Comment le Village by CA à Caen soutient les start-ups ?
Découvrez comment le Village by CA Normandie aide des start-ups à passer à l'échelle avec un accompagnement concret sur deux ans.

Au MoHo de Caen, un trio de jeunes pousses s’apprête à passer à l’échelle. Le Village by CA Normandie a retenu trois start-ups à l’issue d’un appel à candidatures lancé le 28 avril, avec un accompagnement sur deux ans. Agriculture robotisée, micro-algues et cosmétique au lin bio constituent un triptyque cohérent au service d’une compétitivité plus sobre et locale.
Sélection du village by ca normandie : trois paris industriels sur deux ans
Le Village by CA Normandie, installé au MoHo à Caen, mobilise son réseau d’entreprises, d’investisseurs et d’experts pour accélérer la croissance de trois lauréates. L’objectif est clair : structurer des modèles industriels robustes et décloisonner les secteurs agricoles, agroalimentaires et cosmétiques par des passerelles de compétences.
L’accompagnement, d’une durée de vingt-quatre mois, réunit mentorat, mise en relation qualifiée et accès aux financements. Ce dispositif soutient autant la consolidation des offres que l’exécution commerciale, avec une attention particulière portée aux enjeux de recrutement, d’industrialisation et de conformité réglementaire.
Les solutions retenues ciblent des irritants opérationnels identifiés sur le terrain : pénurie de main-d’œuvre dans la récolte, valorisation énergétique de flux sous-exploités et circuits d’approvisionnement traçables dans la cosmétique. Cette cohérence renforce l’intérêt de partenaires industriels qui cherchent des gains de productivité mesurables.
Le MoHo de Caen, point d’ancrage de l’innovation
Le MoHo est un campus d’innovation basé à Caen. Ses espaces et programmes favorisent les croisements entre start-ups, entreprises établies, institutions et recherche. C’est dans ce cadre que le Village by CA Normandie opère sa sélection et son accompagnement, facilitant l’accès au terrain, aux pilotes industriels et aux premiers contrats.
Sylektis : robotique de récolte et gains de productivité
Sylektis, fondée par Wilfried Garrigue et basée au Mans, développe un robot de récolte capable de traiter plusieurs cultures, en terre comme hors sol. Premier terrain d’application : un récolteur d’asperges blanches pensé pour réduire la pénibilité, lisser la qualité et limiter la dépendance à la main-d’œuvre saisonnière.
La promesse opérationnelle est double. D’une part, la mécanisation stabilise les rendements en corrigeant les aléas de disponibilité et de cadence humaine.
D’autre part, elle réduit le coût unitaire de la récolte au fur et à mesure que le taux d’utilisation de la machine augmente. Le passage à l’échelle suppose toutefois des preuves d’endurance en conditions réelles, un service après-vente structuré et des partenariats distributeurs dans les bassins maraîchers.
Green fusyon : micro-algues et biogaz, une boucle circulaire
Portée par Jacques De Montigny, étudiant à AgroParisTech, Green Fusyon conçoit une solution de production de chlorelle, micro-algue riche en protéines, oméga-3 et antioxydants. Sa singularité vient de l’usage de biogaz issu de méthaniseurs pour alimenter le process, inscrivant la production dans une logique circulaire et bas-carbone.
En mai 2024, la start-up a remporté le Next Startupper Challenge organisé à VivaTech, renforçant sa visibilité et sa crédibilité technologique (Les Echos, 2024). L’adossement à des sites de méthanisation existants sécurise l’approvisionnement énergétique et permet des économies d’échelle énergétiques, à condition de maîtriser la qualité sanitaire des souches et la stabilité des rendements.
Linae : cosmétique naturelle au lin bio, ancrage normand
Linae, lancée par Stéphanie Gastaldin et rejointe par Sandra Bekale, se positionne sur des soins naturels à base d’extraits de lin bio. Cette plante, emblématique de la Normandie, apporte viscosité, rétention d’eau et confort d’application, tout en valorisant une filière locale et traçable.
La différenciation attendue repose sur l’innocuité des formules, l’origine des ingrédients et la performance sensorielle. Pour accélérer, Linae devra sécuriser ses approvisionnements, fiabiliser l’industrialisation et étendre ses canaux de distribution vers des réseaux sélectifs et pharmaceutiques, sans céder sur les exigences de certification bio.
Un programme long autorise un calendrier réaliste de validation : prototypes de présérie, homologations, alimentation des carnets de commande et structuration d’un service client. Les indicateurs clés à suivre incluent le coût de revient industriel, la marge brute par ligne de produit, le taux de disponibilité machine, la durée moyenne d’installation chez le client et la rotation des stocks de pièces.
Investisseurs et capitaux patients : l’effet réseau sur l’agri-tech
L’industrialisation exige des capitaux patients et un accompagnement proche du terrain. En février 2024, Sylektis a bénéficié d’un co-investissement réunissant Agri Angels, Le Mans Sarthe Investissement et Ouest Angels.
Ce tour doit financer les premières séries, les services de déploiement et la documentation technique. L’enjeu n’est pas seulement de produire, mais d’organiser la capacité de déploiement chez l’exploitant agricole.
Agri angels : un réseau ciblé sur l’agri-agro
Lancé en janvier 2023 par France Angels, Agri Angels se concentre sur les innovations agri-agro. Le réseau a déjà soutenu deux start-ups, dont Sylektis, avec un objectif : accélérer les premières ventes et structurer des modèles répétables de commercialisation. La présence d’investisseurs sectoriels facilite l’accès à des sites pilotes et aux premiers retours utilisateurs, déterminants pour itérer le produit.
Pour les start-ups agricoles, l’apport de business angels spécialisés se lit aussi dans la qualité du carnet d’adresses : coopératives, concessionnaires, syndicats, acteurs de la transformation. C’est un levier tout aussi important que l’apport en capital, car il réduit le temps d’accès au marché et améliore l’ajustement produit-métier.
Agri Angels en bref
Réseau de business angels créé début 2023 et dédié à l’agri-agro. Il co-investit avec des fonds et clubs régionaux, soutenant des projets proches de la commercialisation ou en phase d’industrialisation. Les critères privilégiés : impact terrain avéré, réduction de la pénibilité, gains de qualité mesurables et potentiel d’export à moyen terme.
Sylektis : cap sur la fiabilité terrain
Le robot récolteur d’asperges blanches vise des opérations répétables et une meilleure prévisibilité des volumes. Les premières installations seront jugées sur la disponibilité machine, la cadence, la facilité de maintenance et le service client. Le co-investissement de février 2024 doit sécuriser ces dimensions critiques, en particulier la montée en capacité et l’organisation des interventions.
Au-delà du produit, la réussite dépend de la pédagogie commerciale : retour sur investissement chiffré, période d’essai encadrée, modalités de location-vente et garanties de performance. Un robot utile est un robot qui s’intègre aux pratiques existantes sans disrupter la logistique de l’exploitant.
La disponibilité de saisonniers varie selon les territoires et les périodes. La mécanisation n’élimine pas l’emploi agricole, elle le requalifie sur des tâches à plus forte valeur ajoutée : pilotage, maintenance, contrôle qualité. Les robots peuvent également étendre la fenêtre de récolte et limiter les pertes liées aux retards de cueillette.
Micro-algues et biogaz : une valorisation circulaire qui gagne en crédibilité
Green Fusyon associe production d’ingrédients et sobriété énergétique. En s’adossant à des unités de méthanisation, la start-up vise une stabilité des coûts d’énergie et un bilan carbone favorable. Le biogaz, issu de la fermentation de déchets organiques, replace l’ingrédient chlorelle dans une boucle locale : déchet agricole, énergie, production d’actif, nutrition.
Green fusyon : de vivatech au démonstrateur industriel
Le prix Next Startupper Challenge conquis en 2024 a apporté de la visibilité, mais la clé se joue désormais sur l’industrialisation et les débouchés. Marchés visés : compléments alimentaires, boissons fonctionnelles, et potentiellement cosmétique active. Des partenariats avec des acteurs de la nutrition et de la distribution spécialisées permettront de valider les volumes récurrents.
La standardisation des souches, la traçabilité et l’absence de contaminants sont des prérequis. Les protocoles de qualité doivent être documentés, audités et compatibles avec la réglementation en vigueur. La compétitivité viendra d’un prix cible par kilo d’actif soutenable, sous contrainte d’énergie et de purification.
Un méthaniseur transforme des intrants organiques en biogaz par digestion anaérobie. Ce biogaz alimente des procédés industriels voisins, ici la culture de micro-algues. Les avantages : réduction d’émissions, valorisation de déchets, ancrage territorial. Les limites : besoin d’accords d’approvisionnement, stabilité du pouvoir calorifique, intégration des normes de sécurité et de maintenance.
Financements biodiversité : une porte d’entrée dès 2025
L’Atlas de la biodiversité communale fait l’objet d’une campagne de financement ouverte en 2025, pilotée par l’Office français de la biodiversité. Des projets industriels qui contribuent à la connaissance et à la préservation des milieux peuvent être éligibles, notamment via des coopérations avec des collectivités et des associations (OFB, 2025).
Cosmétique au lin : de la parcelle au flacon, la valeur d’un sourcing normand
Le lin est un marqueur agricole de la Normandie, apprécié pour ses fibres mais aussi pour ses mucilages qui intéressent la cosmétique. En capitalisant sur cet actif local, Linae adresse la demande de formules naturelles et tracées, avec un discours de transparence sur l’origine des ingrédients et les procédés.
Linae : stratégie d’industrialisation et canaux de vente
Pour transformer l’essai, Linae devra calibrer sa production, sécuriser ses sous-traitants de conditionnement et aligner son plan de lancement avec les contraintes réglementaires de l’UE. La marque peut aussi profiter de relais régionaux pour diversifier ses réseaux de vente : pharmacies, enseignes bio, e-commerce sélectif et hôtellerie bien-être.
Les marges se jouent sur le mix produit, la politique d’échantillonnage et le coût d’acquisition client. Une stratégie d’animation en points de vente, combinée à des campagnes digitales ciblées, structurera la notoriété à coût maîtrisé, notamment si la marque capitalise sur le storytelling de la filière lin.
Au-delà du label, l’enjeu est la traçabilité : origine des cultures, modes d’extraction, solvants utilisés et résidus possibles. Les certificats d’analyse par lot, l’audit des sous-traitants et la stabilité des formulations sur la durée de vie du produit constituent le socle qualité d’une marque cosmétique engagée.
Aides publiques et leviers financiers : transformer l’amorçage en croissance
Les trois lauréates peuvent mobiliser des dispositifs publics pour consolider leurs plans d’investissement. ACRE, exonérations fiscales spécifiques, garanties et cofinancements s’articulent avec les apports d’investisseurs privés afin de limiter la dilution tout en accélérant les jalons industriels et commerciaux.
Le rôle des banques et de Bpifrance, via garanties ou prêts d’amorçage, complète le tableau. Les conventions avec des collectivités ou des syndicats professionnels permettent de tester en contexte réel des solutions comme le robot de récolte ou les installations de production de micro-algues, avec des retours d’expérience structurés.
Dispositifs mobilisables pour les jeunes entreprises
Plusieurs outils existent pour alléger les premiers pas d’une start-up en France :
- ACRE : allègement des cotisations sociales au démarrage, sous conditions d’éligibilité.
- Exonérations ou abattements fiscaux selon la localisation et l’activité, à vérifier avant l’implantation.
- Garanties publiques pour faciliter l’accès au crédit d’investissement et au crédit-bail.
- Subventions ou appels à projets thématiques sur la biodiversité, l’agriculture et l’économie circulaire.
La sélectivité des dossiers s’appuie sur des livrables concrets : preuve d’usage documentée chez un client, trajectoire claire de marge brute, gouvernance adaptée à la montée en cadence et plan de conformité. L’adossement à un accélérateur comme le Village by CA facilite l’orchestration de ces briques, avec un calendrier de jalons partagé entre les parties.
Qualité sanitaire et traçabilité : une alerte rappelle les exigences de l’agroalimentaire
La filière agroalimentaire évolue sous contrainte de qualité et de sécurité. En mai 2025, un rappel de produits a été décidé après détection de salmonelle dans des fleischschnacka vendus en magasins U en Alsace, soulignant la vigilance nécessaire tout au long de la chaîne de valeur. Les innovations qui améliorent la traçabilité et réduisent les risques opérationnels gagnent en intérêt.
Pour Sylektis, cela valide la nécessité de process standardisés et documentés lors de la récolte, limitant les erreurs et les contaminations croisées. Pour Green Fusyon, cela renforce l’importance des protocoles qualité sur les cultures de micro-algues. Pour Linae, la traçabilité des matières premières et des sites de fabrication devient un argument commercial et un prérequis réglementaire.
Sécurité produit : conséquences économiques d’un rappel
Un rappel entraîne des coûts directs et indirects : destruction de lots, logistique de retour, communication, impact sur la confiance et renégociation avec la distribution. Les start-ups gagnent à investir tôt dans la qualité documentaire et les systèmes de traçabilité, car le coût de non-qualité croît exponentiellement avec la taille des volumes.
Dans ce contexte, l’appui d’un accélérateur régional fournit un avantage : accès aux retours d’expérience d’industriels et de distributeurs, mise aux normes en amont, et accompagnement dans les dossiers de financement dédiés à l’amélioration de la qualité. Les partenaires bancaires et assureurs, sensibles au risque opérationnel, valorisent ces garanties dans leurs décisions d’octroi.
Normandie, laboratoire de transitions productives
Le trio Sylektis, Green Fusyon et Linae illustre des transitions complémentaires : robotisation raisonnée, valorisation du biogaz, ancrage d’actifs naturels. Ce sont des solutions d’usage qui s’alignent sur la réalité des exploitants, des ateliers et des circuits de distribution. La sélection du Village by CA Normandie agit comme un catalyseur de preuves terrain et d’accès au marché.
Au-delà de la région, ces approches peuvent inspirer des coopérations interterritoriales et sectorielles, notamment en agriculture, nutrition et cosmétique naturelle. L’articulation entre capitaux privés spécialisés, dispositifs publics d’amorçage et réseaux d’accélération donne à ces start-ups une chance crédible de transformer l’essai à l’échelle industrielle.
En combinant accompagnement de proximité, financements ciblés et exigences de qualité, la promotion du Village by CA Normandie convertit des innovations concrètes en leviers de compétitivité pour l’agri-agro et la cosmétique, avec une empreinte locale assumée et une ambition nationale.