de France, avec une priorité donnée aux marchés européens puis à d’autres zones selon la verticale. L’export devient un pilier stratégique, parfois dès les premières étapes de mise sur le marché, en particulier pour les offres B2B où les cycles d’adoption sont comparables d’un pays à l’autre.
Export : points de vigilance pour le pilotage
- Couverture de change : calibrer la protection sur les devises sensibles pour préserver la marge.
- Risque pays : adapter l’assurance-crédit et les incoterms aux pratiques locales.
- Pricing différencié : tenir compte de la TVA, des règles locales et de l’élasticité par marché.
- Support et SLA : organiser la disponibilité et la qualité de service transfrontière.
La diversification géographique crée un effet de portefeuille : la faiblesse d’un marché peut être compensée par la vigueur d’un autre. Les produits digitaux et les solutions B2B se prêtent bien à ce jeu, car la proposition de valeur est transférable, à condition d’adapter la conformité réglementaire et l’architecture contractuelle.
Emploi, productivité et résultat d’exploitation : des signaux mieux orientés
Le rééquilibrage entre croissance et discipline se lit dans l’emploi. En moyenne, une start-up emploie 50 personnes.
Vingt-deux structures se distinguent par des effectifs beaucoup plus importants, jusqu’à 581 salariés. Les à-coups sectoriels restent marqués : les mobilités progressent de +16 % en effectifs, le tourisme de +13 % et la fintech de +8 %. À l’inverse, l’éducation et les ressources humaines reculent de -9 %, le marketing digital de -3 %.
La croissance des emplois est inférieure à celle des revenus, ce qui signale une amélioration progressive de la rentabilité. De fait, le résultat d’exploitation moyen reste négatif, mais tend à s’améliorer, porté par un pilotage plus serré des coûts et par des arbitrages de portefeuille produits. Cette bascule vers l’efficacité opérationnelle est particulièrement visible dans l’IT, où la sobriété de trésorerie et la discipline de délivrance deviennent des priorités explicites.
IT et frugalité budgétaire : arbitrages en cours
La rareté relative des financements pousse les équipes dirigeantes à privilégier la rentabilité unitaire sur l’hypercroissance. Concrètement : moins de dépenses marketing non ciblées, des plans produits recentrés sur les fonctionnalités génératrices de marge et des SLAs calibrés par segment de clientèle. Cette orientation améliore la visibilité de trésorerie et la résilience aux chocs exogènes.
Indicateurs de rentabilité à surveiller en 2025
- Marge brute par produit et par segment client.
- Coût d’acquisition client et délai de récupération.
- Revenus récurrents et taux de rétention par cohorte.
- Churn et expansion revenue sur les comptes existants.
- Ratio cash burn / croissance pour calibrer la trajectoire de financement.
Défaillances judiciaires : faibles volumes, profils vulnérables
En 2024, 57 start-up ont fait l’objet d’une procédure. 70 % de ces cas se sont conclus par une liquidation judiciaire.
L’essentiel des entreprises concernées affichent une ancienneté comprise entre 6 et 10 ans. Le profil type des dossiers est récurrent : fonds propres insuffisants, pertes significatives, trésorerie limitée. Les métriques médianes associées donnent un ordre de grandeur : 3,1 millions d’euros de chiffre d’affaires et 47 salariés.
Sur la période récente, les séries publiques sur les défaillances d’entreprises, mises à jour en juillet 2025, font état d’une remontée en 2024. Cette évolution générale corrobore les vulnérabilités relevées dans l’écosystème start-up, où la tension sur les financements et la dépendance à des cycles d’adoption parfois longs peuvent fragiliser le modèle.
Repères juridiques : comprendre les issues possibles
Les procédures collectives visent à traiter une situation de cessation des paiements ou à la prévenir. Elles obéissent à des régimes distincts, avec des conséquences économiques et sociales différentes.
- Sauvegarde : ouverte aux entreprises qui ne sont pas encore en cessation des paiements, elle vise à faciliter la réorganisation pour maintenir l’activité et l’emploi.
- Redressement judiciaire : destiné aux entreprises en cessation des paiements mais dont la viabilité est envisageable, il organise une période d’observation et la construction d’un plan.
- Liquidation judiciaire : lorsque la poursuite de l’activité est impossible, la liquidation met fin à l’entreprise, procède à la cession des actifs et au règlement des créanciers.
Pour les start-up, la prévention demeure décisive : gouvernance de trésorerie, planification des scénarios de financement, maîtrise contractuelle des engagements et veille sur la dette fournisseurs.
Un chiffre d’affaires médian de 3,1 millions d’euros et une médiane d’effectifs à 47 salariés indiquent des structures déjà engagées dans l’industrialisation. Le point de rupture intervient souvent lorsque la croissance ralentit plus vite que ne se réduisent les dépenses fixes. L’anticipation des besoins en fonds de roulement et la renégociation des clauses contractuelles sont alors des leviers déterminants.
Financements, French Tech et cap public : amortisseurs activés
Le baromètre 2025 d’EY et France Digitale documente un essoufflement : les levées de fonds chutent de 35 % au premier semestre 2024 pour totaliser 2,8 milliards d’euros. La raréfaction de capitaux affecte mécaniquement la vitesse de déploiement commercial et les plans d’embauche, et elle pèse sur la création de nouvelles sociétés. Le signal est net, y compris dans les régions dynamiques, comme le relaient des médias économiques (baromètre EY - France Digitale, 2025).
Dans ce contexte, les dispositifs nationaux jouent un rôle d’amortisseur. La 6e promotion du French Tech Next40/120, annoncée en juin 2025, met en avant 160 start-up à fort potentiel, sur la base de critères objectifs de chiffre d’affaires et de levées de fonds. Au-delà de la vitrine, l’initiative structure des parcours d’hypercroissance, favorise l’accès aux marchés et renforce la crédibilité auprès des clients grands comptes.
Lancé en 2023, French Tech 2030 accompagne des projets innovants, notamment en santé, environnement et technologies. Le dispositif cible l’industrialisation, la souveraineté et l’export, avec un accent sur la mise à l’échelle de solutions à fort impact. L’ensemble constitue une politique de l’offre au service des start-up les plus prometteuses, cohérente avec les statistiques de surperformance constatées sur 2024.
Du côté des régulateurs et des organismes statistiques, le message demeure constant : la diversification sectorielle et l’ouverture internationale renforcent la résilience des entreprises innovantes. À court terme, l’enjeu est d’arrimer la discipline financière sans étouffer l’investissement dans la R&D et l’extension à l’international. À moyen terme, la recomposition des chaînes de valeur européennes pourrait offrir un terrain d’accélération aux greentech et aux fintech, sous réserve d’un accès stable aux marchés et d’un cadre réglementaire lisible.
Ce qu’il faut surveiller au-delà de 2024
- Vitesse de reprise des levées et mix dettes-fonds propres.
- Évolution du churn dans les verticaux sensibles aux cycles budgétaires.
- Marge brute et discipline sur les coûts variables logistiques et cloud.
- Rythme d’internationalisation et capacité à convertir en revenus récurrents.
- Effet des programmes French Tech sur l’accès aux marchés et la structuration de l’hypercroissance.
2024, année de consolidation sous contrainte financière
Le panorama 2024 conjugue deux réalités : des start-up qui surperforment le reste de l’économie en croissance de chiffre d’affaires, et un cycle qui impose de la discipline dans l’emploi, la rentabilité et l’allocation de capital. La bascule vers l’efficacité opérationnelle est enclenchée, en particulier dans l’IT et la fintech. Les défaillances restent limitées en volume mais révèlent des fragilités structurelles sur les fonds propres et la trésorerie.
Les politiques publiques et l’orientation export constituent des appuis tangibles, tandis que la reprise des financements conditionnera l’allure de 2025. Dans l’intervalle, le mot d’ordre reste le même : croître mieux, en consolidant l’équation économique et en préservant les relais d’innovations qui font la différence à l’international.
La vraie victoire 2025 sera d’aligner vitesse commerciale et solidité financière, sans diluer l’ambition technologique.