4,2 milliards d’euros écartés du calcul initial. En quatre jours, entre sa nomination et sa première série d’arbitrages publics, Sébastien Lecornu a clos l’idée de supprimer deux jours fériés en 2026. Le signal est clair pour les entreprises et les partenaires sociaux. Le gouvernement assume un recalibrage budgétaire sans toucher au calendrier du travail.

Retrait acté des deux jours fériés dans le projet de budget 2026

Le 13 septembre 2025, le Premier ministre a confirmé qu’aucune suppression de jours fériés ne serait intégrée dans la copie budgétaire pour 2026. Le lundi de Pâques et le 8 mai restent donc fériés. Cette clarification, livrée à la presse quotidienne régionale, met fin à l’une des mesures les plus controversées envisagées durant l’été.

Le chef du gouvernement a assumé un choix politique et social. D’un côté, il a pris acte de la contestation exprimée par les syndicats et une part du patronat, préoccupés à la fois par l’acceptabilité sociale et par les effets opérationnels d’un changement de calendrier.

De l’autre, il a fermé la porte à un nouveau cycle houleux sur la retraite, autre dossier inflammable. Le message envoyé est celui d’une priorité donnée à la stabilité organisationnelle des entreprises et à l’apaisement social, à l’approche du dépôt du projet de loi de finances pour 2026.

Pour les directions financières comme pour les DRH, la décision enlève une variable lourde à piloter. L’absence de suppression de jours fériés évite un redimensionnement des plannings, des cycles compensatoires et des dispositifs d’heures supplémentaires. Elle écarte également l’hypothèse d’un décalage des pics de consommation, cruciaux pour certains secteurs.

Ce que visait la suppression du lundi de Pâques et du 8 mai

La piste abandonnée devait ajouter deux jours ouvrés au calendrier 2026, évalués à 4,2 milliards d’euros d’activité additionnelle. Les critiques ont pointé des bénéfices discutables en productivité nette et des coûts périphériques possibles pour les chaînes d’approvisionnement, la paie et la logistique.

De bayrou à lecornu, la séquence politique qui a tout accéléré

Le 9 septembre 2025, Sébastien Lecornu a été nommé à Matignon, avec mandat de constituer un nouveau gouvernement. Le lendemain, un arrêté a détaillé la composition de son cabinet, confirmant une transition exécutive rapide autour des enjeux budgétaires. Le calendrier s’est ainsi compressé entre installation du nouvel exécutif et arbitrages sur les mesures sensibles.

En toile de fond, l’héritage d’un plan d’économies présenté à la mi-juillet par François Bayrou, alors Premier ministre. Cette trajectoire pluriannuelle fixait une cible de 43,8 milliards d’euros d’économies et visait un déficit public ramené à 4,6 % du PIB en 2026.

Parmi les leviers annoncés figurait la suppression de deux jours fériés, additionnée à d’autres rationalisations de dépenses et de niches. Avec l’arrivée de Lecornu, ce volet spécifique sort du périmètre, sans remise en question de l’objectif global d’assainissement.

La nomination d’un Premier ministre et l’arrêté fixant la composition du cabinet stabilisent la chaîne décisionnelle et logistique du budget: arbitrages interministériels, saisine des inspections, bouclage des études d’impact, calibrage des compensations. Cet ancrage administratif permet d’ajuster rapidement les mesures contestées sans désorganiser le processus de dépôt et d’examen parlementaire.

Chiffrages du plan initial et repositionnement de la trajectoire 2026

Le socle chiffré issu du plan de juillet demeure la référence. L’exécutif vise toujours une consolidation rapide des finances publiques, condition de crédibilité sur les marchés comme dans le dialogue européen. Ce qui change, c’est la composition des leviers à l’intérieur de la trajectoire.

Le retrait des jours fériés retire un gisement estimé à 4,2 milliards d’euros. Il ne remet pas en cause la cible attendue pour 2026, mais implique des ajustements sur d’autres lignes, qu’elles relèvent d’économies de fonctionnement, de rationalisations de dispositifs ou d’optimisations de recettes. La visibilité donnée dès septembre est un signal important aux acteurs économiques qui planifient leurs investissements et leurs recrutements sur 2026.

Métriques Valeur Évolution
Objectif d’économies 2026 43,8 Md€ Inchangé
Contribution envisagée des jours fériés 4,2 Md€ Retirée
Déficit public visé en 2026 4,6 % du PIB Inchangé
Dette publique T2 2025 Environ 110 % du PIB Contexte

La communication officielle a souligné l’écoute des partenaires sociaux et la nécessité d’éviter des mesures à rendement incertain. Plusieurs observateurs qualifient ce geste de concession symbolique. Sur le plan macro, il ne modifie pas la direction d’ensemble mais rebat les cartes des instruments à activer.

Deux points émergent pour la suite: la revue des dépenses susceptibles d’être reprogrammées et la priorisation d’outils de soutien à la production, afin de concilier consolidation budgétaire et trajectoires d’investissement. Le gouvernement a laissé entendre qu’il privilégierait des solutions moins clivantes socialement, sans renoncer à la discipline comptable attendue.

Ce que les entreprises gagnent en stabilité opérationnelle

Le maintien des jours fériés évite une translation brutale de l’organisation du travail. C’est un sujet très concret pour la paie, la planification des équipes et la relation commerciale. Pour un gestionnaire d’unités de production, l’impact ne se limite pas aux deux dates en tant que telles: il touche l’ensemble des paramètres amont et aval, du planning de maintenance aux dates de livraison.

Calendrier rh et paie 2026

  • Planification des horaires simplifiée, sans refonte des cycles des équipes ni recalibrage massif des compteurs d’heures.
  • Heures supplémentaires et majorations inchangées sur les périodes fériées travaillées, levant une source d’incertitude sur les coûts unitaires.
  • Congés payés et RTT calibrage intact, évitant un empilement de reports ou des conflits d’arbitrage en période estivale.

Secteurs orientés vers la demande domestique

Le commerce de détail, l’hôtellerie-restauration et les loisirs, généralement portés par les pics de fréquentation liés aux ponts, conservent un environnement d’activité lisible. Les directions commerciales peuvent maintenir leurs plans d’animation, tandis que la logistique évite un changement de cadence coûteux. Dans l’industrie, l’absence de deux jours ouvrés additionnels maintient la visibilité sur les cadences, sans nécessiter de relance d’achats intermédiaires à court terme pour satisfaire un surcroît de commandes compressé sur l’année.

Dans les services, l’arbitrage lève un risque de surcharge et de turnover temporaire consécutif à une densification des jours travaillés. L’argument a été mis en avant par les organisations patronales comme par les syndicats: un calendrier stable est un facteur d’attractivité du marché du travail et réduit le risque d’absentéisme post-périodes intenses.

Le calcul ne se réduit pas à la masse salariale majorée. Il faut intégrer: la désorganisation potentielle en amont, la pénalité logistique en aval, l’énergie, l’assurance qualité et le risque d’attrition si l’effort demandé devient récurrent. Un CFO rapproche ces coûts des gains de chiffre d’affaires réellement captables sur la période, puis arbitre au regard de la marge contributive.

Angle juridique: sécuriser le droit du travail évite un cycle contentieux

Modifier la liste des jours fériés légaux aurait impliqué d’altérer des dispositions du droit du travail et, potentiellement, des accords collectifs et d’entreprise. Au-delà de la procédure parlementaire, la mise en conformité des textes conventionnels, l’adaptation des accords de branche et la renégociation locale auraient généré un risque de conflits et de contentieux. Le retrait de la mesure écarte un chantier juridique complexe et offre un horizon clair aux directions RH.

En pratique, les entreprises auraient dû auditer leurs usages internes sur le travail des jours fériés, réviser les politiques de majoration, actualiser les logiciels de paie et redéfinir les dispositifs d’astreinte. Autant d’opérations consommant du temps et mobilisant des équipes support.

Cette charge de mise en conformité n’est plus à absorber. L’administration du travail n’a pas non plus à organiser une chaîne d’instructions sur les modalités d’application et les exceptions sectorielles.

Rappels utiles sur les jours fériés en droit français

Les jours fériés légaux sont listés de manière limitative. Leur statut est encadré par des règles relatives à la rémunération, aux majorations en cas de travail et aux repos compensateurs selon les conventions. Toute modification au niveau national implique d’ajuster un ensemble de textes imbriqués, depuis la loi jusqu’aux accords de branche.

Où trouver 43,8 milliards d’euros sans toucher au calendrier

Le gouvernement maintient l’objectif d’économies globales annoncé en juillet, avec une consolidation à réaliser autrement. Pour les entreprises, plusieurs scénarios classiques peuvent influer sur la trésorerie et la fiscalité, sans préjuger des arbitrages finaux. Ces leviers relèvent des outils habituellement mobilisés dans les lois de finances et de financement de la sécurité sociale.

  • Revue de dépenses publiques ciblant des dispositifs redondants, avec un effort de sélectivité sur les programmes à faible effet multiplicateur.
  • Réexamen de niches fiscales, notamment via des plafonnements ou des durcissements de conditions d’éligibilité, à rendement plus immédiat que la réécriture du calendrier du travail.
  • Lutte contre la fraude et recouvrement avec accent sur les contrôles de TVA et de cotisations, afin de générer des recettes sans hausse des taux faciaux.
  • Rationalisations sectorielles sur des dépenses de fonctionnement et subventions, en coordination avec les collectivités et les opérateurs publics.

Pour le secteur privé, l’intérêt de cette recomposition est double. D’abord, elle laisse intacte la boussole RH pour 2026. Ensuite, elle privilégie des instruments budgétaires qui se traitent davantage par la conformité et la gestion des risques fiscaux. Les directions financières peuvent anticiper des contrôles plus soutenus et revoir leurs dispositifs de collecte de données, plutôt que de reconstruire des organisations calendaires.

Deux repères bornent la trajectoire: 43,8 milliards d’euros d’économies en cible et un déficit public visé à 4,6 % du PIB pour 2026. Ils restent la grille d’analyse prioritaire des investisseurs et des agences. Dans l’équation, la dette publique proche de 110 % du PIB à la mi-2025 sert de boussole de soutenabilité à moyen terme.

La cohérence d’ensemble reste l’enjeu. Sans jours ouvrés supplémentaires, l’effort se déplace vers des mesures techniques qui, bien calibrées, peuvent produire des effets sans peser sur l’organisation quotidienne des entreprises. Les prochaines étapes seront scrutées: calibrage des dépenses normatives, trajectoires de dépenses locales et articulation avec les priorités industrielles.

Production, innovation et équilibre budgétaire: les points de vigilance pour 2026

Le précédent plan mettait l’accent sur un sursaut de production et d’investissement. Le nouveau chef du gouvernement n’a pas remis en cause la nécessité d’outils favorables à l’offre. Les entreprises attendent des signaux de continuité sur les projets à fort contenu technologique, indispensables pour la compétitivité et les chaînes de valeur.

Plusieurs pistes sont régulièrement évoquées par Bercy et dans les écosystèmes économiques pour concilier assainissement et croissance. Sans préjuger des arbitrages finaux, on peut citer:

  • Maintien de dispositifs pro-innovation afin d’éviter un effet de couperet sur la R&D, notamment par une visibilité pluriannuelle sur les crédits d’impôt et les enveloppes programmatiques.
  • Fléchage sélectif vers l’innovation énergétique et la décarbonation, où les retombées industrielles sont plus rapides et les cofinancements européens mobilisables.
  • Effort de simplification administrative et réglementaire pour accélérer l’investissement privé, jugé moins coûteux que des dépenses directes à rendement incertain.

Pour les directions d’entreprise, ce couple stabilité du calendrier et soutenabilité budgétaire signifie qu’il faut affiner la gestion de portefeuille de projets. La hiérarchisation par retour sur capital investi et par risques réglementaires demeure la meilleure boussole interne, au moment où l’État cible ses appuis sur des segments prioritaires.

Trois repères pour les COMEX et les DAF

  1. Planifier 2026 sans refonte des plannings, mais avec un scénario prudent sur les contrôles et la conformité fiscale.
  2. Sécuriser la paie en consolidant les règles jours fériés et majorations, y compris pour les sites multi-régimes.
  3. Prioriser les investissements dans les domaines à soutiens publics durables, afin d’amortir les éventuelles mesures d’ajustement.

Au plan macro, le cap reste celui d’une décrue graduelle du déficit, à l’articulation d’un soutien à la productivité et d’une maîtrise de la dépense. Les entreprises lisent cet agenda en mode gestion des risques: scénario central de stabilité, scénario alternatif de durcissement fiscal ciblé, le tout encadré par la contrainte européenne et la soutenabilité de la dette.

Dernier virage avant la présentation automnale du plf 2026

Le geste politique de séparer l’objectif d’économies de la suppression de jours fériés clarifie le cadre 2026 pour les employeurs. Les deux jours emblématiques, lundi de Pâques et 8 mai, restent inchangés, tandis que l’exécutif conserve l’ambition de 43,8 milliards d’euros d’efforts cumulés sur le périmètre public.

La trajectoire budgétaire demeure sous contrainte, mais la méthode privilégie la lisibilité et le dialogue social. Les arbitrages restants seront scrutés pour mesurer l’équilibre entre consolidation et compétitivité.

Cap maintenu, instruments ajustés. Les entreprises peuvent avancer leurs plans 2026 sans reconfigurer leur calendrier, en restant attentives aux réglages budgétaires à venir.