+10 à 11 millions de logements concernés : au 1er janvier 2026, le DPE collectif devient la nouvelle ligne rouge des petites copropriétés. La mesure, issue de la loi Climat et Résilience, va redistribuer les priorités budgétaires de milliers de syndics et de conseils syndicaux, avec à la clé des arbitrages techniques, juridiques et financiers lourds pour les propriétaires comme pour les locataires.

Copropriétés de moins de 50 lots : bascule réglementaire au 1er janvier 2026

Le compte à rebours est lancé pour les copropriétés de moins de 50 lots. À compter du 1er janvier 2026, ces immeubles devront disposer d’un diagnostic de performance énergétique collectif couvrant l’ensemble du bâtiment. Cette étape complète le déploiement déjà engagé pour les plus grandes structures et vise une approche collective de la performance énergétique, au-delà des réparations ponctuelles sur les logements pris isolément.

Selon des estimations consolidées à partir de données de l’INSEE et de l’ANAH, la mesure cible entre 740 000 et 800 000 résidences collectives, représentant environ 10 à 11 millions de logements et près de 23 millions de personnes. En d’autres termes, une part très significative du parc résidentiel est concernée, qui devra s’organiser pour faire réaliser un diagnostic valable 10 ans et susceptible de déclencher des travaux graduels.

DPE collectif : ce que regarde l’expertise

Le diagnostic évalue l’immeuble dans son ensemble : enveloppe (toiture, façades, planchers), parties communes (isolation, menuiseries collectives), systèmes (chauffage, eau chaude, ventilation) et consommations estimées. Il positionne le bâtiment de A à G et propose des recommandations de travaux avec gains attendus.

Calendrier légal du DPE collectif : obligations échelonnées 2024-2026

Le cadre légal, promulgué par la loi Climat et Résilience d’août 2021, prévoit une montée en charge par paliers pour les bâtiments d’habitation collective. D’après les informations publiées par le Ministère de l’Économie, trois seuils structurent l’obligation :

  • Depuis le 1er janvier 2024 : immeubles en monopropriété et copropriétés de plus de 200 lots.
  • Depuis le 1er janvier 2025 : copropriétés de 50 à 200 lots.
  • À partir du 1er janvier 2026 : copropriétés de moins de 50 lots.

Concrètement, environ 30 % des copropriétés déjà concernées regroupent celles de 50 lots ou plus, en cours de mise en conformité depuis 2024-2025. Les 70 % restantes, majoritairement des petites structures, entreront dans l’obligation au 1er janvier 2026. L’objectif affiché est clair : substituer des plans de rénovation structurés aux interventions dispersées, avec un diagnostic collectif qui priorise les gisements d’économies d’énergie à l’échelle de l’immeuble (economie.gouv.fr).

Le DPE individuel décrit la performance d’un logement, utile lors d’une vente ou d’une location. Le DPE collectif porte sur l’immeuble complet, éclaire les décisions d’assemblée générale et sert de point d’appui aux programmes de travaux. Les deux diagnostics peuvent coexister mais n’ont pas la même finalité opérationnelle.

Effets économiques et juridiques pour les copropriétaires et les locataires

L’équation financière repose d’abord sur le coût du diagnostic et, ensuite, sur les travaux susceptibles d’être décidés à partir des recommandations. Le financement du DPE collectif constitue une charge commune répartie selon les quotes-parts, comme toute dépense générale de copropriété.

Pour les propriétaires, l’enjeu est double : anticiper le vote en assemblée générale et calibrer une trajectoire d’investissements susceptible de valoriser le bien à moyen terme. Pour les locataires, un immeuble insuffisamment performant peut entraîner des charges de chauffage plus élevées et des nuisances temporaires en cas de travaux. Le signal est néanmoins incitatif pour l’ensemble des occupants : selon l’ANAH, l’outil est conçu pour accélérer la rénovation des bâtiments anciens fortement énergivores.

Au niveau macro, l’INSEE recense environ 37 millions de logements en France, dont une part importante en copropriété. L’ANAH estime qu’environ 17 % du parc total est classé F ou G, soit plus de 5 millions de logements. La massification des diagnostics collectifs vise, à terme, à réduire cette proportion et à concentrer les budgets sur les immeubles où le retour énergétique est le plus significatif.

Répartition de la dépense en copropriété : rappel utile

Le DPE collectif est financé par le syndicat des copropriétaires et réparti :

  1. Selon les tantièmes de charges générales inscrits au règlement de copropriété.
  2. Sur la base du budget voté en assemblée générale.
  3. Via l’appel de fonds affecté à la ligne « diagnostics » ou « études ».

Combien coûte un DPE collectif et comment financer

Les coûts constatés varient avec la taille, la complexité et l’accès aux données techniques de l’immeuble. Selon des acteurs du secteur de la rénovation énergétique, un DPE collectif se facture le plus souvent entre 1 000 et 5 000 euros, avec un ticket moyen observé de 2 000 à 3 000 euros pour les petites copropriétés, montant relayé par des médias spécialisés dans l’immobilier. Cette enveloppe ne préjuge pas des dépenses de travaux, potentiellement plus importantes si l’immeuble est classé en F ou G.

Pour lisser l’impact, des dispositifs publics existent. L’ANAH, via France Rénov’, peut soutenir la phase de diagnostic et la rénovation.

MaPrimeRénov’ Copropriété est mobilisable pour une partie des travaux, avec une aide pouvant aller jusqu’à 25 % du coût, et des bonus en cas de sortie des classes F et G, sous conditions. Des données publiques indiquent que de nombreuses copropriétés ont déjà été aidées en 2024, signalant une montée en charge du dispositif.

Vérifier que le diagnostiqueur est certifié par un organisme lui-même accrédité par le COFRAC. Exiger un cahier des charges précisant le périmètre, les hypothèses de calcul et le format des livrables. S’assurer de l’exhaustivité des relevés sur l’enveloppe et les systèmes, et de la présence d’un plan d’actions chiffré par scénarios.

Financements publics : comment articuler les aides

Articuler les dispositifs nationaux et locaux peut améliorer le plan de financement :

  • France Rénov’ pour l’orientation et le conseil.
  • MaPrimeRénov’ Copropriété pour une part des travaux d’efficacité énergétique.
  • Bonus possible en cas de sortie de la catégorie F ou G.

Points d’attention : critères d’éligibilité, plafonds et cumul avec d’autres aides. S’en tenir aux informations publiées par les organismes officiels et les syndics.

Mode d’emploi : voter, diagnostiquer, planifier

La procédure est balisée par la loi du 10 juillet 1965 sur la copropriété. Le DPE collectif doit figurer à l’ordre du jour de l’assemblée générale et être voté à la majorité simple. Une fois acté, le syndic mandate un diagnostiqueur certifié, qui procédera aux relevés, aux calculs et à la restitution du rapport.

Procédure en AG : étapes essentielles

  • Inscription du DPE collectif à l’ordre du jour avec devis joints.
  • Vote à la majorité simple sur la désignation du prestataire et le budget associé.
  • Organisation des visites techniques et collecte des documents : plans, factures d’énergie, carnets d’entretien.
  • Réunion de présentation du rapport et mise en discussion des scénarios de travaux.

Diagnostic : périmètre technique

Le professionnel examine l’enveloppe du bâtiment, les réseaux collectifs de chauffage et d’eau chaude, la ventilation et les consommations. Le rapport attribue une classe énergétique et formule des recommandations hiérarchisées. La validité de 10 ans offre à la copropriété une fenêtre de planification.

Obligatoire depuis 2023 pour les immeubles de plus de 15 ans, le Plan pluriannuel de travaux (PPT) permet de hiérarchiser les interventions sur 10 ans. Adosser le DPE collectif au PPT favorise l’obtention de financements et séquence les chantiers en fonction de leur rentabilité énergétique et de l’état du bâti.

Transition énergétique du parc résidentiel : gains attendus et marché des services

Au-delà de la conformité réglementaire, la dynamique visée est celle d’une réduction mesurable des consommations et des émissions. D’après des études de l’ADEME, des travaux bien ciblés peuvent réduire les factures de chauffage de 20 à 30 % sur les immeubles rénovés. Ce potentiel renforce l’intérêt d’une démarche par étapes, éclairée par un diagnostic collectif robuste.

La loi Climat et Résilience s’inscrit dans une trajectoire qui prévoit l’interdiction progressive de mise en location des logements les plus énergivores. Des déclarations publiques rappellent la cible d’une interdiction des G d’ici 2028, avec un durcissement ensuite pour les classes F puis E, selon un calendrier appelé à s’affiner. Les diagnostics collectifs doivent, à terme, contribuer à l’évitement de millions de tonnes de CO2 par an en accélérant les rénovations à l’échelle de l’immeuble.

Pour l’écosystème économique, l’obligation crée un marché en croissance pour les cabinets de diagnostic, bureaux d’études, entreprises de travaux et financeurs. Des acteurs du secteur rapportent un afflux de demandes pour des DPE collectifs, avec une accélération nette en 2024. La coordination entre syndics, AMO et banques devient un facteur de succès pour éviter les goulets d’étranglement.

Hellio : signal de marché

Selon des informations sectorielles, Hellio a constaté en 2024 une hausse de 40 % des sollicitations sur les diagnostics et projets de rénovation énergétique. Ce signal confirme l’accélération de la demande, notamment à l’approche des nouveaux jalons réglementaires.

Indicateurs structurants du parc résidentiel

Quelques repères utiles pour prioriser les actions :

  • 37 millions de logements en France, dont une part importante en copropriété.
  • Environ 17 % du parc classé F ou G, soit plus de 5 millions de logements.
  • Parmi les immeubles construits avant 1975, une forte proportion nécessite des rénovations énergétiques.

Ces ordres de grandeur, issus de données publiques, justifient la focalisation sur les bâtiments collectifs les plus énergivores (INSEE, ANAH).

Cap 2026 : préparer sa copropriété sans retard

La fenêtre 2025-2026 doit être mise à profit pour programmer l’AG, sélectionner un diagnostiqueur et articuler le DPE collectif au PPT. L’enjeu n’est pas seulement de se conformer à l’obligation, mais d’optimiser le rapport coût-bénéfice des travaux, d’anticiper les demandes d’aides et de prévenir les tensions sur les devis comme sur les délais.

À terme, la discipline imposée par le DPE collectif peut devenir un levier de valeur pour l’immeuble : consommation maîtrisée, charges stabilisées, et meilleure lisibilité pour les investisseurs comme pour les occupants. Aux copropriétés désormais de transformer l’obligation en opportunité, avec une feuille de route crédible et des financements bien orchestrés.

Le temps de l’anticipation est court : chaque assemblée générale 2025 peut faire gagner un cycle d’hiver sur la performance de l’immeuble.