L’actualité du mois de janvier a été sous le signe des licornes françaises. Les trois premières semaines de l’année ont déjà vu apparaitre cinq licornes. Au total, ces start-up ont levé 1,8 milliard en moins d’un mois, un exploit remarquable face au contexte mondial actuel. Un effet qui ne passe pas inaperçu dans le secteur économique et financier français. Mais alors, comment explique-t-on cette avalanche de licornes ? Qui sont ces start-up valorisées à plus d’un milliard ? Quel atout apportent-elles à l’économie française ? 

Pourquoi y a-t-il une pluie de licornes françaises en 2022 ? 

Voilà maintenant plusieurs mois que de nombreux articles titrent sur l’apparition de licornes ou les records de ces dernières. Les start-up françaises ont particulièrement le vent en poupe depuis un an. Résultat des courses, le milieu économique s’intéresse particulièrement à ce nouveau phénomène pour 2022. Mais alors, comment définir une licorne ? Qui participe à l’écosystème tech ? 

Une licorne, c’est… 

Tout d’abord, la définition basique d’une licorne établit deux critères indispensables. Elle désigne une société non cotée en bourse, d’une part, et qui est valorisée à plus d’un milliard d’euros, d’autre part. 

Les toutes premières licornes au monde apparaissent, en 2013, dans une étude menée par le fonds Cowboy Ventures. L’article dénombre 39 start-up américaines qui répondent aux critères mentionnés ci-dessus. En l’espace de 10 ans, elles ont éclos au rythme de quatre licornes par an en moyenne. 

Ce statut possède une symbolique de rareté et d’accomplissement pour les start-up. En effet, actuellement, dans le monde, on décompte à peu près 900 entreprises de cette envergure. Devenir une licorne ou unicorn, en anglais, offre une visibilité auprès de l’écosystème économique, mais surtout auprès de prochains investisseurs éventuels. 

En France, elles sont au nombre de 25 depuis peu. Pendant longtemps, les start-up tricolores ont été les grandes absentes du palmarès. La première licorne de l’Hexagone a vu le jour en 2013 avec BlaBlaCar. La pionnière voit aujourd’hui son capital valorisé à hauteur de 2 milliards de dollars. Depuis, un bon nombre d’autres entreprises l’ont dépassée. Une accélération s’est fait ressentir ces dernières années puisque la majorité des start-up françaises ont dépassé le milliard, il y a moins de deux ans. Ce mois-ci justement, Back Market a notamment pulvérisé le record avec une valorisation à cinq milliards de dollars. Mais alors, pourquoi ce boom soudain de licornes françaises ? 

Licornes françaises

L’abondance des liquidités 

Le monde des start-up est en ébullition, particulièrement grâce à une abondance de liquidité. Les dernières levées de fonds ont atteint des montants très élevés. Par exemple, rien qu’en septembre 2021, il y a eu plus de deux milliards d’euros investis dans les capitaux de start-up. Les experts du milieu économique estimaient que la France n’atteindrait pas les 25 licornes avant 2025 et pourtant…  

Le milieu de la French Tech connait, depuis quelque temps, une certaine médiatisation et surtout bénéficie d’un réel soutien de l’État. Avec ces dernières nouvelles, le Président de la République se félicite de la réussite des start-up tricolores : « On nous disait que c’était impossible. Et qu’au fond, la ‘start-up nation’ était du vent. Mais collectivement, nous y sommes arrivés, et avec trois ans d’avance ».

Un soutien du milieu financier se remarque aussi par les politiques monétaires accommodantes mises en place par les banques centrales. Elles ont instauré des taux bas pour permettre les investissements, ce qui a favorisé une augmentation significative des investisseurs français depuis 2016.

En effet, d’après le baromètre EY du capital-risque, rien que sur le premier trimestre de 2021, les start-up françaises ont levé 5,14 milliards d’euros. Ce constat montre bien l’engouement financier qu’ont les investisseurs pour les jeunes pousses françaises. 

Résultat des courses, sur un an, les levées de fonds ont atteint 11,5 milliards d’euros de financement,  soit le double de l’année 2020. 

Un écosystème tech soutenu 

L’économie française a longtemps connu un retard face à l’innovation et la création de start-up, mais elle connait depuis quelques années un rattrapage certain. Plusieurs facteurs sont à l’origine de cette nouvelle dynamique. Parmi eux, le souhait de l’État d’accompagner la construction de cet écosystème tech attractif. Pour ce faire, il y a eu la création de Bpifrance en 2012. L’institution a plusieurs missions pour soutenir le secteur de l’innovation et rendre plus compétitive l’économie française. Elle fait à la fois office de banque d’investissement, d’incubateur et de lanceur de projets. Chiffre à l’appui, en 2020, Bpifrance a financé en direct 20,5 milliards d’euros, consenti 6,2 milliards d’euros de prêts et investi 3,2 milliards d’euros. 

Dans la même démarche pour construire un réseau de start-up et renforcer la force de l’écosystème de jeunes pousses tricolores, une seconde institution a vu le jour : la French Tech. Il s’agit là, d’un réseau réunissant des start-up, des investisseurs, des décideurs et des community builders avec une base à la Station F à Paris et des communautés partout en France et dans le monde. La mission consiste à encourager les entrepreneurs à développer leurs start-up en France et à les faire rayonner.   

Toutes ces initiatives ont permis l’accélération du développement d’un écosystème tech français et le placent aujourd’hui à la troisième position européenne en nombre de licornes. Alors, qui sont ces investisseurs qui participent à ces levées de fonds toujours plus élevées ? 

Des méga-tours de table 

L’année 2021 bat de nombreux records pour l’écosystème de la French Tech tant en nombre d’opérations qu’en montants investis. L’année dernière, 784 opérations de levée de fonds ont été bouclées pour un montant total de 11,6 milliards d’euros. Cela représente, en termes de valeurs, une augmentation de 115 % par rapport à 2020. Il y a eu 22 tours supérieurs à 100 millions d’euros sur les douze mois, avec un record pour Sorare qui boucle un tour à 586 millions d’euros. 

Plus de doute, l’Hexagone attire de plus en plus d’investisseurs, l’écosystème français a atteint la maturité ! 

Le profil de l’investisseur s’internationalise. En effet, sur les 22 méga-tours de table, 18 d’entre eux ont impliqué un fonds étranger. 

En somme, la France progresse et ça se remarque à l’échelle internationale dorénavant. Les observateurs considèrent la France comme zone prioritaire d’investissement, une bonne nouvelle pour les licornes en devenir ! 

Les licornes françaises, un troupeau à suivre de près 

Alors qu’en 2019 la France ne comptait que quatre licornes à son palmarès, les deux années suivantes ont fait exploser les compteurs. Les 25 licornes d’aujourd’hui ont vu leur capital dépasser le milliard à vitesse grand V. Elles ont aussi conquis le quotidien des Français. En effet, un Français sur deux utilise des services ou produits de ces pépites chaque jour. 

La génération des licornes françaises 2022

Le mois de janvier a été fructueux pour l’économie de l’innovation en France : 5 licornes ont vu le jour. Plus précisément, il s’agit de Payfit, Ankorstore, Qonto, Exotec et Spendesk venant du secteur de la fintech principalement. Toutes ont des projets ambitieux à réaliser avec ce nouvel investissement. 

C’est la pépite Payfit qui a ouvert le bal avec un tour de table à 254 millions d’euros. Cette solution de gestion de la paie et des ressources humaines a su convaincre et compte renforcer ses équipes de 400 personnes. 

Ensuite, Ankorstore, la marketplace française, lui a emboité le pas avec une levée à 250 millions d’euros. Ce grossiste digital veut se développer sur toute la zone européenne et accroitre sa notoriété. 

La néobanque Qonto est rentrée dans la danse en bouclant un tour de table à hauteur de 486 millions d’euros. La fintech compte faire grimper son nombre de clients et recruter 1 500 collaborateurs. 

A suivi Exotec, pépite industrielle qui a réuni 355 millions d’euros qu’elle compte aussi utiliser pour renforcer ses équipes. 

Enfin, la fin de cette série vertueuse se clôture avec Spendesk, une autre pépite fintech, et sa levée à 100 millions d’euros. 

Cette nouvelle promotion vient compléter la troupe de start-up déjà valorisée à plus d’un milliard d’euros. Mais dans quel secteur évoluent-elles ? 

Des licornes innovantes dans des secteurs pas si diversifiés 

Les 25 ultra-pépites tricolores opèrent dans 14 secteurs différents, mais en réalité quatre secteurs principaux se détachent : e-commerce, fintech, divertissement et retail. 

Tout d’abord, l’e-commerce se démarque avec un total de 13 milliards de dollars répartis entre les start-up Vestiaire Collective, Back Market, Veepee et ManoMano. Back Market, à elle seule, détient un capital à plus de 5 milliards d’euros depuis peu. 

Ensuite, les pépites Qonto, Payfit, Lydia et Spendesk se regroupent dans le secteur de la fintech avec une valorisation à 8,9 milliards de dollars. 

Suit de près le secteur des divertissements avec Sorare, Voodoo et Deezer qui cumulent à eux trois un peu plus de 8 milliards de dollars. 

Pour finir, le retail constitue le quatrième secteur valorisé à hauteur de 5,48 milliards de dollars avec Mirakl et Ankorstore. 

Les douze licornes restantes évoluent dans les secteurs comme l’assurtech, la cybersécurité, la mobilité, les RH, la proptech, l’IT, la medtech, le smart Industry, la martech et les télécoms. Des secteurs où les prochaines licornes auront tout intérêt à venir investir… 

 

Des pépites ultra jeunes et ultra valorisées

L’animal mythique a mis du temps avant de trouver ses semblables tricolores. En effet, après BlaBlaCar en 2015, les licornes françaises se faisaient attendre. Jusqu’à 2020, le club des un milliard n’en comptait que quatre : BlaBlaCar, Deezer, Doctolib et Ivalua. L’écosystème a ensuite connu un grand boom ces deux dernières années. 

Une évolution se remarque en plus des tours de tables avec des montants astronomiques, c’est la jeunesse de ces start-up. Par exemple, il n’a fallu à Ankorstore que deux ans et demi pour intégrer ce fameux club. Alors que Blablacar aura mis neuf ans entre sa création et son milliard, une dizaine d’entre elles ont réussi cet exploit en moins de huit ans. Cette évolution demeure un signe d’un écosystème dynamique et mature. 

Et maintenant ?

Cette augmentation fulgurante tant dans les levées de fonds que l’apparition de licornes réjouit les observateurs, mais que dit-elle du futur de l’économie ?

La France a tout de même encore un peu de chemin à parcourir, notamment au niveau européen. Des plans d’investissements seraient à l’étude pour atteindre un objectif : avoir dix géants de la tech au niveau européen. Pour l’heure, aucun chiffre ni date butoir n’ont été fournis.

Une réalité s’impose : si la France veut rivaliser au niveau mondial, il faudra repenser les moyens mis en place. Même si l’arrivée d’investisseurs étrangers demeure une bonne nouvelle, l’un des moyens à mettre en place correspondra peut-être à trouver des financements made in France. Il y a aussi une autre piste à l’échelle européenne, avec la création d’un Nasdaq spécial vieux continent ou encore un marché européen.

Finalement, la prochaine étape pour les pépites du club des un milliard consistera sûrement à entrer en bourse comme Believe et OVHcloud, anciennes licornes.