Les ETI françaises face à un recul significatif de leur chiffre d'affaires
Découvrez les résultats du baromètre Palatine-METI 2025 sur les ETI françaises et leurs défis face à la baisse de rentabilité.

38 % d’ETI déclarent un recul de leur chiffre d’affaires au premier semestre 2025 : le signal est net, les marges s’érodent et les arbitrages s’accélèrent. Porté par la Banque Palatine, le METI et Challenges, le baromètre Palatine-METI publié le 29 septembre 2025 dresse un état des lieux lucide des équilibres financiers des entreprises de taille intermédiaire françaises. Les projets de croissance demeurent, mais avec une vigilance accrue sur la rentabilité.
Baromètre Palatine-METI : un révélateur des équilibres financiers des ETI
Le baromètre Palatine-METI, réalisé avec Challenges, la Banque Palatine et le METI, repose sur des sondages auprès de dirigeants d’ETI. Objectif : éclairer la santé économique d’un maillon central de l’appareil productif français, situé entre PME et grands groupes. L’édition dévoilée le 29 septembre 2025 confirme une conjoncture sous tension, où recettes et marges se normalisent à un niveau plus bas.
La valeur de ce baromètre est double. D’abord, il documente un recul conjoncturel tangible sur les revenus et la profitabilité. Ensuite, il détecte des capacités d’adaptation encore solides : désendettement maîtrisé, sélection des investissements, consolidation ciblée. Autrement dit, un stress réel sur les comptes d’exploitation, mais pas de rupture de liquidité.
Un pourcentage de dirigeants indiquant une baisse ne mesure pas l’ampleur de la contraction mais sa diffusion. Une baisse déclarée par 38 % des répondants signifie une détérioration assez étendue du chiffre d’affaires. La dynamique de marge dépend ensuite de l’effet volume, de l’évolution des prix de vente et des coûts (salariaux, énergétiques, fiscaux, achats).
Performance opérationnelle en retrait au premier semestre 2025
Chiffre d’affaires en recul : 38 % d’ETI touchées
Près de 4 ETI sur 10 ont vu leur chiffre d’affaires diminuer au premier semestre 2025 par rapport à la même période de 2024, soit environ 38 % des entreprises interrogées (Challenges, 1er mai 2025). Cette baisse de diffusion sectorielle révèle un environnement de demande plus fragile, avec un effet prix qui s’essouffle et des volumes qui peinent à rebondir.
Rentabilité sous pression pour 57 % des dirigeants
Le tassement des marges ressort comme l’autre marqueur fort de l’enquête : 57 % des dirigeants rapportent une perte de rentabilité par rapport à l’année précédente. Cette érosion traduit l’effet ciseau entre des coûts opérationnels qui demeurent élevés et des prix de vente moins dynamiques. Conséquence : montée des arbitrages, intensification des plans d’économies, et priorisation des projets à retour rapide.
Le miroir des grands groupes : le SBF 120 recule aussi
La tendance ne se limite pas aux ETI. D’après L’Agefi, la marge opérationnelle du SBF 120 a fléchi à 10 % au premier semestre 2025, contre 12,8 % en 2023.
Ce reflux confirme une normalisation post-pics 2021-2022, sur fond de renchérissement durable de certains facteurs de production. Les ETI, plus exposées à la cyclicité des carnets et avec des effets d’échelle moindres que les grands groupes, en ressentent rapidement l’impact.
Photographie 2025 : points clés à retenir
- 38 % des ETI déclarent un recul de chiffre d’affaires au S1 2025 (Challenges, 1er mai 2025).
- 57 % observent une perte de rentabilité sur un an.
- Marge opérationnelle du SBF 120 à 10 % au S1 2025, après 12,8 % en 2023.
- Contexte politique instable cité comme frein par les dirigeants.
- Capacité de remboursement de la dette jugée majoritairement satisfaisante.
Instabilité politique et fiscalité : les freins cités par les dirigeants
Deux facteurs dominent dans l’analyse des causes de la dégradation : l’instabilité politique et la hausse des prélèvements obligatoires. Le budget 2025, voté par le gouvernement, intègre des augmentations fiscales qui élèvent les coûts opérationnels. Les dirigeants interrogés associent cette pression fiscale accrue à une baisse de visibilité, pénalisant les décisions d’investissement.
L’Insee souligne que l’environnement politique pèse sur la confiance des ménages et la consommation, avec un contrecoup indirect sur l’activité des entreprises. Les Indicateurs de conjoncture publiés par le Ministère de l’Économie et actualisés le 7 mai 2025 pointent également une croissance fragile, confirmant un contexte d’atterrissage lent après la période d’hyper-volatilité sanitaire et énergétique.
Sur le front macro, l’Insee anticipe une progression du PIB français de 0,8 % en 2025, un niveau relevé mais jugé modeste au regard des besoins d’investissement et d’emploi nécessaires à une reprise plus solide (Insee). L’atonie décrite met en perspective la prudence affichée par les ETI dans leurs plans d’expansion.
Les canaux de transmission identifiés par les dirigeants sont multiples : report de commandes publiques ou privées, cycle d’achat des ménages retardé, hausse des coûts de conformité, renchérissement de certains financements. À court terme, cela réduit la croissance organique et grève la marge via des coûts fixes plus difficiles à ajuster.
Croissance organique et externe : les ETI ne coupent pas les moteurs
Le baromètre fait émerger un point d’équilibre intéressant. Tout en actant une contraction partielle des revenus et des marges, deux tiers des ETI prévoient ou ont déjà lancé un projet de croissance organique en 2025, qu’il s’agisse d’extensions de sites, d’innovations produits ou de montée en gamme commerciale. En parallèle, plus de 58 % ont initié ou planifié une opération de croissance externe.
Ce double mouvement traduit une approche de portefeuille des projets : conserver l’initiative sur les relais de croissance tout en procédant à des arbitrages stricts sur le retour sur capital engagé. Le baromètre Challenges-METI-Banque Palatine daté du 1er mai 2025 souligne d’ailleurs la capacité de la plupart des ETI à rembourser leurs dettes, en dépit de carnets de commandes moins étoffés. Les entreprises privilégient des plans d’investissement sélectifs, orientés vers l’efficacité opérationnelle et la consolidation sectorielle.
Dette et liquidité : signal rassurant du baromètre
Le maintien d’une capacité de remboursement fluide est un différenciateur clé. Il découle d’une discipline financière renforcée depuis la crise sanitaire, d’un pilotage plus fin du besoin en fonds de roulement et d’une pression accrue sur les dépenses discrétionnaires. Résultat : des marges sous tension, mais des trésoreries qui demeurent maîtrisées, éléments essentiels pour saisir des opportunités d’acquisitions ciblées.
Fusions-acquisitions : prudence active
Les projets de croissance externe progressent sous une forme plus sélective. Les dossiers recherchés sont ceux qui offrent une intégration rapide et des synergies de coûts ou commerciales identifiables, pour sécuriser les retours dans un contexte de demande atone. Les multiples de valorisation, moins tendus qu’en période d’euphorie, facilitent une consolidation disciplinée.
Croissance organique vs. croissance externe : deux leviers complémentaires
- Croissance organique : optimisation industrielle et commerciale, innovation, productivité, montée en gamme.
- Croissance externe : acquisition de parts de marché, extension de gamme, intégration verticale, synergies de coûts.
- Arbitrage clé 2025 : priorité aux projets à payback court et à la résilience de cash-flow.
Données macro et poids des ETI dans l’économie française
Le tableau de bord de la conjoncture de l’Insee, mis à jour le 29 août 2025, décrit une économie française en ralentissement. L’industrie fournit des appuis mais demeure hétérogène selon les branches.
L’instabilité politique pèse sur la confiance et, par ricochet, sur l’investissement productif. Les statistiques sectorielles du Ministère de l’Économie, actualisées le 28 mai 2025, rappellent l’empreinte des ETI : environ 5 500 entreprises, 24 % du PIB et 3,2 millions d’emplois, selon des rapports gouvernementaux récents.
Malgré une inflation et des coûts énergétiques stabilisés à un niveau inférieur aux pics, leur niveau absolu reste suffisant pour rogner les marges, surtout dans les activités intensives en énergie. Le ministère évoque des mesures de soutien à l’étude, notamment des allègements fiscaux ciblés annoncés en juillet 2025, pour compenser les effets du budget 2025 sur les ETI.
Inflation et énergie : le coût de la stabilité relative
La stabilisation n’implique pas un retour aux conditions pré-crises. Le prix de l’énergie, même modéré par rapport aux sommets récents, demeure un poste de coût significatif qui renchérit les coûts variables ou semi-fixes. Effet immédiat : nécessité de renégocier les contrats, d’accélérer l’efficacité énergétique, et d’ajuster les grilles tarifaires lorsque le pouvoir de marché le permet.
PIB 2025 à 0,8 % : reprise trop molle pour regonfler les marges
Avec un PIB attendu à 0,8 % en 2025, la reprise apparaît trop limitée pour offrir un levier de volume suffisant à une remontée spontanée de la rentabilité. Les directions financières se concentrent donc sur des leviers endogènes : discipline de coûts, productivité, pricing sélectif, gestion du BFR, digitalisation de la chaîne order-to-cash.
Le poids macro des ETI tient à leur multiplication dans les territoires et à leur rôle d’exportateurs. Mais la sensibilité aux cycles demeure élevée : base de coûts moins flexible que celle des grands groupes, dépendance aux chaînes d’approvisionnement, et pouvoir de pricing hétérogène selon les filières. D’où des marges plus sensibles aux à-coups de demande.
Indicateurs de vigilance à suivre en 2025
- Écart de marge vs S1 2024 et S1 2023, par segment d’activité.
- Durée de cycle du BFR : DSO, DPO, rotation des stocks.
- Taux d’utilisation des capacités et point mort de production.
- Évolution des carnets de commandes et mix géographique.
- Coûts unitaires énergie et salaires, et leur transmission dans les prix.
Politiques publiques et signal-prix : quelles implications pour les ETI
L’articulation entre politiques publiques et comptes d’exploitation se lit aujourd’hui autour de trois axes. D’abord, le niveau des prélèvements obligatoires, dont l’augmentation actée dans le budget 2025 détériore l’équation de coûts et ampute les marges de manœuvre d’investissement.
Ensuite, les mesures de soutien ciblées à l’étude, annoncées par le ministre de l’Économie en juillet 2025, qui pourraient atténuer une partie de ces effets. Enfin, un signal-prix dans l’énergie et les intrants qui reste élevé par rapport à la décennie précédente.
Ces paramètres plaident pour une lecture fine des politiques sectorielles afin de sécuriser les plans de charge et de capter les dispositifs de soutien lorsqu’ils existent. Pour les directions financières, l’optimisation du coût du capital et la priorisation des projets à forte intensité de cash-flow deviennent structurantes tant que la croissance spontanée reste limitée.
Budget 2025 : quels impacts pour les entreprises
Les hausses de prélèvements obligatoires mentionnées par les dirigeants se traduisent par une augmentation du niveau de charges, avec une incidence directe sur la marge opérationnelle. Les secteurs à forte intensité capitalistique ou énergétique sont particulièrement sensibles à ces déplacements de paramètres. En face, la préparation d’allègements ciblés, si elle se concrétise, pourra contribuer à rééquilibrer la trajectoire financière de certaines ETI.
Dans un contexte de visibilité réduite, les entreprises renforcent l’alignement planning–achats–production, ajustent les politiques de stocks et accentuent la sélectivité commerciale. L’objectif est de préserver le cash-flow opérationnel en limitant le capital immobilisé tout en sécurisant le service client prioritaire.
Piloter la trajectoire 2025 : décisions financières prioritaires
Au-delà du diagnostic, plusieurs lignes d’action ressortent des réponses des dirigeants et des signaux macro. Premièrement, resserrer le contrôle du coût complet des produits et services pour éviter les destructions de marge sur les segments où les prix n’absorbent plus la hausse des charges. Deuxièmement, rebasculer l’effort d’investissement vers des projets d’efficacité et d’automatisation avec un retour rapide.
Troisièmement, sécuriser les financements à des conditions stables, en capitalisant sur une capacité de remboursement jugée majoritairement soutenable par le baromètre. Quatrièmement, poursuivre une stratégie d’acquisitions ciblées offrant des synergies immédiates et un relèvement du mix de marge. Enfin, piloter la relation client par la valeur, en privilégiant la profondeur de comptes plutôt que la course au volume lorsque l’élasticité prix devient unfavorable.
Les organisations gagneront aussi à renforcer les boucles de monitoring conjoncturel. Des sources comme l’Insee et le Ministère de l’Économie recommandent de suivre les baromètres et indicateurs afin d’anticiper les inflexions et d’adapter rapidement la politique commerciale et industrielle.
Pricing, coûts et BFR : un triptyque indissociable
La protection de la marge brute par le pricing n’a de sens que si elle s’accompagne de gains de productivité et d’un BFR discipliné. Une tarification recalibrée sans reprise de contrôle sur les coûts ou les encaissements retardera la reconstitution des marges. À l’inverse, des gains de productivité non valorisés dans les prix priveront l’entreprise des ressources pour financer son repositionnement.
Trois signaux avancés à intégrer aux comités de gestion
- Taux de transformation commercial par segment et évolution du panier moyen.
- Indice d’efficience opérationnelle basé sur OEE, coûts unitaires et rebuts.
- Écart de cash conversion vs la norme historique de l’entreprise.
ETI : cap maintenu, horizon prudent pour 2025-2026
Le baromètre Palatine-METI met en évidence une réalité contrastée. Revenus et marges fléchissent, le coût des facteurs demeure élevé et l’instabilité politique pèse sur la demande.
En miroir, les ETI gardent des marges de manœuvre : désendettement tenu, investissements choisis, opportunités de consolidation. Avec un PIB attendu à 0,8 % en 2025, la reprise exige plus que la patience : elle appelle une discipline d’exécution et des paris industriels sélectifs.
Si les mesures de soutien ciblées évoquées cet été trouvent leur traduction concrète, elles contribueront à stabiliser les trajectoires financières les plus exposées. D’ici là, l’avantage ira aux entreprises qui optimisent coûts, prix et cash, tout en maintenant une ambition de croissance maîtrisée.
Dans la houle 2025, les ETI françaises confirment une chose : la résilience est un choix stratégique autant qu’un résultat financier.