SPIE Facilities propulse l’infrastructure de Bouygues Telecom vers un edge plus vert
SPIE Facilities gère 130+ sites Bouygues Telecom pour garantir 99,999 % de disponibilité tout en réduisant le PUE et les émissions carbone.

Le renforcement du partenariat qui unit SPIE Facilities à Bouygues Telecom dans l’exploitation de plus de 130 sites d’hébergement critiques illustre l’intensification des investissements télécoms dans la résilience et la sobriété énergétique.
Un partenariat long terme, catalyseur de continuité numérique
Collaborer depuis quinze ans sur des infrastructures où la moindre interruption coûte des millions n’est pas anodin ; c’est la marque d’une relation de confiance forgée dans la durée. À l’origine limité à trois data centers franciliens, le contrat couvre désormais 34 sites en Île‑de‑France et près d’une centaine d’implantations dans le Sud‑Ouest, soit des surfaces comprises entre quelques dizaines de mètres carrés et plus de 6 000 m². Sur ces sites, SPIE Facilities pilote l’électricité HT/BT, la génération de secours, les onduleurs, la CVC et la ventilation.
L’extension actée début 2023 porte sur 131 nouveaux points techniques – data centers, Central Offices et Metro Offices – maillons invisibles mais indispensables pour acheminer la voix, la donnée mobile, l’Internet fixe et, increasingly, les services cloud de Bouygues Telecom. Au quotidien, l’opérateur vise un taux de disponibilité « proche de 100 % » pour quelque 28 millions d’utilisateurs.
Chiffres clés du contrat
- 34 sites en région parisienne
- ~100 sites dans le Sud‑Ouest
- surfaces de 50 m² à 6 000 m²
- objectif de disponibilité ≈ 100 %.
Cartographie : des hubs franciliens aux artères régionales
Les data centers historiques, situés dans la boucle nord de Paris, concentrent les nœuds de transit IP et la sortie vers les principaux Internet Exchanges. Cinq Central Offices (espaces techniques hérités du RTC, aujourd’hui convertis à la fibre) complètent le dispositif. Ils gèrent le backbone optique et accueillent les têtes de réseaux FTTH, xDSL et 5G.
La centaine de Metro Offices répartis entre Bordeaux, Toulouse et Montpellier forment, quant à eux, un maillage de proximité. Chaque site héberge des équipements radio, RAN et des micro‑data centers de périphérie (edge nodes) pour réduire la latence des applications temps réel – IoT industriel, streaming 4K ou cloud gaming. En internalisant leur maintenance, Bouygues Telecom met sous surveillance des milliers de points critiques (groupes électrogènes, batteries, onduleurs) grâce à la plateforme Smart FM 360° de SPIE, qui corrèle alarmes et données de consommation en temps réel.
À l’époque du cuivre, le Central Office (CO) désignait le bâtiment où convergaient les paires torsadées pour la téléphonie fixe. Avec la fibre puis la 5G, le CO a basculé vers le rôle de mini‑data center métropolitain ; il concentre désormais les équipements IP/MPLS, les routeurs BGP et parfois les serveurs de cache de CDN locaux.
Garantir l’« five‑nines » : quand la tolérance de panne frôle zéro
Un arrêt non planifié de seulement 5 minutes par an se traduit par une indisponibilité de 0,001 % ; c’est le niveau de service auquel aspire l’opérateur depuis qu’il a rapatrié son cœur de réseau IP sur ses propres datacenters. Pour atteindre ce Service Level Objective (SLO) 99,999 %, SPIE Facilities déploie des équipes 24/7 sur les plus grands sites ; chaque incident doit être isolé, diagnostiqué et réparé en moins de 30 minutes. Le Mean Time To Repair constaté sur 2024 est descendu sous les 18 minutes, selon les tableaux de bord partagés par les deux partenaires.
La redondance électrique suit la norme Tier 3+ : double arrivée HTA, distribution BT en Star Topology, onduleurs 2N et groupes diesel bi‑carburant. Les essais de déclenchement mensuels, chronométrés, ne doivent pas dépasser les 15 secondes de bascule. Sur l’axe climatique, la température ambiante est maintenue entre 23 °C ± 3 °C via des systèmes CRAH en couloir confiné et batteries de free‑cooling.
Le Power Usage Effectiveness mesure le ratio entre la consommation totale du site et celle des seuls équipements IT. En France, l’Arcep estime le PUE moyen à 1,46 en 2023 ; un PUE de 1,2 est considéré comme excellent sur un data center Tier 3.
Efficacité énergétique : quand l’air frais devient un actif
Au‑delà de la redondance, le contrat intègre des clauses de performance énergétique. SPIE Facilities a carte blanche pour abaisser le PUE de chaque site ; la rémunération variable repose sur trois indicateurs : réduction de kWh, baisse des émissions de CO₂ équivalent et allongement de la durée de vie des équipements (objectif : +3 ans).
Le free‑cooling est la première brique : dès que la température extérieure descend sous 17 °C, les batteries d’échange air/air prennent le relais des groupes froids. À Toulouse et Bordeaux, deux data centers expérimentent également la récupération de chaleur fatale vers des réseaux de chauffage urbain (40 % de couverture de leurs besoins en 2024). SPIE s’appuie sur son expérience Smart FM pour piloter la régulation ; l’algorithme, nourri par l’IA, anticipe la charge IT et module en avance le flux d’air, limitant les à‑coups.
Cette approche rejoint la stratégie climat de Bouygues Telecom : l’opérateur vise –40 % d’émissions « scopes 1 & 2 » d’ici 2030 et 100 % d’électricité renouvelable en 2027. En 2024, 64 % de son mix provenait déjà de contrats d’achat d’énergie verte, notamment hydraulique.
Bon à savoir : sobriété numérique
L’Arcep estime que les data centers consommaient 2,4 TWh d’électricité en 2023 ; leur part pourrait tripler d’ici 2035 si aucune mesure d’efficience n’est prise.
Qui est SPIE Facilities ?
Filiale française du groupe SPIE (chiffre d’affaires 2024 : 9,9 milliards €), SPIE Facilities emploie plus de 6 300 techniciens spécialisés dans la maintenance multitechnique. Au‑delà des télécoms, la société gère plus de 18 millions m² de bureaux et bâtiments publics. Ses expertises dépassent la GTB traditionnelle ; elles incluent la cybersécurité OT, la gestion énergétique as‑a‑service et la supervision à distance.
La croissance de SPIE est tirée par la transition énergétique : 49 % de son CA 2024 correspond à des activités reconnues « vertes » au sens de la taxonomie européenne.
Pour le présent partenariat, SPIE Facilities mobilise un plateau support à Saint‑Ouen, deux Centres de Services Partagés (télé‑supervision H24) et un laboratoire de « test & learn » pour optimiser batteries LFP et UPS lithium‑ion.
Bouygues Telecom : stratégie d’infrastructure et virage cloud
L’opérateur, filiale du groupe Bouygues, a bouclé 2024 sur un chiffre d’affaires facturé aux clients de 6,2 milliards €, en hausse de 5 % malgré l’environnement concurrentiel. Les investissements réseau (CAPEX 2024 : 1,5 milliard €) se concentrent sur trois axes : densification 5G 3,5 GHz, migration cœur de réseau sur cœur cloud‑natif et extension du backbone fibre au-delà de 100 Tb/s. Les data centers servent aussi de base arrière pour NumSpot, le cloud souverain lancé fin 2023 avec Docaposte et Dassault Systèmes.
En s’appuyant sur SPIE Facilities, Bouygues Telecom sécurise la montée en charge de ses services hébergés : IoT industrielle, téléphonie avancée (VoNR) et offres Network‑as‑a‑Service pour le B2B. Le contrat prévoit des comités d’innovation trimestriels pour déployer refroidissement par immersion, carburants HVO pour groupes de secours et micro‑turbines à hydrogène.
Le free‑cooling exploite la différence de température entre l’air extérieur et l’ambiance IT ; quand cette dernière est inférieure au seuil défini, l’air frais est acheminé directement dans les couloirs froids, sans passer par les compresseurs de chillers. Résultat : jusqu’à 70 % d’économies sur la partie Cooling d’un data center en climat tempéré.
Impact macro‑économique : une densification des acteurs français du data center
La décision de Bouygues Telecom renforce la tendance française au « regional edge » : rapprocher la puissance de calcul des bassins d’usage pour limiter la latence et les coûts de transit. Ce mouvement profite aux ETI de la maintenance multitechnique ; SPIE double sa présence sur le marché télécom, concurrençant Vinci Energies et Equans.
Sur le plan environnemental, l’engagement contractuel d’un PUE cible à 1,3 permettrait une économie annuelle de 22 GWh, soit la consommation d’une ville de 4 400 habitants. Si cet objectif était répliqué aux 250 data centers français de plus de 1 MW, le gain théorique atteindrait 0,55 TWh, l’équivalent de la production annuelle d’une ferme éolienne de 130 MW. Ces chiffres soulignent le poids stratégique de la maintenance prédictive et du pilotage énergétique dans la filière numérique.
Au niveau financier, les analystes voient dans ce partenariat un indicateur de résilience : la maintenance, indexée sur l’inflation mais garantie sur la durée du contrat (cinq ans fermes, reconductible), assure à SPIE un cash‑flow récurrent, tandis que Bouygues Telecom convertit une partie de son CAPEX en OPEX lissant ainsi l’effort d’investissement.
Au‑delà de 2025 : vers des data centers bas‑carbone et distribués
L’année 2025 sera charnière : la mise en service de trois nouvelles salles modulaires (2 MW chacune) en Ile‑de‑France doit servir de laboratoire grandeur nature pour l’hydrogène de secours et les refroidisseurs adiabatiques à très faible empreinte eau. Dans la foulée, Bouygues Telecom envisage d’ouvrir un quatrième availability zone dans le sud de la France pour son cloud souverain, tandis que SPIE Facilities prépare le passage de la norme ISO 50001 :2018 à sa future version 2026.
L’enjeu ultime reste de concilier disponibilité quasi totale et décarbonation ; l’alliance SPIE‑Bouygues peut devenir un modèle si les objectifs de PUE, de recyclage des racks et de conversion vers des groupes électrogènes H₂ sont atteints. Le marché français du data center, estimé à 4 milliards € en 2024, pourrait croître de 7 % par an jusqu’en 2030, principalement dopé par les usages IA et la 5G industrielle. Cette dynamique rend la maîtrise énergétique non pas accessoire, mais centrale à la création de valeur.
En conjuguant fiabilité sans faille et sobriété énergétique, le duo SPIE Facilities‑Bouygues Telecom trace une voie où performance industrielle et responsabilité environnementale ne sont plus antagonistes mais interdépendantes.