Allibert cesse ses activités : Aurlane achète la marque
La liquidation d'Allibert à Grenoble entraîne une reprise par Aurlane. Découvrez les conséquences et ce que cela signifie pour le marché.

À Grenoble, la liquidation d’Allibert le 4 juillet 2025 a précipité la vente de ses actifs et l’arrêt de sa production. Quelques jours plus tard, Aurlane confirme avoir repris la marque, avec l’ambition de la repositionner en haut de gamme et de s’appuyer sur sa notoriété, notamment en Belgique. Un pari mesuré sur un actif immatériel puissant, mais sans reprise d’outil industriel ni de personnel.
Liquidation d’Allibert confirmée à Grenoble : chronologie et portée
Le tribunal de commerce de Grenoble a acté la liquidation judiciaire d’Allibert le 4 juillet 2025, clôturant une période de redressement ouverte en janvier 2025. Cette décision a entraîné l’arrêt des opérations de l’entreprise et la mise en vente des actifs de la société, parmi lesquels sa marque éponyme, réputée dans l’univers de la salle de bains.
Jusqu’au dernier virage procédural, un scénario de reprise partielle a semblé possible. Aurlane, conjointement avec Decotec, avait déposé une offre couvrant notamment les sites de Voiron et de la région de Troyes. Les deux candidats se sont toutefois retirés avant l’audience, jugeant la reprise trop risquée au regard du périmètre envisagé.
Grenoble : décision judiciaire et conséquences
Le jugement a scellé la fin de l’activité productive d’Allibert. Les contrats de travail ont été rompus dans le cadre de la procédure et l’ensemble des actifs a été mis à l’encan.
Aucun salarié n’a été repris par Aurlane au moment de l’acquisition de la marque. Les trois sites concernés par les activités françaises d’Allibert sont situés à Voiron en Isère, Châtellerault dans la Vienne et près de Troyes dans l’Aube.
Retrait de l’offre conjointe avec Decotec
Sébastien Doumenc, fondateur et PDG d’Aurlane, a expliqué le retrait de la première offre par les pertes de la filiale belge d’Allibert, non concernée par un dépôt de bilan mais qui devait être reprise intégralement. Cette entité, composée de 39 salariés, introduisait un risque financier jugé trop élevé à ce stade. Selon le dirigeant, « Il aurait été possible de restructurer les activités françaises, mais l’ajout de la branche belge rendait l’opération trop hasardeuse ».
Le redressement judiciaire vise à permettre la poursuite de l’activité, la sauvegarde de l’emploi et l’apurement du passif. La liquidation judiciaire intervient lorsque le redressement est manifestement impossible. Elle entraîne l’arrêt de l’activité, la rupture des contrats de travail et la cession des actifs, matériels comme immatériels, selon l’ordre des créanciers.
Repères clés sur l’affaire Allibert
Les points saillants à retenir :
- Liquidation judiciaire prononcée par le tribunal de commerce de Grenoble le 4 juillet 2025 (Zepros).
- Rachat de la marque Allibert par Aurlane après la liquidation, sans reprise d’effectifs ni de sites (Batiactu, Sdbpro).
- 171 salariés en France avant liquidation, répartis sur trois sites.
- Filiale belge de 39 salariés, hors procédure mais jugée trop risquée à reprendre.
Marque Allibert dans le giron d’Aurlane : périmètre réel de l’opération
Aurlane a acquis l’actif immatériel majeur d’Allibert : sa marque. Cette transaction ne comprend ni usines ni salariés. Elle dote néanmoins Aurlane d’un capital de notoriété conséquent, particulièrement utile pour accélérer les ventes auprès des distributeurs et installateurs historiques du réseau Allibert, en France comme en Belgique.
La société parisienne annonce un objectif clair : relancer les modèles phares de la marque tout en opérant une montée en gamme, afin de positionner Allibert au-dessus de l’offre actuelle d’Aurlane. Plusieurs nouveautés sont envisagées, avec un contraste assumé entre l’ADN accessible d’Aurlane et l’ambition plus premium d’Allibert.
Périmètre de l’actif repris
L’opération porte sur la propriété intellectuelle, la marque et les droits qui y sont attachés. Le montant de la transaction n’a pas été divulgué. Les actifs industriels, les stocks et les contrats de travail d’Allibert n’entrent pas dans le périmètre de reprise. Aurlane construira donc la relance via ses circuits existants et ses partenaires industriels, sans reprise d’outil de production.
Conséquences contractuelles pour clients et fournisseurs
Les relations commerciales antérieures d’Allibert ne sont pas automatiquement transférées. Les distributeurs et les enseignes de bricolage ou de second œuvre intéressés par l’offre relancée devront conclure de nouveaux accords avec Aurlane. De son côté, le repreneur pourra prioriser les références à fort volume et forte marge, en sélectionnant ses partenaires logistiques et industriels.
Le rachat d’un actif immatériel ne transfère ni les dettes ni les obligations sociales de la société liquidée. Le repreneur hérite d’un fonds de commerce symbolique, d’une identité et de la possibilité de capitaliser sur un portefeuille de produits historiques, mais doit reconstruire les flux d’approvisionnement, la qualité perçue et la distribution. C’est un redémarrage commercial plus qu’une continuité d’exploitation.
Emplois et sites industriels : impacts chiffrés en 2025
Avant sa liquidation, Allibert employait 171 salariés en France, répartis entre Voiron, Châtellerault et la région de Troyes. La décision judiciaire a provoqué la rupture des contrats de travail. Aucun poste n’a été directement transféré chez Aurlane avec l’acquisition de la marque.
A moyen terme, Aurlane évoque une dizaine de créations de postes pour soutenir la relance commerciale et marketing de la marque, en particulier sur la logistique, le trade marketing et le service client. Ce volume reste sans commune mesure avec les suppressions de postes consécutives à la liquidation d’Allibert. Le contraste souligne le caractère asymétrique des reprises centrées sur les actifs immatériels.
Allibert : sites concernés et effectifs
Le triptyque Voiron, Châtellerault, Troyes a structuré l’activité française. L’arrêt des opérations a mis fin à l’activité productive de ces sites. La filiale belge, forte de 39 salariés, n’a pas fait l’objet d’une procédure locale mais a été identifiée comme un foyer de pertes, ce qui a pesé dans le retrait de l’offre initiale d’Aurlane et de Decotec.
Aurlane : créations de postes visées
L’entreprise compte aujourd’hui environ 100 salariés et réalise un chiffre d’affaires d’environ 42 millions d’euros. Les recrutements envisagés sont ciblés, avec une priorité à la mise en marché de la gamme Allibert, l’animation du réseau de distribution et l’alignement qualité-service promis par un repositionnement premium.
Distributeurs et installateurs : points de vigilance immédiats
Ce que les clients professionnels doivent vérifier pour sécuriser leurs flux :
- Garanties produits : elles ne survivent pas automatiquement à la liquidation. Les nouvelles conditions Aurlane font foi.
- Références relancées : les modèles emblématiques peuvent réapparaître, mais avec des fiches techniques mises à jour.
- Délais et SAV : les circuits logistiques changent. Anticiper l’ajustement des délais de livraison et les modalités de SAV.
- Nouveaux contrats : formaliser les conditions commerciales avec Aurlane, y compris les politiques de retours et d’avoirs.
L’histoire d’Allibert : de Grenoble à une notoriété belgo-française
Fondée en 1930 à Grenoble, Allibert est passée des semelles de chaussures aux accessoires de salle de bains, avant de s’imposer dans l’ameublement de la pièce d’eau. Son essor remonte aux Trente Glorieuses, avec l’armoire de toilette à trois portes miroirs lancée en 1958, devenue un produit iconique dans de nombreux foyers. Longtemps attendue pour son rapport qualité-prix, la marque a gardé une forte affinité auprès du public français et belge.
Rachetée en 2019 par un fonds israélo-néerlandais, l’entreprise n’a pas trouvé le relais d’innovation suffisant pour contrer la concurrence asiatique sur l’entrée et le milieu de gamme. L’érosion de sa rentabilité a fini par fragiliser la structure, sur fond d’importations low-cost et de pression accrue des enseignes nationales.
Produits iconiques et implantation belge
Allibert a développé un portefeuille reconnu de meubles et d’accessoires de salle de bains. La Belgique est restée un bastion commercial, où la marque a capitalisé sur un réseau historique de revendeurs. Des analyses sectorielles relayées par la presse spécialisée estiment que la marque a conservé une part significative dans les meubles de salle de bains en Belgique, évaluée entre 8 et 10 % sur la période récente.
Le marché belge de la salle de bains se caractérise par un maillage serré de revendeurs spécialisés, une sensibilité forte au design et aux produits durables, et une part élevée de la rénovation résidentielle. Dans ce contexte, une marque au capital de confiance installé comme Allibert bénéficie d’un effet réseau immédiat : notoriété de long terme, bouche-à-oreille professionnel, catalogue facilement identifié par la distribution.
Stratégie Aurlane : montée en gamme et cap belge
Aurlane annonce un plan de relance qui dissocie clairement les positionnements : Allibert en premium et Aurlane sur l’offre cœur de marché. L’objectif est double : revaloriser la marge par produit et capter les clients orphelins d’Allibert à la suite de l’arrêt des livraisons.
Le développement en Belgique figure au premier rang des priorités, la marque y disposant d’un capital d’image supérieur. Aurlane souhaite y accélérer ses ventes en s’appuyant sur l’historique de la marque et un discours produit renouvelé, intégrant durabilité des matériaux et design.
Positionnement premium et feuille de route produits
La relance ciblera en priorité les modèles emblématiques d’Allibert, revisités pour coller aux standards actuels de fonctionnalité, d’esthétique et de durabilité. Aurlane compte articuler l’offre autour de gammes à valeur ajoutée, avec un soin particulier porté à la qualité perçue, aux finitions et aux services associés. La promesse est claire : faire d’Allibert une alternative premium, distincte du cœur de gamme Aurlane.
Belgique : go-to-market et transferts de notoriété
En Belgique, la stratégie commerciale s’appuiera sur les enseignes de bricolage et les réseaux spécialisés, où Allibert bénéficie d’une forte reconnaissance. L’enjeu sera de réactiver les linéaires et la communication point de vente, en capitalisant sur la mémoire de la marque et sur des innovations ciblées. Le but est de convertir, rapidement, la notoriété existante en volume de ventes additionnel.
R&D et fiscalité : leviers activables
Pour soutenir la montée en gamme, Aurlane pourra mobiliser des dispositifs fiscaux dédiés à l’innovation, dont les crédits d’impôt R&D prévus par la loi de finances 2025. L’entreprise mentionne un objectif de croissance de 10 à 15 % dès 2026, porté par la reprise des clients d’Allibert et le lancement de nouvelles gammes.
Indicateurs marché et cadre légal : ce que cela change pour les entreprises
Le marché français de la salle de bains est évalué à environ 5 milliards d’euros annuels. En 2024, il a progressé de près de 3 %, malgré la pression sur les coûts. Pour 2025, une croissance comprise entre 4 % et 6 % est anticipée, stimulée par les rénovations énergétiques et l’amélioration de l’habitat. Ces dynamiques soutiennent le pari d’une relance ciblée sur des gammes à meilleure marge.
En Belgique, les études sectorielles évoquent une croissance d’environ 5 % en 2024 pour la salle de bains, portée par l’entretien du parc résidentiel et des exigences environnementales plus strictes sur les matériaux. Aurlane indique vouloir adapter l’offre Allibert à ces standards, avec une intégration renforcée de matériaux recyclés et un discours éco-conçu sur la durée de vie des meubles.
France : taille du marché et tendances 2024-2025
Les distributeurs français recherchent des gammes stables, facilement approvisionnables et différenciantes dans un univers concurrentiel où les importations à bas coûts ont intensifié la pression sur les prix. Une marque patrimoniale repositionnée en premium peut répondre à cette attente, à condition d’aligner qualité produit, visibilité et service après-vente.
Belgique : dynamique 2024 et attentes 2025
Le segment belge des meubles de salle de bains valorise la durabilité et le design. La notoriété historique d’Allibert y représente un accélérateur de visibilité et de conversion. Aurlane mise sur cet atout pour signer rapidement des référencements et consolider une base de chiffre d’affaires récurrent sur le Benelux.
Repères chiffrés 2024-2026 pour situer l’opération
Données utiles pour la lecture économique de la relance :
- 42 M€ de chiffre d’affaires environ pour Aurlane, effectif d’environ 100 salariés.
- 171 salariés chez Allibert en France avant liquidation.
- Marché français de la salle de bains : ≈ 5 Md€.
- Belgique : croissance sectorielle ≈ 5 % en 2024, notoriété Allibert estimée entre 8 % et 10 % sur les meubles.
- Objectif Aurlane post-acquisition : +10 à +15 % de croissance en 2026.
Le repositionnement premium impose de tenir un triptyque serré : 1) un signal-prix cohérent avec la promesse de qualité, 2) un sourcing industrialisé qui sécurise les délais et la constance des finitions, 3) une marge rénovée permettant d’investir en marketing et en SAV. Tout écart entre ces trois piliers pénalise l’effet de marque.
Cap 2026 : relance sous contrôle de coûts
Aurlane mise sur un actif rare, la marque Allibert, pour accélérer en France et surtout en Belgique. La réussite passera par la rigueur du repositionnement, la fiabilité de l’industrialisation et la reconquête méthodique des réseaux. Aucune donnée financière sur le prix d’acquisition n’a été communiquée, mais l’opération s’apparente à un pari à coût maîtrisé pour un potentiel de marge revalorisée.
Les prochains mois diront si l’équation tient ses promesses : gamme premium crédible, distribution réactivée, et trajectoire de croissance annoncée à deux chiffres. L’enjeu consiste à transformer un capital de notoriété en revenu récurrent, sans dérive des coûts ni dilution de l’identité produit.
Relancer une marque patrimoniale est un art d’équilibre entre mémoire, innovation et discipline opérationnelle.