À Bordeaux, Tekever et Avantix ont officialisé un rapprochement technologique autour des capteurs de ROEM et de la guerre électronique. Ce MoU consolide une chaîne de valeur européenne des drones, avec une translation concrète vers l’industrialisation en France portée par des implantations à Toulouse et Cahors, et une expertise ROEM concentrée à Aix-en-Provence. Les usages visés couvrent ISR, sécurité intérieure et supériorité informationnelle.

Protocole Tekever-Avantix : un socle commun pour les capteurs ROEM embarqués

Tekever, acteur portugais des systèmes autonomes fondé en 2001 et employant environ 1 000 collaborateurs, a signé avec Avantix, activité spécialisée d’Eviden au sein du groupe Atos, un mémorandum d’entente pour intégrer des technologies de guerre électronique et de renseignement d’origine électromagnétique sur ses drones. L’accord vise des charges utiles compactes de ROEM et la mise au point de solutions ISR modulaires et robustes, destinées aux besoins militaires et à la sécurité intérieure.

Le protocole prévoit une coopération technique à long terme, avec des évaluations d’interopérabilité et des démonstrations visant à valider l’intégration sur les plateformes de Tekever. L’ambition opérationnelle est claire : fournir une architecture ouverte permettant l’emport de capteurs, le traitement bord et la diffusion de renseignement en temps quasi réel, dans des environnements électromagnétiques complexes.

UAV Show à Bordeaux : signature du MoU

La formalisation est intervenue à l’UAV Show 2025 à Bordeaux, rendez-vous de référence du drone en Europe. Ce cadre confère une visibilité industrielle et institutionnelle à l’accord, en cohérence avec les annonces françaises sur la montée en puissance des usages drones, de la surveillance à l’appui des opérations, avec une place croissante accordée à l’IA.

Ce que couvre l’accord technique Tekever-Avantix

L’accord cible des résultats concrets d’intégration ROEM sur drones Tekever :

  • Interopérabilité entre plateformes Tekever et charges utiles Avantix, avec essais et démonstrations.
  • Capteurs ROEM compacts pour missions tactiques de renseignement électromagnétique.
  • Solutions ISR modulaires orientées opérations, résilience et temps quasi réel.
  • Double spectre d’usages : armées et sécurité intérieure.

Trois faisceaux de compatibilité sont généralement visés :

  • Mécanique et énergétique : enveloppe masse, vibrations, consommation, gestion thermique.
  • Numérique et liaisons : bus de données, synchronisation, latences, sécurité des communications.
  • Logiciel et mission : API, formats d’événements, intégration dans la chaîne de traitement ISR.

Le MoU ouvre la voie à ces vérifications, condition sine qua non avant des campagnes de démonstrations puis d’industrialisation.

Architecture ISR modulaire : gains opérationnels et résilience

Au cœur du partenariat, l’intégration de capteurs ROEM tactiques compacts permet de détecter, localiser et analyser des émissions radio. Couplée à des algorithmes embarqués, cette instrumentation vise à réduire le temps de recueil et d’exploitation du renseignement sur zone, avec un partage aux centres de commandement et vers d’autres effecteurs. Pour l’opérateur, l’intérêt réside dans la flexibilité du kit capteurs et l’adaptabilité aux profils de mission.

La résilience se joue à deux niveaux. D’abord, la capacité à opérer dans des environnements brouillés, saturés ou contestés. Ensuite, la modularité qui autorise l’évolution incrémentale du drone par ajout ou remplacement de charges utiles, sans requalification lourde de la plateforme. Tekever et Avantix misent sur une intégration non intrusive, évitant d’handicaper l’endurance ou les performances de vol.

Usage défense et sécurité intérieure : applications ciblées

  • Militaire : amélioration du renseignement électromagnétique, mise au jour de réseaux adverses, appui à la planification et à la protection des forces.
  • Intérieur : surveillance de frontières, observation de zones sensibles, contribution à la gestion de crise et au maintien de l’ordre technologique.

La valeur économique tient à la réduction des cycles de développement, à la mutualisation des briques capteurs et traitements, et à la perspective de contrats pluriannuels, notamment au sein de forces européennes qui exigent des capacités évolutives et interopérables.

Un capteur ROEM compact typique inclut :

  • Antennes et front-end RF pour capter des bandes de fréquences ciblées.
  • Numérisation et filtrage pour isoler et qualifier les signaux d’intérêt.
  • Algorithmes d’analyse pour classifier, géolocaliser et hiérarchiser des émetteurs.

Le défi embarqué consiste à optimiser masse, consommation et dissipation thermique, tout en garantissant la précision et la robustesse des mesures.

Tekever en France : Toulouse et Cahors comme tremplin industriel

Tekever a posé ses jalons en France avec une filiale à Toulouse, au cœur de l’écosystème aéronautique. En 2025, la société a annoncé une implantation à Cahors dans le Lot, sur le site de l’ancien parc des expositions, afin d’étoffer ses capacités de production et d’intégration. Cette dynamique renforce l’ancrage local et crée des synergies avec des partenaires technologiques français.

Tekever à Cahors : implantation industrielle et emplois

Rapportée récemment par Aerobuzz, l’ouverture d’une unité à Cahors matérialise l’ambition de proximité industrielle avec les clients et les partenaires. Si le volume d’emplois n’est pas détaillé, l’annonce positionne la ville comme un point d’appui pour l’assemblage, l’intégration et les essais. En complément de Toulouse, le site du Lot soutiendra l’industrialisation de charges utiles et leur qualification sur les plateformes de la marque.

MERIO à Cahors : synergies capteurs et systèmes

Tekever s’est allié à MERIO, spécialiste français de caméras et capteurs haute précision basé à Cahors. L’objectif est d’accélérer l’innovation en systèmes autonomes et de renforcer le tissu industriel local. L’accord avec MERIO complète le MoU avec Avantix : l’un apporte le savoir-faire optique et capteurs, l’autre la compétence ROEM et guerre électronique, dessinant un portefeuille de charges utiles à large spectre.

Le passage du prototype à la série exige :

  • Maîtrise des exigences aéronautiques sur la plateforme hôte et la charge utile.
  • Qualification environnementale et essais en conditions représentatives.
  • Processus qualité et documentation de la configuration pour assurer la traçabilité.

Les intégrations modulaires réduisent les cycles, sous réserve d’une architecture ouverte et documentée.

Avantix et Eviden : profondeur technologique, adossée au groupe Atos

Avantix, basé à Aix-en-Provence, se spécialise dans les systèmes de guerre électronique et de ROEM pour la défense et la sécurité. L’entité bénéficie de l’appui d’Eviden, branche d’Atos dédiée aux technologies avancées comme la cybersécurité, le big data et l’IA. L’écosystème offre des compétences d’intégration système, d’ingénierie logicielle et de sécurisation des chaînes de données critiques.

Le groupe Atos, coté sur Euronext Paris, a publié un chiffre d’affaires de 10,7 milliards d’euros en 2023 (Rapport annuel Atos 2023). Malgré des phases de restructuration, les activités liées à la défense et aux technologies critiques demeurent un pilier, offrant à Avantix une assise pour adresser des programmes à forte complexité d’intégration.

Avantix à Aix-en-Provence : expertise ROEM

Le cœur de métier d’Avantix tourne autour de la capture, de l’analyse et de la valorisation de signaux électromagnétiques pour produire un renseignement exploitable. L’intégration sur drones Tekever ouvre un champ de déploiement complémentaire aux plateformes terrestres et navales, avec la possibilité de démultiplier la couverture et d’accélérer la boucle renseignement-effet.

Atos et Eviden : ancrage cybersécurité et IA

La combinaison cybersécurité, exploitants de données massives et IA est critique pour sécuriser la chaîne ISR, de la collecte à la diffusion. L’appui d’Eviden permet d’envisager des architectures où la résilience cyber et le traitement intelligent des signaux renforcent la valeur des capteurs. Pour les acheteurs publics, cette continuité technique et la capacité à mener des intégrations complexes sont des facteurs de réduction de risque.

  • Détection d’émissions adverses pour cartographier des réseaux et prioriser des zones d’intérêt.
  • Appui à la protection des forces via l’alerte précoce et la surveillance de spectres sensibles.
  • Complémentarité capteurs avec l’optronique et le radar, pour une image multi-int captable par un même vecteur.

La qualité d’exploitation repose sur la fusion de données et des boucles de décision courtes.

Marché, politiques publiques et export : un alignement d’intérêts

Au-delà du MoU, le duo Tekever-Avantix s’inscrit dans une dynamique européenne où le drone devient un vecteur de choix pour le renseignement. En France, la Loi de programmation militaire 2024-2030 entérine des investissements de plusieurs milliards d’euros pour moderniser les capacités, avec un accent mis sur l’automatisation et l’IA. Les communications institutionnelles rappellent l’emploi opérationnel des drones, y compris des vecteurs armés, et l’intérêt d’une filière souveraine de capteurs.

Au plan européen, le marché des drones est attendu en croissance soutenue avec une trajectoire vers 15 milliards d’euros d’ici 2030 (Commission européenne). Cette expansion soutient des stratégies de partenariats transfrontaliers, l’industrialisation de charges utiles standardisables et la consolidation d’écosystèmes régionaux, à l’image de l’Occitanie et de la Provence.

UAV et sécurité intérieure : cas d’usage en France

Les technologies ISR et ROEM embarquées trouvent des débouchés en sécurité intérieure pour la surveillance de zones sensibles ou le renforcement de la connaissance de situation. L’articulation entre opérateurs civils habilités et forces de sécurité exige des solutions certifiables, interopérables et cyber-sécurisées, avec une gouvernance stricte de la donnée. La modularité promise par le partenariat pèse dans l’équation économique, car elle abaisse les coûts de cycle de vie par réutilisation.

Partenariat avec Apex à Taïwan : lecture industrielle

Sur la scène internationale, des informations récentes indiquent que Tekever a conclu un partenariat avec Apex Aviation pour fournir des drones ISR avancés à Taïwan. Cette séquence illustre l’aptitude de Tekever à transposer ses technologies vers des marchés sensibles et à s’appuyer sur des alliances locales. Pour les acheteurs européens, c’est un signal sur la maturité export et la capacité d’adaptation de l’offre.

Les charges utiles ROEM et GE sont soumises à des régimes de contrôle des exportations. Les industriels doivent :

  • Vérifier la classification des composants et logiciels concernés.
  • Assurer une traçabilité stricte des chaînes d’approvisionnement.
  • Intégrer des mécanismes de gouvernance pour les données sensibles générées en opération.

Ces contraintes influencent la conception dès l’amont et conditionnent les calendriers de déploiement à l’export.

Repères financiers et industriels

Trois informations clés pour situer l’accord dans son écosystème :

  1. Atos a réalisé 10,7 milliards d’euros de chiffre d’affaires en 2023, donnant de l’assise à l’activité défense d’Eviden.
  2. Tekever emploie environ 1 000 personnes et renforce son implantation française avec un site à Cahors.
  3. Le marché européen des drones vise 15 milliards d’euros d’ici 2030, soutenant les stratégies de partenariats technologiques.

Cadence industrielle et achats publics : les étapes post-MoU

Un MoU est une intention structurée qui précède les jalons engageants. Les étapes probables se déroulent en séquence : intégration de la charge utile sur un drone de série, campagnes de tests au sol et en vol, évaluation des performances et de la robustesse, ajustements d’architecture, puis démonstrations auprès des donneurs d’ordre. Le tout s’enchaîne avec la qualification produit et les procédures d’acquisition.

Sur le plan économique, la réussite dépendra de la réplicabilité des architectures sur plusieurs plateformes Tekever, du coût total de possession optimisé par la modularité, et de la capacité à sécuriser une base fournisseurs européenne pour réduire les risques de dépendances critiques. Le signal envoyé au marché est que les briques ROEM d’Avantix peuvent être intégrées sans compromettre endurance, charge utile principale et disponibilité.

Boucle ISR, du capteur à la décision : métriques de succès

  • Latence capteur-centre et robustesse des liaisons de données.
  • Précision de géolocalisation des émetteurs et taux de détection.
  • Résilience face au brouillage et dégradations spectrales.
  • Maintenance et évolutivité des charges utiles embarquées.

Ces métriques seront déterminantes pour décrocher des contrats en Europe, où l’interopérabilité et l’évolutivité sont désormais des critères de base dans les cahiers des charges.

Éclairage opérationnel français : innovation et usage des drones

Les communications officielles mettent en avant le rôle des drones dans les missions de surveillance, de renseignement et d’appui, avec un recours à l’IA pour améliorer l’efficacité des capteurs. Des publications du Ministère des Armées rappellent le déploiement opérationnel de drones comme le Reaper pour des frappes ciblées au Sahel, soulignant la montée en puissance de l’écosystème drones et l’importance de filières technologiques européennes.

Pour les industriels français, l’attelage capteurs ROEM plus plateformes ISR offre un levier d’autonomie stratégique, tant pour les forces armées que pour la sécurité intérieure. Les efforts de Tekever à Cahors et les capacités d’Avantix à Aix-en-Provence s’inscrivent dans cette trajectoire, avec un bénéfice collatéral pour l’emploi qualifié et la souveraineté technologique.

Sécurité des données et gouvernance : un critère d’achat décisif

La sensibilité des données ROEM impose un traitement sécurisé end-to-end. La combinaison de compétences d’Eviden en cybersécurité et d’intégration système est un argument de réassurance, alors que les acheteurs publics exigent auditabilité, cloisonnement des flux et résilience face aux cybermenaces. Le partenariat devra démontrer cette maturité lors des prochaines démonstrations.

Cap stratégique pour l’écosystème défense français

En formalisant un MoU à Bordeaux, Tekever et Avantix ajoutent une pièce au puzzle d’une filière européenne des drones plus intégrée, avec une empreinte industrielle renforcée en France. Les promesses du duo ROEM plus ISR devront maintenant se traduire en réussites de terrain, avec des démonstrations convaincantes, une interopérabilité prouvée et une trajectoire industrielle maîtrisée.

Au-delà de l’accord, c’est la convergence entre innovation capteurs, intégration système et industrialisation locale qui se joue. Si elle se confirme, elle pourra irriguer d’autres plateformes, d’autres marchés européens et des contrats export, consolidant un avantage compétitif pour les acteurs impliqués.

Prochaine étape attendue : transformer la compatibilité annoncée en performances mesurées, puis en commandes fermes.