L’aérien en Bretagne cherche à redécoller

Depuis la pandémie de Covid-19, le secteur aérien en Bretagne tente de retrouver son élan. Les aéroports de Rennes et de Brest, en particulier, visent à capitaliser sur la reprise du trafic international. Cependant, les petites plateformes doivent naviguer entre les défis économiques et les attentes croissantes des voyageurs. Ce contexte soulève des questions sur l'avenir de l'aviation commerciale dans la région.

 

Les enjeux de la connectivité aérienne

La connectivité aérienne est cruciale pour le développement économique des régions. En Bretagne, les aéroports jouent un rôle essentiel pour attirer des investisseurs et favoriser le tourisme. La saturation de Nantes Atlantique pousse les acteurs locaux à envisager des solutions alternatives pour soutenir la croissance du trafic.

Une dynamique de reprise post-Covid

La fréquentation des aéroports bretons est en pleine reprise. En 2023, l’aéroport de Nantes Atlantique a accueilli 6,5 millions de passagers, représentant 52 % des Bretons utilisant cet aéroport. Cependant, la saturation imminente de Nantes Atlantique et le retard dans son réaménagement poussent les acteurs économiques à se mobiliser. L’association Des Ailes pour l’Ouest, forte de 500 membres, appelle à une réflexion sur l’avenir de l’aviation commerciale dans le Grand Ouest.

Guillaume Dalmard, président de l’association, souligne l’importance d’un réseau aérien efficace pour le développement économique. Il rappelle que la décroissance du transport aérien, parfois évoquée, serait une erreur. Les niveaux de fréquentation actuels sont les plus élevés depuis des années, et l’aviation reste un vecteur essentiel de connectivité.

« L’aviation ne peut pas être dissociée du développement économique de nos régions. La connectivité aérienne reste essentielle pour l’attractivité de nos territoires. »

Guillaume Dalmard, Président de Des Ailes pour l’Ouest

L’échec du projet Notre-Dame-des-Landes

Le projet d'aéroport à Notre-Dame-des-Landes, abandonné en 2018, reste un sujet sensible. Malgré un référendum local favorable, l'État a décidé de ne pas poursuivre le projet. Guillaume Dalmard évoque cet échec comme un revers majeur pour la région, où les enjeux d’accessibilité et de compétitivité demeurent cruciaux.

Les chefs d’entreprise bretons, désireux de voyager rapidement, se heurtent à des infrastructures qui ne répondent pas toujours à leurs besoins. Les liens avec les anciens soutiens du projet NDDL, tels que les groupes Beaumanoir et Samsic, sont réactivés. Une assemblée générale de Des Ailes pour l’Ouest est prévue pour discuter des futures stratégies aéroportuaires.

Les conséquences de l’abandon de Notre-Dame-des-Landes

Les conséquences de cet abandon sont multiples : développement entravé des infrastructures aéroportuaires, saturation des aéroports existants et perte d’opportunités économiques pour la région. Le Grand Ouest se retrouve confronté à un défi majeur pour maintenir sa compétitivité.

Les aéroports bretons : un maillage à optimiser

La Bretagne compte cinq aéroports commerciaux : Rennes, Brest, Dinard, Quimper et Lorient. Cependant, la majorité du trafic est concentrée sur deux plateformes : Brest et Rennes, qui représentent 98 % des passagers. En 2023, l’aéroport de Brest a enregistré 810 000 passagers, tandis que Rennes a atteint environ 600 000 voyageurs.

  • Brest : 810 000 passagers en 2023, avec une prévision de 950 000 pour 2024.
  • Rennes : 600 000 passagers en 2023, en baisse par rapport à 2022.

Claude Ravalec, président de la CCI Finistère, souligne l'importance de la compagnie Volotea, qui a récemment ouvert une base à Brest, augmentant ainsi l’offre de destinations. Cette dynamique est essentielle pour le développement économique de la région.

Les défis de la ligne Brest-Orly

La relance de la ligne Brest-Orly est un enjeu majeur pour les entreprises locales. Bien que la fréquentation des TGV en Bretagne ait augmenté de 40 % en 2023, la reprise d’une liaison aérienne s’annonce complexe. Le projet de la compagnie régionale Céleste, qui visait à relancer cette ligne, a échoué et a été liquidé en juin 2023 avant même son premier vol.

Claude Ravalec attribue cet échec à un manque de capitaux extérieurs et à l'absence d'un modèle économique viable. Malgré le soutien des collectivités locales et des entreprises, la compagnie n’a pas réussi à obtenir sa licence d’exploitation. Les liaisons vers Paris-Charles de Gaulle, opérées par Air France, semblent suffire à répondre à la demande actuelle.

Rennes : un aéroport en quête de renouveau

L’aéroport de Rennes, géré par la Seard, peine à retrouver son niveau d’avant-Covid. En 2019, il avait frôlé le million de passagers, mais en 2023, il n’a pas dépassé les 600 000. La CCI Ille-et-Vilaine mise sur le soutien des entreprises pour relancer l’activité. Laurent Giboire, président du conseil stratégique de la Seard, met en avant les atouts de l’aéroport, notamment ses liaisons vers des hubs internationaux.

  • Hubs desservis : Paris-Charles de Gaulle, Amsterdam, Francfort.
  • Trafic international : 200 000 passagers en 2023, représentant un tiers du trafic total.

Malgré ces chiffres encourageants, l’aéroport souffre d’une offre limitée, avec seulement 11 liaisons directes, contre 32 pour Brest. Les ajustements fréquents des compagnies low-cost, comme Easyjet, compliquent la situation. Des liaisons vers des destinations prisées, comme Porto et Lisbonne, ont été suspendues, ce qui pousse les voyageurs à se tourner vers Nantes.

Les petites plateformes face à l’incertitude

La stratégie aéroportuaire de la Région Bretagne, élaborée à l’automne 2023, vise à soutenir les aéroports de second rang. La Région a prévu d’investir 420 millions d’euros dans les infrastructures aéroportuaires d’ici 2040. Michaël Quernez, vice-président de la Région, souligne l'importance de développer les aéroports moins fréquentés, comme Quimper et Dinard.

Quimper, récemment passé sous la gestion de la Sealaq, bénéficie d’un investissement de 1,6 million d’euros sur trois ans. La Région souhaite valoriser le foncier pour attirer des entreprises et créer des revenus. Dinard, quant à lui, a trouvé un équilibre grâce à un partenariat avec Sabena Technics, qui emploie plus de 500 personnes sur le site.

L’aéroport de Lorient : un avenir incertain

À Lorient, la situation est plus délicate. En 2023, seulement 6 377 passagers ont utilisé l’aéroport, qui peine à retrouver son activité d’avant-Covid. Le projet ambitieux de faire de Lorient la porte d’entrée de la Bretagne Sud n’a pas abouti. Actuellement, un seul vol quotidien vers Toulouse est proposé, ce qui ne suffit pas à relancer le trafic.

La proximité de Lorient avec Nantes et Rennes, bien desservies par le train, complique la situation. Claude Ravalec souligne que le temps de trajet en train est un facteur déterminant pour les voyageurs. De plus, la tendance vers des modes de transport plus durables, comme le train, met encore plus de pression sur l’aéroport de Lorient.

Vers une aviation décarbonée

Les préoccupations environnementales influencent également le secteur aérien. Selon la SNCF, voyager en train réduit les émissions de CO2 de 90 % par rapport à un vol. Cette réalité pousse les entreprises à adopter des stratégies de responsabilité sociétale des entreprises (RSE) plus strictes. Claude Ravalec indique que l’aviation de demain devra être plus verte, avec des avions électriques pour les courtes distances et des avions à hydrogène pour les trajets moyens.

La CCI Bretagne, dans sa contribution à la stratégie aéroportuaire, rappelle que l'aviation reste un atout pour le transport de passagers sur de longues distances. Elle souligne également que l'empreinte foncière de l'aviation est inférieure à celle des transports ferroviaires et routiers.

Guillaume Dalmard, président de Des Ailes pour l’Ouest, partage cette vision. Il évoque une aviation vertueuse, avec des innovations technologiques à venir. La société brestoise Green Aerolease, fondée en 2021, illustre cette tendance en développant une flotte d’avions électriques, avec des modèles plus grands prévus d’ici 2026.

Le secteur aérien en Bretagne est à un tournant. Les aéroports de Rennes et de Brest cherchent à capitaliser sur la reprise du trafic, tandis que les petites plateformes explorent des modèles économiques viables. La dynamique de développement doit s’accompagner d’une réflexion sur l’impact environnemental et l’avenir de l’aviation commerciale dans la région.