Quelles perspectives pour Manitou après un semestre difficile ?
Découvrez l'analyse des performances de Manitou au S1 2025, incluant résultats financiers et perspectives de marché.

Le spécialiste français de la manutention Manitou traverse un premier semestre 2025 plus heurté, tout en conservant des marges de manœuvre opérationnelles. Le groupe, solide industriellement, affiche un recul d’activité à court terme mais préserve des leviers concrets grâce à un carnet nourri, une base clients diversifiée et des innovations produits à forte valeur.
Chiffres clés du premier semestre et lecture économique
Au 30 juin 2025, Manitou a réalisé un chiffre d’affaires de 1,2 milliard d’euros, en baisse de 9 % par rapport au premier semestre 2024. Ce reflux intervient après une année 2024 particulièrement dynamique, alimentée par des livraisons soutenues et des délais résorbés. La contraction s’explique d’abord par le retournement des commandes des loueurs d’équipements, acteurs au cœur des cycles du BTP et de l’industrie.
Le résultat net s’est replié de 60 % sur la période, sous l’effet conjugué d’un mix produit moins favorable, d’une pression sur les volumes et d’une normalisation progressive des conditions d’achats. Cette contre-performance, relevée dans la presse régionale, a déçu par rapport aux anticipations initiales (Ouest-France, fin juillet 2025).
En dépit de ce recul, plusieurs signaux de stabilisation émergent. Les prises de commandes repartent à la hausse, le carnet de commandes couvre environ six mois d’activité et la direction vise un atterrissage 2025 proche du niveau de 2024, avec une marge opérationnelle autour de 5,5 %. La trajectoire dépendra toutefois du rythme de transformation du carnet en chiffre d’affaires et de la tenue des marchés finaux.
Ce cadre financier appelle une lecture pragmatique. La baisse de chiffre d’affaires tient davantage à une inflexion conjoncturelle qu’à un problème structurel de demande adressable. La sensibilité au cycle des loueurs amplifie le repli, mais le remplissage du carnet signale que les besoins d’équipements restent présents, en particulier dans les solutions de levage adaptées aux chantiers et aux sites industriels.
Trois clés de lecture pour évaluer le semestre
1. Un effet de base défavorable par rapport à un premier semestre 2024 très fort. 2. La normalisation des commandes des loueurs de matériels, qui impacte les volumes à court terme. 3. Un carnet qui soutient la visibilité opérationnelle et sécurise une partie de l’activité du second semestre.
Commandes et carnet: dynamique contrastée mais porteuse
Malgré l’atonie de la demande de certains clients historiques, les prises de commandes de Manitou ont progressé au premier semestre 2025. Le groupe affiche un carnet équivalent à environ six mois d’activité, un niveau qui contribue à lisser le profil de production sur le reste de l’année. Les publications semestrielles du 30 juillet 2025 indiquent aussi des gains de parts de marché, soutenus par la profondeur de gamme et des équipements calibrés pour l’industrie comme pour l’agriculture.
Cette dynamique tient à une stratégie d’offre cohérente sur les différentes familles de produits: chariots télescopiques, nacelles élévatrices, matériels de manutention. Le panorama sectoriel de 2025 reste exigeant, mais la montée en puissance d’options électriques et d’outils de sécurité embarqués accroît la pertinence de la gamme auprès des donneurs d’ordre soucieux de performance et de conformité aux normes environnementales.
La robustesse du carnet fournit une base de planification. Elle ne prémunit pas totalement contre des aléas d’exécution: disponibilité de composants sensibles, arbitrages logistiques des clients, ou encore adaptations de plan de charge sur les sites de production. Néanmoins, l’épaisseur du pipeline commercial réduit la volatilité trimestrielle et permet d’absorber plus aisément un choc de demande ponctuel.
Un carnet couvrant six mois signifie que, à cadence de production constante, l’entreprise dispose d’ordres fermes suffisants pour remplir la charge des ateliers sur un semestre. Pour un fabricant d’équipements, cette visibilité permet: 1. d’optimiser l’ordonnancement industriel, 2.
de sécuriser les approvisionnements critiques, 3. de négocier au mieux les plans de transport, 4. de déployer la main-d’œuvre sur des horizons prévisibles. Limite majeure: la capacité des clients à maintenir leurs calendriers de réception.
Autre élément notable: l’orientation positive des commandes est jugée supérieure aux attentes de début d’année, y compris selon les documents financiers accessibles via l’AMF. Pour un industriel exposé aux cycles, ce signal pèse davantage que la photographie à mi-année. La question devient la suivante: à quel rythme ce pipeline se convertira-t-il en chiffre d’affaires, dans un contexte macroéconomique qui se détend progressivement sur le front de l’inflation et des taux d’intérêt en Europe.
Indicateurs à surveiller au second semestre
- Taux de conversion du carnet: part des commandes livrées et facturées dans les délais.
- Mix produit: proportion de matériels à forte marge versus entrées de gamme.
- Capex des clients finaux: décisions d’investissement des grands donneurs d’ordre, notamment dans le BTP et l’agro-industrie.
- Évolution des coûts d’achats: composants électroniques, aciers, hydraulique.
Droits de douane américains: exposition et plans de contingence
Les annonces récentes sur de nouveaux droits de douane américains introduisent une source d’incertitude supplémentaire pour les exportateurs français d’équipements de manutention. Les documents de questions-réponses de l’administration douanière française publiés début juillet 2025 décrivent le périmètre des marchandises potentiellement visées, avec des impacts variables selon les codes tarifaires, l’origine préférentielle et les schémas logistiques.
Pour Manitou, l’enjeu est double: préserver la compétitivité prix sur le marché américain et limiter les décalages de livraison susceptibles d’affecter la reconnaissance du chiffre d’affaires. Les équipes dirigées par Michel Denis reconnaissent ce risque: les nouvelles taxes peuvent entraîner des modifications de marché difficiles à anticiper. La communication financière semestrielle confirme que le groupe garde un œil attentif sur ces paramètres, tout en poursuivant sa stratégie commerciale.
Le ministère de l’Économie a diffusé début août 2025 un point d’information détaillé à destination des entreprises. Les conseils publiés portent sur la vérification de l’origine des produits, le calibrage des déclarations et l’usage d’outils dédiés au suivi des formalités. Pour les industriels, l’enjeu consiste à disposer d’une cartographie précise des codes SH utilisés, à sécuriser l’origine des composants et à anticiper d’éventuelles réorganisations de chaîne logistique.
- Optimisation douanière: revue des classifications tarifaires et de l’origine préférentielle, recours aux décisions contraignantes d’information tarifaire pour sécuriser les codes SH.
- Ajustements commerciaux: clauses de révision tarifaire dans les contrats export, repositionnement des gammes, offres alternatives selon la fiscalité à l’import.
- Ingénierie industrielle: scénarios de configuration produit ou d’assemblage final en local si juridiquement et économiquement pertinents.
Check-list douanière pour les industriels de la manutention
- Valider les codes SH des machines et sous-ensembles sensibles.
- Documenter l’origine des composants pour sécuriser l’origine préférentielle de l’équipement.
- Analyser l’incoterm contractuel et sa répartition des risques douaniers.
- Évaluer l’impact sur les marges et la politique commerciale par marché.
- Mettre à jour les systèmes de déclaration et les masters data douane.
Le risque tarifaire ne remet pas en cause l’orientation stratégique du groupe mais peut peser sur la visibilité commerciale aux États-Unis, marché significatif pour le secteur des matériels d’accès et de levage. L’effet final dépendra de trois variables: ampleur effective des droits, élasticité de la demande américaine et capacité à répercuter partiellement les surcoûts.
Structure sectorielle et rôle des loueurs: comprendre le cycle
Le ralentissement chez les loueurs explique une large partie de l’ajustement 2025. Dans l’écosystème des matériels de construction et de manutention, les groupes de location jouent un rôle d’amortisseur mais aussi d’amplificateur. Ils achètent massivement en phase ascendante, puis ralentissent brutalement leurs commandes lorsque les taux d’utilisation fléchissent ou que les conditions financières se tendent.
Pour un fabricant comme Manitou, cette cyclicité induit un effet amplifié sur les volumes à court terme. Un même niveau d’activité des chantiers peut se traduire différemment selon le taux d’équipement des loueurs, leur politique de rotation de flotte et l’accès au financement. En 2025, la combinaison d’une normalisation post-pic et d’un attentisme d’investissement a pesé sur la demande en Europe et en Amérique du Nord.
En parallèle, le segment agricole et l’industrie hors BTP ont joué un rôle d’appui, même si la dégradation générale des climats d’affaires a freiné certains projets de renouvellement. Le message à retenir: l’exposition à des marchés finaux diversifiés atténue le choc, sans l’effacer totalement.
Les loueurs ajustent leurs plans d’achats en fonction de trois paramètres clés: 1. taux d’utilisation de la flotte, 2. conditions de financement et valeur résiduelle attendue, 3. perspectives de prix de location. En phase de ralentissement, la décision type consiste à prolonger la durée d’usage de la flotte et à différer les renouvellements. Cet arbitrage pèse mécaniquement sur les volumes des fabricants à court terme.
Loueurs européens: cycle et arbitrages
Dans le contexte 2025, les loueurs européens ont renforcé leurs critères d’achat: retour sur capital strict, priorité aux équipements polyvalents et à forte liquidité de revente, accent sur les technologies facilitant la maintenance prédictive. Cette discipline renforce la demande vers des matériels robustes et standardisés, au détriment de références plus spécifiques lorsque la visibilité baisse. Pour un industriel, cela implique de calibrer finement les mix de production, avec une flexibilité d’assemblage accrue.
La conséquence pour Manitou est claire: un alignement renforcé du plan de charge sur les références cœur de gamme et les plateformes modulaires. Cette approche permet de maintenir un niveau de service satisfaisant, tout en conservant des options d’ajustement rapide si la demande se réaccélère au second semestre.
Capacité d’innovation et empreinte industrielle de manitou
Manitou demeure un acteur de référence sur son segment, coté à Paris sous le code EPA:MTU. Le groupe met en avant des solutions électriques et des innovations destinées à réduire le coût total de possession pour ses clients. Les priorités technologiques incluent la sécurité, l’ergonomie et l’efficacité énergétique, avec une montée en gamme progressive des composants et des systèmes d’assistance.
Sur le terrain industriel, la standardisation des plateformes et la maîtrise de la chaîne d’approvisionnement restent des leviers critiques. L’efficience des sites et la sécurisation des fournisseurs clés conditionnent la tenue des délais et la compétitivité prix. Cette discipline opérationnelle est d’autant plus cruciale quand l’environnement économique se complexifie et que les arbitrages douaniers s’intensifient.
Manitou : stratégie et résultats
La stratégie présentée à mi-année mise sur la stabilisation du chiffre d’affaires 2025 au niveau de 2024, soit autour de 2,7 milliards d’euros, et sur un résultat opérationnel proche de 5,5 %. Dans la communication officielle, Michel Denis se montre confiant: l’entreprise estime pouvoir compenser l’atonie du premier semestre grâce à la bonne tenue du carnet et à l’effort commercial sur les marchés porteurs (Manitou Group, 30 juillet 2025).
Ce cadre suppose une conversion efficace des commandes, une stabilisation des coûts d’achats et l’absence d’accident de marché aux États-Unis. Il incite également à prioriser les offres générant un meilleur mix de marge, en s’appuyant sur des configurations d’équipements adaptées aux profils de demande les plus résilients, comme la logistique industrielle et les services municipaux.
Repères pour la lecture des marges
- Marge brute: sensible au prix de vente et aux coûts composants, elle reflète l’équilibre prix d’usine et achats.
- Marge opérationnelle: intègre la charge industrielle et commerciale. Sa résilience dépend de l’absorption des frais fixes.
- Effet mix: poids des références à plus forte valeur, options de sécurité et motorisations à basse émission.
À moyen terme, la différenciation se jouera sur la profondeur de gamme, le réseau de distribution et l’après-vente. Les clients de la manutention valorisent la disponibilité des pièces, la réactivité des réparations et la stabilité des contrats de maintenance. Sur ces terrains, la capacité d’investissement et l’empreinte locale sont déterminantes pour gagner des appels d’offres récurrents.
Gouvernance financière et trajectoire 2025: marges, investissements et exécution
La guidance du management s’articule autour de deux axes: préservation des marges et stabilité du chiffre d’affaires 2025 par rapport à 2024. La cible d’un résultat opérationnel autour de 5,5 % implique une gestion serrée des coûts de production et des dépenses commerciales. L’effort porte sur le pilotage du plan de charge, l’allocation des ressources vers les lignes à plus forte marge et l’optimisation des achats.
L’investissement industriel reste orienté vers la modernisation des outils et le développement de plateformes produits. La discipline sur le besoin en fonds de roulement demeure un enjeu central: raccourcissement du cycle de conversion de trésorerie, négociation des délais fournisseurs, maîtrise des encours d’inventaire. La solidité du carnet de commandes facilite ces arbitrages, mais la priorité reste la conversion opérationnelle à un rythme compatible avec les objectifs annuels.
La crédibilité de la trajectoire 2025 repose sur une exécution sans accroc: montée en cadence fluide, qualité au rendez-vous, arbitrages logistiques maîtrisés. À cet égard, la granularité des flux de production et la flexibilité des sites sont des atouts. Des aléas exogènes subsistent néanmoins, à commencer par les évolutions de la politique commerciale américaine et l’environnement de taux.
Des taux d’intérêt en reflux allègent le coût du capital pour les loueurs et les industriels: 1. amélioration du taux d’actualisation des projets, 2. accessibilité accrue des financements, 3. revalorisation de la valeur résiduelle. Pour un fabricant, cela se traduit généralement par une reprise séquentielle des commandes, d’abord sur les matériels essentiels à forte rotation.
Sur le plan de l’information, la publication semestrielle confirme la ligne de conduite: transparence sur le carnet, lisibilité des priorités opérationnelles et prudence sur les paramètres non maîtrisés. C’est un cadre apprécié par les marchés, soucieux de mesurer la capacité d’un industriel à piloter ses marges dans un environnement chahuté.
Contexte économique et environnement concurrentiel
Le panorama 2025 pour les équipements de manutention reste exigeant. Les climats d’affaires en Europe s’améliorent par paliers, à mesure que l’inflation se modère et que les taux amorcent un cycle de détente. La construction demeure le talon d’Achille, alors que l’industrie cherche un nouvel élan avec des investissements davantage ciblés sur la productivité et la sécurité au poste.
Face à ce contexte, la concurrence s’organise autour de trois thèmes: l’électrification des gammes, la télémétrie pour optimiser les parcs et l’intensification des services. Les fabricants qui harmonisent leurs plateformes et renforcent leurs capacités de maintenance à distance prennent l’avantage. Pour Manitou, l’alignement sur ces sujets constitue un facteur de différenciation qui peut soutenir les parts de marché à court et moyen termes.
Les tensions commerciales internationales, réactivées depuis 2024, obligent par ailleurs à des plans de contingence robustes: revues de codes douaniers, reconfigurations d’assemblage, simulation de scénarios de tarification. La capacité à réagir vite devient un avantage compétitif, autant industriel que commercial.
Au cours du semestre, la presse économique a souligné la marche prudente mais déterminée de Manitou: reconnaissance d’une dégradation de marché, maintien des investissements prioritaires, et positionnement produit en ligne avec les attentes des clients professionnels. Ce réalisme stratégique favorise la résilience, même lorsque le cycle se retourne.
Profil et empreinte de manitou: ce qu’il faut retenir
Avec environ 6 000 collaborateurs et un chiffre d’affaires de 2,7 milliards d’euros en 2024, Manitou appartient au cercle des équipementiers européens de taille significative. Sa présence internationale et sa capacité à servir des marchés hétérogènes sont des amortisseurs de cycle. Le cas d’école 2025 l’illustre: recul conjoncturel des volumes, mais commandes qui redonnent de la visibilité et marges préservées à un niveau satisfaisant pour un point bas de cycle.
Le positionnement du groupe s’appuie sur des familles de produits éprouvées et une stratégie d’innovation pragmatique. À mesure que les flottes s’électrifient et que les exigences réglementaires se renforcent, les clients privilégient des solutions robustes, sûres et optimisées sur la durée d’usage. La valeur se déplace vers l’écosystème global: machine, data, pièces, services.
À l’échelle boursière, la lisibilité des objectifs et la qualité d’exécution sont scrutées par les investisseurs. Ce n’est pas tant l’ampleur de la baisse semestrielle qui importe que la manière dont l’entreprise verrouille ses fondamentaux: conversion du carnet, discipline sur les coûts, gouvernance attentive aux risques exogènes.
Citation à retenir
« À ce jour, nous estimons pouvoir compenser la baisse d’activité du premier semestre au cours du second semestre, et ainsi avoir un chiffre d’affaires 2025 stable par rapport à 2024. Le résultat opérationnel devrait être de l’ordre de 5,5 %. » (Manitou Group, 30 juillet 2025)
La portée de cet engagement sera fonction des conditions de marché, en particulier aux États-Unis. La prudence reste de mise, mais l’équation opérationnelle proposée est cohérente avec un scénario de stabilisation progressive en Europe et une demande américaine résiliente si l’impact tarifaire reste encadré.
Repères pour la suite de 2025
La trajectoire de Manitou au second semestre se jouera sur quelques variables décisives: conversion du carnet, élasticité des prix dans un environnement tarifaire plus incertain, et discipline sur les coûts. Les signaux disponibles à ce stade plaident pour une amélioration relative de l’activité, en ligne avec l’objectif d’un chiffre d’affaires annuel stable par rapport à 2024.
Pour les acteurs français de l’industrie, la séquence 2025 rappelle l’importance d’une stratégie de cycle complète: diversification des débouchés, standardisation des plateformes, service renforcé et vigilance douanière. Le semestre décisif s’ouvre avec de la visibilité et des garde-fous. Reste à convertir ces atouts en résultats comptables tangibles d’ici la fin de l’exercice.
En somme, Manitou aborde la seconde moitié de l’année avec un carnet affermi, une discipline opérationnelle assumée et un cap financier lisible, tout en composant avec un contexte douanier et sectoriel plus incertain.