Atos connaît un nouveau fléchissement boursier en 2025
Atos souffre d'une baisse tout en visant une marge plus robuste. Zoom sur la situation boursière et les ajustements stratégiques du groupe.

53,3 euros à la mi-séance et une séance sanctionnée de -6 % : Atos vient rappeler, en Bourse de Paris, que le chemin du redressement reste escarpé. Après avoir doublé depuis début août 2025, le titre trébuche le mardi 21 octobre 2025, sur fond de publications trimestrielles attestant une baisse encore marquée des revenus et d’un ajustement des ambitions 2025.
Bourse de Paris : -6 % pour Atos après un rebond estival
Le titre Atos a décroché de 6 % ce mardi 21 octobre 2025 pour s’établir à 53,3 euros, malgré un spectaculaire rebond de +100 % depuis le début du mois d’août. Sur trois ans, la perte cumulée demeure supérieure à 90 %, un rappel cinglant de la profondeur des difficultés rencontrées par le groupe de services numériques.
La réaction de marché intervient au lendemain de la publication des comptes du troisième trimestre et d’une révision des prévisions annuelles. À court terme, la polarisation des investisseurs s’explique par la coexistence de signaux contradictoires : une baisse de revenus toujours à deux chiffres en organique, mais une décélération de la décroissance et un discours de pilotage des marges qui se veut plus discipliné. Les échanges, signalés comme nourris par plusieurs flux d’informations financières, traduisent une volatilité qui reste élevée pour une valeur sous tension stratégique et financière.
Ce mouvement boursier reflète aussi une lecture macro plus prudente : dans un environnement de demande IT hésitante, les arbitrages budgétaires des grands donneurs d’ordre pèsent sur le renouvellement des contrats et la montée en gamme vers l’IA et le cloud, deux chantiers où Atos doit composer avec des concurrents puissants.
Lecture boursière du jour
Le recul de 6 % après un doublement du titre depuis août illustre un marché technique, dominé par des arbitrages rapides et la recherche de signaux de confirmation sur la trajectoire 2026. La valeur reste sensible aux ajustements de guidance et au rythme des cessions d’actifs.
Troisième trimestre 2025 : décélération de la baisse des revenus
Atos a dévoilé un chiffre d’affaires trimestriel de 1,98 milliard d’euros, en repli organique de 10,5 % par rapport à la même période de 2024. Sur neuf mois, les revenus s’élèvent à 5,998 milliards d’euros, en retrait organique de 15,2 %.
La dynamique montre une contraction encore marquée, mais moins accentuée qu’en début d’exercice. Cette évolution s’explique par des sorties volontaires et par la réduction de contrats peu rentables, une décision cohérente avec le recentrage sur la profitabilité à moyen terme.
Au-delà du niveau d’activité, l’enjeu se déplace vers la qualité du mix contractuel. Renoncer à des contrats déficitaires pèse sur le chiffre d’affaires à court terme, mais soutient la marge opérationnelle et conditionne la capacité de retour à une croissance organique saine dès 2026, si l’effet base et le pipeline se normalisent.
Données clés du trimestre
- Chiffre d’affaires T3 2025 : 1,98 milliard d’euros, -10,5 % en organique.
- Revenus 9 mois 2025 : 5,998 milliards d’euros, -15,2 % en organique.
- Facteurs explicatifs : contrats non rentables arrêtés, sorties volontaires, environnement de marché atone, effets de change.
Dans l’immédiat, la priorité consiste à préserver la marge brute et à réduire l’exposition aux contrats générateurs de pertes. En miroir, l’accès à des deals mieux rémunérés dépendra de la capacité commerciale à valoriser l’expertise dans la cybersécurité et l’IA, segments où la crédibilité technique reste un atout mais où la réputation financière pèse sur les négociations.
Une décroissance organique plus faible traduit un momentum relatif : l’entreprise recule encore, mais moins vite. Pour Atos, cette inflexion pourrait indiquer que les mesures de tri des contrats et de gestion des coûts commencent à produire un effet. La confirmation nécessitera de répliquer ce profil sur plusieurs trimestres, avec une trajectoire d’entrées de commandes cohérente.
Guidance 2025 ajustée : revenus revus, marge relevée
Le groupe abaisse sa prévision de chiffre d’affaires 2025. L’objectif auparavant situé autour de 8,5 milliards d’euros est désormais ramené à un niveau supérieur à 8 milliards d’euros.
Les raisons invoquées couvrent l’impact des taux de change, la réduction des activités déficitaires et une demande molle. Dans le même temps, la cible de marge opérationnelle supérieure à 4 % est relevée par rapport à une estimation antérieure d’environ 4 %.
Cette combinaison est stratégique : accepter moins de revenus aujourd’hui pour sécuriser une marge plus robuste. Sur un plan financier, cela suggère un arbitrage favorable à la génération de cash à horizon 2026, si l’amélioration de la marge se confirme et si les coûts de restructuration restent maîtrisés. Les investisseurs évalueront la crédibilité de cette trajectoire à l’aune des flux de trésorerie et du coût du capital.
Hypothèses explicites communiquées par Atos
- Revenus 2025 désormais anticipés au-dessus de 8 milliards d’euros.
- Marge opérationnelle visée supérieure à 4 % sur l’exercice.
- Variables clés : taux de change, épuration des contrats déficitaires, marché atone.
Pour un groupe en redressement, la pertinence d’une guidance repose autant sur l’alignement interne des fonctions commerciales, opérationnelles et financières que sur l’exécution opérationnelle dans la durée. Le pilotage serré des coûts d’exécution et de la charge de sous-traitance sera particulièrement scruté.
Avertissement sur les revenus : cadre AMF et conséquences
Un ajustement de guidance est un fait de marché qui suppose une communication claire et simultanée, sous l’œil de l’AMF. Pour Atos, la cohérence entre résultats trimestriels et objectifs annuels conditionne la confiance des investisseurs. Une trajectoire de marge mieux tenue peut compenser un effet volume négatif à court terme.
Gouvernance et trajectoire 2026 : le plan Philippe Salle
À la tête du groupe depuis octobre 2024, Philippe Salle confirme une feuille de route de redressement qui fait du retour à la croissance organique en 2026 et de la génération de trésorerie positive les deux jalons prioritaires. Le dirigeant inscrit ces objectifs dans une transformation qui combine tri des contrats, simplification de la structure et recentrage sur les activités différenciantes.
Dans le discours du management, la séquence est claire : 2025 est une année de stabilisation des fondamentaux opérationnels, 2026 doit marquer le passage au vert sur la croissance organique et les flux de trésorerie, et les années suivantes visent une normalisation des marges. Des projections internes évoquées dans la presse économique font état d’une ambition de marge opérationnelle à 10 % d’ici 2027, sous réserve de l’exécution du plan et des conditions de marché.
Philippe Salle : mandat et feuille de route
- 2025 : sécuriser la marge, rationaliser le portefeuille de contrats, ajuster les coûts.
- 2026 : renouer avec la croissance organique et viser une trésorerie opérationnelle positive.
- Au-delà : reconstituer la profitabilité, avec une ambition de marge à deux chiffres.
La « prime d’exécution » est désormais le principal catalyseur. Le marché jugera sur pièces, trimestre après trimestre, l’alignement entre annonces et livrables financiers.
Pour une société en redressement, la génération de cash assainit la structure bilantielle, réduit la dépendance aux financements externes et sécurise les investissements de croissance. Chez Atos, c’est un indicateur pivot pour juger de la réussite du tri des contrats et du pilotage des coûts d’exécution.
Capitaux, cessions et héritage des années 2010
Le profil actuel d’Atos résulte d’une décennie de croissance externe ambitieuse et d’un endettement devenu contraignant. Fondée en 1997, la société a pris de l’ampleur au cours des années 2010, avec notamment l’intégration de Bull en 2014 et de Syntel en 2018. Ces opérations ont accru l’empreinte commerciale du groupe, mais la trajectoire s’est heurtée à des défis de gouvernance, des surcoûts sur certains contrats publics et une charge de dette élevée.
En 2024, Atos a abordé une phase critique de restructuration financière, dans un contexte de Dette nette supérieure à 4 milliards d’euros. Des discussions ont porté sur des cessions d’actifs jugés non essentiels ou stratégiquement sensibles. Parmi elles, un projet de cession de la branche Big Data & Security à l’État a été évoqué en 2024 pour un montant d’environ 700 millions d’euros, avec un périmètre et un calendrier dépendant des discussions institutionnelles et des impératifs de souveraineté.
Sur le plan opérationnel, la photographie 2024 affichait déjà une tendance négative des revenus, avec une baisse à deux chiffres sur neuf mois. La continuité en 2025 confirme le besoin de recentrage et de discipline d’exécution, en évitant les contrats risqués et en réallouant les ressources vers les activités à plus forte valeur.
Atos : chronologie condensée 2014-2025
- 2014 : acquisition de Bull, élargissement des capacités en infrastructures et cybersécurité.
- 2018 : acquisition de Syntel, renforcement en services applicatifs et offshore.
- 2024 : crise financière, dette nette au-delà de 4 milliards d’euros, négociations de restructuration et projets de cessions d’actifs stratégiques.
- 2025 : décroissance en organique atténuée au T3, guidance revenus ajustée et marge opérationnelle relevée.
Au-delà des cessions, le redressement dépendra de la capacité du groupe à convertir son pipeline commercial dans des segments en croissance rentable, et à contenir les coûts d’exécution dans les grands contrats.
Contrats publics déficitaires : mécanismes de risque
Les contrats publics multi-annuels comportent des clauses de performance et des engagements de service lourds. En cas de sous-estimation des coûts, la marge peut être érodée sur la durée du contrat. La réponse d’Atos consiste à réviser le portefeuille, renégocier quand c’est possible, ou sortir des contrats structurellement déficitaires.
Environnement de marché et cadre réglementaire en France
La photographie macroéconomique française demeure terne au premier semestre 2025. La Direction générale du Trésor a confirmé une progression du PIB de +0,1 % au premier trimestre 2025, un rythme modeste susceptible de freiner certains budgets IT privés et publics, avec des arbitrages d’investissement plus sélectifs. Cette conjoncture pèse sur les cycles de décision, allonge les temporalités d’appel d’offres et peut retarder les ramp-up de projets.
À l’échelle européenne, l’encadrement des aides d’État et des concentrations conditionne les trajectoires de cession d’actifs sensibles. Dans le cas d’un acteur clé pour les infrastructures critiques et la cybersécurité, le dialogue avec les autorités publiques vise à concilier continuité de service, sécurité des données et impératifs de marché.
Conjoncture française 2025 : implications sectorielles
- Activité économique faible et budgets informatiques sous surveillance.
- Déploiements cloud et IA priorisés, mais phasés, avec une exigence accrue de ROI.
- Pression sur les prix dans les services commoditisés, prime aux expertises sécurité et data.
Pour Atos, l’environnement incite à sélectionner les projets, à valoriser l’expertise et à sécuriser la marge plutôt qu’à courir le volume. Le différentiel de croissance face à des concurrents internationaux plus capitalisés renforce la nécessité d’un positionnement clair sur des niches de souveraineté et de services à forte valeur.
Règles UE sur aides d’État : lignes de crête pour un acteur stratégique
Les discussions relatives à des actifs de souveraineté s’inscrivent dans des cadres européens stricts. Les montages doivent équilibrer soutien public, respect des règles de concurrence et pérennité industrielle. Pour un groupe exposé aux infrastructures critiques, cette équation technicise les calendriers et impose une transparence renforcée sur les impacts financiers et opérationnels.
Pour un prestataire de cybersécurité, la notion de souveraineté couvre la localisation des données, la maîtrise des technologies critiques et la continuité d’activité en cas de crise. Les schémas de cession ou de partenariat doivent préserver ces prérequis, au risque sinon d’affaiblir la chaîne de confiance.
Ce que surveiller d’ici 2026 pour juger du redressement
À court terme, trois indicateurs feront la différence. D’abord, la marge opérationnelle 2025, attendue au-dessus de 4 %, dira si le tri des contrats produit son effet.
Ensuite, la génération de trésorerie en 2026 constituera le véritable test de robustesse. Enfin, la croissance organique devra réapparaître dès 2026, confirmant la capacité d’Atos à convertir son pipeline sur des offres à valeur ajoutée.
En Bourse, le titre restera corrélé aux jalons d’exécution et à la clarté du cap stratégique. Les prochaines publications, notamment sur l’évolution du carnet de commandes et la saisonnalité des flux, permettront d’affiner la lecture d’une trajectoire encore fragile mais désormais mieux balisée.
(Boursorama, 21 octobre 2025) pour le cours et les grandes lignes de publication. Détails chiffrés des ajustements 2025 également relayés par des médias financiers spécialisés.