Septembre 2025 ne sera pas une rentrée fiscale comme les autres. En France, les couples mariés ou pacsés verront leur prélèvement à la source évoluer par défaut vers un taux individualisé. Cette bascule automatique, pensée pour corriger des distorsions au sein des foyers, ne change pas l’impôt global dû mais en modifie la répartition entre conjoints. Un enjeu concret de trésorerie, et d’équité, pour environ 15 millions de couples.

Ce qui change réellement à partir du 1er septembre 2025

Le cœur de la réforme est simple à exprimer mais majeur dans ses effets : le taux individualisé devient le paramètre par défaut pour tous les couples mariés ou pacsés. Il sera appliqué automatiquement aux nouveaux couples, ainsi qu’aux foyers déjà soumis à un taux commun qui n’auront pas exprimé de préférence contraire.

Concrètement, chaque conjoint se verra appliquer un taux de prélèvement directement lié à ses revenus propres. Le montant total d’impôt du foyer, calculé selon l’imposition commune, ne bouge pas. En revanche, la charge est mieux alignée sur la capacité contributive de chacun. Cette mesure découle de la loi de finances pour 2024 et sa mise en œuvre a été actée pour le 1er septembre 2025 (source: economie.gouv.fr).

La réforme cible d’abord les foyers aux revenus déséquilibrés. Dans ces configurations, le taux commun pèse souvent davantage sur le conjoint le moins rémunéré

. L’individualisation corrige cette asymétrie, tout en conservant l’ossature de l’impôt commun. Un ajout important pour les directions financières d’entreprises et les services de paie : aucune action technique supplémentaire n’est exigée de l’employeur, qui applique toujours le taux transmis via la DSN.

Repères clés à retenir

Date d’entrée en vigueur : 1er septembre 2025. Population concernée : couples mariés ou pacsés, imposés en commun. Philosophie du dispositif : individualiser le taux, préserver l’impôt global du foyer. Option ouverte : possibilité de conserver le taux commun sur demande expresse et réversible.

Métriques Valeur Évolution
Nombre de couples mariés ou pacsés environ 15 millions stable à court terme
Entrée en vigueur de l’individualisation par défaut 1 septembre 2025 nouvelle règle par défaut
Recettes annuelles via PAS plus de 100 Md€ sans impact global attendu (source: impots.gouv.fr)
Seuil IFI 2025 1,3 M€ de patrimoine net inchangé

Le taux commun pouvait amplifier des distorsions au sein des couples dont les revenus étaient éloignés. L’individualisation par défaut rend le PAS plus neutre et plus lisible en trésorerie. L’objectif est d’éviter qu’un conjoint à revenu plus faible se voie appliquer un taux supérieur à celui qu’il supporterait en situation individuelle, sans modifier l’impôt global dû.

Comment fonctionne le prélèvement à la source dans la pratique

Instauré en 2019, le prélèvement à la source prélève l’impôt au fil de l’eau sur salaires, pensions et autres revenus. Le taux est transmis par l’administration à l’employeur, la caisse de retraite ou l’organisme payeur. Un salarié payé 1 940 euros nets par mois et soumis à un taux de 4,4 % se voit ainsi retenir environ 93 euros sur sa paie mensuelle.

Pour les couples imposés en commun, l’administration calcule un taux de foyer à partir des revenus agrégés. Ce taux commun est efficace mais peut être inadapté quand les revenus diffèrent sensiblement. D’où l’existence de trois grandes modalités de taux proposées aux contribuables : le taux du foyer, le taux individualisé et le taux neutre.

Le taux du foyer reste pertinent pour des revenus proches entre conjoints. Le taux individualisé privilégie une répartition au plus près de la capacité contributive de chacun. Le taux neutre est utile pour préserver la confidentialité vis-à-vis de l’employeur, mais expose à des régularisations si le barème de référence ne correspond pas à la situation réelle.

La retenue du PAS ne s’applique pas au net à payer, mais au net imposable, qui diffère du net perçu selon les cotisations et avantages. Cette distinction peut expliquer des écarts entre simulation et paie réelle. En cas de doute, consulter la ligne « Net imposable » du bulletin de salaire avant d’appliquer un pourcentage théorique.

Le taux neutre s’appuie sur un barème standard, sans tenir compte de la situation familiale. Il est utile pour préserver la confidentialité mais peut générer un reste à payer en fin d’année si ce taux est inférieur au taux réel du foyer. À l’inverse, un trop-prélevé peut survenir si le barème est trop élevé par rapport à la situation réelle.

Inégalités intra-foyer et effets redistributifs de l’individualisation

Les écarts de revenus au sein des couples demeurent marqués en France. À poste égal, l’écart salarial moyen entre femmes et hommes tourne autour de 16 %, un différentiel qui tend à s’accroître avec l’arrivée d’enfants. Ces disparités se reflètent mécaniquement dans la mécanique du PAS lorsque le taux commun s’applique indistinctement à chaque rémunération du foyer.

Dans de nombreux ménages, le taux du foyer est plus élevé que le taux qui serait appliqué au conjoint aux revenus modestes si celui-ci était imposé isolément. L’effet inverse touche le conjoint aux revenus supérieurs, qui profite d’un taux inférieur à son taux individuel. Au total, l’équilibre de trésorerie au mois le mois peut se trouver déplacé, sans pour autant modifier l’impôt global du couple.

Les évaluations réalisées par des services de l’État et différents organismes de place ont mis en évidence un phénomène régulier : le taux commun concentre une partie de l’effort sur le revenu le plus faible, alors que le taux individualisé le répartit de manière plus proportionnée. Cette observation a nourri le choix politique de passer à l’individualisation par défaut, avec maintien d’une option ouverte pour les foyers souhaitant conserver le taux commun.

Sur le terrain, la bascule devrait être la plus visible dans les foyers où l’écart de salaire dépasse un rapport de un à deux. Les effets sont amplifiés lorsque l’un des conjoints a des revenus variables ou des primes importantes. Pour ces profils, l’individualisation réduit le risque que la personne la moins rémunérée absorbe un niveau de retenue qui ne correspond pas à sa capacité de paiement.

Ce qui s’automatise et ce qui ne change pas

S’automatise : le passage au taux individualisé au 1er septembre 2025 pour les couples, sauf option contraire. Ne change pas : le mode de calcul de l’impôt commun, la possibilité de moduler le taux en cas de variation de revenus, les règles de déclaration annuelle, et l’application du PAS par l’employeur qui demeure purement technique.

Cas pratiques et simulations chiffrées

Les comparaisons concrètes donnent l’ampleur des effets de la réforme sur la trésorerie intra-foyer. Les simulations ci-dessous, effectuées à partir de revenus nets mensuels et de taux arrondis, montrent comment l’individualisation répartit différemment un montant identique d’impôt dû.

Charles et dana : rééquilibrage immédiat

Couple pacsé sans enfant. Charles perçoit 3 000 euros nets par mois, Dana 1 500 euros. À taux commun de 7,5 %, Charles est prélevé d’environ 225 euros par mois et Dana d’environ 112 euros. Total de retenue mensuelle : 337 euros environ.

Avec l’individualisation, le taux de Charles grimpe à 10,4 % soit autour de 311 à 312 euros. Celui de Dana chute à 1,7 %, soit environ 26 euros. Le total reste identique mais la ventilation devient proportionnelle à la capacité contributive de chacun. La trésorerie mensuelle de Dana s’améliore d’environ 86 euros, tandis que celle de Charles diminue d’autant.

Gabriel et camille : baisse du taux pour le revenu le plus modeste

Couple marié avec deux enfants. Gabriel gagne 4 600 euros nets par mois, Camille 1 850 euros. Au taux commun de 8,4 %, Camille supporte une retenue annuelle de l’ordre de 1 866 euros, soit environ 155 euros par mois.

En individualisé, le taux de Camille tombe à environ 0,4 %, soit près de 8 euros mensuels et une centaine d’euros par an. Le taux de Gabriel monte à environ 11,6 %. Le total du foyer ne change pas, mais le différentiel de trésorerie au profit de Camille est significatif. Cet effet est précisément celui que la réforme cherche à systématiser par défaut.

Les taux utilisés sont arrondis et appliqués sur des revenus nets mensuels à des fins pédagogiques. En paie réelle, le calcul porte sur le net imposable et tient compte des informations déclarées au fisc. La mécanique reste la même : individualiser le taux rapproche la retenue de la capacité contributive de chacun et corrige les distorsions générées par un taux unique fondé sur le revenu total du foyer.

Piloter son taux avant septembre 2025 : démarches et options

La bascule au taux individualisé est automatique, mais le maintien du taux de foyer reste possible. Pour cela, chaque couple doit se connecter à son espace particulier, rubrique Gérer mon prélèvement à la source, puis sélectionner l’option dédiée permettant de conserver le taux commun. La démarche est gratuite, immédiate et réversible.

Quelques conseils opérationnels, utiles pour les directions administratives et financières, comme pour les particuliers :

  • Vérifier la cohérence des revenus pris en compte à la dernière déclaration, afin d’éviter tout écart de taux non désiré à la rentrée 2025.
  • Simuler le passage à l’individualisation pour anticiper l’effet de trésorerie chez chacun des conjoints.
  • En cas de variation sensible des revenus en cours d’année, demander une modulation du taux via l’espace en ligne. L’administration autorise cette modulation sous conditions.
  • Pour les nouveaux couples mariés ou pacsés en 2025, noter que l’individualisation par défaut s’appliquera dès la première imposition commune, sauf option inverse.

Il demeure impossible de fixer un taux arbitraire. L’administration calcule le taux à partir des éléments déclarés et des barèmes en vigueur. À noter aussi que la confidentialité demeure garantie pour l’employeur, qui n’a pas accès aux détails du calcul et se contente d’appliquer le taux transmis.

Confidentialité du taux au travail

L’employeur reçoit un taux sans connaître ni sa composition ni la situation familiale sous-jacente. En cas de sensibilité, un taux neutre peut être appliqué. Attention toutefois aux régularisations ultérieures si ce taux s’écarte de la situation réelle du foyer.

La modulation est autorisée si la variation de revenus ou de composition du foyer justifie un écart significatif d’impôt. La demande s’effectue en ligne et peut ajuster le prélèvement du mois suivant. En cas de sous-estimation manifeste, des intérêts de retard peuvent s’appliquer. Il est donc préférable de documenter la variation de revenus avant de requérir une modulation.

Points juridiques et fiscaux associés : impôt commun, ifi, séparation

La réforme n’altère pas le principe d’imposition commune des couples mariés ou pacsés. Le calcul de l’impôt du foyer demeure inchangé, de même que les règles relatives au quotient familial. L’individualisation du taux n’est qu’un ajustement de répartition de la retenue à la source entre conjoints, au fil des mois.

Concernant l’impôt sur la fortune immobilière, les règles restent identiques. Les couples redevables déclarent leur patrimoine au 1er janvier 2025 sur une base commune, dès lors que le seuil de 1,3 million d’euros de patrimoine net est franchi. L’individualisation du taux du PAS n’a aucun impact sur ces obligations déclaratives et d’assiette.

En cas de rupture du couple, la gestion du taux doit être actualisée rapidement. Les ex-conjoints peuvent demander un taux individuel correspondant à leur nouvelle situation, et l’administration rectifie alors les informations transmises aux employeurs. La vigilance s’impose notamment en cas de pensions, de garde alternée ou de modification substantielle des revenus.

Du côté des entreprises, le dispositif reste inchangé. Le rôle de l’employeur est purement déclaratif et technique dans la chaîne du PAS. L’individualisation par défaut ne crée pas de procédure supplémentaire. Les directions paie poursuivent l’application des taux transmis par l’administration via la DSN, en assurant la bonne fiabilité des bases net imposable et des retours CRM de la DGFiP.

Entreprises : trois points de vigilance paie

1 Garantir l’exactitude du net imposable en paie. 2 Appliquer rigoureusement le dernier taux reçu, sans interprétation. 3 Gérer les cas de taux neutre à la demande du salarié, en sachant que le solde fiscal sera régularisé côté administration et contribuable, pas côté employeur.

Cartographie des impacts économiques et sociaux

Le prélèvement à la source a profondément modifié la temporalité de l’impôt sur le revenu depuis 2019. En ancrant la retenue sur la paie, il a sécurisé les recettes publiques et lissé l’effort fiscal des ménages. Les encaissements annuels dépassent 100 milliards d’euros, montrant la centralité du dispositif dans l’architecture budgétaire nationale.

Le passage à l’individualisation par défaut ne vise pas une hausse de rendement. Il s’agit d’un réglage fin pour améliorer l’équité intra-foyer, réduire les perceptions d’injustice et apaiser les tensions de trésorerie qui pouvaient naître lorsque le revenu le plus faible supportait une part disproportionnée du prélèvement.

À l’échelle macro, aucun effet attendu sur le niveau global des recettes, mais un bénéfice microéconomique tangible : des prélèvements mieux calibrés pour chaque conjoint. Dans les couples aux écarts de revenus importants, cette correction de signal-prix mensuel peut aussi influencer des arbitrages de carrière, de temps de travail ou de prise de congés parentaux, en rendant plus lisible la contribution fiscale de chacun à partir de sa propre rémunération.

Il faudra suivre la première année de mise en œuvre. Deux risques d’exécution existent. D’une part, une compréhension insuffisante par certains contribuables, qui pourraient s’attendre à une baisse d’impôt alors que la réforme ne modifie pas l’assiette globale. D’autre part, des anticipations de trésorerie mal calibrées, si le couple n’anticipe pas la variation de retenue sur chacun des bulletins.

Lorsque les revenus sont proches, l’impact de l’individualisation est marginal. Dans ces foyers, garder le taux commun peut simplifier le suivi. De même, si les conjoints souhaitent mutualiser totalement la trésorerie sans différenciation, le taux commun reste cohérent. Rappel utile : l’option est réversible à tout moment via l’espace en ligne.

Pour les acteurs RH et finance, un message central à relayer aux salariés : la réforme ne change pas l’impôt total. Elle modifie la façon dont la retenue s’applique chaque mois à chacun des conjoints. Cette nuance, souvent perdue dans le débat public, est essentielle pour éviter les incompréhensions et les contestations auprès des services paie.

Feuille de route d’ici la rentrée 2025

Les prochains mois seront surtout dédiés à l’appropriation. Les couples ont intérêt à simuler leur situation, vérifier leurs revenus déclarés et décider s’ils souhaitent maintenir le taux commun. Les nouveaux couples mariés ou pacsés à compter de 2025 seront, eux, placés par défaut sur l’individualisation, avec la même liberté d’option.

Cette évolution du PAS consolide une trajectoire vers plus d’équité de trésorerie au sein des foyers, sans bouleverser les fondamentaux fiscaux. Elle offre un cadre plus ajusté à la diversité des configurations familiales et professionnelles, à condition que chacun s’en empare de manière informée et proactive.

En rendant l’individualisation du taux la norme, l’État ajuste la mécanique du prélèvement à la source pour mieux refléter les différences de revenus au sein des couples, tout en préservant l’équilibre budgétaire global et la simplicité opérationnelle côté entreprises.