L'étude récente d'Altares révèle des tendances contrastées en matière de comportements de paiement parmi les entreprises en France et en Europe pour 2023. 

D'une part, près de la moitié des entreprises, tant françaises qu'européennes, honorent leurs factures dans les délais impartis, reflétant un taux de ponctualité proche de 50%. D'autre part, on observe une préoccupation croissante quant à l'augmentation des retards, surtout ceux excédant 30 jours. 

En France et en Europe, environ une entreprise sur deux paie ses factures à temps

L’étude met en lumière une dualité dans les pratiques de paiement des entreprises en France et en Europe sur 2023.

D'une part, 1 entreprise sur 2 respecte les échéances de paiement de ses factures. En effet, actuellement, la proportion d'entreprises françaises réglant leurs factures à temps est la plus élevée jamais enregistrée. Elle avoisine les 50% (49,3%), un taux comparable à la moyenne européenne (49,9%) pour le deuxième semestre 2023. De l'autre, il y a une tendance inquiétante vers l'augmentation des retards, en particulier pour les paiements dépassant 30 jours.

L'importance de délais de paiement respectés pour une bonne dynamique économique est soulignée par Thierry Millon, directeur des études chez Altares, qui affirme : « Il faut des clients qui payent à l’heure pour pouvoir à son tour payer ses fournisseurs à l’heure. Le crédit interentreprise et ses 800 milliards d’euros n’est pas un jeu à somme nulle où les postes fournisseurs et clients s’équilibrent toujours. » 

France et Europe : des retards de paiement en légère hausse

Chef d'entreprise qui règle ses factures à temps

En moyenne, les délais de paiement des entreprises en France et en Europe s'étendent en moyenne à 12 jours et 13 jours respectivement pour le deuxième semestre 2023, marquant une petite hausse par rapport à l'année antérieure. 

Cette situation reflète un ralentissement de l'activité économique. L’inflation élevée et des taux d'intérêt croissants mettent les trésoreries sous pression et entravent les bonnes pratiques de paiement observées en 2022. En effet, depuis l'été 2020, les retards de paiement en France, comme en Europe, avaient commencé à diminuer progressivement après avoir atteint un sommet de 14,5 jours. Trois ans plus tard, bien que l'Europe dans son ensemble reste bloquée sur un seuil de retard moyen de 13 jours, la France a vu son retard moyen revenir à 12 jours.

France : une augmentation des retards importants de plus de 30 jours 

En France, un aspect particulièrement alarmant est la hausse des retards excédant 30 jours. En effet, les retards supérieurs à 30 jours ont augmenté, passant de 5,7% à 7,6% en un an. 

Alors que les PME avaient repris leurs comportements de paiement d'avant la crise Covid en 2022, en passant sous la barre des 12 jours, elles connaissent désormais des retards légèrement plus longs. En effet, les PME avec un effectif de 50 à 200 employés ont vu leurs retards s'allonger d'une journée par rapport à l'année précédente, passant de 11,2 jours au deuxième trimestre 2022 à 12,4 jours au deuxième trimestre 2023. Cependant, les PME qui comptent entre 10 et 49 salariés ont tout de même réussi à maintenir leurs retards de paiement en dessous de 11,5 jours.

Une tendance opposée a été observée chez les très petites entreprises (TPE). Les plus grandes structures, avec plus de 3 salariés, ont maintenu leurs retards autour de 11,5 jours, tandis que les plus petites, avec moins de 3 salariés, ont vu leurs retards augmenter à 12,2 jours au deuxième trimestre 2023

Thierry Millon, directeur des études chez Altares, souligne que les tensions sont particulièrement fortes chez les très petites entreprises. Il note que ces entreprises pourraient approcher 13 jours de retard d'ici le troisième trimestre 2023, un niveau inhabituel pour ces structures normalement soumis à des paiements plus rapides.

Les entreprises de taille intermédiaire (ETI) et les grandes entreprises avec plus de 1000 salariés n'ont pas non plus réussi à maintenir les progrès réalisés l'année précédente. Alors qu'elles avaient réduit leurs retards à 16,5 jours pendant l'été 2022, les retards moyens sont maintenant proches de 18 jours, atteignant le chiffre de 17,7 jours au deuxième trimestre. 

Tableau chiffré sur les délais de paiement des entreprises sur l'année 2023 et les années précédentes

France : des disparités régionales et sectorielles pour les retards de paiement

La France présente des différences marquées en termes de retards de paiement, aussi bien à l'échelle régionale que sectorielle.

Dans les différentes régions, les écarts sont prononcés. Par exemple, à Paris et en Île-de-France, le retard moyen dépasse 17 jours, se situant bien au-delà de la moyenne nationale. En revanche, des régions comme la Bretagne, les Pays de la Loire et la Nouvelle-Aquitaine réussissent à maintenir leurs retards en dessous de 10 jours.

En ce qui concerne les différents secteurs, les disparités sont tout aussi significatives. 

Le secteur B2C, particulièrement dans les domaines de la restauration et des débits de boissons, a connu une augmentation notable de ses retards de paiement depuis 2022, reflet des défis continus post-Covid. Par exemple, dans la restauration, le retard moyen de paiement est d'environ 19,4 jours à la mi-2023, une légère hausse par rapport à la crise. De plus, les bars et les coiffeurs, qui avaient amélioré leur situation post-crise, subissent de nouveau des difficultés. Cependant, le commerce de détail affiche une plus grande stabilité, malgré des tensions persistantes, notamment dans les secteurs alimentaires et de l'habillement. Le domaine alimentaire a terminé le premier semestre avec un retard moyen d'environ 13,5 jours, effaçant ainsi les améliorations de 2021 et 2022.

Dans le secteur B2B, alors que la construction se distingue par ses bonnes performances, le secteur immobilier, en revanche, connaît une forte baisse de régularité dans les paiements. En effet, le domaine de la promotion immobilière voit maintenant ses retards de paiement moyens dépasser les 26 jours, et les agences immobilières présentent un retard moyen de 17,3 jours, marquant une hausse de 3 jours sur un an.Par ailleurs, le secteur administratif subit également une détérioration de ses pratiques de paiement depuis 2022. Le délai moyen de paiement, qui était inférieur à 12 jours en 2021, s'est accru pour atteindre presque 13 jours à la fin de 2022, et dépasse désormais les 14 jours.

La situation en Europe 

En Europe, les comportements de paiement varient considérablement entre les pays.

La France est alignée sur la moyenne européenne, mais reste derrière les Pays-Bas et l'Allemagne. En effet, les Pays-Bas et l'Allemagne maintiennent leur position de leaders, avec des retards de paiement inférieurs à 7 jours

La Belgique, autrefois parmi les « bons élèves », connaît des difficultés avec une moyenne de 11,4 jours de retard de paiement.

Les pays latins, comme le Portugal, l'Espagne et l'Italie, font face à des retards plus importants, bien que l'Italie ait réduit ses délais à moins de 17 jours. Le Royaume-Uni montre des signes d'amélioration, avec des retards descendant à 13,8 jours.

Selon Thierry Millon, les entreprises européennes tentent de résister aux défis économiques, mais un écart se creuse entre celles qui respectent leurs échéances de paiement et celles qui les prolongent de plus d'un mois, révélant des différences significatives en termes de trésorerie et de santé financière.