À Boves, Tiamat et Mecaware passent à l’acte avec NaCre, un partenariat industriel pensé pour ancrer en France une filière sodium-ion intégrée. En jeu : concevoir, produire et recycler sur un même axe territorial des batteries sans lithium ni métaux rares, avec un procédé bas carbone adapté dès l’origine aux chimies de Tiamat. Les jalons calendaires et budgétaires sont posés, l’ambition est clairement industrielle.

NaCre : une filière sodium-ion intégrée de la production au recyclage

Le projet NaCre réunit Tiamat, fabricant amiénois de batteries sodium-ion, et Mecaware, société lyonnaise spécialiste du recyclage. L’acronyme condense l’ambition : Na pour sodium, C pour circularité, Re pour ressources. L’objectif opérationnel est d’installer une boucle complète de revalorisation des matériaux depuis les rebuts de production jusqu’aux futures fins de vie de cellules.

Tiamat, 29 salariés, travaille des chimies sodium-ion sans lithium ni métaux rares. Mecaware, plus de 60 salariés, déploie une technologie d’extraction de métaux stratégiques sans acide ni sulfate. La brique NaCre s’emboîte directement dans la stratégie produit de Tiamat, avec une adaptation du procédé au design des cathodes au vanadium et une intégration visée in situ dans les futures unités industrielles.

Qui est Tiamat : ancrage amiénois et choix technologique

Établie en Picardie, Tiamat développe des batteries sodium-ion conçues pour la charge et décharge ultra-rapides, sans recours au lithium et en limitant la dépendance aux métaux rares. Les usages ciblés vont des outillages manuels aux data centers alimentant des applications d’IA. L’entreprise prépare une montée en échelle industrielle en Somme, avec une brique de recyclage intégrée dès la conception de l’écosystème.

Mecaware : technologie et montée en puissance

Fondée en 2020, Mecaware a développé un procédé d’extraction sélective de métaux stratégiques sans acide ni sulfate, validé sur des chimies NMC et désormais étendu au vanadium présent dans les cathodes sodium-ion de Tiamat. Selon des déclarations officielles, la technologie vise une récupération supérieure à 95 % des métaux critiques. NaCre sert de cadre commun pour adapter ces briques aux caractéristiques des cellules de Tiamat et à une implantation au plus près des lignes.

NaCre en 6 repères opérationnels

Les marqueurs clés du projet annoncés par les partenaires :

  • Filière dédiée aux batteries sodium-ion, du rebut de production au recyclage.
  • Procédé sans acide ni sulfate pour extraire les métaux stratégiques.
  • Extension au vanadium des cathodes Na-ion de Tiamat.
  • Intégration in situ du recyclage dans les unités industrielles.
  • Lancement officiel du projet en septembre 2025 et démonstrateur en septembre 2026.
  • Cible 2030 en phase pilote : 17 tonnes de métaux valorisés.

Technologie de recyclage : validation NMC et extension au vanadium

Mecaware a structuré sa R&D autour d’un procédé propre destiné aux chimies de batteries. Validé sur des compositions NMC courantes, il est étendu aux cathodes au vanadium travaillées par Tiamat.

La particularité tient à l’absence d’acide et de sulfate, tout en visant une extraction fine des métaux stratégiques. Avec NaCre, la technologie se décline pour le sodium-ion et s’ajuste aux flux réels d’un site de production.

Cette approche permet de réemployer les matériaux extraits dans des boucles industrielles courtes, afin de réduire les achats de matières vierges et de limiter l’exposition aux volatilités de prix. En positionnant la brique de recyclage dans l’usine, NaCre vise une logistique optimisée et des pertes minimisées, ce qui pèse sur le coût total de possession des cellules.

Procédé sans acide ni sulfate : implications industrielles

Écarter les acides et sulfates amène des bénéfices industriels concrets : simplification des habilitations chimiques, réduction des risques opérationnels, limitation d’une partie des coûts de conformité, et meilleure compatibilité avec une implantation au cœur d’un site de production. L’extension au vanadium est stratégique pour Tiamat, car elle conditionne l’aptitude à boucler la matière avec ses propres chimies.

Intégration in situ dans les unités Tiamat

La promesse opérationnelle de NaCre est celle d’une ligne de recyclage bord-à-bord avec la ligne de production. Le recyclage des rebuts de production, puis, à terme, des cellules en fin de vie, alimente un réservoir de matériaux directement réinjectés dans la fabrication de cathodes et de cellules sodium-ion. Cette intégration verticale doit, à maturité, rendre l’outil industriel plus résilient et compétitif.

1) Composition : le sodium-ion évite le lithium et cible l’absence de métaux rares, ce qui réduit la dépendance à certaines chaînes d’approvisionnement. 2) Coût potentiel : l’usage de matières plus accessibles peut stabiliser les coûts. 3) Usage : la charge et décharge rapides conviennent à des applications de puissance, par exemple l’outillage ou le soutien des data centers.

Le vanadium participe à la performance électrochimique de certaines cathodes sodium-ion. Son extraction sélective permet de boucler la matière, de limiter les achats externes et de maintenir la stabilité des formulations au fil des générations de produits. NaCre vise un procédé calibré pour ces besoins spécifiques.

Boves, Somme : gigafactory et retombées économiques

Tiamat prépare une gigafactory à Boves, aux portes d’Amiens. Ce site industriel a fait l’objet d’une concertation publique de deux mois, accompagnée par la Commission nationale du Débat public. Les informations partagées lors de ces échanges font état d’un potentiel de jusqu’à 2 000 emplois à terme, signe d’un ancrage territorial fort pour la filière sodium-ion locale.

Dès 2027, l’usine vise jusqu’à 1 million de batteries par an. À terme, la capacité doit atteindre 5 GWh par an, soit environ 30 fois la production initiale.

Les cellules ciblent des usages de puissance comme l’outillage ou le soutien énergétique des data centers dédiés à l’IA. L’intégration sur site du recyclage Mecaware doit réduire les flux sortants de déchets et consolider la maîtrise matière.

Capacité et calendrier industriel

Le schéma annoncé articule un démarrage à 1 million de batteries par an en 2027, pour monter à 5 GWh par an au régime cible. Cette trajectoire s’accompagne d’investissements dans les équipements de production et dans la brique de recyclage in situ pour traiter les rebuts et sécuriser les approvisionnements internes en matériaux recyclés.

Emplois et concertation publique

La concertation CNDP ouverte récemment a posé les bases d’un dialogue sur l’empreinte environnementale, les retombées économiques et les enjeux sociaux d’un tel site industriel. Le chiffre de jusqu’à 2 000 emplois illustre le potentiel d’attractivité pour les Hauts-de-France, notamment en compétences industrielles, maintenance, qualité et logistique.

Concertation à Boves : points clés suivis par le territoire

Les sujets discutés lors de la concertation ont porté sur :

  • Environnement : gestion des flux matière, maîtrise des risques, traitement et valorisation des déchets.
  • Économie : créations d’emplois, structuration de la sous-traitance locale, formation.
  • Social : intégration dans le tissu local, mobilité et aménagements, information des riverains.

Financement européen et trajectoire du projet NaCre

NaCre a été sélectionné dans un appel à projets financé par le FEDER Hauts-de-France. Le budget global annoncé dépasse 2,3 millions d’euros et couvre les développements jusqu’à la validation en démonstrateur.

Le lancement officiel est attendu en septembre 2025, avec un démonstrateur opérationnel dès septembre 2026. Des études technico-économiques prolongeront l’effort jusqu’en août 2027.

À l’horizon 2030, la phase pilote vise le recyclage de 17 tonnes de métaux issus des déchets de batteries de Tiamat. Ce jalon, modeste à l’échelle du marché, est structurant pour éprouver les rendements matière, consolider la traçabilité et calibrer les coûts de production sur une technologie qui priorise l’absence de lithium et de métaux rares.

FEDER Hauts-de-France : périmètre et budget

Le recours au FEDER sert à financer l’industrialisation d’une filière de recyclage propre, alignée avec la logique d’économie circulaire et la relocalisation d’étapes clés en France. L’appui européen renforce la soutenabilité financière des premières étapes, traditionnellement intensives en CAPEX et en R&D process.

Étapes 2025-2027 et cible 2030

Le phasage associe un lancement en septembre 2025, un démonstrateur en septembre 2026 et une consolidation techno-économique jusqu’en août 2027. La cible 2030 de 17 tonnes de métaux recyclés doit fournir un socle de données à l’échelle pilote pour guider les arbitrages de montée en puissance industrielle.

Un démonstrateur produit des séries limitées sur un outil proche de l’industriel. Il permet de valider les rendements, de stabiliser les paramètres qualité, de tester les boucles de recyclage en conditions réelles et d’affiner les coûts unitaires avant d’engager des capacités plus lourdes.

Alliances capitalistiques et débouchés marchés

Au-delà du procédé, la consolidation d’un écosystème sodium-ion passe par des alliances industrielles et financières. En janvier 2024, Stellantis, Arkema et MBDA sont entrés au capital de Tiamat, illustrant l’intérêt croissant pour des alternatives au lithium, plus durables et moins dépendantes de ressources critiques (BFMTV). Ces acteurs apportent des expertises complémentaires : mobilité électrique, matériaux et aéronautique.

En juin 2025, Tiamat a signé un partenariat stratégique et financier avec Endeavour, constructeur américain de data centers, afin d’aligner la montée en puissance de la production avec les besoins en stockage d’énergie pour l’IA (Le Journal des Entreprises). Ce rapprochement inclut des engagements techniques et financiers et constitue un débouché structurant pour les batteries Na-ion dans un secteur en expansion.

Stellantis, Arkema et MBDA : entrée au capital et effet structurant

Pour Tiamat, l’entrée de Stellantis, Arkema et MBDA valide le positionnement technologique et renforce la base industrielle. L’apport d’un constructeur automobile permet d’adresser des besoins de puissance et de recharge rapide; un chimiste des matériaux apporte son expertise en formulations et compatibilités; un industriel aéronautique contribue à l’exigence qualité et aux standards de fiabilité.

Endeavour : stockage pour l’IA et trajectoire commerciale

Le partenariat avec Endeavour ouvre des débouchés dans des architectures de data centers où la réactivité et la résilience énergétique sont critiques. Les batteries sodium-ion de Tiamat, caractérisées par leur puissance et leur vitesse de charge, y trouvent un terrain d’application naturel, en particulier pour l’IA.

Applications cibles des batteries Na-ion Tiamat

Segments mis en avant par Tiamat pour ses cellules sodium-ion :

  • Outillage manuel : profils d’usage intensifs, cycles rapides, besoin de disponibilité immédiate.
  • Data centers : fonctions de backup, lissage de pics, soutien à l’IA nécessitant des environnements stabilisés.
  • Équipements de puissance : lorsque stockage et restitution rapides priment sur l’autonomie longue.

Lecture économique et industrielle : où se loge l’avantage compétitif

NaCre fait le pari d’un avantage coût-performance issu de l’assemblage de trois leviers : i) cellules sodium-ion conçues pour la puissance, ii) procédé de recyclage internalisé, iii) intégration territoriale limitant flux et pertes. Sur un marché exposé aux cycles matière, une maîtrise en amont et une réintégration matière permettent d’amortir les chocs d’approvisionnement et d’optimiser les capex d’extension.

La feuille de route vise l’équilibre industriel plutôt que la volumétrie immédiate. Les jalons 2025-2027 cadrent la montée en maturité technologique; la cible 2030 fournit une échelle pilote pour stabiliser la courbe d’expérience. Le couplage avec des débouchés clairs comme les data centers et l’outillage accroît la lisibilité marchés, condition essentielle pour sécuriser des financements et des contrats d’approvisionnement.

En rapprochant la brique de recyclage des lignes, l’industriel réduit les coûts logistiques, limite les délais entre rebut et revalorisation, améliore la récupération matière et renforce la traçabilité. À terme, cela pèse sur le coût unitaire et la qualité, avec des bénéfices qui s’amplifient lorsque les volumes de production croissent.

Calendrier NaCre à retenir

Les étapes annoncées par les partenaires pour structurer la montée en puissance :

  1. Septembre 2025 : lancement officiel du projet NaCre.
  2. Septembre 2026 : démonstrateur opérationnel.
  3. Août 2027 : fin des études technico-économiques.
  4. 2030 : phase pilote visant 17 tonnes de métaux recyclés.

Gouvernance industrielle et cadre d’exécution

Le partenariat est porté au plus haut niveau opérationnel, avec une déclaration d’intention claire d’Arnaud Villers d’Arbouet, président de Mecaware, qui positionne NaCre sur des objectifs de souveraineté, de résilience et de compétitivité. Le cœur du dispositif tient à la valorisation des rebuts et des déchets futurs des batteries Na-ion, afin de réinjecter des matériaux dans la production de nouvelles cellules.

Cette gouvernance centrée sur la circularité correspond aux attentes des marchés français et européens : réduction de l’empreinte des chaînes d’approvisionnement, traçabilité des flux, diminution des risques industriels et environnementaux, et construction d’une base manufacturière localisée.

Tiamat : gigafactory et intégration process

La gigafactory en projet à Boves structure la partie amont de la filière. L’intégration sur site du recyclage permet d’aligner la production, la qualité et la maintenance des caractéristiques matériaux sur la durée. L’échelle visée par Tiamat, de la série 2027 jusqu’aux 5 GWh par an, fixe les besoins en matière secondaire et pilote la capacité nominale des procédés de recyclage associés.

Mecaware : industrialisation du procédé

Pour Mecaware, NaCre est un levier d’industrialisation ciblé. La validation NMC confère une base technique, l’extension au vanadium fait le lien avec les chimiques Na-ion de Tiamat. Le passage au démonstrateur, puis la phase pilote à l’horizon 2030, constituent des jalons indispensables pour asseoir les rendements, qualifier la qualité matière récupérée et optimiser les coûts d’exploitation.

Emplois et ancrage local en Somme

Ce que le projet laisse entrevoir pour le territoire :

  • Jusqu’à 2 000 emplois à terme liés à la gigafactory de Boves.
  • Compétences mobilisées : production, maintenance, contrôle qualité, logistique, sécurité.
  • Effet filière : sous-traitance industrielle, services techniques, formation.

Cap industrialo-circulaire confirmé, à suivre d’ici 2027

NaCre articule une stratégie simple et exigeante : une technologie sodium-ion spécialisée, un procédé de recyclage calibré pour ses matériaux, et une intégration industrielle au cœur d’un site qui vise 5 GWh par an. Les étapes 2025-2027, soutenues par le FEDER Hauts-de-France, concentrent la preuve techno-économique. La cible de 17 tonnes recyclées en 2030 servira de mètre étalon pour la prochaine montée en puissance.

Reste à convertir ce cadre en avantages compétitifs durables : coûts maîtrisés, sécurisation matière et déploiements commerciaux sur des segments précis. Avec des alliances capitalistiques activées et un débouché data centers engagé, Tiamat et Mecaware posent des jalons concrets pour une filière sodium-ion française adossée à l’économie circulaire.

La démonstration, désormais, se fera sur ligne.