101 en octobre dans l’industrie et +7 points dans le commerce de détail : la boussole conjoncturelle repasse à l’optimisme prudent. Les enquêtes de l’Insee montrent que les chefs d’entreprise rehaussent leurs anticipations, sans emballement. Décryptage sectoriel, comparaison avec 2023-2024 et points d’attention pour les directions financières et achats.

Industrie manufacturière : l’indicateur passe au-dessus de 100

Le moral industriel s’améliore nettement en octobre. L’indicateur du climat des affaires dans l’industrie atteint 101 points, soit +4 points en un mois. Ce niveau dépasse légèrement la moyenne de longue période fixée à 100, signalant un environnement redevenu légèrement favorable au secteur manufacturier.

Deux ressorts nourrissent ce mouvement :

  • Perspectives personnelles de production en hausse : davantage d’industriels anticipent une activité plus soutenue à court terme.
  • Carnets de commandes perçus comme mieux garnis, avec un redressement des soldes d’opinion sur la demande.

Pris isolément, ces signaux n’annoncent pas une accélération brutale. Ils marquent toutefois une inflexion appréciable par rapport au premier semestre 2025, où l’industrie se situait sous sa moyenne. À titre de repère, l’Insee observait un climat industriel à 96 en juin 2025, traduisant alors une dégradation de la confiance.

L’indicateur synthétique est un agrégat d’opinions normalisées de chefs d’entreprise (balances d’opinion). Il est calibré sur une moyenne de longue période fixée à 100 : au-dessus, le climat est jugé plus favorable que d’ordinaire ; au-dessous, il est moins porteur. Les sous-composantes usuelles incluent les perspectives d’activité, l’emploi, les carnets de commandes et, selon le secteur, les intentions de commandes et les stocks.

À fin octobre, le redressement est cohérent avec la normalisation progressive des anticipations des dirigeants. Le parallèle avec octobre 2023 est éclairant : un an plus tôt, un rebond avait déjà été enregistré, dans un contexte néanmoins marqué par l’incertitude post-pandémie et des tensions de coûts. L’épisode actuel apparaît plus homogène, car porté à la fois par la production anticipée et par les carnets.

Commerce de détail et réparation automobile : intentions de commandes en nette hausse

Le commerce de détail, incluant la réparation automobile, signe un retour au quasi-équilibre. L’indicateur sectoriel progresse de +7 points pour s’établir à 99 en octobre. Il reste marginalement sous la moyenne historique, mais la marche franchie est significative.

Les enquêtes font apparaître un double déclencheur :

  • Intentions de commandes en forte progression, symptôme d’un réassort plus confiant à l’approche de la fin d’année.
  • Perspectives générales d’activité en rebond, compatibles avec une demande moins hésitante qu’au 3e trimestre.

Cette inflexion contraste avec l’automne 2023, lorsque le climat des affaires dans le commerce avait reflué et glissé sous sa moyenne. La situation actuelle reste mesurée, mais elle dénote une volonté de reconstitution des volumes, point clé pour les chaînes d’approvisionnement et la trésorerie des détaillants.

Repères chiffrés d’octobre à retenir

• Industrie manufacturière : 101 points, soit +4 en un mois.

• Commerce de détail et réparation auto : 99 points, soit +7 en un mois.

• Indicateur global : +1 point en octobre par rapport à septembre, d’après la presse économique, avec également +3 points pour le climat de l’emploi.

Pour les directions achats, la séquence suggère une montée en puissance des réassorts. Côté marges, la reconstitution des volumes peut soulager les coûts fixes d’exploitation. La prudence reste de mise sur le profil de la demande finale, encore hétérogène selon les segments et les zones.

Lecture 2023-2025 : de l’assombrissement au « mieux » mesuré

Les écarts de tendance sur trois automnes successifs offrent un bon instrument de lecture.

Chronologie 2023-2025 : points saillants

  • Octobre 2023 : la confiance s’assombrit. Les indicateurs sectoriels reculent sous leur moyenne, touchés par une demande atone et des incertitudes persistantes.
  • Octobre 2024 : nouveau repli, avec une tonalité prudente renforcée et des acteurs économiques en position d’attente.
  • Septembre 2025 : stabilité à 96 pour l’indicateur global, révélant une économie encore hésitante, tandis que le climat de l’emploi décroît.
  • Octobre 2025 : éclaircie modeste, soutenue par l’industrie et le commerce de détail, avec une hausse d’un point de l’indicateur d’ensemble selon la presse économique.

Cette trajectoire dessine un point d’inflexion plus qu’un cycle haussier établi. Elle est compatible avec une normalisation des anticipations, après plusieurs trimestres dissonants entre secteurs. Les dernières données placent l’industrie légèrement au-dessus de sa moyenne, un marqueur symbolique dans un environnement devenu plus lisible.

Au-dessus de 100, les dirigeants déclarent en moyenne un climat plus porteur qu’à l’accoutumée. En pratique, cela se traduit par des plans de charge stabilisés ou en hausse, une visibilité légèrement meilleure et des calibrages d’investissement réévalués. L’effet est souvent progressif, car les décisions d’achats d’équipements et d’effectifs se matérialisent avec décalage.

Niveau d’ensemble et emploi : signaux plus favorables mais encore fragiles

À l’échelle agrégée, le climat des affaires ressortait stable à 96 en septembre 2025, indiquant un environnement globalement modéré. Les informations disponibles pour octobre font état d’un gain d’un point sur l’indicateur d’ensemble, avec un redressement plus marqué du climat de l’emploi de +3 points rapporté par la presse.

Industrie et services : quelles divergences à surveiller

La photographie sectorielle reste contrastée. L’industrie regrimpe au-dessus de 100 quand les services, plus résilients ces derniers mois, affichent une progression moins ample. Cet écart n’a rien d’exceptionnel : il illustre l’ordonnancement classique d’un redémarrage, où la réaccélération des commandes et la reconstitution des stocks se diffusent avec un pas de temps distinct selon les métiers.

Deux éléments méritent attention dans l’interprétation :

  • Ampleur des hausses mensuelles : l’écart +4 dans l’industrie et +7 dans le commerce souligne un rattrapage, pas un changement de régime.
  • Position par rapport à 100 : l’industrie repasse en zone « normale » quand le commerce reste juste au-dessous. La prudence commerciale demeure rationnelle au vu des arbitrages des ménages.

Solde d’opinion : différence entre la part d’entreprises déclarant une amélioration et celles signalant une détérioration. Un solde positif indique un basculement vers l’optimisme.

Carnets de commandes : appréciation qualitative du niveau de commandes en portefeuille par rapport à la normale. En redressement, ils soutiennent la production à court terme.

Perspectives personnelles de production : jugement du dirigeant sur l’évolution de sa propre activité, utile pour anticiper les mouvements d’embauches et d’investissements.

Les équipes RH et les directions financières peuvent y voir un signal de recalibrage de l’intérim et des CDI dans l’industrie, à mesure que le niveau de production anticipée s’affermit. L’effet sur l’emploi reste toutefois gradué et dépendant de la confirmation des commandes.

Conséquences pour les directions financières, achats et supply chain

Pour les entreprises, ces points d’appui dessinent une feuille de route pragmatique. L’enjeu consiste à sécuriser la capacité d’exécution sans trop alourdir le risque de stock ou de coûts fixes.

Risques identifiés fin 2025 : coûts, stocks et visibilité

  • Coûts encore volatils : même si la confiance s’améliore, le pilotage des charges opérationnelles demeure clé. Lissage contractuel, clauses de renégociation et suivi des indexations restent des outils centraux.
  • Stocks à finesse : les intentions de commandes en hausse plaident pour un réassort, mais ciblé. Les rotations doivent être suivies au plus près pour éviter l’immobilisation de trésorerie.
  • Capex calibrés : la position à 101 dans l’industrie autorise un dégel ciblé des investissements de productivité ou de maintenance différée, sous réserve de trajectoires de commandes confirmées.

Dans les filières exposées aux délais d’approvisionnement, la recomposition des portefeuilles fournisseurs peut encore produire des effets de second tour en matière de prix et de qualité de service. Les entreprises gagnent à conserver une redondance minimale sur les maillons critiques et à évaluer le coût de reconfiguration face au risque de rupture.

Indicateurs à surveiller par les DAF

  1. Écart à 100 par secteur : déclencheur de scénarios d’embauches et d’investissements.
  2. Intentions de commandes dans le commerce : signal d’avance sur l’activité réelle T4-T1.
  3. Carnets de commandes dans l’industrie : profondeur et diffusion par filière.
  4. Climat de l’emploi : confirmation ou non du rebond sur les prochains mois.
  5. Stocks et délais : vitesse d’écoulement et fiabilité des fournisseurs clés.

Les directions achats peuvent, de leur côté, repositionner certaines négociations pour capter les effets prix d’une demande qui se recompose. Dans l’automobile et l’équipement de la maison, la visibilité offerte par les commandes à venir justifie des contrats plus souples sur volumes et calendriers de livraison. À l’export, l’amélioration de la perception de la demande joue en faveur d’un redémarrage progressif, à confirmer dans les prises de commandes réelles.

Capteurs conjoncturels : données et interprétation sans extrapolation hâtive

Le redressement d’octobre doit être lu à la lumière des repères récents. En juin 2025, le climat industriel ressortait à 96, puis l’agrégat global est resté stable à 96 en septembre 2025. En octobre, la progression d’un point au global, la poussée de l’industrie à 101 et le regain du commerce à 99 composent un tableau encourageant, mais toujours intermédiaire.

La discipline d’analyse consiste à privilégier les signaux qui persistant sur plusieurs mois. Les composantes les plus utiles à suivre d’ici la fin d’année sont les intentions de commandes dans le commerce, et la production anticipée couplée aux carnets dans l’industrie. Un faisceau de confirmations sur deux à trois relevés serait de nature à solidifier la lecture d’un cycle de reprise.

Budget 2026 : intégrer un scénario central avec activité « autour de la normale » dans l’industrie et proche de celle-ci dans le commerce. Prévoir des sensibilités sur volumes et prix.

Trésorerie : adapter les lignes court terme au profil de réassort. Veiller aux maturités et aux besoins saisonniers.

Supply chain : privilégier des accords offrant des points de re-négociation trimestriels si la visibilité sur la demande demeure hétérogène.

Pour la gouvernance, l’arbitrage consiste à accélérer là où les signaux sont validés et à conserver des options inverses sur les segments encore volatils. Le panorama actuel légitime des décisions incrémentales, afin de capter la reprise sans surexposer le bilan.

Octobre 2025 : une fenêtre de stabilisation à consolider

Les données d’octobre dessinent un paysage plus lisible : industrie à 101, commerce à 99, un indicateur global en léger mieux et un climat de l’emploi qui se raffermit. La bascule au-dessus de 100 dans l’industrie a une portée symbolique, utile pour enclencher des décisions d’exploitation et de capacité.

La trajectoire reste toutefois conditionnée à la durabilité des commandes et à la confirmation des signaux durant l’hiver. L’enjeu pour les entreprises est de prolonger cette stabilisation par une exécution disciplinée, attentive aux écarts sectoriels et aux contraintes de coûts. Cap sur les prochains relevés pour valider la trajectoire et ajuster les plans d’action.