Schneider Electric se réorganise en France avec des fermetures
Fermeture de deux sites de Schneider Electric en France impactant 126 emplois d'ici 2027. Décisions, calendrier et conséquences locales détaillés.

Schneider Electric enclenche une réorganisation d’ampleur en France. Le groupe mettra fin aux activités de deux sites historiques, à Privas et à Montélimar, avec une extinction progressive d’ici la mi-2027. Derrière cette décision, une réalité industrielle tenace et une recherche de compétitivité. L’enjeu est clair: reconfigurer l’outil productif tout en maîtrisant le choc social et territorial.
Fermetures programmées à privas et montélimar: décisions, calendrier et effectifs concernés
La direction de Schneider Electric a officialisé le 9 septembre 2025 la fermeture de deux implantations associées à sa filiale Construction Électrique du Vivarais. Sont concernés un site industriel à Privas et un site logistique à Montélimar, avec une cessation d’activité fixée à juin 2027.
Au total, 126 salariés seraient touchés par le projet, dont environ 112 postes à Privas et 15 à Montélimar (TF1 Info). Les premiers départs interviendraient dès le printemps 2026, sous réserve des procédures sociales et du calendrier définitif à valider avec les représentants du personnel.
Schneider Electric indique privilégier un redéploiement interne chaque fois que possible, ainsi que des solutions d’accompagnement individuelles. La filiale CEV, dédiée à la construction électrique, portera la majorité des mesures, en coordination avec l’entité française du groupe.
Points clés de l’annonce
Deux sites concernés, arrêt complet d’ici mi-2027, orientation vers des reclassements internes lorsque possible, et ouverture d’un dialogue social sur les modalités d’exécution. Les syndicats demandent des garanties et contestent l’absence de perspectives locales.
Pourquoi ces sites s’arrêtent: production en retrait et arbitrages de compétitivité
La direction évoque un recul durable des volumes sur les lignes concernées, sans visibilité de retournement. Les tentatives de diversification, notamment à Privas avec la réparation d’équipements usagés, n’auraient pas suffi à restaurer une charge industrielle viable sur la durée.
Pour un acteur de l’électrotechnique, une baisse persistante de la production pèse doublement: elle rogne la productivité unitaire et fragilise l’effet d’échelle qui amortit investissements, maintenance et qualité. L’arbitrage devient alors prudentiel: consolider sur des sites mieux chargés, puis redéployer les activités non rentables ou les convertir.
La logistique suit une logique comparable. Un hub sous-utilisé renchérit le coût par palette et complique la performance service. Les groupes accélèrent alors la centralisation de flux ou le rapprochement des plateformes des corridors routiers et ferroviaires les plus denses, pour optimiser les délais et l’empreinte carbone.
Quand la charge industrielle s’érode au fil des années, trois signaux convergent: plan de maintenance reporté et vieillissement des moyens, coût de non-qualité plus difficile à contenir, capex arbitrés vers des sites plus performants. Cette mécanique autosuffisante rend la relance délicate, sauf à réalimenter massivement le carnet et les investissements.
À l’échelle d’un groupe mondial, l’alignement stratégique est aussi en jeu. Schneider Electric accélère depuis plusieurs exercices sur les solutions numériques d’efficacité énergétique et l’intégration de la chaîne de valeur autour des logiciels, des automatismes et des services. Cette orientation favorise les sites capables de combinatoires produit-logiciel et de montée en gamme technologique.
À retenir sur la trajectoire des sites ardéchois et drômois
Privas a tenté des pivots vers la réparation pour étirer le cycle de vie des matériels. La tendance de fond, jugée insuffisante par la direction, incite à réallouer la capacité vers des unités mieux chargées et plus intégrées à la stratégie numérique du groupe.
Emploi, obligations légales et leviers de sécurisation des parcours
Un projet de cette ampleur en France active un cadre juridique précis. Au-delà des annonces, la réussite opérationnelle passe par le respect des étapes sociales obligatoires, la qualité du Plan de sauvegarde de l’emploi et l’efficacité du reclassement.
- Information-consultation du Comité social et économique, appuyée le cas échéant par un expert-comptable.
- PSE obligatoire si le seuil légal de licenciements est franchi dans une entreprise d’au moins 50 salariés, y compris mesures de formation, aides à la mobilité, appui à la reconversion.
- Validation du plan par l’administration (DREETS) ou homologation selon le cadre retenu.
- Recherche de reclassement interne sérieuse et traçable, en France et à l’international lorsqu’il existe des opportunités compatibles.
- Dispositifs dédiés: congé de mobilité, contrat de sécurisation professionnelle, accompagnement à la création ou reprise d’entreprise, VAE.
Les directions structurent le dossier autour d’axes clés: motifs économiques objectivés, périmètre d’emplois et catégorisation, mesures d’accompagnement calibrées, reclassement interne documenté, et calendrier réaliste. Côté contrôle, l’administration vérifie notamment la cohérence entre difficultés invoquées et mesures proposées, et la proportionnalité des moyens au regard des capacités du groupe.
Dans un groupe comme Schneider Electric, le potentiel de reclassement interne est naturellement plus élevé que dans une PME indépendante. La clé reste la cartographie des compétences et la rapidité à faire coïncider besoins ouverts et profils disponibles, via des passerelles de formation ciblées.
Mesures d’accompagnement mobilisables en pratique
Les plans robustes combinent plusieurs leviers: FNE-Formation pour reconversion rapide, formations certifiantes sur des métiers en tension, indemnités de mobilité pour mutations inter-sites, aide à la création d’entreprise pour les porteurs de projet, et cellule d’appui pour les candidatures de reclassement.
Territoires: quels effets économiques à privas et montélimar
Le retrait d’un industriel d’ancrage pèse rapidement sur les écosystèmes locaux. La perte de 126 emplois à court terme impacte d’abord le revenu des ménages, puis les activités de sous-traitance et de services. Le tissu économique de Privas et Montélimar devra absorber cette déperdition de flux, au moins transitoirement.
L’Ardèche, où se situe le site de Privas, affichait un taux de chômage de 7,2 pour cent en 2024. La sensibilité du marché de l’emploi à une contraction de l’industrie y est donc significative (INSEE). Du côté de la Drôme, l’activité logistique de Montélimar bénéficiait d’une situation géographique favorable, mais pourrait être redéployée vers des plateformes plus centralisées.
Les collectivités locales disposent de leviers limités mais utiles: activation de cellules territoriales, soutien à la reprise d’actifs ou d’activités connexes, facilitation des parcours de formation vers des métiers en tension, notamment dans la maintenance industrielle, la gestion d’énergie et la logistique.
Une fermeture de site est l’arrêt total de l’activité sur un lieu géographique donné. Elle peut s’accompagner d’un transfert d’activité vers d’autres sites. La cessation d’activité vise la disparition d’une branche entière au sein d’une entreprise. Dans les deux cas, les obligations d’information, de consultation et de reclassement s’appliquent, avec des nuances selon le périmètre.
À noter, les nouvelles règles de zones à faibles émissions mobilité redessinent progressivement les schémas logistiques, même si elles ne sont pas à l’origine du projet Schneider Electric ici. Elles pourront relever d’un paramètre d’optimisation dans la réorganisation globale des flux à l’échelle du groupe, en lien avec l’objectif de décarbonation.
Données emploi local à surveiller
Suivre l’évolution des offres dans l’industrie et l’énergie, la capacité d’absorption de la logistique régionale, et le taux de retour à l’emploi des salariés accompagnés. Ces indicateurs donnent la mesure de l’impact réel et de la qualité de la réponse publique et privée.
Schneider electric: trajectoire, empreinte française et cap stratégique
Fondé en 1836, Schneider Electric s’est imposé comme un acteur clé de la gestion de l’énergie et de l’automatisation. Le groupe développe des technologies pour optimiser la consommation énergétique des bâtiments, des infrastructures et des industries, en combinant équipements, logiciels et services.
En France, l’empreinte de Schneider Electric reste significative, avec plusieurs usines, des centres R&D et une présence tertiaire à Rueil-Malmaison. Cette assise permet d’offrir des passerelles internes, même quand des arbitrages de carte industrielle s’imposent.
Sur le plan financier, Schneider Electric a délivré en 2023 un chiffre d’affaires de l’ordre de 36 milliards d’euros, soutenu par la demande en solutions d’efficacité et en automatismes industriels. La direction affiche par ailleurs un cap ambitieux en matière d’opérations bas carbone, avec des objectifs rapprochés de neutralité pour ses périmètres directs.
Grenoble: écosystème industriel et r et d
Le pôle grenoblois concentre des expertises en électronique de puissance, numérique et automatismes. Dans un scénario de redéploiement, ce type d’écosystème offre une capacité d’absorption de profils industriels et techniques, à la faveur de projets mêlant produit et logiciel.
Rueil-malmaison: fonctions siège et mobilité interne
Le site de Rueil-Malmaison, à dominante corporate et commerciale, peut proposer des voies de transition pour des fonctions support, qualité, supply chain ou service client. Il ne s’agit pas d’une substitution directe aux métiers de production, mais d’un chemin de mobilité réaliste pour certains profils.
L’ensemble s’inscrit dans la stratégie d’un acteur qui consolide sa base industrielle pour mieux prioriser les investissements vers les segments en croissance: gestion digitale de l’énergie, automatisation avancée, services énergétiques, et intégration logiciel-matériel sur des marchés finaux à haute criticité.
Qui est CEV, la filiale impliquée
Construction Électrique du Vivarais opère au cœur de la chaîne de valeur des composants et appareillages électriques, avec un ancrage productif régional. Son repositionnement s’inscrit dans un mouvement plus large de rationalisation industrielle et de recomposition logistique à l’échelle du groupe.
Réactions, points de friction et questions en suspens
Les organisations syndicales dénoncent une fermeture jugée prématurée, au regard des efforts de diversification engagés et des savoir-faire disponibles. Elles demandent des garanties sur l’emploi et la localisation des activités transférées, ainsi qu’un niveau d’indemnisation proportionné aux moyens du groupe.
La direction met en avant une transition responsable et la volonté d’ouvrir des portes de reclassement en interne. En filigrane, une question: quelles capacités d’accueil réelles, sur quels métiers et à quel horizon? La réponse dépendra de l’état du carnet de commandes sur les autres sites français et européens, et de l’adéquation compétences-postes.
- L’étendue des postes ouverts et leur localisation, clé pour limiter la mobilité contrainte.
- Le niveau de formation et la durée des parcours de reconversion financés.
- La qualité des mesures d’accompagnement: aides au logement, prise en charge des déplacements, tutorat sur site d’accueil.
- La lisibilité du calendrier, pour sécuriser les décisions individuelles des salariés.
Un autre enjeu concerne la continuité d’activité pour les clients. Les transferts de références industrielles demandent une qualification minutieuse sur les sites récepteurs, avec des jalons qualité et supply chain. La réussite de ce volet conditionne l’absence de rupture pour les marchés finaux.
L’entreprise doit identifier tous les postes disponibles compatibles avec les compétences des salariés, et proposer des emplois équivalents ou à défaut de catégorie inférieure avec accord. La preuve de la démarche effective est déterminante: publication interne, entretiens, suivi individualisé, et accès égal à l’information pour chaque salarié.
Ce que cette réorganisation dit de l’industrie électrique en france
Le cas Privas-Montélimar illustre une double tension sectorielle. D’un côté, une demande robuste pour l’efficacité énergétique, stimulée par la rénovation, l’électrification et l’automatisation. De l’autre, une compétition industrielle qui exige des sites toujours plus productifs, digitalisés et proches des marchés ou des hubs logistiques majeurs.
En pratique, cela pousse les groupes à concentrer certaines lignes, automatiser davantage, et rationaliser les plateformes. Les sites qui ne franchissent pas ce seuil de compétitivité doivent être reprofilés. Le défi français consiste à préserver un maillage d’unités productives modernes tout en développant des compétences adaptées au virage numérique de l’industrie.
Pour les pouvoirs publics, l’enjeu est d’orienter les incitations vers les niches technologiques porteuses, la formation accélérée, et l’ancrage local de projets industriels décarbonés. Les salariés, eux, gagnent à sécuriser des titres certifiants directement valorisables dans l’électrotechnique, la maintenance, la robotique, la supervision et la qualité.
Indicateurs permettant de suivre l’exécution du projet
Quelques repères pour mesurer l’avancement et l’impact réel:
- Taux de reclassement interne à 6 et 12 mois.
- Part des départs volontaires vs économiques.
- Délai moyen de reconversion et hausse de qualification obtenue.
- Maintien de service aux clients: délais, taux de service, indicateurs qualité après transfert.
Ce qui attend les salariés et le marché dans les prochains mois
Les réunions d’instances et la négociation des mesures d’accompagnement vont structurer l’automne. Les salariés surveilleront la cartographie des postes ouverts en France et les conditions de mobilité, tandis que les territoires chercheront des repreneurs ou des projets industriels alternatifs pour amortir l’impact.
Le marché, lui, évaluera la capacité du groupe à transférer sans rupture les productions et les flux logistiques. Les prochains trimestres diront si l’équation est tenue: compétitivité préservée, qualité maintenue, et impact social limité grâce à des reclassements massifs et rapides.
La fermeture programmée de Privas et Montélimar met en lumière une vérité industrielle simple: pour rester fort, un groupe doit parfois se contracter localement afin d’investir mieux. Tout l’enjeu est de transformer cette contraction en rebond social et productif, sans perdre les compétences qui font la différence.