Bpifrance × Open Startup : la passerelle franco‑africaine des licornes de demain
Un an après VivaTech, Bpifrance et Open Startup réunissent 15 jeunes pousses africaines à Paris et ouvrent un corridor financier et technologique vers le marché

Un an seulement après la signature de leur accord à VivaTech 2024, Bpifrance et Open Startup (OST) réunissent à Paris quinze jeunes pousses africaines pour une session intensive de mises en relation, de coaching financier et de décodage du marché français. Cette étape marque la montée en puissance d’un pont économique inédit entre les deux rives de la Méditerranée.
Une alliance au service de l’expansion transcontinentale
Signé lors de VivaTech 2024, le partenariat associe la force de frappe financière de Bpifrance à l’expertise terrain d’OST, ONG panafricaine créée par l’entrepreneuse tunisienne Houda Ghozzi. Leur objectif : offrir un continuum d’accompagnement aux startups africaines à haut potentiel, depuis la préparation de la première levée de fonds jusqu’à l’accélération commerciale en Europe. Parmi les résultats déjà mesurés, 75 % des lauréats ont bouclé une levée pour un cumul de 5,9 millions d’euros.
Bon à savoir : Averroès Africa
Averroès Africa est le fonds de fonds de Bpifrance dédié à l’investissement dans des fonds africains. Ses tickets ciblent les séries A et B, avec 180 M€ sous gestion, permettant d’ancrer durablement les participations africaines dans les portefeuilles européens.
Le workshop du 12 juin 2025 : décryptage d’une journée stratégique
Installées rue de la Victoire, les délégations ont enchaîné pitch deck clinics, masterclass sur la due‑diligence française et rencontres rapides avec des fonds parisiens. Bpifrance a mobilisé ses équipes Financement International, Export, Deeptech et EuroQuity : un guichet unique souvent jugé indispensable par les investisseurs pour sécuriser des deals transfrontaliers. Les échanges ont notamment insisté sur les standards IFRS et l’importance d’un Kbis ou équivalent africain traduit et légalisé pour toute prise de participation en France.
Equivalent du Certificate of Incorporation, le Kbis français permet de vérifier l’identité juridique d’une société. Pour un investisseur étranger, l’absence de Kbis (ou d’un extrait d’immatriculation comparablement officiel) complique les contrôles LCB‑FT (lutte contre le blanchiment de capitaux et le financement du terrorisme) et retarde la signature des pactes d’actionnaires.
Portrait : quinze pépites africaines en immersion parisienne
La sélection OST 2025 illustre la diversification du numérique africain. Les voici regroupées par verticaux principaux :
- Fintech & Insurtech : Kasi Money Technologies (néo‑banque pour revenus irréguliers), Valorigo (réservation et paiement en pharmacie), Guepard (optimisation data‑ops au service des équipes dev).
- Agri & Foodtech : Kilimo Fresh Foods Africa (chaîne logistique anti‑gaspillage en Tanzanie).
- Healthtech : MCM Group‑PSM (dossier médical digital + dispositifs physiques), TanzMed (télé‑santé IA en swahili), Reme‑D (kits de diagnostic moléculaire low‑cost), Zencey (plateforme bien‑être + télé‑consultation).
- HR & Customer Experience : Kwiks (recrutement IA), ToumAI (analyse multilingue de sentiment client), Bravvo (engagement salarié + ESG gamifié).
- Greentech & Energie : Atarec (houlogénérateur pour ports et usines de dessalement).
- Cybersécurité & Data : WiseShare (partage documentaire « zero‑trust »).
- Edtech & Média : Yello (app audio éducative certifiée par l’État sénégalais), Relead (réseau publicitaire Wi‑Fi en zones d’affluence).
À travers ces projets, le continent présente un visage résolument multi‑sectoriel, avec une proportion croissante de projets deeptech (Atarec, Reme‑D). Les valuations visées oscillent entre 3 M€ et 15 M€ selon les informations partagées en off, signe d’une maturité financière plus affirmée qu’en 2018‑2019.
Décryptage : visa French Tech
Depuis 2023, le Visa French Tech permet aux fondateurs non‑européens de séjourner quatre ans en France avec renouvellement simplifié. Les startups sélectionnées par OST peuvent s’appuyer sur ce dispositif pour installer une filiale ou un bureau commercial dans l’Hexagone.
Bpifrance : architecture d’un guichet unique pour l’international
Au‑delà des financements en capital‑innovation, Bpifrance met à disposition assurance‑prospection, garanties bancaires et avances remboursables. Ce triptyque réduit le risque de change et fluidifie l’accès au crédit pour des structures parfois dépourvues d’historique bancaire en zone euro. L’accompagnement est complété par un volet formation‑marché : webinaires sur la fiscalité française, sessions de simulation de négociation (SHA & Term Sheet) et mise en conformité RGPD.
Fonds Oséo Innovation, Prêt Développement Export, Assurance Prospection Accompagnement – trois dispositifs pilotés par Bpifrance et la Direction générale du Trésor. Les startups peuvent les panacher selon le couple risque‑pays / maturité technologique.
OST : de la recherche à la scale‑up, un prisme holistique
OST s’appuie sur deux programmes phares. GROW cible les scale‑ups prêtes pour un tour de série A d’environ 1 M€. BRAIN renforce la recherche appliquée en DeepTech africaine, souvent sous‑financée dans les laboratoires publics. Ce continuum conforte l’idée qu’accélérer l’innovation revient autant à former les fondateurs qu’à les capitaliser.
Un contexte macroéconomique favorable mais compétitif
Selon Pitchbook, les investissements VC en Afrique ont atteint 4,1 G$ en 2024 (+8 %), avec une traction marquée sur la fintech et la healthtech. La France reste la première porte d’entrée européenne pour ces flux – devant le Royaume‑Uni – grâce à l’effet cumulé de la French Tech et du Sommet Afrique‑France. La récente remontée des taux en zone euro incite toutefois les fonds à privilégier des dossiers plus résilients (unit economics positifs dès la série A).
Chiffres clés
4,1 G$ de capitaux VC levés en Afrique en 2024 ; 26 % de ces montants proviennent de fonds européens, dont 8 % directement originaires de France (source : Pitchbook, rapport Global VC 2024).
Cap sur 2026 : quels relais de croissance ?
En un an, Bpifrance et OST ont posé les bases d’un corridor d’innovation Sud‑Nord. Les prochaines étapes : élargissement du portefeuille à la souveraineté alimentaire, déploiement de soft‑landing zones dans trois régions françaises (Occitanie, Hauts‑de‑France, Auvergne‑Rhône‑Alpes) et création d’un nouveau véhicule d’investissement cross‑border co‑labellisé par l’AFD et Proparco. Une dynamique qui pourrait inspirer d’autres banques de développement européennes confrontées au défi de la compétitivité technologique face aux États‑Unis et à l’Asie.
En favorisant la circulation des capitaux, des talents et des bonnes pratiques, le tandem Bpifrance‑OST redessine la carte des échanges technologiques entre l’Afrique et la France.