En ce début d’année, les entreprises françaises font face à un environnement peu favorable, caractérisé par une croissance économique en berne et des incertitudes politiques.

Les chiffres du Baromètre des entreprises 2024, réalisé par le Conseil National des Greffiers des Tribunaux de Commerce (CNGTC), la Banque des Territoires, Infogreffe et Xerfi Specific, illustrent avec précision la manière dont ces turbulences impactent la création d’entreprises, les procédures de sauvegarde, ainsi que les radiations. Dans les paragraphes qui suivent, nous analysons en profondeur les tendances et dynamiques qui façonnent le paysage entrepreneurial français, en revenant sur les chiffres clés, les facteurs d’influence et les perspectives à moyen terme.

Un climat conjoncturel tendu dès 2024

Les données collectées de janvier à novembre 2024 font état d’une croissance économique d’environ 1 %. Cette performance reste loin des ambitions initiales, surtout au regard des perspectives annoncées pour 2025 : selon Xerfi, le Produit Intérieur Brut (PIB) ne progresserait que de 0,7 %. Cette décélération souligne la fragilité de la reprise économique, fragilité accentuée par une incertitude politique et réglementaire pesant sur les décisions d’investissement et de recrutement.

Les entreprises, déjà marquées par les conséquences de crises successives (sanitaires, énergétiques et inflationnistes), cherchent à préserver leur trésorerie, en réévaluant à la baisse leurs projets d’embauches et de développement. Les ménages, par ailleurs, adoptent une attitude prudente : ils limitent leur consommation, malgré la hausse relative des salaires réels et une inflation qui tend, bien que lentement, à se modérer.

Ce contexte particulier est au cœur de l’analyse du Baromètre : il explique en grande partie l’augmentation des procédures collectives et la tendance générale de ralentissement de l’activité sur l’ensemble du territoire. Pour mieux saisir l’ampleur de la situation, examinons en détail les différents indicateurs qui, mis bout à bout, tracent la cartographie économique de la France d’aujourd’hui.

Définition : PIB et impact sur l’emploi

Le PIB (Produit Intérieur Brut) est l’indicateur de référence pour mesurer la richesse produite par un pays. Lorsque le PIB croît faiblement, l’activité économique se contracte : les entreprises réduisent leurs besoins de main-d’œuvre, freinant ainsi les créations d’emplois. Un PIB sous la barre de 1 % de croissance se traduit souvent par une stagnation de l’embauche dans de nombreux secteurs.

L’évolution des immatriculations : entre dynamisme et prudence

Contrairement aux idées reçues, la période de janvier à novembre 2024 a enregistré une hausse de 8,4 % des immatriculations par rapport à l’année précédente. Cette progression témoigne d’un dynamisme persistant de l’entrepreneuriat en France, même si ce sursaut reste à nuancer. En effet, ce sont surtout les entreprises individuelles qui ont contribué à cet élan, notamment dans le secteur des services et du numérique.

Pourquoi ce regain ? L’un des facteurs majeurs est l’attrait pour le statut d’auto-entrepreneur (micro-entreprise), dont la simplicité administrative continue de séduire.

La volonté d’indépendance professionnelle et la recherche d’opportunités dans les nouvelles technologies encouragent aussi la création d’entreprises. Néanmoins, la croissance rapide des immatriculations reste deux fois moins forte que celle des ouvertures de procédures collectives, illustrant un revers de la médaille : le manque de stabilité et les difficultés de maintien d’activité.

La France demeure un vivier d’initiatives entrepreneuriales, mais l’environnement économique impose aux nouveaux acteurs une grande vigilance, tant sur le plan de la gestion financière que sur celui de la maîtrise de leurs charges.

Cette prudence se reflète dans un besoin accru d’accompagnement et dans l’intérêt croissant pour les dispositifs de soutien à la création d’entreprises offerts par les Chambres de Commerce et d’Industrie (CCI) et par d’autres organismes publics ou privés.

Bon à savoir

Selon certains économistes, la croissance des créations d’entreprises individuelles n’est pas un simple effet de mode. Dans un contexte économique incertain, elle peut traduire une recherche de solutions alternatives ou d’indépendance face à l’emploi salarié. Les formations en ligne, la digitalisation des services et l’essor des plateformes de freelances participent à cette tendance.

Les procédures collectives en hausse : un signal d’alarme

Le Baromètre met en avant une progression de 17,3 % des ouvertures de procédures collectives (redressements judiciaires, liquidations judiciaires, etc.) sur les onze premiers mois de 2024.

Ce taux, qui progresse deux fois plus vite que celui des immatriculations, est le révélateur de fragilités persistantes au sein du tissu entrepreneurial français.

Parmi les facteurs explicatifs :

  • L’impact des crises économiques récentes (COVID-19, inflation, hausse du coût de l’énergie) qui ont profondément affecté les trésoreries.
  • La fin des aides d’urgence octroyées en 2023 : ces aides avaient jusqu’alors soutenu artificiellement certaines entreprises en difficulté.
  • L’inflation soutenue qui renchérit les coûts de production, en particulier dans le BTP (Bâtiment et Travaux Publics), l’agroalimentaire et la logistique.

Sur le terrain, ces difficultés se traduisent par une multiplication des audiences dans les Tribunaux de Commerce, notamment pour traiter les défaillances d’entreprises en quête d’un plan de redressement ou d’une solution de liquidation. Pour beaucoup, l’augmentation du prix des matières premières et la chute de la demande pèsent lourdement sur la rentabilité.

Les redressements judiciaires (qui représentent 24 % de l’ensemble des procédures) progressent de plus de 35 % par rapport à l’année précédente, ce qui illustre une certaine volonté de préserver l’outil de production ou l’activité, plutôt que de liquider instantanément. Les mandataires et administrateurs judiciaires confirment que les chefs d’entreprise sont, dans ce contexte, plus enclins à demander l’ouverture d’un redressement judiciaire pour essayer de sauver leur structure.

Radiations : une tendance à la hausse sous différentes formes

Le phénomène des radiations d’entreprises constitue également un indicateur clé pour comprendre la santé d’un marché. Le Baromètre signale une augmentation globale de 7,9 % des radiations en 2024, avec une pointe en fin d’année. Cette dynamique reflète le fait que nombre d’entrepreneurs ne parviennent plus à maintenir leur activité dans un contexte économique défavorable.

On distingue plusieurs types de radiations :

  • Radiations volontaires : plus de la moitié des cas (53 %), souvent motivées par l’impossibilité de rentabiliser l’activité ou par un changement d’orientation professionnelle. Chez les entrepreneurs individuels, ce taux grimpe à près de 70 %.
  • Radiations d’office : en hausse significative (+26,3 %), décidées par les tribunaux lorsque les obligations légales ne sont plus remplies (absence de dépôt de comptes, locaux inexistants…).
  • Radiations consécutives à une procédure collective : en progression (+12,3 %), elles interviennent en bout de chaîne, lorsque la liquidation judiciaire ne laisse d’autre choix que la radiation.
Les différences entre « radiation » et « dissolution »

La dissolution désigne la décision de mettre fin à l’existence d’une société à l’initiative de ses associés ou actionnaires (et non d’un tribunal). Elle précède souvent la liquidation.

La radiation acte la disparition de la société au Registre du Commerce et des Sociétés (RCS). La radiation peut être volontaire, d’office ou faire suite à une procédure collective.

Les contrastes régionaux : toutes les zones sont touchées

Le ralentissement n’est pas cantonné à une zone géographique particulière. Les immatriculations progressent un peu partout, mais les difficultés entrepreneuriales se généralisent elles aussi.

Quelques points de vigilance émergent :

  • La Corse affiche une hausse notable des radiations (+85,8 %), suggérant un net repli de l’activité sur ce territoire.
  • Les DROM (Départements et Régions d’Outre-Mer) montrent des tendances mixtes : la Guadeloupe, la Martinique et Mayotte subissent un certain repli des immatriculations, alors que la Martinique, elle, connaît une baisse des difficultés d’entreprises.
  • Les régions du nord de la France (Hauts-de-France) ou de l’ouest (Pays de la Loire) enregistrent de fortes augmentations des inscriptions de privilèges du Trésor, ce qui témoigne parfois d’un durcissement des contrôles et d’un renforcement des procédures de recouvrement.

En définitive, aucune région n’est véritablement épargnée. Les différences s’expliquent par des spécificités sectorielles (industrielles ou touristiques par exemple), par la densité des structures existantes et par la politique de soutien ou d’accompagnement mise en place localement.

Le Baromètre montre ainsi que la fragilisation du tissu entrepreneurial est un phénomène national, bien qu’il puisse revêtir des nuances locales.

Bon à savoir

Les études régionales mettent parfois en avant des spécificités culturelles ou historiques : ainsi, dans certaines zones rurales, la dynamique entrepreneuriale repose encore fortement sur l’activité agricole ou artisanale. Les soutiens des collectivités, comme des dispositifs de péréquation, peuvent atténuer ou retarder l’impact des crises économiques.

Focus sectoriel : la construction et l’immobilier en première ligne

Deux secteurs se détachent particulièrement dans ce panorama :

  1. La construction, qui conjugue une baisse des immatriculations et une forte hausse des procédures collectives (+23,6 %). Les entreprises du BTP subissent de plein fouet les coûts des matières premières, la hausse du prix de l’énergie et le ralentissement des chantiers, en lien avec la réduction des investissements publics et privés.
  2. L’immobilier, où les défaillances s’envolent de +39,3 %. L’augmentation des taux d’intérêt et la frilosité des banques à octroyer des crédits fragilisent la création d’entreprises dans ce domaine. De même, la demande de biens immobiliers est ralentie par le contexte macroéconomique, ce qui pèse sur la rentabilité des agences et des promoteurs.

Dans d’autres secteurs, comme l’agriculture-sylviculture-pêche, la situation n’est guère plus florissante, puisque la hausse des coûts de production (semences, engrais, transport) se traduit par des marges réduites, alors même que la demande peine à suivre. Pour autant, certains domaines tirent mieux leur épingle du jeu : l’information-communication et les services aux entreprises continuent de voir leurs immatriculations progresser plus vite que leurs difficultés.

L’âge moyen des entreprises en difficulté : un indicateur à suivre

Le Baromètre souligne que l’âge moyen des entreprises qui entrent en procédure collective atteint 8,3 ans en 2024, en légère augmentation. Les SARL et entreprises individuelles ont tendance à être plus âgées à l’instant de leur défaillance que les SAS (Sociétés par Actions Simplifiées), majoritairement adoptées par les structures récentes.

Cette évolution montre que la vulnérabilité ne touche pas uniquement de jeunes pousses, parfois perçues comme moins solides : des entités plus établies subissent elles aussi les répercussions de l’environnement économique actuel. Dans le secteur de l’immobilier, l’âge moyen des entreprises en difficulté a reculé de 7 mois, suggérant que des structures plus jeunes se lancent sur un marché actuellement en crise et peinent à subsister.

Pourquoi l’âge moyen d’une entreprise importe-t-il ?

Un âge moyen élevé pour les entreprises en difficulté indique que des structures déjà bien implantées rencontrent des problèmes de trésorerie ou de positionnement commercial. À l’inverse, un âge moyen bas révèle que les jeunes sociétés ne parviennent pas à passer le cap critique des premières années, souvent déterminantes pour leur pérennité.

Les inscriptions de privilèges et les injonctions de payer : un climat de défiance ?

Parallèlement à la progression des créations et aux alertes sur les défaillances, le Baromètre met en évidence une augmentation notable des inscriptions de privilèges du Trésor (+6,6 %) et de la Sécurité Sociale (+5,0 %). Ces dispositifs permettent aux organismes publics d’assurer un certain rang de créancier en cas de procédures collectives. Leur hausse suggère à la fois un taux d’impayés croissants et un suivi plus étroit des autorités fiscales et sociales.

Dans les Hauts-de-France et les Pays de la Loire, cette progression est particulièrement marquée. Au niveau sectoriel, le commerce et la construction concentrent une part importante de ces privilèges, suivis par l’enseignement-santé-action sociale, qui enregistre une hausse de +40,3 % des inscriptions du Trésor. Cela démontre que même des secteurs réputés plus stables ne sont pas épargnés.

Les ordonnances portant injonction de payer, quant à elles, diminuent très légèrement (-0,7 %) en 2024. Les contrastes régionaux sont frappants, avec une chute notable en Occitanie (-22,6 %) et, au contraire, une envolée en Île-de-France (+15,1 %). La construction demeure en tête du nombre d’injonctions, malgré une baisse de -11,8 %. L’immobilier, encore lui, connaît en revanche la plus forte progression (+27,9 %).

Un recours accru aux mécanismes de prévention

Le Baromètre met aussi en lumière la place grandissante des démarches de prévention. Bien que le nombre de dossiers détectés soit en recul (-10,3 %), celui des dossiers de prévention étudiés connaît une augmentation de +12,5 %. Autrement dit, les alertes lancées, notamment par les commissaires aux comptes ou les créanciers, se concrétisent davantage par des solutions de sauvegarde ou des accords amiables.

Cette progression témoigne d’une volonté partagée d’éviter le pire scénario de la liquidation. Les entreprises, comprenant la gravité de leur situation, anticipent en faisant appel aux procedures de prévention prévues par le Code de commerce (conciliation, mandat ad hoc, etc.). Selon le Baromètre, près de 75 % de ces dossiers initiés découlent d’informations internes : soit le dirigeant lui-même, soit le service comptable, soit encore un associé ou un actionnaire qui constate des alertes financières.

Pour certains experts, cette tendance illustre un certain maturité grandissante du monde entrepreneurial français : plutôt que de laisser s’accumuler les dettes et de conduire l’entreprise à la faillite, les dirigeants optent pour un dialogue précoce avec leurs partenaires financiers et les tribunaux. L’idée est d’éviter qu’une simple difficulté temporaire se transforme en cessation de paiements avérée.

Retour sur la notion de résilience entrepreneuriale

Si l’on considère l’ensemble des facteurs exposés (immatriculations, procédures collectives, radiations, inscriptions de privilèges), le paysage entrepreneurial français en 2024 apparaît à la fois fragilisé et résilient. Fragilisé, car de nombreuses structures peinent à maintenir leur activité dans un contexte où la croissance stagne et les incertitudes politiques augmentent les coûts de l’énergie et des matières premières. Résilient, parce qu’un grand nombre d’entreprises individuelles se créent, et que la prévention des difficultés semble progresser.

Pour beaucoup de dirigeants, l’enjeu consiste à identifier les leviers de compétitivité qui permettront de traverser cette zone de turbulences : digitalisation, diversification, recherche de partenariats, montée en gamme… Dans l’ensemble, les experts s’accordent sur le fait que cette situation requiert une adaptation rapide aux nouvelles contraintes de marché et une gestion rigoureuse de la trésorerie.

Le Baromètre souligne également l’importance du rôle des greffiers des tribunaux de commerce et des juridictions spécialisées, qui constituent des sentinelles essentielles pour détecter et accompagner au plus tôt les entreprises en péril. Plus ces acteurs de la justice commerciale interviennent tôt, plus il est possible d’éviter la cessation de paiements.

L’importance des données Infogreffe et l’angle d’analyse Xerfi

Dans la conception de cette étude, deux partenaires majeurs jouent un rôle déterminant : Infogreffe et Xerfi Specific.

  • Infogreffe centralise l’ensemble des informations légales sur les sociétés françaises (statuts, comptes annuels, évènements au Registre du Commerce et des Sociétés). Ce portail donne accès à des millions de données, permettant un suivi précis des tendances de création, de radiation et de modification d’entreprises.
  • Xerfi Specific est un institut d’études économiques et sectorielles reconnu pour ses analyses prospectives. Sa collaboration avec le CNGTC apporte une dimension macroéconomique à l’étude, en insistant sur la corrélation entre les indicateurs d’activité et les mouvements conjoncturels (taux d’intérêt, climat des affaires, etc.).

En associant la rigueur statistique de ces bases de données et l’expertise analytique des économistes, le Baromètre des entreprises 2024 constitue un outil précieux pour anticiper les évolutions du marché et préparer des réponses adaptées, tant du côté des politiques publiques que des stratégies de dirigeants d’entreprise.

Qui se cache derrière ces chiffres ? L’histoire de nombreux entrepreneurs

Au-delà des pourcentages et des comparaisons d’une année sur l’autre, il est crucial de se rappeler que chaque procédure collective ou chaque radiation reflète la réalité d’une aventure entrepreneuriale. Derrière ces statistiques, il y a des femmes et des hommes qui ont investi du temps, de l’énergie et souvent des économies personnelles pour donner vie à un projet.

Les retours de terrain recueillis dans le cadre du Baromètre montrent que le ressenti des chefs d’entreprise oscille entre inquiétude et détermination. Certains évoquent un « effet de ciseaux », avec des charges qui augmentent plus vite que le chiffre d’affaires. D’autres pointent du doigt la difficulté de recruter des profils qualifiés, malgré un marché de l’emploi en tension. D’autres encore soulignent les atouts de l’entrepreneuriat digital, qui permet d’étendre rapidement sa clientèle, y compris à l’international.

L’un des objectifs de ce rapport est justement d’éclairer la diversité des situations afin que les pouvoirs publics, les organismes d’accompagnement et les acteurs économiques locaux puissent proposer des solutions ciblées. Qu’il s’agisse de simplifier l’accès au financement, de promouvoir la formation continue ou d’encourager l’innovation, de multiples pistes restent à explorer pour soutenir la pérennité des entreprises françaises.

Les clés de lecture pour 2025 : vigilance et adaptation

À en croire les estimations de Xerfi, la croissance économique de la France ne dépasserait pas les 0,7 % l’an prochain, prolongeant ainsi un cycle de molle expansion. Dans ce contexte, plusieurs éléments sont à surveiller de près :

  1. L’évolution de l’inflation : si la hausse des prix persiste, elle continuera de peser sur les marges des entreprises.
  2. Le marché du travail : une dégradation de l’emploi affaiblirait la consommation des ménages et le moral des entrepreneurs.
  3. Les politiques publiques : un cadre réglementaire incertain peut freiner l’investissement. Des changements fiscaux ou juridiques en cours de mandat politique peuvent déstabiliser les acteurs économiques.
  4. L’accès aux financements : dans un contexte de durcissement monétaire, le coût du crédit et la solvabilité des entreprises seront cruciaux.

D’un autre côté, la poursuite de la numérisation de l’économie, la transition écologique et la nécessité d’innover dans de nouveaux secteurs (IA, énergies renouvelables, etc.) peuvent constituer des opportunités. Les entreprises capables de s’adapter à ces nouveaux débouchés auront une longueur d’avance pour résister aux chocs économiques et se positionner sur des marchés porteurs.

L'alternative des solutions de financement participatif

Face à la hausse des taux d’intérêt, certaines entreprises se tournent davantage vers les solutions de financement participatif (crowdfunding), le leasing ou la location financière pour alléger leurs investissements et mieux répartir les coûts dans le temps.

Regard prospectif : un écosystème en quête de stabilité

Dans cette ambiance de croissance ralentie et de hausses marquées des défaillances, le Baromètre des entreprises 2024 dresse un portrait révélateur de la situation actuelle. Les entreprises, même si elles souffrent, font preuve d’une volonté de rebond, comme en témoignent les redressements judiciaires en hausse, signe que l’on cherche à sauver l’activité.

Il est indispensable de poursuivre le suivi statistique entamé par le CNGTC et ses partenaires, car celui-ci constitue un levier décisif d’alerte pour les pouvoirs publics. Les dispositifs de prévention ne fonctionnent efficacement que s’ils s’appuient sur des données fiables et accessibles. À ce titre, la coopération entre les greffes, Infogreffe et Xerfi Specific demeure stratégique pour aiguiller la politique économique et identifier les secteurs les plus vulnérables.

Le thème récurrent de l’incertitude réglementaire mérite également une attention particulière : la stabilité des normes (fiscales, sociales, environnementales) est un critère primordial pour que les entreprises puissent planifier sereinement leurs projets d’investissement. Dans une France souvent caractérisée par un empilement législatif, tout effort de simplification et de lisibilité légale est susceptible d’apporter une bouffée d’air à ceux qui entreprennent.

Enfin, les entreprises qui parviennent à se différencier et à innover sont généralement mieux armées face à des conjonctures difficiles. Qu’il s’agisse de trouver de nouveaux débouchés, de diversifier sa gamme de produits ou de mettre en place une politique de responsabilité sociale et environnementale (RSE), la capacité à se renouveler est un atout majeur pour traverser des périodes d’incertitude.

Un horizon à construire

Sur la base des constats du Baromètre, il apparaît que le tissu entrepreneurial français est à la croisée des chemins : fragilisé par une série de chocs (crises sanitaires, inflation, tensions géopolitiques), mais également poussé à se transformer pour saisir de nouvelles opportunités. L’année 2025 s’annonce ainsi décisive pour de nombreux secteurs, qui devront composer avec une croissance modérée, une veille réglementaire soutenue et une évolution rapide des préférences de consommation.

D’un côté, l’accroissement des procédures collectives et le niveau élevé des radiations dessinent une réalité préoccupante. De l’autre, l’augmentation des immatriculations, surtout portée par les entrepreneurs individuels, indique un dynamisme toujours présent pour créer de la valeur. Reste à savoir si la pression sur les coûts et l’incertitude politique n’entameront pas les velléités entrepreneuriales dans les mois à venir.

En somme, ce Baromètre des entreprises 2024 nous rappelle à la fois la fragilité et la vitalité du monde économique français. Les chiffres, qu’ils concernent l’immobilier ou la construction, pointent des failles structurelles, mais également une capacité d’adaptation qu’il convient de soutenir et d’accompagner. Les réflexions autour de la simplification du cadre juridique, de la relance de l’investissement ou encore de l’accès à la formation constituent autant de pistes d’action pour assurer la pérennité du tissu entrepreneurial.

Au final, c’est la capacité collective à anticiper, innover et collaborer qui déterminera la solidité de l’écosystème entrepreneurial français face aux multiples défis annoncés.

Vous pouvez consulter ici le baromètre national des entreprises de janvier à novembre 2024